L’abbaye de Klosterneuburg (Basse-Autriche)

Sur l’emplacement même de l’abbaye se trouvait à l’époque romaine, une forteresse, construite au Ier siècle après J.-C. forteresse qui s’intégrait au système de défense de la frontière de l’empire (limes).
Une communauté de chanoines séculiers s’était installée aux environs de 1113 au sein de la nouvelle forteresse et résidence des Babenberg construite par le margrave Léopold III dit le Pieux (1073-1136) au sommet de la colline viennoise du Leopoldsberg, un lieu déjà habité depuis l’Antiquité et sur lequel les Romains avaient également vraisemblablement édifié un de leurs nombreux forts de surveillance de la frontière.
Il semblerait que le début de la construction de l’abbaye de Neuburg date de 1114 mais il est possible, si l’on en croit certains documents, que celle-ci soit plus ancienne. Léopold III qui avait du renoncer entretemps pour des raisons politiques et religieuses à son projet d’établir un siège épiscopal, dote alors généreusement le nouveau couvent initialement occupé par les chanoines séculiers du Léopoldsberg et qui se transformera en 1133 en une abbaye augustinienne. Le bienheureux Hartmann (1090-1164), connu pour ses réformes, futur évêque de Brixen, en devient premier prévôt. Après que le margrave Léopold eut remis le monastère au siège apostolique, le pape Innocent II le prend sous sa protection pontificale en 1137. Le prévôt Hartmann fonde à côté de l’abbaye , un couvent pour les chanoinesses augustines dont l’église est dédiée à sainte Marie-Madeleine. Le financement de la fondation du couvent aurait été assuré financièrement  par la femme de Léopold III, Agnès,  qui peut être considérée comme la fondatrice du couvent.

L’abbaye de Klosterneuburg, peinture de Franz Jaschke (1775-1822)  

L’abbaye de Klosterneuburg est alors étroitement liée au cercle réformateur de Salzbourg et devient un soutien pour la réforme de l’Église passant sous l’influence de l’éminent théologien Gerhoch von Reichersberg (1092?-1169?), défenseur d’une théologie orientée vers la Bible et les Pères de l’Église et qui se montre critique envers la scolastique naissante. Cette théologie biblique apparait dans la décoration de la chaire de Nicolas de Verdun (vers 1130-vers 1205), transformée par la suite en autel de Verdun.
Un des trésors de l’abbaye, un chandelier à sept branches provenant de Vérone, acheté par Léopold III pour la collégiale est encore plus ancien. Les éléments de l’abbaye de Klosterneuburg qui remontent à l’époque de Léopold III de Babenberg se retrouvent dans l’église collégiale baroquisée ultérieurement, dans le palais dans la cour Léopold (Leopoldihof) lui aussi baroquisé par l’architecte italien Donation Felice d’Allio (1671-1760) ainsi que des parties du cloître médiéval. Les reliques de Léopold III, dans la chapelle qui lui est consacrée sont présentées chaque année lors de la fête de saint-Léopold. Afin de familiariser la population environnante avec l’histoire de la famille du margrave après sa canonisation (1485), l’abbaye de Klosterneuburg commande au peintre originaire d’Ulm Hans Part (1480/88-1526/29) le tableau généalogique de la dynastie des Babenberg. Ce tableau, peint entre 1489 et 1492, ainsi que d’innombrables autres trésors religieux, sont conservés dans le musée de l’abbaye.

 Henri II, Jasomirgott, détail de l’arbre généalogique des Babenberg peint par Hans Part ; la scène se passe sur le Danube, photo domaine public

   L’importance exceptionnelle de cette abbaye est confirmée par sa prodigieuse métamorphose architecturale au XVIIIe siècle. Conformément au modèle espagnol de l’Escorial, l’empereur Charles VI de Habsbourg (1711-1740), soucieux d’en faire l’équivalent mais qui décède avant que les travaux d’un coût colossal supportés par l’abbaye ne s’achèvent, avait le projet grandiose de réaliser une somptueuse résidence seigneuriale monastique. Bien que les travaux aient été initialement confiés à Donato Felice d’Allio, c’est l’architecte de la cour Johann Fischer von Erlach (1656-1723) qui est à l’origine de la surélévation du bâtiment existant du monastère, de la nouvelle architecture des façades et de la présence des coupoles monumentales ornées des couronnes de la maison des Habsbourg. L’architecture de la collégiale subit lors de sa restauration au XIXe, de nouvelles transformations néogothiques selon le credo de l’époque.

Photo © Danube-culture, droits réservés

L’abbaye augustinienne de Klosterneuburg qui traversa depuis sa fondation sans trop de dommages les aléas de l’histoire à l’exception des guerres napoléoniennes pendant laquelle elle est occupée à deux reprises et en partie pillée (y compris sa cave !) et dont une partie des objets en or et en argent seront fondus pour soutenir les finances en ruine de l’Autriche à l’issue des conflits, est demeurée, tout comme les grandes abbayes danubiennes de Saint-Florian, de Melk et de Göttweig, un lieu culturel dynamique et un centre spirituel influent. Elle possède son propre vignoble et produit des vins de qualité.

Photo Danube-culture © droits réservés

Anton Bruckner à Klosterneuburg 
Le prévôt Josef Kluger (1865-1937) qui fut membre des chanoines augustins de Klosterneuburg tout comme du directoire de la Wiener Konzerthaus et qui participa activement à la vie musicale de la Vienne, fut un ami proche jusqu’à la mort du compositeur Anton Bruckner (1824-1896). Celui-ci a été accueilli à l’abbaye à de nombreuses reprises lors des fêtes religieuses de 1869 à 1894 et aimait à y jouer sur les orgues qui lui rappelaient peut-être celles de Saint-Florian. Il y compose vers 1886 son Ave Regina coelorum (WAB 8).

La légende de la fondation de l’abbaye
Cette légende apparaît pour la première fois au XIVe siècle.
Le margrave Léopold se tenait avec sa jeune épouse Agnès huit jours après la cérémonie de leur mariage en 1124, sur la terrasse du château que le souverain avait fait construire au sommet de la colline viennoise qui porte aujourd’hui son nom (Leopoldsberg) et où il avait fait transférer sa résidence de Melk.

Miniature de Léopold III d’Autriche, dit le Pieux, détail de l’arbre généalogique des Babenberg peint par Hans Part, photo domaine public collection de l’abbaye de Klosterneuburg

Les deux jeunes fiancés devisait familièrement quand soudain un coup de vent violent arracha le voile de la tête de la jeune margravine et l’emporta au loin dans les airs. Agnès qui tenait à ce voile comme à la prunelle de ses yeux se désola de sa disparition. Aussi Léopold en personne et de nombreux serviteurs partirent immédiatement à sa recherche mais il leur fut impossible de le retrouver. Huit ans s’écoulèrent et la perte du voile fut oublié. Un jour que Léopold chassait dans une forêt des bords du Danube en amont de Vienne, ses chiens se mirent en arrêt devant un épais fourré. Lorsque celui-ci fut percé, on trouva une petite clairière près de laquelle poussait un sureau. Le précieux voile perdu par Agnès était accroché à l’une des ses branches, encore intact. Léopold, profondément pieux, vit dans ce miracle un message du divin. Se souvenant du voeux qu’il avait fait auparavant de fonder une abbaye, il choisit comme emplacement pour sa construction l’endroit où le voile avait été retrouvé, à proximité du Danube et au pied de la colline du Leopoldsberg.

Vue sur l’abbaye de Klosterneuburg et le Danube par Anton Hlavacek (1842-1926), huile sur toile, 1873, collection de l’abbaye de Klosterneuburg

www.stift-klosteurneuburg.at

Eric Baude pour Danube-culture © droits réservés, mis à jour septembre 2023

Saint-Michel (Wösendorf), église mère de la Wachau

 Saint-Michel, église mère de la Wachau depuis le vignoble de la rive droite en aval de Spitz/Donau
   Cet édifice de style gothique tardif baroquisé à l’intérieur, doté d’un chœur et d’un orgue (XVIIe) qui provenait d’une autre église et dont la facteur n’a pas été identifié, a conservé une des cinq tours de défense (XVIe siècle) qui, avec un pont-levis la protégeaient des dangers. L’église et son ossuaire voisin, érigés au début du XIVe siècle et dont nombre des ossements proviendraient de soldats tués lors de la bataille voisine de Loiben en 1805, sont entourés d’un petit cimetière et des restes des fortifications.

Nikolaus Koffler (1776- 1848), saint-Michel en Wachau aquarelle, mine de plomb sur carton, 1841

    Sept statues animalières en terre cuite ont été installées sur le faîte du choeur. Bien que connues sous le nom des « sept lièvres de Saint-Michel » et à l’origine d’une légende populaire, elles représentent en réalité des cerfs et des chevaux vraisemblablement dans le contexte d’une chasse à courre. Les originaux de ces statues sont conservés au musée de Krems.

Eric Baude pour Danube-culture © droits réservés, août 2023

Carl Wenzel Zajicek (1860-1923), l’église saint-Michel, sans date

L’abbaye bénédictine de Göttweig

   « Les monastères de l’Autriche doivent, en général, leur origine à Charlemagne ; presque tous ils revendiquent l’honneur d’avoir été fondés par lui. Celui de Göttweig, néanmoins, où nous venons de nous arrêter, est attribué à Altmann, évêque de Passau qui mourut en 1091, vingt ans après l’avoir fondé. Ce couvent, quoiqu’il date de 750 ans, n’est pas encore achevé ; les travaux en ont été fréquemment interrompus ; il est à craindre, au reste, qu’il ne soit jamais terminé. Vingt-deux églises paroissiales, quatre villes, un nombre infini de villages et de hameaux étaient jadis soumis à la juridiction du monastère, et lui, ne reconnaissait que celle du pape, qui, seul, avait le droit de le visiter. Le Saint Père usa rarement de ce privilège. Les Turcs, au grand déplaisir des bons Augustins2, dont il est la propriété, s’en firent trop souvent ouvrir les caves et les trésors.

Photo © Danube-culture, droits réservés

 Au reste, ce monastère a perdu beaucoup de ses apanages, de ses revenus et de sa puissance. Les moins sont hospitaliers, bien appris, et les étrangers, comme les habitants des environs, y sont toujours reçus avec courtoisie. Dans la belle saison, le beau tableau que, de là, présente le Danube, et dont le pinceau le mieux inspiré ne peut rendre que faiblement les traits, attire au couvent de Göttweig une foule de pèlerins de tout sexe, de tout âge, de toutes conditions, qui y affluent des campagnes voisines à plus de dix lieues à la ronde. Nous nous en sommes éloignés pleins d’enthousiasme et d’admiration; comme le doivent être des voyageurs amoureux des nobles ouvrages de l’art, des sites où la nature déploie ses plus merveilleux atours ; pleins de reconnaissance pour l’accueil bienveillant et fraternel qu’on nous y a fait.
Un jour, il y a de cela quarante ans de cela, Napoléon trouvait dans le réfectoire des Göttweig un déjeuner confortable servi avec des soins, une prévenance dont il parut enchanté. Bien que sa présence en ce lieu, en compagnie de ses illustres généraux, ne plût que médiocrement aux timides cénobites, il fut traité avec non moins de magnificence que de respect ; toutefois, les grands sabres, les épées, les habits chamarrées d’or et de broderies, tout cela flamboyait trop aux yeux des pacifiques chanoines et leur causait d’importuns éblouissements… »
William Beattie (1793-1875) , Le Danube illustré, pour faire suite à Constantinople ancienne et moderne, au voyage en Syrie etc, Vues d’après nature dessinées par [William Henry] Bartlett [1809-1854], gravées, ,  par plusieurs artistes anglais, Édition française revue et corrigée par H-L. Séverac, H. Mandeville, Libraire-Éditeurs, 42 rue Vivienne, à Paris, [1849]

Photo Danube-culture © droits réservés

« Derrière Mautern sur une montagne couverte de bois, haute de 220 mètres se trouve le couvent des Bénédictins de Göttweih, que l’on aperçoit déjà du bateau derrière Dürrenstein (Dürnstein). Remarquables dans ce couvent sont : l’église avec son portail, le choeur, le superbe escalier à fresque, la chambre de l’empereur et la bibliothèque avec 40 000 volumes, des monnaies, des estampes et une collection d’histoire naturelle. Le couvent fut fondé en 1072 par l’évêque Altmann de Passau et donné aux Bénédictins en 1093 qui le possèdent encore aujourd’hui ; à cause de sa grande richesse l’abbaye reçut le surnom  : « À la monnaie sonnante » (Zum klingenden Pfennig). »
Alexandre François Heksch (1836-1885), Guide illustré sur le Danube de Ratisbonne à Souline et indicateur de Constantinople, avec 50 illustrations en taille de bois et 5 cartes, Vienne. Pest. Leipsic., A Hartleben, Éditeur, 1883

La silhouette de l’abbaye bénédictine de Göttweig depuis les rives du Danube à la hauteur de Krems, photo © Danube-culture, droits réservés

Transmis à l’ordre des Bénédictins en 10943, Göttweig voit également la fondation d’un monastère de nonnes (vers 1100) qui s’installent par la suite dans les  nouveaux couvents de Garsten (1107) et de Seitenstetten (1116). L’abbaye devient rapidement un centre religieux et scientifique. Un moine y rédige la « Vita Altmanni Episcopi Pataviensis » au XIIe siècle.

L’évêque Altmann de Passau, photo droits réservés

Les annales de Göttweig dans lesquelles on trouve des informations sur les  immenses possessions dispersées du monastère sont parmi les plus documentées d’Autriche. L’abbaye connaît une période sombre au XVIe siècle lors des guerres et des destructions liées aux invasions ottomanes qui la mène au bord des ruines. Elle retrouve sa prospérité et ses activités religieuses et scientifiques à partir du XVIIe siècle et est reconnue comme l’un des principaux centres de la Contre-réforme. Un incendie détruit une grande partie des bâtiments en 1718. Aussi l’abbé Gottfried von Bessel (1714-1749) décide t-il de la rebâtir et en confie la reconstruction à l’un des plus prestigieux architectes du Baroque et ingénieur militaire, Johann Lukas von Hildebrant (1668-1745), auteur du palais Schwarzenberg (1697) et des deux palais du Belvédère (1714-1722) du prince Eugène de Savoie à Vienne. L’architecte imagine un projet grandiose qui ne sera que partiellement achevé. La décoration intérieure est confiée aux peintres réputés Martin Johann Schmidt (1718-1801), né dans le petit village de Grafenwörh près de Krems et Paul Troger (1698-1782) dont on retrouve aussi les peintures inspirées dans les abbayes de Melk, d’Altenburg, de Zwettl et de Seitenstetten. Göttweig possède une impressionnante collection d’oeuvres d’art (peintures, tapisseries des Gobelins, parures, objets liturgiques, manuscrits armes à feu…) ainsi qu’un remarquable cabinet d’estampes.

Photo © Danube-culture, droits réservés

L’église abbatiale de Sainte-Marie de l’Assomption occupe une position centrale privilégiée. Sa nef de style baroque primitif (1635-1642), son chœur gothique (1402-1431) et sa façade baroque à deux tours (1722-1765) forment un ensemble exceptionnel. Le grand escalier surplombé une par une fresque de Paul Troger (1739) ainsi que les chambres impériales, en particulier la salle Altmanni, ses peintures baroques et ses vedutas de J.S. Hötzendorfer, illustrent le soin et le goût avec lesquels l’abbaye a été décorée.

L’escalier impérial et la fresque de Paul Troger, photo wikipedia, Uoaei1

Tout faillit pourtant disparaître au XXe siècle pendant la triste période du national-socialisme. Les exploitations agricoles et forestières du monastère furent confisquées, les moines expulsés, les trésors culturels dispersés et les bâtiments dévastés. Les moines ne revinrent à l’abbaye qu’en 1945 et la restaurèrent au prix d’un travail considérable.
31 paroisses dépendent aujourd’hui encore de l’abbaye de Göttweig.

La légende des apôtres en or protecteurs de Göttweig !
   Les moines bénédictins de l’abbaye de Göttweig ont toujours eu la vie belle ! Ils ne souffrirent d’aucune maladie, d’aucune peur ni d’aucun malheur, enfin presque…  Sous la terre, dans une grotte secrète de leur colline, se trouvent des statues des apôtres recouvertes d’or et dont la barbe étrangement ne cesse de pousser. parmi les moines seuls les trois dignitaires supérieurs du monastère, l’abbé, le prieur et l’intendant, connaissent l’endroit précis où se cache cette grotte. Ils y descendent en secret une fois par an pour raser les barbes dorées. Les douze statues dorées des apôtres étaient au complet à l’origine mais aujourd’hui il n’en reste plus que onze car un jour qu’ils étaient dans une misère absolue, les moines de Göttweig furent obligés malgré eux de vendre une des statues. La légende ne dit pas laquelle !
Thomas Hoffmann, Clemens Hoffmann, Wachau, Wunderbares, Sagenhaftes, Unbekanntes, Kral Verlag, Berndorf, 2013, p. 126

Eric Baude pour Danube-culture © droits réservés, mis à jour mai 2023
stiftgoettweig.at

Notes :
1L’une des figures les plus remarquables de l’épiscopat allemand de son époque et l’un des évêques les plus importants de Passau. Il est est enterré à Göttweig dans la crypte de l’abbatiale. Un moine de ce monastère écrivit sa Vita vers 1140 ; elle fut remaniée en 1192-94 par un abbé de passage, Rupert.
des Bénédictins et non pas des Augustins comme l’écrit William Beatie
3 Le premier abbé, Hartmann, provient du monastère de Sankt Blasien en Forêt-Noire.

La chapelle Erentrude (XIIIe siècle), photo © Danube-culture, droits réservés

La basilique de Maria Taferl (Basse-Autriche)

Photo © Danube-culture, droits réservés

Un emplacement idéal !
Le sommet de la colline avait été déjà choisi, comme si souvent au long des rives danubiennes, par des tributs celtes pour en faire un lieu de culte. On trouve d’ailleurs encore devant la basilique une pierre posé sur un socle et entouré d’une rampe qui pourrait avoir vraisemblablement servi comme autel pour des sacrifices.

L’autel de sacrifice celte, photo Danube-culture © droits réservés

Le culte et les superstitions du paganisme celtique sur les hauteurs de Marbach ont perduré suffisamment longtemps pour que les populations aient considéré ces lieux comme inhospitaliers. Pour effacer ces souvenirs païens, on aurait par la suite suspendu une petite croix de bois dans le chêne situé devant le dolmen. Cette croix était fixée à un tableau protégé par un petit auvent sur les côtés duquel était accroché les images de la Vierge Marie et de Saint Jean. C’est depuis cette époque que cet endroit s’appelle « Beim Taferl », en français « Près du petit tableau » d’où provient le nom de Maria Taferl.

Maria Taferl, photo © Bwag/Commons

Les origines du pèlerinage de Maria Taferl remonte au XVIIe siècle. Une légende raconte que le 14 janvier 1633, un berger du nom de Thomas Pachmann, décida d’abattre le vieux chêne, presque déjà mort. Mais sa hache glissa et retomba sur ses deux jambes. C’est à ce moment là qu’il aperçut la croix sur l’arbre. Pensant avoir involontairement commis un sacrilège, il s’agenouilla et demanda pardon à Dieu. Selon le berger, le sang qui coulait de ses blessures aux jambes, s’arrêta aussitôt. Il pût retourner seul chez lui et guérir rapidement. En 1641 ou 1642, un juge du village de Kleinkrummnußbaum atteint d’une grave dépression, fit remplacer la petite croix en bois qui s’abimait par une statuette de la Vierge des Douleurs. Il en fût guéri. La première apparition miraculeuse d’une lumière à cet endroit eut lieu un peu plus tard, en 1658. Elle fut suivie de nombreuses autres apparitions, sur la terre ou dans le ciel, une trentaine en tout, entre 1659 et 1661. De mystérieux pèlerins vêtus de blanc, seuls en petit groupe ou au sein d’une procession surgissaient lors de ses miracles. Au même moment où se produisaient ces apparitions se réalisaient des guérisons et des épisodes miraculeux. Les évêques de Passau et de Ratisbonne menèrent à la fin de 1659 une enquête minutieuse qui confirma, après l’audition de nombreux témoignages, la véracité des faits. Il fut alors décidé, dès 1660, qu’une église serait bâtie à cet endroit.

Jacob Prandtauer (1660-1726), maître maçon et architecte tyrolien, collection de l’Abbaye bénédictine de Melk 

La première pierre de la basilique est solennellement posée par un représentant des autorités ecclésiastiques de Passau le 25 avril 1660. Le terrain en relief oblige toutefois à abandonner la direction habituelle est-ouest et à lui préférer une orientation nord-sud. Le maître-autel est de cette façon orienté au nord, le portail principal au sud et la façade avec ses deux tours fait face au Danube. Le vieux chêne et sa Vierge miraculeuse sont volontairement inclus dans l’édifice. La construction de la basilique dure plus de soixante ans. Trois architectes se succèdent ; le viennois Georg Gerstenbrand (1667 ou 1668), architecte de la cour impériale, le lombard Carlo Lurago (1615-1684) de 1671 à 1673 et enfin le plus connu d’entre eux, le tyrolien et maître maçon Jakob Prandtauer (1660-1726), à qui l’on doit également en grande partie les merveilleuses abbayes de Melk, Dürnstein et Saint-Florian et qui acheva l’impressionnante coupole de Maria Taferl.

Martin Johann Schmidt (1718-1801) dit « Le Schmidt de Krems », éminent représentant de l’École dite « du Danube »,  sources Rudolf Lehr , Landeschronik Oberösterreich, Verlag Christian Brandstätter, Wien

La construction de Maria Taferl mobilise de nombreux artistes parmi les plus réputés. Aux trois architectes se joignent les italiens Carlo Consellino (stucs de la sacristie), Antonio Beduzzi (1675-1735) pour les fresques, connu également comme l’auteur du magnifique maître-autel de l’abbaye de Melk, Joseph Matthias Götz (1696-1760) pour le maître-autel, achevé en 1738, Peter Widering (vers 1684-1760) pour les sculptures de la chaire, J. A. Amorth, la Sainte Trinité sur le pilier du transept, J. G. Dorfmeister (1736-1786), auteur des sculptures des grands autels latéraux, le peintre viennois Johann Georg Schmidt (1685-1748) pour les petits autels latéraux ou encore le peintre autrichien Martin Johann Schmidt dit « Kremser Schmidt » (« Le Schmidt de Krems ») (1718-1801) qui réalise les tableaux des grands autels latéraux et enfin l’ébéniste Mattäus Tempe de Sankt-Pölten.

La fresque de la coupole représentant la vie et l’ascension de la Vierge Marie peinte par Antonio Beduzzi, photo Abubiju

L’édifice, consacré comme basilique mineure en 1947, est en forme de croix et mesure, si l’on inclue la sacristie attenante, une longueur totale de 70 m. Ses dimensions intérieurs sont de 53 m de long. La nef centrale atteint 13 m de large et le transept 31, 30 m sur 13.

Le maître-autel (détail), réalisé par Joseph Matthias Götz, photo © Danube-culture, droits réservés

Maria Taferl fit l’objet de nombreuses restaurations. La place devant la basilique fut aménagée en 1960.
Les extraordinaires orgues de l’époque Rococo, réalisées par le facteur viennois Johann Hencke (1698-1766) n’ont malheureusement pas été conservées à l’exception du buffet. Elles ont été transformées en 1910 par Franz Capek, facteur d’orgues de Krems, en un orgue romantique tardif avec 40 registres et 3 manuels. Aujourd’hui les orgues sont équipées de 47 registres, 4 manuels et comptent en tout 2915 tuyaux.

Les orgues de Maria Taferl, photo © Danube-culture, droits réservés

Les nouvelles cloches, d’un poids total de 7 200 kilos qui sonnent le Te Deum (si, ré, mi, sol, la) contribuent également à la grande réputation du lieu de pèlerinage.
On ne manquera pas de visiter l’extraordinaire chambre du trésor et si l’on visite les lieux par temps clair de jouir de la splendide vue sur le Danube et les massifs alpins autrichiens.
Une légende populaire raconte que l’eau de la source de Maria Taferl guérit miraculeusement les maladies des yeux.

Photo © Danube-culture, droits réservés

Eric Baude, révision juillet 2022, droits réservés

Sources :
WEICHSELBAUM, Josef, Maria Taferl, Verlag Schnell und Steiner GMBH CO., 3ème édition française, Munich et Zurich, 1987
www.basilika.at
www.nibelungengau.at

Dans les environs de Maria Taferl se trouve le château d’Artstetten. Une exposition permanente est consacrée à la vie et au destin tragique de l’archiduc François-Ferdinand de Habsbourg (1863-1914), assassiné à Sarajevo, la capitale de la Bosnie-Herzégovine le 28 juin 1914.
www.schloss-artstetten.at 

L’église Saint-Jean-Baptiste im Mauerthale (Wachau, Basse-Autriche)

   L’église est mentionnée pour la première fois en 1240 en relation avec un don de l’archevêque Eberhard von Salzbourg (1200-1246) au monastère Saint-Pierre de cette même ville. Avec les villages d’Hofarnsdorf, de Bacharnsdorf et de Mitterarnsdorf, la paroisse de Saint-Jean-Baptiste im Mauerthale forma le domaine d’Arnsdorf propriété de l’archidiocèse de Salzbourg de 860 à 1806. 

Sankt Johann im Mauerthale, pointe sèche coloriée de W. Mossman d’après William Henry Bartlett (1809-1854), en face le village de Schwallenbach

   Si un tout premier édifice religieux a été bâti dès le IXe siècle en partie sur les ruines d’une tour de guet romaine, l’église actuelle date en grande partie de la première moitié du XVe siècle.

Reste d’un mur d’une tour de guet romaine sur laquelle a été bâtie l’église saint-Jean-Baptiste, photo © Danube-culture, droits réservés

   La tour de l’église est à la base quadrangulaire avec un clocher octogonal  surmonté à son sommet d’un coq transpercé d’une flèche qui évoque une des légendes populaires du Mur du diable (Teufelsmauer) situé sur l’autre rive du Danube.

Le coq transpercé d’une flèche veille toujours sur l’église saint Jean-Baptiste im Mauerthale, photo © Danube-culture, droits réservés

   L’intérieur se compose d’une nef avec un toit plat avec sur les côtés de belles fresques murales du début du Gothique, datées d’entre le deuxième quart du XIIIe et le XVe siècle.

photo © Danube-culture, droits réservés

   La chaire en style baroque tardif est accessible de l’extérieur. Le maître-autel également baroque dans un  chœur de style gothique est d’une excellente facture.

Le maître-autel baroque et le choeur gothique, photo © Danube-culture, droits réservés

   Le tombeau présumé de Saint-Aubin (Sankt Albinus) se trouvait jusqu’en 1862 dans une niche murale dans le fonds gauche de l’église. Une statue le représente en pèlerin du début du XVIe siècle.

Saint Albin dans sa niche au fonds de l’église, photo © Danube-culture

   La fresque sur le mur extérieur du côté du Danube montrant Saint-Christophe, protecteur des voyageurs a pu être en partie conservée.

Saint-Christophe, photo © Danube-culture, droits réservés

   Juste derrière l’église se trouve un puits couvert de l’époque Baroque. Les lieux ont été, en particulier pour cette  raison et pour le culte de Saint-Albin dont l’église abritait autrefois la tombe présumée, une importante destination de pèlerinage de la fin du Moyen-Âge jusqu’au Baroque. Les innombrables et souvent superstitieux pèlerins venaient y boire l’eau bénite et prometteuse de guérison miraculeuse et les bateliers y pratiquaient aussi différentes offrandes avec des fers-à-cheval. Un autre lieu de pèlerinage, Maria Langegg, situé sur le chemin de Saint-Jacques de Compostelle, entre l’abbaye de Göttweig et l’abbaye de Melk, voisine avec la modeste église de Saint-Jean-Baptiste im Mauerthale.  

Le puit couvert à l’arrière de l’église, photo © Danube-culture, droits réservés

L’église de Saint-Jean-Baptiste im Mauerthale se trouve désormais sur la commune de Rossatz-Arndorf.

Eric Baude pour Danube-culture © droits réservés, mis à jour avril 2022

Sources :
Die Wachau, Niederösterreichische Kulturwege, NÖ Landesarchiv und NÖ Institut für Landeskunde, St. Pölten
Von Aggstein bis Göttweig, Dunkelsteinerwald, Niederösterreichische Kulturwege, NÖ Landesarchiv und NÖ Institut für Landeskunde, St. Pölten
www.kirchen-am-fluss.at

Austria-forum.at
www.gedaechtnisdeslandes.at

Le clocher octogonal de style gothique tardif, photo © Danube-culture, droits réservés

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