Hainburg/Danube (Basse-Autriche), « Porta Ungarica »

La naissance et le nom de Hainburg sont liés à la forteresse du « Heimenburg », construite vers l’an 1000 sur l’éperon rocheux voisin surnommé « Am Stein » (sur le rocher) de Deutsch-Altenburg, ouvrage érigé probablement par un certain chevalier du nom de Heimo (?). Cette forteresse est mentionnée pour la première fois en 1042 dans un document écrit officiel à l’occasion de sa destruction pendant les guerres hongroises de l’empereur Henri III (1017-1056). Elle est ensuite rebâtie au XIe siècle (1050-1070 ?) sur la colline du « Schlossberg » (colline du château) d’où il était plus aisé de contrôler les gués voisins de Thèbes et de Pressburg (Bratislava).

Les vestiges de l’ancien château-fort (Schlossberg) et la vue panoramique sur le Danube et le Braunsberg,  photo sources Bibliothèque Nationale d’Autriche, Vienne

La forteresse et les lieux en viennent à faire office de porte vers l’Est historique, jouant à la fois le rôle de place forte frontalière et de plaque tournante entre l’Europe occidentale et orientale, acquérant leur réputation comme  « Introiutus Ungariae » (1189) ou « Porta hungarica ». Des partisans des comtes Vohburg s’imposent par la suite en tant que souverains de la région vers la fin du XIe siècle. Grâce à leur ralliement aux puissants margraves et ducs de Babenberg sous Léopold V (1177-1194), Hainburg accède au rang de principauté. Le « Heimenburg » est le coeur d’un vaste château et d’une paroisse qui s’étend jusqu’à la Leitha (lajta en hongrois, affluent de la rive droite de 180 km qui se jette dans le Danube près de la ville hongroise de Mosonmagyaróvár). Au pied de la colline de la forteresse, on érige sur la terrasse haute une cité fortifiée dont le centre initial était l’église sainte-Marie. Le point de cristallisation du développement de la ville était la cour de l’église (« Kirchhof ») qui servait à la fois de de marché, de tribunal, de lieu de réunion et de cimetière. Les activités les plus importantes sont  alors liées à la culture de la vigne qui, associée au commerce transrégional à longue distance, entraine un  développement économique rapide de Hainburg ainsi qu’au déplacement de son centre d’activé vers la terrasse basse plus proche du Danube.
La ville s’agrandie de manière cohérente à partir du XIIIe siècle avec l’aménagement d’une place de marché rectangulaire et la construction de l’église saint-Jacques (1236/41) qui correspond aujourd’hui  à la place centrale dominée par l’église paroissiale, d’un nouvel axe principal et d’un réseau de rues en forme de grille.
L’ancien centre sur la haute terrasse, est également  reconstruit à cette époque. La construction des fortifications de la ville, mené en grande partie dans la première moitié du XIIIe siècle, avec ses tours et ses portes, est l’ouvrage le plus complet et le plus monumental conservé de cette époque dans toute l’Europe centrale. Les remparts qui s’élèvent jusqu’à 10 m de haut et ont plus de 2 m d’épaisseur, sont entrecoupés de 15 tours. Ces fortifications auraient été financées par la rançon versée par Richard-Cœur-de Lion emprisonné dans la forteresse de Dürnstein en Wachau en 1194. Inspirées par d’autres constructions du même type en Europe occidentale et de celles des Croisés, elles entourent la ville depuis la colline du château jusqu’au Danube en incluant la forteresse et en contrôlant les rives du fleuve.

Vue de la Porte de Vienne depuis le sud-est, photo sources Bibliothèque Nationale d’Autriche, Vienne

L’impressionnante porte de Vienne, construite vers 1230/40, deviendra au fil du temps l’emblème de la cité. Cette porte très représentative avec un revêtement en bossage, est considérée comme la plus  monumentale de toutes les portes fortifiées autrichiennes du XIIIe siècle. Avec l’érection de la porte de Vienne et de la porte de Hongrie, construite à la même époque de l’autre côté des remparts, la phase principale de l’ouvrage de fortifications est achevée.

Vue de la Porte de Hongrie, photo sources Franz Lobinger, Bibliothèque Nationale d’Autriche, Vienne

La tour gothique de l’ancienne synagogue, photo sources Bibliothèque Nationale d’Autriche, Vienne 

Le développement de Hainburg atteint son apogée sous le règne du roi Ottokar II Přemysl de Bohême (vers 1230-1278) dont la politique hongroise confère à Hainburg une importance stratégique et en fait le théâtre de grands événements politiques comme lors des négociations avec les rois hongrois.

Ottokar II Ottokar II Přemysl de Bohême (vers 1230-1278), Vienne

Ottokar II tient sa cour à Hainburg plus souvent qu’aucun autre prince ne le fera avant ou après lui. En 1252, il épouse dans la chapelle du château la duchesse Marguerite d’Autriche (1204-1266), sœur du dernier duc de Babenberg et ancienne épouse de Henri de Hohenstaufen (Henri II de Souabe, 1211-1242). Sous son règne commence l’extension du château, l’achèvement de l’église saint-Martin ainsi que, vers 1270, le renforcement des portes, en particulier de la porte de Vienne dont on trouve la mention écrite en 1272 sous le nom de « Porta winense ». Cette porte est surélevée de deux étages défensifs, le chemin de ronde de la porte étant également surélevé par une construction en ogive techniquement audacieuse. Cette porte abrite aujourd’hui le musée de la ville.
Le couvent des Frères mineurs est édifié près de la porte de Vienne, dans l’angle nord-ouest des remparts de la ville. Hainburg,  fidèle à Ottokar II Přemysl de Bohême restera l’un de ses rares points d’appui sûrs à la fin de son règne. Après la victoire de Rodolphe Ier de Habsbourg (1218-1291) sur Ottokar II en 1278 à la bataille de Dürnkrut dans la plaine du Marchfeld sur la rive gauche du Danube, bataille à l’occasion de laquelle Ottokar est tué d’un coup de poignard, la ville entre en possession des Habsbourg.
Au début du XIVe siècle, les bourgeois de Hainburg, s’appuyant sur deux privilèges accordés par le duc Frédéric le Bel (1289-1330) entre 1308 et 1314, réussissent à s’émanciper de la seigneurie du château et à former une commune indépendante. Des juges et des jurés municipaux sont mentionnés pour la première fois en 1308 et cinq ans plus tard, des conseillers municipaux. Le sceau de la ville est également attesté pour la première fois à cette époque (première empreinte de sceau en 1308). L’ascension de la bourgeoisie de Hainburg se concrétise par la densité et la qualité des constructions urbaines dans le secteur de la place du marché (Hauptplatz/place centrale) et de la rue principale ainsi que sur la rive du Danube à l’extérieur des remparts (Stetten) où les pêcheurs de Hainburg, particulièrement privilégiés, ont pu s’établir. L’existence de la communauté juive est mentionnée dès 1320. Sa synagogue, en grande partie conservée, appartient aux rares exemples architecturaux de synagogue de la fin du Moyen Âge. la population juive a également joué un rôle important dans la prospérité de la bourgeoisie locale, prospérité qui se maintiendra jusqu’au début du XVe siècle.
La capacité financière de la ville s’affaiblie au XVe siècle en raison de multiples facteurs comme la pratique des Habsbourg en matière de mise en gage, l’expulsion de la communauté juive en 1420, les guerres de Hongrie et les conquêtes par le roi hongrois Matthias Corvin en 1482 et la baisse du commerce sur le Danube suite à l’expansion de l’Empire ottoman. Les dévastations de l’arrière-pays par les troupes ottomanes et les armées impériales dans les années 1540 et le contournement de la ville par une route commerciale plus méridionale entrainent un déclin économique qui se confirme au XVIe siècle. 10 à 15 % de la zone urbaine sont alors désertés.
Les contraintes liées au stationnement des troupes impériales pendant des années lors de la guerre de Trente Ans, l’incendie de la ville en 1634, des épidémies de peste, de mauvaises récoltes entrainant une famine, incitent de nombreux habitants à quitter Hainburg. La cité est alors considérée au XVIIe siècle comme pauvre, désolée, ruinée et morne. Les conquêtes ottomanes de 1683, qui déciment les populations locales et menacent Vienne sont le point final de cette évolution. 90 % des habitants furent tués ou emmenés comme esclaves.

La colonne de la peste de Hainburg sur la place principale, photo droits réservés

Le déclin de la ville se reflète aussi bien dans l’état du château que dans celui de l’église paroissiale saint-Martin, autrefois monumentale. Le château, déjà délabré en 1501, est rénové et agrandi par les différents propriétaires de gages mais il finit par tomber en ruine après les destructions de la guerre de Trente Ans et des campagnes ottomanes de 1683.
L’église saint-Martin s’effondre vers le milieu du XVIIe siècle et c’est saint-Philippe et saint-Jacques, sur la place principale, qui devient l’église paroissiale. Le siège de la seigneurie sera déplacé au pied de la colline du château (« Neues Schloss », 1757-1767).

Le clocher de l’église saint-Philippe et saint-Jacques, photo © Danube-culture, droits réservés

L’unique réalisation architecturale du XVIIe siècle qui débute en 1677 est le couvent des Franciscains. Grâce à la construction d’une manufacture de draps (1702), ces Franciscains joueront un rôle majeur dans la première industrialisation de la ville. Mais c’est la manufacture de tabac fondée en 1723 par le conseiller de la chambre impériale Boussart qui devient le moteur et le symbole de l’essor économique. Elle est édifiée dans l’ancien couvent des frères mineurs, devenu un arsenal impérial après leur expulsion en 1525 et sera étatisée en 1784 par l’empereur Joseph II dans le cadre de la monopolisation du tabac.

Hainburg et ses remparts en 1870

La manufacture en expansion rapide (jusqu’en 1938 elle porte le nom d’ « Österreichische Tabakregie », après 1945 d’ « Austria Tabak AG ») est installée dans plusieurs bâtiments, dont certains marquent encore aujourd’hui la physionomie de la ville, comme le magasin de feuilles construit dans des formes classiques entre 1821 et 1840 dans le couvent franciscain désaffecté (supprimé en 1787) et le bâtiment dit « Donaugebäude » (aujourd’hui « Kulturfabrik »), construit en 1846/47 pour la production de cigarettes.
Le développement industriel ainsi que la fonction de garnison de Hainburg depuis 1810 entraîne, à partir du milieu du XIXe siècle, l’urbanisation des zones situées à l’est, au sud-est et au sud-ouest de la ville, où des maisons individuelles et mitoyennes ainsi que des ensembles d’immeubles sont édifiés.

Hainburg vers 1883, gravure de Hans Ludwig Fischer

La construction de la ligne de chemin de fer depuis Vienne en direction de Bratislava en 1914, permet de régénérer les anciennes relations économiques et culturelles avec la grande ville slovaque mais elles ne fonctionneront cependant plus que de manière limitée dès la fin de la Première Guerre mondiale en raison de la nouvelle frontière avec la République tchécoslovaque et elles seront même totalement rompues après 1948 par le « rideau de fer ».

Hainburg, sa manufacture de tabac (ancien couvent des Frères mineurs) et en arrière-plan le Schlossberg , J. Kranzle Wien 1916

Pendant des décennies, Hainburg a mené une existence de ville frontalière impasse, marquée par l’isolement et un déclin économique. L’inauguration du nouveau pont sur le Danube en 1973, qui permet d’accéder au sud de la plaine du Marchfeld,  apporte un modeste renouveau mais ce ne sera qu’avec l’ouverture des frontières de l’est en 1989, que Hainburg reviendra au centre de l’Europe.
En décembre 1984, Hainburg se retrouva au centre de l’attention politique et médiatique dans toute l’Autriche. Une mobilisation et une occupation citoyenne pacifique de la zone alluviale de « Stopfenreuth » permet de contester un projet de centrale hydroélectrique sur le Danube menaçant la biodiversité et l’écosystème fluvial et alluvial. La création du Parc National  des Prairies Alluviales Danubiennes « National Park Donau-Auen » en 1996 est une des conséquences de cette mobilisation écologique qui trouva un écho bien au-delà des frontières de l’Autriche et qui résonne encore dans le coeur des protecteurs de l’environnement.

Le projet de barrage et de centrale hydroélectrique de Hainburg : un environnement bouleversé, symbole de l’intervention humaine désastreuse sur un éco-système 

Le symbole architectural des nouvelles opportunités touristiques et économiques de Hainburg en tant que carrefour entre l’Est et l’Ouest est une  ancienne fabrique de tabac sur le Danube, transformée en « usine culturelle ».

Ce bâtiment industriel du XIXe siècle, a été rénové et sert depuis 2007 de lieu d’expositions et de manifestations ainsi que de dépôt archéologique du Land de Basse-Autriche.

Eric Baude pour Danube-culture, mai 2024

www.wienertor.at
www.donauauen.at
www.kulturfabrik-hainburg.at

Archives de l’Institut géographique militaire, Atlas historique : relevé de la Zone 13, colonne XVI, section a (ultérieurement 4758/1), Marchfeld : Schlosshof, Markthof, Hainburg. Cadastre franco-joséphin, échelle au 1:25.000, relevé en 1872/73.

 Hainburg et le Danube aujourd’hui, vue du ciel. Au premier plan à droite le hideux centre commercial qui jouxte les remparts, photo Stephanie Grüssl, 2019. Source : Bibliothèque Nationale d’Autriche, Vienne

Konrad Lorenz

  « Les bosquets et les prés marécageux des alentours de Tulln étaient le domaine de Konrad Lorenz, de ses randonnées le long du Danube, de ses bras et de ses canaux. Les histoires que les empreintes racontaient à son regard ou au flair de son chien — quand il habitait Altenberg, village situé entre Tulln et Klosterneuburg — sont plus intéressantes que celles que je glane sur les frises des maisons, dans les vieux livres ou les musées. Lors de ce voyage je rencontre trop souvent l’aigle héraldique à deux têtes et trop peu l’aigle royal ou l’aigle de mer, qui tournoient au-dessus des eaux du Danube ; Musil, François-Joseph, le Croissant et le Café Central laissent dans l’ombre des habitants plus anciens et plus légitimes de la Mitteleuropa, les ormes et les hêtres, les sangliers et les hérons. »

Claudio Magris, « Aigle à deux têtes et aigle de mer » in Danube, Collection L’arpenteur, Éditions Gallimard, Paris, 1988 

   Ses recherches ont été consacrées à l’étude du comportement des animaux dans leur milieu naturel mettant notamment en valeur l’importance de la notion d’empreinte. Elles ont contribué au développement de l’éthologie. Parti de l’observation patiente et minutieuse de certains oiseaux, Konrad Lorenz s’est interrogé sur l’homme et son devenir en tant qu’espèce sociale. Il s’est aussi illustré également dans le domaine de la protection de l’environnement danubien autrichien.
Konrad Lorenz enseigne de 1937 à 1940 à l’Université allemande Albertus de Königsberg, alors en Prusse orientale, aujourd’hui Kaliningrad, enclave russe, où il occupe la chaire d’Emmanuel Kant (1724-1804) puis, mobilisé et fait prisonnier par l’armée russe, il ne rentre en Autriche qu’en 1946.

Konrad Lorenz à Altenberg, photo droits réservés

      Travaillant tout d’abord chez lui dans la maison familliale d’Alternberg, il devient codirecteur du département d’éthologie comparée de l’Institut Max-Planck, créé par ses soins en 1951 à Buldern en Westphalie (Allemagne) puis directeur de l’Institut Max-Planck de Seewiesen près de Munich à partir de 1961. Il revient alors à Altenberg. Dans les dernières années de sa vie, Konrad Lorenz apporte son soutien et se joint aux défenseurs de l’environnement et de la nature, en particulier lorsque le gouvernement socialiste autrichien décide de construire une centrale nucléaire à Zwettendorf sur le Danube, près de Tulln. L’opposition d’une grande partie de la population et un référendum obligera celui-ci à renoncer de mettre la centrale en fonctionnement. Il apporte encore son prestigieux soutien aux opposants du projet de barrage de Greifenstein, à proximité d’Altenberg et de sa maison, projet malheureusement réalisé puis de celui de Hainburg, en aval de Vienne, initiative critiquée vivement par les défenseurs de l’environnement soutenus par l’écologiste suisse Franz Weber (1927-2019)1 et dont l’abandon permit la création du Parc National des Prairies Alluviales Danubiennes et le sauvetage de ce patrimoine naturel unique.

Franz Weber à Hainburg en 1984

   Le Prix Nobel de physiologie ou médecine qui lui fut attribué en 1973 provoqua une vive polémique dans une partie de la communauté scientifique qui contestait ses hypothèses. On lui lui reprocha également d’avoir été membre du parti nazi et d’avoir publié en 1940 dans une revue allemande un article intitulé «  Désordres causés par la domestication du comportement spécifique à l’espèce « .
Prairies alluviales danubiennes…
   « Comme coulées dans du plâtre, les traces des multiples habitants des prairies alluviales danubiennes ont été préservées dans les larges bandes boueuses jusqu’à la prochaine inondation. Qui a osé prétendre qu’il n’y avait plus aucun cerf dans ces lieux ? D’après les empreintes, de nombreux cerfs imposants semblent au contraire encore fréquenter ces forêts, même si on ne les entend plus à la période du rut. Les dangers de la dernière guerre, qui a fait dans ses derniers instants tant de ravages par ici, les ont rendus secrets et furtifs. Chevreuils et renards, rats musqués et rongeurs plus petits, innombrables chevaliers guignettes, pluviers, petit-gravelots et chevaliers sylvains ont déformé la boue avec les séries croisées de leurs déplacements.

Chevalier guignette (Actitis hypoleucos), photo droits réservés

   Même si ces traces racontent à mes yeux les histoires les plus belles, combien plus nombreuses sont celles que détecte le seul museau de ma petite chienne ! Elle se régale dans des orgies d’odeurs que nous autres êtres humains, avec nos pauvres nez, ne pouvons même pas nous imaginer… »
Konrad Lorenz

La forteresse de Greifenstein et le Danube au-dessus d’Altenberg (rive droite) en 1942 avant la construction de la centrale hydroélectrique, territoire d’observations et d’expérimentations multiples du scientifique autrichien

    Max Weber parle dans son livre Le paradis sauvé, livre consacré à la lutte pour la protection des prairies alluviales danubiennes en aval de Vienne et à l’abandon du projet de barrage de Hainburg, sa rencontre à Altenberg en 1984 avec Konrad Lorenz :
« Et il nous raconte comment, jeune homme, il avait l’habitude de traverser les bancs de gravier clair, là-bas au bord du Danube, de patauger dans les eaux peu profondes et de se jeter enfin dans le fleuve, de le traverser à grandes brassées — comment, depuis l’autre rive, il pénétrait dans l’Au et comment il restait couché au plus profond de l’Au, « au bord d’un bras secret du grand fleuve, comme un crocodile enfoncé dans la vase », au milieu d’un paysage vierge dépourvu du moindre signe de l’existence d’une civilisation humaine. »

Les prairies alluviales danubiennes, un patrimoine naturel exceptionnel, photo Danube-culture © droits réservés

   « C’est alors que je réussissais parfois, dit-il en poursuivant son anecdote, racontée également dans un de ses livres, à réaliser un miracle auquel les sages orientaux les plus érudits aspirent comme à un but suprême : sans que je m’endorme, mes pensées se dissolvent dans la nature qui m’entoure ; le temps s’arrête, ne signifie plus rien, et lorsque le soleil descend et que la fraîcheur du soir m’incite au retour, je ne sais plus si ce sont des secondes ou des années qui ont passé. Ce Nirvana animal est le meilleur contrepoids au travail intellectuel, un véritable baume pour les nombreuses écorchures à l’âme de l’homme moderne stressé. »
Max Weber, Le paradis sauvé, Pierre-Marcel Favre, Lausanne, 1986

Notes :
1 https://www.ffw.ch › fr

Bibliographie en langue française (sélection)
Les animaux ces inconnus, Éditions de Paris (1953)
Il parlait avec les mammifères, les oiseaux et les poissons (traduit de l’allemand), Flammarion, Paris (1968)
Évolution et Modification du comportement : L’inné et l’acquis, Payot, Paris (1967)
Tous les chiens, tous les chats, Flammarion, Paris (1970)
Essais sur le comportement animal et humain : Les leçons de l’évolution de la théorie du comportement, Le Seuil, Paris (1970)
Une histoire naturelle de la connaissance, Flammarion, Paris (1975).
Les Huit péchés capitaux de notre civilisation, Flammarion, Paris (1973)
 L’Agression, une histoire naturelle du mal, Flammarion, Paris (1977)
L’Homme dans le fleuve du vivant, Flammarion, Paris (1981)
Les Fondements de l’éthologie, Flammarion, Paris (1984)
Les Oies cendrées, Éditions Albin Michel, Paris (1989)
L’Année de l’oie cendrée, Stock, Paris (1991)
L’homme en péril, Flammarion, Paris (1992)
De petits points lumineux d’espoir, entretiens avec Frédéric de Towarnicki, Rivage, Paris (2009)

Eric Baude pour Danube-culture, © droits réservés, révisé janvier 2024

Le Danube autrichien non canalisé entre Vienne et Bratislava et ses forêts alluviales en amont de la petite ville de Hainburg, territoire du Parc national des Prairies Alluviales Danubiennes, photo Danube-culture © droits réservés

La Porta Hungarica et le Braunsberg

   Le sommet du Braunsberg avec sa vue dégagée, ultime avancé du massif alpin sur les rives du fleuve, déjà habité à l’ère de la Tène, avait été choisi par les celtes pour y établir un oppidum que s’empressèrent de détruire les Romains mais qui est aujourd’hui en partie reconstitué et qui a fait l’objet de fouilles archéologiques.

Oppidum celte au sommet du Braunsberg, photo © Danube-culture, droits réservés

Le Danube au pied du Braunsberg et les forêts alluviales de la rives gauche avec leurs bras morts, à gauche le petit port de Hainburg photo © Danube-culture, droits réservés

   Ce relief oblige le fleuve à effectuer un joli méandre pour le contourner vers le nord (il est probable qu’initialement le fleuve l’ait contourné par le sud) avant de recevoir les eaux de la Morava (March) qui déterminent sur une partie de son cours la frontière entre l’Autriche et la Slovaquie et de passer devant l’ancienne forteresse de Devín, détruite par les troupes napoléoniennes et dont les ruines avec son cortège de légendes dominent le confluent.

Les ruines de la forteresse de Devín (Slovaquie) depuis la rive droite du Danube, photo © Danube-culture, droits réservés

   L’exposition du Braunsberg, sa position de « Porta Hungarica » avec les petites Carpates de la rive septentrionale, aux lisières de la plaine pannonienne, sa géologie calcaire et la présence à ses pieds du Danube qui l’arrose tout en le contournant, génèrent un microclimat spécifique favorable tout à fait favorable à de nombreuses espèces animales et végétales de type méditerranéen, adeptes du soleil et sa chaleur comme le lézard vert, la couleuvre d’Esculape, l’Onosma austriaca (famille des Boroginacées), l’orpin royal de Phénicie (Verbascum phoeniceum) ou l’iris nain (Iris pumila). Plusieurs espèce végétales, faisant la joie des botanistes, sont en particulier endémiques au Braunsberg et à ses environs tel l’œillet à plumes de Hainbourg (Dianthus lumnitzerii).

Oeillets à plumes en fleur (Dianthus lumnitzeri), photo © droits réservés

Le Braunsberg, classé zone Natura 2000, se trouve aux limites du Parc National des Prairies Alluviales Danubiennes.

https://www.donauauen.at

Le Danube au pied du Braunsberg avec les ruines de la forteresse de Röthelsheim, photo © Danube-culture, droits réservés

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