Le parc Janko Král’ de Bratislava, un des premiers jardins publics en Europe

Statue du poète révolutionnaire slovaque Janko Král’ (1822-1876)
L’impératrice Marie-Thérèse et archiduchesse d’Autriche (1717-1780), reine de Hongrie et de Bohême, aimait à séjourner dans son château de la toute proche (à quelques 60 km en aval de Vienne) et plus modeste Presbourg, capitale du royaume de Hongrie de 1536 à 1783. Sur sa demande, des initiatives d’urbanisation vont métamorphoser le visage de la ville. Les remparts sont démolis, les douves comblées et de nombreux palais baroques sont érigés.
Un parc conséquent sur la rive droite du fleuve en 1775-1776, est inauguré en lien avec les travaux de régulation du Danube dont l’entreprenante souveraine autrichienne souhaite améliorer la navigation. Des allées sont dessinées en forme d’étoile à 8 branches et bordées de différentes essences d’arbres (érables, saules, ormes, frênes, peupliers, aulnes…) rappelant l’atmosphère d’origine des nombreuses forêts et prairies alluviales qui bordaient le fleuve. Le parc subira d’importantes transformations dans les années trente du XIXe siècle, liées au couronnement de l’impératrice Caroline-Auguste de Habsbourg-Lorraine (1792-1873). Pendant l’ère communiste, d’autres aménagement regrettables engendrent la disparition de la la roseraie et de la citerne. L’aspect actuel du parc date de 1839. Après avoir changé plusieurs fois de nom au cours de son histoire (Bürgerau, Brückerau, Städtischer Aupark, Parc de Tyrš), ce superbe espace vert porte aujourd’hui le nom de Parc Janko Kráľ (en slovaque Sád Janka Kráľa), en hommage au poète romantique et révolutionnaire slovaque Janko Král’ (1822-1876) dont la statue se trouve au centre de celui-ci.1
Le parc Janko Král’, d’une superficie de 42 hectares, situé entre le vieux et le nouveau pont, dans l’arrondissement de Peteržalka (Bratislava V) abrite de nombreux arbres remarquables et constitue en fait le seul véritable poumon vert au centre de la capitale slovaque. Bien que ce parc ait perdu quelques-uns des trésors, il émane néanmoins encore un grand charme de ce lieu de promenade et de détente sur la rive droite du fleuve que savent apprécier les habitants de Bratislava.

Tour gothique d’origine de l’église des Franciscains. La cloche de cette tour au sommet du clocher de l’église indiquait autrefois l’ouverture et la fermeture des débits de boisson et était surnommée « la cloche de la bière ». Endommagée par des bombardements elle fut remplacée par une copie et installée dans le parc. Photo © Danube-culture, droits réservés
La capitale slovaque recèle encore d’autres trésors de verdure comme le jardin à la française du palais Grassalkovich (1760) construit sur les plans de l’architecte F. A. Hillebrant et qui abrite la présidence de la République slovaque, le jardin de la médecine du palais Aspremont (1769), aujourd’hui faculté de médecine de l’Université Comenius, le jardin Franz Liszt et son petit pavillon Rococo dans lequel le pianiste et compositeur hongrois a donné son premier concert public en 1820, le « Horský Park » (parc de la montagne), une forêt collinaire aménagée en parc public en 1869 et agrandi en 1892 et le jardin botanique de l’université Comenius avec sa roseraie et ses ses serres qui s’étend sur 6, 5 hectares non loin du Danube.
Pour celles et ceux qui aiment la tranquillité à tout prix, ils ne sauront omettre de s’asseoir sur un banc ou sous la tonnelle de la place Hviezdoslav, d’y jouer éventuellement aux échecs pour se changer les idées ou de se réfugier dans le joli cimetière évangélique historique près de Kozia brana, dans le cimetière de Ondrej, oasis de repos pour les morts comme pour les vivants et de flâner dans les allées romantiques du fossé de la ville.
L’auberge historique Leberfinger, une institution à Bratislava, en lisière du parc Janko Král’ et à proximité du quai du Danube, ouverte en 1785 et connue pour avoir eu le privilège d’héberger une nuit l’empereur Napoléon Ier lors des bombardements de Bratislava, est aussi toujours fréquentée assidument pour sa cuisine.
www.leberfinger.sk
Notes :
1 Janko Král’ a écrit ce poème où il cite le Danube :
Nous te quittons,
Danube silencieux,
car sur tes rives
nous n’avons plus d’institution.
Nous resterons pourtant
tes fidèles enfants :
Aucun Slovaque
ne t’effacera de sa mémoire.
Chers monts Tatras,
nous volerons vers vous,
et réveillerons nos frères
de leur sommeil.
Le jour s’estompe,
Le soleil se couche,
mais pour nous il se lèvera,
car le Seigneur est avec nous.
Ne vous affligez pas, mes frères !
L’aube apparaîtra bientôt
Et sur notre tombeau
une nouvelle gloire brillera.
Salut aux Serbes, aux Tchèques,
aux Croates et aux Polonais !
Salut à nos frères
des Slovaques du Danube !
Ce poème se trouve dans un manuscrit de Jan Pravoslav Leska, manuscrit intitulé « Národnje Slovenskje Pjesňe písau Janko Pravoslav Leška, 1850 ». Cette poésie de Janko Král est le troisième du chapitre « Pjesne Bretíslavskích žakov, ki sa po zakázaňú Ústavu Sloven. do Levoča odebrali » (Poèmes des étudiants de Bratislava qui se sont rendus à Levoča après la fermeture de l’Institut slovaque). Il n’y a pas de titre. Il a été publié pour la première fois en 1956.
Sources :
https://zlatyfond.sme.sk/dielo/412/Kral_Dunaju-nas-tichy/1#ixzz7QEqAm0kF
Eric Baude pour Danube-culture, mai 2023, © droits réservés