Aschach (Haute-Autriche) et le Danube
« ASCHAW, (Géog. anc. & mod.), ville d’Allemagne dans la haute Autriche, sur le Danube, à l’embouchure de l’Ascha ; quelques-uns prétendent que c’est l’ancienne Joviacum de la Norique, que d’autres placent à Starnberg, & d’autres à Frankennemarck. »
ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS PAR UNE SOCIÉTÉ DE GENS DE LETTRES, PARIS, 1751-1772
En raison des conditions climatiques favorables pour la culture de la vigne et de droits qui lui sont accordés, l’ancien village de pêcheurs devient au cours du temps une importante place de négoce du vin. Le droit de passage sur le Danube (péage) et la construction de bateaux pour le transport des marchandises (vin, sel, pierre, matériaux divers…) viennent compléter les autres activités locales et enrichir la commune.
La première source écrite concernant Aschach se trouve dans un document mentionnant la fondation de l’abbaye bénédictine de Kremsmünster (Haute-Autriche) en 777. Son fondateur, le Duc Tassilo de Bavière ( 741 ?-794) avait offert à l’abbaye deux vignobles d’Aschach, alors situé sur son territoire. Aschach est de nouveau cité dans les années 791 et 802 à l’époque de Charlemagne et figure dans le « Schaunberger Urbarbuch » de 1371 (cadastre de Schaunberg) dans lequel il est écrit que le village compte environ 60 maisons et possède un droit de justice et de cité, deux églises, les chapelles de saint-Laurent et de saint-Jean ainsi qu’un octroi de péage sur le Danube. le village est élevé au rang de bourgade en 1512 par l’Empereur Maximilien Ier (1449-1519) et obtient son blason sur lequel figure des grappes de raisin et qui inclue. la bourgade obtient « galement le droit d’y tenir marchés et foires. Les façades élégantes et colorées des maisons de la « rangée d’or » qui s’alignent depuis l’église, sur la place Kurzwernhardt et le long de la rue Ritzberger, témoignent de la richesse d’Aschach et de ses habitants à cette époque.Quand les dynasties des comtes d’Aschach et de Schaunberger (1559) s’éteignent, le château d’Aschach passe aux mains de la familles des Liechtenstein. En 1622, l’Empereur Ferdinand II ( ) offre les terres et le château d’Aschach au comte Harrach. Celui-ci fait agrandir le château en 1709-1710 avec le concours du célèbre architecte baroque Lukas von Hildebrandt (1668-1745). Aschach devient une paroisse indépendante sous le règne de Joseph II de Habsbourg.
Les activités du village furent largement favorisé par son emplacement favorable au bord du Danube. Le nombre d’habitants parmi lesquels les bateliers, les ouvriers, les bourgeois les négociants, étaient les plus nombreux, a malgré tout beaucoup fluctué.
Aschach fut également un lieu fréquenté au cours du temps par de nombreux artistes parmi lesquels le musicien et compositeur Leonhard Paminger (1495-1567), né dans le village. Le peintre Josef Abel (1764-1818) en est également originaire. Citons encore Albert Ritzberger (1853-1915), Karl Schade (1862-1954), Franz Koberl (1889-1967), Fritz Cernaysek (1910-1996) et Christian Ludwig Attersee (1940-).

Portrait supposé du jeune Franz Schubert, peint par Josef Abel, collection du Kunsthistorisches Museum, Vienne
La commune ne fut pas épargnée par les guerres au long de son histoire. Elle est occupée par les troupes bavaroises en en 1620 et en 1809 par les armées napoléoniennes. Par miracle, aucune destruction ne fut à déplorer pendant la première ni lors la deuxième guerre mondiale.
Des catastrophes naturelles l’endeuillent à toutes les époques parmi lesquelles des crues importantes, en 1789 et plus récemment en 1954 et en 2002 avec un incendie et des débâcles de glaces catastrophiques.
Quand le péage fut supprimé, la commune dut chercher d’autres sources de revenus. En dehors des activités de calfatage des bateaux, des radeaux et autres embarcations, on eut l’idée de construire une briqueterie. Des entrepreneurs fondèrent une usine fabriquant des cadres de tableaux. Une usine de fabrication d’amidon démarra ses activités en 1936.
Le pont sur le Danube a été érigé 1962 et remplace le bac à fil. Dès l’année suivante, la plus grande centrale hydroélectrique d’Europe centrale à cette époque est construite en amont de la cité.
Aschach et la viticulture
La vigne est cultivé à Aschach ainsi que dans 13 autres lieux de Haute-Autriche depuis l’époque romaine. Les vignobles des seigneuries de Schaumberg, Stauf et de St. Nikolas (évêque de Passau) rapportaient chaque année sous forme d’impôts, plus de 1000 seaux d’un volume de 56,6 l chacun. Entre 1445 et 1447 est expédié depuis Aschach plus d’un million de litres de vin. Dans les années 1664/1665, la superficie de vignobles atteint plus de 120 ha, Des changements climatiques et de mauvaises vendanges contribuèrent à la disparition de la vigne. Ces dernières années, des tentatives courageuses de redonner vie aux anciennes cultures viticoles ont été entreprises.
Aschach et son péage
De tous temps, le Danube fut une voie de transit et de commerce. Il était donc compréhensible qu’on y installe des postes de douane. Celui d’Aschach est mentionné pour la première fois dès 905. C’était surtout le sel du Salzkammergut qu’on transportait sur le Danube vers la Bavière c’est-à-dire vers l’amont.
On parle pour la première fois du péage de Aschach en 1190 qui était entres les mains des comtes de Formbach et fut plus tard transféré aux Seigneurs de Schaunberg. Par la suite le péage fut donné en bail, néanmoins les entrées et les consignes du péage étaient strictement surveillées par les seigneurs. Avec les juges, les responsables du péage avaient également un statut particulier. En 1775 le péage fut transféré en amont, à Engelhartszell, ce qui a entrainé de grandes pertes sur le plan économique pour le bourg d’Aschach. À l’exception de la batellerie il ne resta alors plus pendant un certain temps que la pêche comme activité locale directement liée au fleuve.
La confrérie des bateliers d’Aschach
On rencontrait d’autres corporations à Aschach comme celles des bateliers, des calfateurs, des pêcheurs, des commerçants et des aubergistes. Tant qu’il y eut un poste de péage, les bateaux étaient obligés d’accoster à Aschach et de s’acquitter de droits de douane. Pour traverser le passage délicat de Kachlett, en aval, où se trouvaient des rochers, les bateliers qui ne connaissaient pas bien les endroits devaient s’assurer les services d’un pilote. Il en résulta la création d’une corporation. Pour les convois qui remontaient le Danube, les bateaux étaient souvent halés par des équipages de 30 à 40 chevaux appelés Hohenauer.
Aschach et la construction navale
La construction navale en bois est une tradition locale très ancienne. Elle fut favorisée non seulement par l’emplacement de la commune le long des voies de communication et de commerce, mais aussi par les forêts environnantes. On y construisait de grandes « Zille » qui pouvaient transporter sur le Danube des cargaisons de pierre et d’autres marchandises jusqu’à 100 tonnes. Ces pierres ont été utilisées comme enrochement lors de la régulation du fleuve. On construisait également des « Trauner » de 20, 30 et 50 tonnes et d’autres types d’embarcations.
Un remarquable petit musée de la construction de bateaux (Zille) et de la pêche (https://museum.aschach.at) met en valeur l’histoire de ces deux importantes activités locales.
Ernst Neweklowsky : Aschach et la navigation sur le Danube
Sur le tronçon du Danube entre Rationne et Krems le fleuve coupe à plusieurs endroits les parties du massif granitique de Bohême qui s’avancent vers le sud tout en conservant son orientation générale est-sud-est. Entre ces parties de son cours montagneuses dans lequel lequel il évacue toutes ses eaux dans un lit uniforme, souvent sinueux et dont seul son histoire permet de comprendre le tracé, se rencontrent des plaines où le fleuve se divise en de nombreux bras qui, suivant la loi de Baer, s’étendent souvent loin vers le sud et changent constamment de place, jusqu’à ce que des travaux de construction et d’endiguement les aient contraint à suivre un lit régulier.
Aux endroits où le Danube pénètre dans les montagnes et en ressort, des agglomérations se sont développées. Elle doivent leur importance autant au trafic fluvial qu’à celui qui traverse le fleuve. Leur création étant souvent due aux passages d’une rive à l’autre et leur développement ultérieur au transport d’amont en aval.
À cette hauteur, le haut-Danube présente, aujourd’hui encore, une pente nettement moins forte que celle qui caractérise le reste de son cours, en raison des « Kachlet d’Aschach » et de « Brandstätt », dont nous parlerons plus loin. Il convient toutefois de mentionner ici ce que les bateliers entendaient par « Kachlet » ou, plus exactement, « G’hachlet », un amoncellement de rochers dans le lit du fleuve soit des roches naturelles ou de galets. L’eau s’écoulant entre eux comme le lin passé au peigne. L’accumulation causée par le « Kachlet » réduisait la pente en amont et facilitait la traversée du courant à cet endroit.
La colonie qui s’est développée ici a reçu le nom d’Aschach, dérivé du mot moyen haut-allemand « asch », qui signifie « frêne », et du suffixe collectif ajouté, en raison de la présence abondante de frênes dans la région. La population de frênes a également donné le même nom à la rivière qui se jette dans le Danube près de Brandstatt, dont la syllabe finale est toutefois le mot moyen haut-allemand « ahe », qui signifie « eau courante ». Il n’y a aucune raison de considérer le mot « Aschach » comme celtique, ni de croire que la rivière Aschach se jetait autrefois dans le Danube près du lieu du même nom, comme l’affirme Martin Kurz.
Tout comme aux limites d’autres passages étroits du Danube, un poste de douane fut rapidement établi à l’extrémité de la vallée de Passau. Rosdorf, le premier poste de douane de la Marche bavaroise de l’est, mentionné dans le document douanier de Raffelstetten datant de 903 à 905, a été recherché dans la localité de Landshaag, mais il se trouvait certainement au sud du Danube, en tout cas dans les environs de l’ancien château de Schaunburg, et ne fut en fait rien d’autre que le précurseur du péage d’Aschach, même s’il était probablement situé à un autre endroit. L’acte douanier de Raffelstetten fait explicitement référence à la situation telle qu’elle s’est développée depuis 826 et mentionne Linz, Eparesburg et Mautern (Basse-Autriche) comme autres postes de douane. Il est question de bateaux appartenant à des marchands et à des hommes libres, de bateaux avec des cargaisons de sel qui traversaient la forêt de Passau, transportant donc du sel de Reichenhall, ainsi que de bateaux provenant de Bavière qui y retournaient avec l’aide du halage. Il est également question de bateaux à part entière, c’est-à-dire de bateaux dont l’équipage était composé de trois personnes. Il est remarquable que les informations relatives à la navigation dans ce règlement douanier l’emportent largement sur celles concernant le transport terrestre, ce qui prouve l’importance du commerce fluviale au début du Xe siècle.
Ernst Neweklowsky
Notes :
1 En géologie la loi de Baer, d’après Karl Ernst von Baer (1792-1876), émet l’hypothèse que, à cause de la rotation de la Terre, dans l’hémisphère nord l’érosion est plus active sur la rive droite des rivières et sur la rive gauche dans l’hémisphère sud En 1926, Albert Einstein a écrit un article expliquant les causes de ce phénomène.
Bien qu’il soit possible qu’une mesure globale de toutes les rivières conduirait à une corrélation, la force de Coriolis en magnitude est bien plus faible que les forces locales dues à l’écoulement de la rivière. Par conséquent, il est peu probable que l’effet de la loi de Baer soit important pour une rivière donnée.
Eric Baude pour Danube-culture © droits réservés, mise à jour octobre 2025









































































