Ulm, ville libre impériale et aujourd’hui capitale du Land de Bade-Wurtemberg
« Le Fischerviertel » ou Quartier des pêcheurs, est un site enchanteur, avec ses ruelles intimes et accueillantes, ses auberges prodigues en truites et en asperges, ses brasseries en plein air, sa promenade sur le Danube, ses vieilles maisons avec des glycines se reflétant dans la Blau, le ruisseau du lieu, lequel se jette discrètement dans le grand fleuve… ». C. Magris, Danube, Éditions Gallimard, Paris, 1988`
Hartmann Schedel, Ulm, gravure sur bois coloriée à la main, 1493
Ulm et le Danube vers 1540, vue depuis le côté sud. Aquarelle signée « delin et pinx. St. Flock Ulm » (Stefan Flock 1870-1928), réalisée en 1910 d’après un dessin à l’encre coloré de 1580. On y voit, du côté actuel de Neu-Ulm la rive droite du fleuve à la hauteur de l’île du Danube. En haut de l’image, de gauche à droite sur la rive septentrionale, la porte « Herdbrucker », la cour « Reichenau » (Ehinger), la cour Verte, la tour « Diebsturm », en biais devant, encastrée dans le mur de la ville, la tour Verte, à côté les ruines de l’église Prediger (reconstruite en 1616 sous le nom d’église de la Trinité), la tour « Spitalturm » et à droite de l’image la tour « Gänsturm ». Depuis la porte « Herdbrucker », le pont « Herdbrücke » mène d’Ulm à l’île du Danube, en partie entourée de remparts (nouvelles fortification réalisées en 1564). Sur la partie est de l’île qui n’est pas fortifiée, se trouvent des ateliers (de cordiers ?). Sur la rive actuelle de Neu-Ulm on voit au premier plan la salle de tir à l’arbalète inférieure, une maison à colombage détruite en 1552, reconstruite en 1557 et à nouveau démolie en 1632. Sur la droite, une cabane de tir avec une cible sur la façade. Sources : Stadtarchiv Ulm
Fondée en 854, la cité d’Ulm a été érigée en ville libre impériale par l’empereur Frédéric Barberousse en 1274. Elle est annexée quelques années à la Bavière au tout début du XIXe siècle puis restituée en partie au duché de Wurtemberg dès 1810. La ville fut détruite par un bombardement allié en 1944 à plus de 80 %.
J. B. Homann (1664-1724), géographe et cartographe allemand, à partir de 1715, cartographe et géographe de l’empereur du Daint Empire romain germanique, membre de l’Académie Royale de Prusse : Nova et accurata Territorium Ulmensis… », Nuremberg, 1720
La ville possède encore un monastère bénédictin baroque avec une splendide bibliothèque, de jolies fontaines, une horloge astronomique du XVIe siècle, un quartier historique des pêcheurs au bord de la Blau devenu un haut-lieu touristique de la ville, plusieurs musées dont un intéressant Musée du pain, un remarquable Musée d’art du XXIe siècle (Musée Weishaupt), un Musée des Souabes du Danube (die Donauschwaben) qui relate l’histoire passionnante mais tragique des migrations volontaires ou imposées de ce peuple vers l’aval du fleuve. Au XVIIIe siècle près de 150.000 immigrants de langue allemande ont été incités à s’installer sur les terres hongroises reconquises sur les turcs par la couronne impériale autrichienne. La majorité venait et de Souabe et des provinces autrichiennes dont la Lorraine. Il y eut 3 vagues principales de migration :
-de 1723 à 1726
-de 1764 à 1771
-de 1784 à 1786
À la fin de la deuxième guerre mondiale, quelques 13 à 15 millions de cette population d’ethnie allemande ont été expulsés de leur terre d’adoption par les régimes communistes de Hongrie et de Roumanie. Ce fut l’une des plus grandes campagne de nettoyage ethnique jamais réalisée dans l’histoire de l’humanité.
« Sur la grand-place d’Ulm s’élève la cathédrale, dont le clocher est le plus haut du monde, et dont la construction — hétérogène — s’est étendue sur plusieurs siècles, puisqu’elle a commencé en 1377 et s’est terminée (si l’on ne tient pas compte de restaurations postérieures ) en 1890. Cette cathédrale a quelque chose de déplacé, cette pointe de mauvaise grâce qui apparaît presque toujours dans les exploits, dans les records… » Claudio Magris, « L’archiviste des vilénies », in Danube, Éditions Gallimard, Paris, 1988
La « cathédrale » d’Ulm (1377-1890), en fait une église luthérienne gothique mais au dimension d’une cathédrale, revendique la flèche la plus haute du monde.
Le marché aux cochons
« La ville est aimable, les 548 brasseries recensées en 1875 semblent réconcilier idéalement Christian Friedrich Daniel Schubart, le poète révolté et Albrecht Ludwig Berblinger le célèbre tailleur qui voulait voler et retomba comme une pierre dans le Danube, le nouveau cinéma allemand, né en grande partie à Ulm, et la célèbre école supérieure de design. C’est de cet aimable genius loci que faisait preuve aussi le plus illustre des fils d’Ulm, Einstein, en écrivant dans un joli quatrain en vers, que les étoiles ― qui se moquent de la théorie de la relativité ― continuent éternellement leur chemin selon les lois de Newton.
Sur la façade de l’hôtel de ville, une plaque rappelle qu’à Ulm Kepler a publié ses Tables Rodolphines et inventé un poids-étalon adopté par la ville ; sur la place du marché aux bestiaux une autre plaque, qui célèbre avec arrogance les victoires allemandes de 1870 et la fondation du Reich de l’empereur Guillaume, ajoute sur un autre ton :
« Auch auf dem Markt der Säue, Wohnt echte deutsche Treue ! »
« Même au marché aux cochons, bat un coeur allemand loyal. »
Photo Danube-culture, droits réservés
Cette rime entre Säue (truie) et Treue (fidélité) est déjà, involontairement, une caricature malicieuse de ce qui, en peu d’années, allait devenir la vulgarité du riche et puissant Troisième Reich. C’est avec une tout autre délicatesse, par contre, qu’on a peint en 1717 sur la belle Maison des Pêcheurs, qui se trouve sur la petite place du même nom, l’image d’une ville, Weissenburg, autrement dit Belgrade. Le peintre, Johannes Matthäus Scheiffele, maître de sa corporation, a voulu immortaliser les convois militaires qui partaient d’Ulm et descendaient le Danube pour aller combattre les Turcs ; Belgrade, reprise puis perdue, étant un des noeuds stratégiques de cette guerre. C’est d’Ulm également, sur de grosses barques connues sous le nom de « pontons d’Ulm » [Ulmer Schachtel] que partaient les colons allemands qui s’en allaient peupler le Banat, les « Donaueschwaben », les Souabes du Danube, qui, durant deux siècles, de Marie-Thérèse à la seconde guerre mondiale, allaient marquer radicalement de leur empreinte cette civilisation danubienne aujourd’hui effacée… » Claudio Magris, « Le marché aux cochons » in Danube, Éditions Gallimard, Paris, 1988
Sur le Danube supérieur…
« Il est indubitable qu’Ulm se trouve sur le Danube supérieur. Mais jusqu’où précisément arrive ce dernier, où se trouvent son début et sa fin, quelle est son aire, son identité, sa notion même ? L’ingénieur Neweklowsky a passé sa vie à tracer les limites de l’ « Obere Donau », du Danube supérieur, et ― une fois circonscrit ce territoire ― à le passer au crible, à le classifier et à le le cataloguer mètre par mètre dans l’espace et dans le temps, en ce qui concerne la couleur des eaux et les tarifs douaniers, le paysage qu’il offre à la perception immédiate et les siècles qui l’on construit. Comme Flaubert ou Proust, Neweklowsky a consacré toute son existence à son oeuvre, à l’écriture, au Livre ; le résultat, c’est un volume en trois tomes de 2 164 pages en tout, y compris les illustrations, qui pèse cinq kilos neuf cents et qui, comme le dit son titre, a, pour sujet non pas le Danube, mais plus modestement La navigation et le flottage sur le Danube supérieur(1952-1964). » Claudio Magris, « Deux mille cent soixante-quatre pages et cinq kilos neuf cents de Danube supérieur », in Danube, Éditions Gallimard, Paris, 1988
Guerre et paix sur les bords du Danube
« Près de l’abbaye d’Elchingen, à quelques kilomètres de la ville, se trouve l’endroit où fut signée, le 19 octobre 1805, la Capitulation d’Ulm, reddition du général autrichien Mack — le « malheureux Mack » dont parle Tolstoï dans Guerre et Paix — à Napoléon. Une stèle rappelle le souvenir des morts napoléoniens — soldats français ou venus des divers États allemands alliés à l’époque avec l’Empereur :
À LA MÉMOIRE DES SOLDATS
DE LA GRANDE ARMÉE DE 1805
BAVAROIS, WURTEMBERGEOIS, BADOIS
ET FRANÇAIS
Le paysage, avec ses bois brumeux le long du fleuve, fait penser à une gravure représentant une bataille. Une brèche montre l’endroit où le maréchal Ney fondit sur les défenses autrichiennes.
Cette section du Danube a été le théâtre de grandes batailles, comme celle d’Höchstadt (ou de Blenheim), au cours de laquelle le prince Eugène et Lord Marlborough, pendant la guerre de succession d’Espagne, infligèrent en 1704 une défaite à l’armée française du Roi-Soleil. Mais ces batailles aux abords du Danube sont des batailles de la vieille Europe prérévolutionnaire et prémoderne, qui prolongent — au gré des victoires et des défaites des différentes grandes puissances — l’équilibre entre les monarchies absolues jusqu’en 1789. L’empire danubien incarne par excellence ce monde de la tradition et Napoléon, qui après avoir vaincu les Autrichiens à Ulm entre dans Vienne, incarne, lui, la modernité qui talonne et serre de près le vieil ordre habsburgo-danubien, dans une poursuite qui n’aboutira qu’en 1918. » Claudio Magris, « Grillparzer et Napoléon », in Danube, Éditions Gallimard, Paris, 1988
Le pont de pierre (le plus ancien pont encore en activité sur le Danube), la cathédrale saint-Pierre et le Danube, trois magnifiques symboles de Ratisbonne
« Ville attenante à Stadt-am-Hof (Stadtamhof), située sur la rive droite du Danube, capitale du cercle bavarois de la Regen (Regenkreis) et le siège de la régence, ci-devant ville libre et impériale. La partie de la ville de Ratisbonne et presque toute celle qu’on nomme Stadt-am-Hof, devint la proie des flammes, lors de l’assaut, qui eut lieu le 23 Avril 1809. C’est aujourd’hui la plus jolie partie de la ville (la superbe rue nommée Maxjosephstrasse).
Stadt-am-hof (Regensburg), gravure de Michael Wening Bavière (1645-1718), vers 1700
21 à 22000 habitants. Vieux et célèbre pont sur la Danube. Belle cathédrale d’un style gothique, où se trouve le monument de Dalberg. La ci-devant abbaye de saint-Emmeran, aujourd’hui la résidence du Prince de Taxis où se trouvent ses riches collections. Observatoire, jardin botanique. L’église de saint-Emmeran, où l’on voit de charmants tableaux, plusieurs autres églises, le collège des Jésuites, le couvent des Écossais, les chapitres, dits Ober et Niedermunster.
La jolie place, dite Neupfarreplatz, c’est incontestablement la première de Ratisbonne, avec des promenades. La jolie maison, dite Unterhaltungshaus, où l’on trouve salle de spectacle, redoute, harmonie (une société bien aimable) et un restaurant. Lycée, gymnase, bibliothèque urbaine (formée par trois autres). Société botanique et ses collections.
La Diète de l’Empire Germanique a siégé dans cette ville, depuis 1662 jusqu’en 1806, époque de sa dissolution. Voyez le local où s’assemblait la Diète générale, ainsi que l’hôtel-de-ville, maintenant le local de la police et du Loto, l’on y trouve aussi une collection d’anciens tableaux. Moulins et machines hydrauliques sur les bords du Danube. Commerce de productions naturelles et d’expédition. Peu d’industrie, mais construction de bateaux, blanchisseries de cire, peinture sur porcelaine. Divertissements : spectacles, bals, concerts, assemblées. Promenades : l’Allée de Taxis (qui n’est rien d’autre qu’un véritable parc) ; Oberwoerdt et Niederwoerdt, les tilleuls, le pont, les parties sur l’eau, la métairie d’Einhausen, le bain de Winzer etc.
Le monument à Johannes Kepler, photo droits réservés
Le monument de Kepler. Ici mourut en 1817, dans la maison Neuenstein, Charles de Dalberg, Prince Primat, ci-devant Grand-Duc de Francfort. Les collections du Comte de Thurn et de Meyer. Établissement de Robinson pour sourds et muets, fondé en 1816. Écoles pour les savants. Dans les environs, la Chartreuse Brul, et Priefling, prélature des Bénédictins.
Hotels et auberges : Charles, Aux 3 Clefs, Auberge à la Couronne d’or, Aux 3 Casques, À l’Agneau Blanc, Au Coq Rouge, À l’Ours Noir, À l’Ours d’or.
Il part toutes les semaines un bateau pour Vienne. Almanach pour ceux qui voyagent dans les environs de Ratisbonne (1809)
Ratisbonne
La ville porte à l’époque romaine, sous le règne de l’empereur Marc-Aurèle, le nom de Castra Regina. On la retrouve aussi sous le toponyme celte de Radaspona, mentionné dans la vie de Saint Emmeran d’Arbeo de Freising (avant 723-784) vers 772 ap. J.-C. et dont la transcription latine médiévale Ratisbona a donné Ratisbonne en français, l’élément celte « bona » signifiant village, fondation. D’autres noms, liés à des périodes de son histoire lui ont été attribués dans la littérature : Tiburnia, Tiburtina, Quadrata, Quatarnis, Hyatospolis, Ymbrispolis, Germainsheim, Metropolis…
Le monastère de Saint Emmeran de Ratisbonne abrite la pierre tombale de ce martyre chrétien du moyen-âge, originaire de Poitiers et qui s’était installé à Ratisbonne. Confesseur à la cour des Agilolfingiens, il fut tué lors d’un guet-apens en 652 à Eching (Bavière)
Ratisbonne qui s’enorgueillit d’avoir accueilli Saint Emmeran, Charlemagne (vers 742-814), un adepte de la natation dans le Danube), les croisades, Frédéric Barberousse (1122-1190), Charles Quint (1500-1558), son fils illégitime Don Juan d’Autriche qui y est né, le peintre Albrecht Altdorfer (vers 1480-1538), maître de l’École dite « du Danube », Johannes Kepler (1571-1630), brillant mais infortuné astronome, les empereurs Napoléon Ier, Guillaume Ier de Hohenzollern (1797-1888), François-Joseph de Habsbourg (1830-1916) et les princes de Thurn und Taxis (ils y sont établis depuis 1748), plus récemment le cardinal Joseph Ratzinger devenu pape sous le nom de Benoît XVI (2005), eut les honneurs de la diète impériale du Saint Empire Romain Germanique de 1663 à 1806. La ville subit aussi des épidémies de peste, les affres des croisades, les désastres de la guerre de Trente ans, la mise à l’index de sa communauté juive et d’autres conflits.
Quelques dates de l’histoire de la ville :
Vers 90 ap. J.-C. : édification d’un premier camp fortifié romain 179 ap. J.-C. : construction du camp de légionnaires de Castra Regina à l’époque du règne de Marc-Aurèle (120-180) Milieu du VIe siècle : arrivée des Bajuwaren (Bavarois) et de la dynastie des ducs agilolfingiens sur les territoires des anciennes provinces romaines de Rhétie et de Norique. Les évêques Emmeran et Ehrard christianisent la Bavière dans la deuxième moitié du VIIe siècle. 652 : mort d’Emmeran 739 : fondation des évêchés de Ratisbonne, Passau, Salzbourg et Freising 788 : le duc de Bavière Tassilon III (vers 742-ap. 794) est emprisonné par Charlemagne, condamné à mort, gracié et doit rentrer dans les ordres 794 : annexion du duché de Bavière au royaume des Francs Xe siècle : première extension de la ville 1135-1146 : construction du Pont de pierre sur le Danube (Steinerne Brücke)
Le pont de pierre de Ratisbonne (Steinbrücke), Topographia Germaniae (1642-1654) de Matthäus Merian l’ancien (1593-1650), gravure sur cuivre
1245 : Ratisbonne devient une cité libre du Saint-Empire Romain germanique sous le règne de Frédéric II (1194-1250) et le demeurera jusqu’en 1803 1274 : début de la construction de la cathédrale gothique saint-Pierre et de l’ancien Hôtel-de-ville 1486-1492 : Ratisbonne, ayant perdu son statut commercial privilégié se débat dans de graves difficultés financières. Elle doit renoncer à son statut de ville libre du Saint-Empire Romain germanique et se soumet volontairement au duc Albert IV de Bavière (1447-1508) qui, à son tour, est contraint de restituer la ville en 1492 à l’empereur Frédéric III (1415-1493)
Regensburg Ratisbonne, gravure de Georg Braun (1542-1622) et Franz Hogenberg (1535-1590), entre 1572 et 1618
1519 : la population juive est accusée de l’état catastrophique des finances de la ville. Elle est expulsée et le ghetto est détruit. Suite à un miracle le pèlerinage de la Belle Madone commence. Il prend fin brutalement peu de temps après en raison d’une épidémie de la peste. 1532 : la Constitutio Criminalis Carolina, code de procédure pénale de l’empereur Charles-Quint est adoptée par la Diète. 1538 : mort du peintre Albrecht Altdorfer (1480-1538), le plus illustre des représentants de l’École du Danube.
La belle Madone de Ratisbonne, Albrecht Altdorfer
1542 : Ratisbonne devient une cité de la Réforme. Toutefois elle continue d’abriter l’évêché catholique. 1594 : la Diète du Saint Empire Romain germanique siège uniquement à Ratisbonne. 1630 : mort du grand mathématicien, astronome et astrologue Johannes Kepler (1571-1630) dans sa maison de Ratisbonne, loin de sa famille et dans un grand dénuement. Sa tombe sera détruite par les armées suédoises lors de la Guerre de Trente Ans. Avant de mourir, il eut le temps d’écrire sous forme de distique élégiaque l’épitaphe en vers qu’il souhaitait pour sa pierre tombale : « Mensus eram caelos. Nunc terrae metior umbras. Mens coelestis erat. Corporis umbra jacet. » (« Je mesurais les cieux. Je mesure maintenant les ombres de la Terre. L’esprit était céleste. Ici gît l’ombre du corps. »)
Johannes Kepler (1571-1630)
1663-1806 : Ratisbonne est le siège de la Diète permanente du Saint-Empire Romain germanique. 1803-1806 : dernière séance de la diète du Saint Empire Romain germanique fondé en 962 par Otton Ier (972-973) et règne du prince-primat Carl Theodor von Dalberg (1744-1817), archevêque et prince-électeur de Mayence et évêque de Ratisbonne. 1809 : bataille de Ratisbonne : les troupes napoléoniennes prennent la ville occupée par les armées autrichiennes. La ville est annexée au nouveau royaume de Bavière créé par Napoléon en 1809 et perd peu à peu de son importance.
Bataille de Ratisbonne, avril 1809
1838 : chef-lieu du district du Haut-Palatinat 1859 : raccordement au réseau ferroviaire 1863 : inauguration du Monument de la Libération (Befreiungshalle) à Kelheim 1910 : construction du port 1938 : au cours de la nuit de cristal, la synagogue est incendiée, les magasins appartenant à des Juifs pillés. De nombreux membres de cette communauté sont arrêtés et déportés. Bombardements de la ville par les Alliés. 1945 : l’armée américaine prend possession de la ville en avril. 1967 : fondation de l’université 1979 : commémoration des 1800 ans de la fondation de Castra Regina 1989 : commémoration des 1250 ans de l’évêché de Ratisbonne 1992 : inauguration du canal Rhin-Main-Danube après 32 ans de travaux 1995 : 750e anniversaire du statut de ville libre d’Empire 2005 : le cardinal Joseph Ratzinger, professeur à l’université de Ratisbonne est intronisé pape sous le nom de Benoit XVI. 2006 : Ratisbonne est classée au patrimoine mondial de l’Unesco.
Ratisbonne « Le Danube, qui sous le Pont de Pierre s’écoule, grand et sombre dans le soir, et strié par les crêtes de ses flots, semble évoquer l’expérience de tout ce qui manque, écoulement d’une eau qui s’en est allée ou va s’en aller mais qui n’est jamais là… » « Même le Volksbuch, le livre populaire du docteur Faust, chante les louanges de Ratisbonne et de son pont de pierre, merveilles des siècles et du monde. Les chroniqueurs font mention de sa magnificence de ville épiscopale et impériale, Maximilien 1er, l’empereur-chevalier, voyait en elle, en 1517, « la plus florissante, jadis, parmi les villes riches et célèbres de notre nation allemande ». Éloges et regrets entourent cette splendide ville romane et gothique aux cents tours, dont les ruelles et les places concentrent dans chaque ornement de pierre les couches d’une histoire pluriséculaire. Les louanges, les panagéryques à la ville remplissent des bibliothèques ; l’apologie se rapporte toujours cependant aux fastes d’autrefois, d’une époque révolue – einst, jadis, dit déjà l’empereur Maximilien. Les églises, les tours, les maisons de maître, les figures sculptées disent la majesté du passé, une gloire que l’on peut se rappeler mais non pas posséder , qui a toujours existé et qui jamais n’existe… « Il existe à Ratisbonne des amoureux de leur cité-État, qui vénèrent les souvenirs que recèlent chaque portail et chaque chapiteau. Ces savants, remuants et sereins comme tous les érudits locaux —à ceci près que, parmi leurs reliques, ils ne tombent pas sur des curiosité de musée, mais bel et bien sur de grandes pages d’Histoire, sur Frédéric Barberousse traversant le pont de pierre —, trouvent et rencontrent, dans le passé, d’autres savants attentifs à se faire les gardiens des siècles enfuis. En 665 pages très serrées, Karl Bauer reconstitue et répare, pierre après pierre, le plan de la ville, l’histoire et la raison d’être de chaque maison et de chaque monument, les ombres dont des centaines et des centaines d’années ont peuplé les ruelles, les arcades, les portes et les coins des splendides petites places. En s’arrêtant, dans ce livre qui date de 1980, sur la maison sise au numéro 19 de la Kreuzgasse, il nous fait le portrait de Christian Gottlieb Gumpelzhaimer [1766-1841], l’historiographe de Ratisbonne, mort en ces murs en 1841, ce passionné du passé de la ville, qui dans le premier tome de son Histoire, légendes et merveilles de Ratisbonne, ouvrage paru entre 1830 et 1838, dit tout son amour pour les richesses ancestrales de la ville ou il a vu le jour… »
Christian Gottlieb Gumpelzhaimer (1766-1841), historiographe de Ratisbonne et amoureux de sa ville
« À Ratisbonne, il y avait une tradition très vivante : celle de l’âne des Rameaux, avec la procession qui promenait à travers la ville une statue du Christ sur un âne de bois, en souvenir de son entrée triomphale à Jerusalem avant la semaine de la Passion. » Claudio Magris, »Ratisbonne » et « L’Âne des Rameaux », in Danube, Éditions Gallimard, Paris, 1988
Souvenir du passage de Napoléon et de ses armées, ici en 1809, photo droits réservés
Château et ancien monastère de saint-Emmeran Les origines du monastère remontent au VIIIe siècle et se situent sur l’emplacement d’un site funéraire paléochrétien. Une communauté de moines s’établit sur la tombe de saint-Emmeram, évêque de Poitiers, missionnaire et martyr franc assassiné en 652 et y développe une vie monastique florissante, des activités scientifiques, spirituelles et culturelles de haut niveau jusqu’à la sécularisation de 1803. Après la sécularisation et la suppression du monastère, le vaste complexe de bâtiments avec sa basilique mineure, remaniée dans le style baroque par les frères Cosmas Damian et Egid Quirin Asam, est donnée, en compensation de la perte de leur ancien palais de Francfort/Main, à la famille des princes de Thurn und Taxis qui occupe déjà une partie des bâtiments.
Basilique mineure du monastère de saint-Emmeram de Ratisbonne, photo droits réservés
Les travaux considérables de construction et de rénovation des XIXe et XXe siècles transforment l’ancien monastère en un château princier confortable, tout en préservant en partie son ancien caractère religieux. Entourant plusieurs cours intérieures, le château se compose d’un cloître de style gothique primitif et flamboyant (XIIe-XIVe) d’une remarquable homogénéité. Le « nouveau couvent », situé sur le côté est de la grande cour et construit aux XVIe et XVIIe siècles, abrite aujourd’hui les salles d’apparat de la famille princière. L’aile sud, qui ferme le château avec une impressionnante façade néo-Renaissance, date de la fin du XIXe siècle.
L’ancien monastère de saint-Emmeram est toujours le siège de la famille princière et de son administration. C’est principalement grâce à l’engagement personnel et financier de la famille des Thurn und Taxis que les bâtiments ont été bien conservés et entretenus. Les espaces muséaux du cloître, du château, de la salle du trésor et des écuries sont très fréquentés. Le projet incongru de 2007 d’une transformation d’une partie de l’ancien monastère en un hôtel de luxe a été contesté par une opposition d’habitants soutenus par des historiens et a été abandonné.
Le Musée de la navigation sur le Danube Ratisbonne compte de nombreux monuments historiques et musées mais parmi ces musées, il en est un des plus originaux et rares sur le fleuve (il en existe seulement trois autres en Autriche, au château de Grein (Haute-Autriche, rive gauche), à Spitz/Donau (Basse-Autriche, rive gauche) et à Vienne-Freudenau (rive droite) : le Musée de la navigation sur le Danube. Cette structure est hébergée à bord de deux bateaux historiques restaurés par le Cercle des travailleurs de Ratisbonne : le Ruthof/Erseksanad, un bateau à vapeur à aubes, construit en 1922/23 et le Freudenau, un remorqueur avec un moteur diesel construit en 1942.
De nombreuses pièces d’origine sont accessibles aux visiteurs à bord des deux bateaux en parfait état et qui font l’objet de démonstrations occasionnelles. Le Freudenau a été conservé dans l’état où il se trouvait jusqu’à la fin de son service actif. Différents documents donnent un bon aperçu de l’histoire de la navigation sur le Danube germanophone.
DONAUS-SCHIFFFAHRTS-MUSEUM Thundorfer Straße / Marc-Aurel-Ufer 93047 Regensburg www.donau-schiffahrtsmuseum-regensburg.de
Office de tourisme de Ratisbonne : www.tourismus.regensburg.de
Guide de la ville : BÖCKER, Heidemarie, Ratisbonne, Guide de la ville, Patrimoine de l’Unesco, Verlag Friedrich Pustet, Regensburg, 2009