Linz (Haute-Autriche) et le Danube

   « Les façades décorées, peintes en marron foncé, en vert, en violet, en blanc cassé et bleu s’y dressaient de toutes parts. Des médaillons en relief les ornaient et des volutes de stuc et de pierre les animaient. Des oriels1 sur le pan s’avançaient au premier étage et des échauguettes arrondissaient les angles, les uns et les autres s’élevant jusqu’au toit où ils rétrécissaient puis retrouvaient leur taille première pour s’achever en exubérantes coupoles ou en globes ; des pots à feu2, des pinacles, des obélisques escortaient ces bulbes décoratifs sur la ligne d’horizon de la ville. Au niveau du sol, des colonnes torsadées commémoratives se dressaient sur les dalles des places, couronnées de disques rayonnant des piques d’or, sortes d’ostensoirs post-tridentins suspendus dans l’air. La sévère forteresse exceptée, campée sur son rocher, la cité était toute vouée au plaisir et à la splendeur. On respirait en tout lieu, la beauté, l’espace et la grandeur. »
Patrick Leigh Fermor, Dans la nuit et le vent, À pied de Londres à Constantinople, « Le Danube, ô saisons, ô châteaux », Éditions Nevicata, Bruxelles, 2016

Beda Weinmann (1818-1888), panorama de Linz, vers 1860 

Linz transformée ou ville-métamorphose

   Hier, et encore aujourd’hui, grande et dynamique cité commerciale et industrielle, Linz a trouvé un judicieux compromis qui lui permet de conjuguer harmonieusement des objectifs parfois contradictoires (développement industriel, protection du patrimoine et de l’environnement) et d’accueillir des touristes de plus en plus nombreux.

Le château de Linz Haute-Autriche au-dessus du Danube, photo © Danube-culture, droits réservés

Sans doute cette politique dynamique et consensuelle, alliée à des ambitions culturelles légitimes ont-t-elles des limites mais permis à Linz d’être élue dès 2009 « Capitale européenne de la culture ». Linz ne s’est pas arrêtée à 2009. L’Opéra-théâtre, réalisé par l’architecte britannique Terry Pawson, connu pour son goût du minimalisme, et inauguré en avril 2013, en est une des preuves les plus convaincantes.

Anton Lutz (1894-1992), Pont et château de Linz, huile sur toile, 1913

La capitale de la Haute-Autriche, déjà bien desservie par des infrastructures routières est désormais en train, grâce aux récents aménagements ferroviaires dans la plaine de Tulln, à 1h 30 de Vienne.
Grande ville culturelle contemporaine danubienne, membre du Réseau des villes créatives de l’UNESCO, elle se situe de plus à la croisée des magnifiques paysages danubiens de la Strudengau et de la Nibelungengau.

L’Opéra de Linz, photo © droits réservés

Linz a toujours su entretenir tout au long de son histoire, des liens étroits avec le fleuve, la construction navale et la navigation sur le Danube. Linz fut dès le début de la navigation à vapeur reliée à Vienne par le « Maria-Anna » un steamer de la D.D.S.G.  dès 1837. Son port est l’un des plus modernes et des plus actifs du Haut-Danube et le plus important d’Autriche en terme de trafic de marchandises. C’est toutefois l’invention du chemin de fer qui entraîna l’impressionnant développement industriel de cette cité. La première ligne d’Autriche, inaugurée dès 1832, reliait la cité à sa soeur slave de Bohême du Sud, České Budějovice (Budweis) par un chemin de fer dont les wagons étaient tirés par des chevaux.

Le Maria-Anna, un des premiers vapeurs de la D.D.S.G. assurent les liaisons régulières entre Vienne et Linz dès 1837

Pour avoir aujourd’hui un panorama général de la ville il faut se rendre sur la rive gauche, au sommet du Pöstlingerberg (rive gauche).
De cet endroit on jouit de la plus belle vue sur Linz, sur son patrimoine architectural et la vallée du Danube en aval avec son impressionnante zone industrielle (rive droite). Un train à crémaillère (Pöstlingerbahn) permet d’y accéder confortablement depuis la place principale (Hauptlatz).

Un peu d’histoire…

Vue de Linz au XVIIe siècle depuis la rive gauche, gravure de Matthäus Merian le jeune (1621-1687), 1650

Linz doit tout d’abord étymologiquement son nom à « son » fleuve, à son changement de direction et à la langue celte. Le mot celte « Lentos » (courbé) a donné son nom à la citadelle romaine de Lentia établie à un carrefour stratégique permettant de contrôler à la fois d’importants territoires danubiens et la Route du sel. Même si elle ne fut que brièvement ville impériale sous le règne de Frédéric III de Habsbourg (1415-1493), la cité n’en continua pas moins à prospérer.

la place principale en 1821, sources : Robert Batty,Rudolf Lehr – Landeschronik Oberösterreich, Wien, Verlag Christian Brandstätter, 2008 

De nombreux lieux et monuments comme la Place principale au centre ville, le château Renaissance, de style maniériste qui abrite désormais le Musée régional de Haute-Autriche, l’ancienne cathédrale Saint-Ignace, les églises gothiques et baroques, l’impressionnante nouvelle cathédrale (1924), l’usine de tabac (1929-1935) et d’autres édifices témoignent de la vitalité de la ville à travers l’histoire.

La nouvelle cathédrale néo-gothique dédiée à l’Immaculée Conception, fut construite entre 1862 et 1924. Sa flèche mesure 134 m de haut, photo © Danube-culture, droits réservés

La guerre civile de 1934 et la sombre période du national-socialisme ont aussi laissé leur empreinte dans la ville tel le pont des Nibelungen. Adolf Hitler, né en Haute-Autriche à Braunau/Inn, passa son adolescence dans les environs de Linz et envisagea de concrétiser dans cette cité ses rêves paranoïaques.

Projet architectural du régime nazi pour les bords du Danube à Linz

Linz devint ainsi alors la cible privilégiée des mesures nazies de planification urbaine et économique mais seul le pont des Nibelungen vit le jour. En 1945, ce pont séparant la rive droite occupée par les forces américaines et la rive gauche du Danube, tenue par l’armée russe, faisait dire aux habitants, non dépourvus d’humour, que « c’est le pont le plus long du monde de l’après guerre. Il commence à Washington et finit en Sibérie ! »

La Place principale et sa colonne protectrice de la Sainte Trinité érigée en 1723 contre les épidémies de peste et autres calamités, photo © Danube-culture, droits réservés

Au milieu de la place principale trône la haute et blanche colonne de la Sainte-Trinité (1723), flanquée d’un Jupiter et d’un Neptune. Elle rappelle les miracles qui ont permis aux habitants d’échapper au feu, à la peste et aux envahisseurs ottomans. Cette belle place aux dimensions impressionnantes a longtemps servi de champ de foire et de marché. Joseph Fouché (1759-1820) a habité avec sa femme et sa fille  au n° 27, pendant son exil en Autriche (1816-1820). Ministre de la police du Directoire à l’Empire, ayant voté la condamnation à mort de Louis XVI, il avait du quitter la France en 1816. Exilé d’abord à Prague, Fouché demandera au prince de Metternich la permission de s’installer à Linz. Il mourra peu de temps après avoir été autorisé à déménager à Trieste en 1820. Quant à Beethoven il logeait au n° 34 de la même place lors de ses visites à son frère Johann, pharmacien de son état.

Enseigne de la pharmacie de Johann van Beethoven à Linz

Le musicien y composa sa huitième symphonie. Un peu plus loin dans une ruelle longeant l’Hôtel-de-ville (Rathausgasse), se trouve la maison qui abrita le célèbre astronome, mathématicien et théologien allemand Johannes Kepler (1571-1630). Mozart y séjourne en 1783 et écrit, à l’âge de 27 ans, une de ses dernières symphonies, celle dite « de Linz » en ut majeur n°36, KV 425.

Johannes Kepler (1571-1630)

L’ancienne cathédrale, autrefois église des Jésuites, conserve intact l’orgue aménagé par le musicien et compositeur Anton Bruckner (1824-1896) et sur lequel il joua et improvisa de 1856 à 1868.

Anton Bruckner, portrait d’Hermann Kaulbach (1846-1909), huile sur toile, vers 1885

D’autres personnalités telles le peintre Alfred Kubin (1877-1959), le graphiste Herbert Bayer (1900-1985, typographe et affichiste du Bauhaus, le ténor Richard Tauber (1891-1948), le philosophe Ludwig Wittgenstein (1889-1951), le mathématicien et physicien Christian Doppler (1803-1853), se rattachent également à l’histoire de la ville. On ne peut pas non plus évoquer Linz sans évidemment citer le nom de l’écrivain, peintre et pédagogue de l’époque Biedermeier, Adalbert Stifter (1805-1868), fondateur en 1855 de la Landesgalerie, aujourd’hui le Lentos Kunstmuseum de Linz (Musée d’art moderne et contemporain de Haute-Autriche lui aussi au bord du fleuve).

Adalbert Stifter (1805-1868), écrivain, peintre, pédagogue, inspecteur des écoles primaires de Haute-Autriche
   Ces dernières années d’importants projets d’aménagement urbain, culturels et architecturaux ont vu le jour. Difficiles de les citer tous tant ils sont nombreux : le nouveau quartier de la gare (Bahnhofviertel) avec l’Opéra-théâtre (Musiktheater), inauguré en avril 2013, des immeubles à l’architecture innovante, le magnifique Musée d’art moderne au bord du fleuve, (Lentos Kunstmuseum Linz) dont la façade éclairée et multicolore se reflète de nuit dans les eaux du Danube, le passionnant Musée du futur (Ars Electronica Center), l’espace de découverte de l’acier (Voestalpine Stahlwert), la SolarCity, le Parc du Danube et ses sculptures contemporaines grand format, de nouveaux ponts… Linz est une cité qui ne cesse d’innover !

À Linz, on aime construire des ponts sur le Danube ! Photo © Danube-culture, droits réservés

 À ne pas manquer…

Culture
Lentos, Kunstmuseum Linz
Musée d’art moderne et contemporain au bord du fleuve dont les façades aiment à se refléter dans les eaux du fleuve. À voir pour ses collections et son architecture réussie !
www.lentos.at

Vue de Linz (et du Danube) en 1955 par le peintre « expressionniste » Oskar Kokoschka (1886-1980), collection du Musée Lentos de Linz. Oskar Kokoschka, né à Pöchlarn, sur les bords du Danube, non seulement peintre mais graveur, décorateur, écrivain, auteur dramatique, est un des artistes les plus complets de sa génération. « Je suis le seul véritable expressionniste : le mot expressionnisme est un mot commode qui veut tout dire de nos jours. Je ne suis pas expressionniste parce que l’expressionnisme est un des mouvements de la peinture moderne. Je n’ai pris part à aucun mouvement. Je suis expressionniste parce que je ne sais pas faire autre chose qu’exprimer la vie … »  

Ars Electronica Center – Bio Lab
Le « Musée de l’avenir » se trouve sur la rive gauche du Danube dans le quartier d’Urfahr. Espace interactif et ludique de découverte dans les domaines des nouvelles technologies et des arts numériques, l’AEC organise un festival chaque année au mois de septembre et de nombreuses autres manifestations.
www.aec.at

Les reflets colorés de la façade éclairée d’Ars Electronica Center se mirent aussi dans le fleuve miroir, photo © Danube-culture, droits réservés

Brucknerhaus
www.brucknerhaus.at
Salle de concert sur la rive droite du fleuve, « port d’attache » du Brucknerorchester Linz
www.bruckner-orchester.at

La Brucknerhaus et le Danube, photo © Danube-culture, droits réservés

Musiktheater Linz
Le « Musiktheater » de Linz est l’une des salles les plus modernes d’Europe. Elle bénéficie d’une acoustique exceptionnelle.
www.landestheater-linz.at

Posthof – Culture
Centre culturel à la programmation contemporaine, ancienne annexe de la poste dans le quartier du port.
www.posthof.at

Schlossmuzeum Linz
Le château de Linz, construit au XIIsiècle (l’aile sud a été restaurée, agrandie et inaugurée en 2009) abrite un musée universel : histoire naturelle, culturelle, artistique et technologique de la Haute-Autriche. Des collections d’art régional magnifique ! Vue exceptionnelle sur la ville et le fleuve et la rive gauche depuis les terrasses.
www.schlossmuseum.at

Le Schloßmuseum possède une magnifique collection d’art populaire de la Haute-Autriche, photo © Danube-culture, droits réservés

Mariendom (nouvelle cathédrale)
Le plus grand bâtiment religieux d’Autriche, achevé en 1924
www.mariendom.at

Tabakfabrik Linz
Ce beau témoignage de l’histoire de l’architecture industrielle européenne moderne se transforme en espace d’innovation pour les industries créatives.
www.tabakfabrik-linz.at

Botanischer Garten (jardin botanique)
Les serres abritent notamment une impressionnante collection de cactus et d’orchidées.
www.linz.at/botanischergarten

Francisco Carolinum Linz, Maison de la photo et des arts contemporains
www.ooelkg.at

Institut Adalbert Stifter
www.stifterhaus.at

La maison de l’écrivain et peintre Adalbert Stifter, toute proche du fleuve.

Voestalpine Stahlwelt
Site dédié aux nouvelles technologies de production de l’acier
www.voestalpine.com/stahlwelt

 Pour les enfants et les adultes 

Linz est aussi une ville très agréable pour séjourner en famille.

Ars Electronica Center – Bio Lab (voir ci-dessus)
Le Drachenexpress (l’express des dragons)
www.grottenbahn.at

Du côté du Danube

   Il est tout à fait possible de prévoir une excursion en bateau sur le Danube. Linz est le port d’attache de l’élégant Schönbrunn, un des plus anciens bateaux à vapeur conservés dans son état d’origine en Europe.
ÖGEG Dampfschiff Schönbrunn : www.oegeg.at

Le Schönbrunn est dernier bateau à vapeur d’une flotte de 300 navires qui, autrefois parcouraient le Danube sous le drapeau de la D.D.S.G. Construit en 1912 dans le chantier naval d’Obuda/Hongrie, il assure un service régulier entre Vienne et Passau jusqu’en 1985. Mis hors service en 1988, il est ancré à Budapest et transformé en casino flottant. En 1994, le Schönbrunn qui n’est plus en état de fonctionnement, échoue à Engelhartszell et sert de bateau d’exposition à la Oberösterreichische Landesausstellung (Exposition Nationale de la Haute-Autriche). Il est alors mis au rebut. La République autrichienne le cède en toute dernière minute à l’association de passionnés Ö.G.E.G. qui l’a remis en état et le fait naviguer régulièrement pour diverses croisières. (sources : www.kaeser.fr

De nombreux autres bateaux descendent et remontent le Danube depuis Passau en amont ou Vienne, Budapest et au-delà et font bien évidemment escale à Linz. Il est aussi possible de visiter le port et d’admirer les nombreuses oeuvres graphiques qui allègent la pesanteur du décor et qui donnent quelque peu aux darses, bassins, aux quais de bétons et aux bâtiments industriels une allure de gigantesque galerie de plein air  d’art contemporain.

Croisières Würm+Köck
www.donauschiffahrt.at

Croisières MS Helene
www.donauschifffahrt.at

Donautouristik
MS Kaiserin Elisabeth
www.donaureisen.at

Hébergement/gastronomie

Hôtel restaurant Pöstlingberg-Schlössl
Vue magnifique sur la ville depuis le Pöstlingberg et cuisine d’excellent niveau
www.poestlingbergschloessl.at

Hôtel Harry’s Home Linz
Hôtel contemporain
www.harrys-home.com/linz

Hôtel Wolfinger
Atmosphère désuète et accueil chaleureux
www.hotelwolfinger.at

Hôtel-restaurant Prielmayer’s
www.prielmayerhof.at

Restaurant Essig’s
Le meilleur restaurant de Linz actuellement : belle atmosphère, service attentif et carte de vins remarquable
www.essigs.at

À noter également la présence de très bons restaurants de cuisine indienne et grecque :
Royal Bombay Palace : www.bombaypalace.at
Zum kleinen Griechen : www.zumkleinengriechen.at

À proximité…

   Après avoir pris le temps de visiter Linz et d’en découvrir quelques-uns de ses trésors, on remontera la rive droite du fleuve jusqu’à l’abbaye cistercienne de Wilhering. On mettra une nouvelle fois ses pas dans ceux du compositeur et organiste romantique autrichien Anton Bruckner en visitant la non moins impressionnante abbaye de Saint-Florian, fondé au XIsiècle par les chanoines de Saint-Augustin, réaménagée aux XVIIe et XVIIIe siècles, autre chef d’oeuvre du Baroque de la vallée du Danube autrichien.

L’abbaye et la basilique augustinienne de Saint-Florian, photo © Danube-culture, droit réservés

Les grandes abbayes autrichiennes de Wilhering, Saint-Florian, Melk, Göttweig et Klosterneuburg sont toutes situées sur la rive droite du Danube.
Au nord de Linz, la région bucolique du Mühlviertel est une chaleureuse invitation aux randonnées et aux promenades en forêt.

Mémorial de Mauthausen (rive gauche)
Dans ce camp de concentration construit par les Nazis, périrent pendant la seconde guerre mondiale plus de 100 000 victimes.
www.mauthausen-memorial.org

Porte d’entrée du sinistre camp de concentration de Mauthausen, photo © Danube-culture, droits réservés

Linz et le troisième Reich…
« Les fenêtres donnent sur le Danube, elles regardent le grand fleuve et les coteaux qui le surplombent, paysage marqué par les bois et les coupoles en bulbe des églises ; l’hiver, avec le ciel froid et les plaques de neige, les courbes aimables du fleuve et des coteaux semblent perdre leur réalité et leur consistance pour devenir les traits à peine esquissés d’un dessin, un blason d’une élégante mélancolie. Linz, capitale de la Haute-Autriche, était la ville qu’Hitler préférait entre toutes et dont il voulait faire la métropole la plus monumentale du Danube. Speer, l’architecte officiel du Troisième Reich, a mis sur le papier ces projets d’édifices gigantesques, pharaoniques, qui n’ont jamais vu le jour, et à travers lesquels, Hitler, comme l’a écrit Elias Canetti, révélait son besoin fébrile de dépasser les dimensions déjà atteintes par d’autres constructeurs, son obsession de la compétition le poussant à battre tous les records […]Dans les rêves du Führer, la cyclopéenne Linz qu’il voulait édifier devait être le refuge de sa vieillesse, l’endroit où il caressait l’espoir de se retirer, après avoir définitivement consolidé le Troisième Reich millénaire et l’avoir remis entre les mains de quelqu’un qui eût été dingne de lui succéder […] À Linz, confiait-il de temps en temps à ses intimes, il vivrait à l’écart du pouvoir, disposé tout au plus, comme un grand-père indulgent, à donner des conseils à ses successeurs, qui viendraient le trouver ; mais peut-être, disait-il – minaudant avec l’hypothèse de son détrônement, qu’il était bien disposé à ne jamais permettre – personne ne viendrait le trouver. À Linz, où il avait vécu des années paisibles, ce despote sanguinaire rêvait de retrouver une espèce d’enfance, une saison libre de tout projet et de toute échéance. Il pensait probablement avec nostalgie à cet avenir vide dans lequel il jouirait de la sécurité de celui qui a déjà vécu, déjà lutter pour dominer le mode, qui a déjà gagné, déjà réalisé ses rêves, et que personne ne pourra plus frustrer. Quand il imaginait cet avenir, il se sentait peut-être assailli par l’angoisse, l’impatience d’atteindre au plus vite ses objectifs, et rongé par la peur de ne pas pouvoir les atteindre. Il avait envie que le temps passe vite, pour vite avoir la certitude d’avoir gagné ; autrement dit, il désirait la mort, et il rêvait de vivre à Linz dans une aimable sécurité semblable à la mort, à l’abri des surprises et des échecs que réserve la vie… »
Claudio Magris, Danube, collection L’Arpenteur, Gallimard, Paris, 1998

Les jeunes années autrichiennes d’un dictateur
Adolf Hitler (1889-1945) est né en Haute-Autriche, à Braunau sur l’Inn, à la frontière avec l’Allemagne. Sa famille, après avoir déménagé à plusieurs reprises, s’installe à Leonding sur la rive droite du Danube en amont de Linz. Hitler y réside jusqu’à 1905 puis séjourne à Linz, à Steyr, retourne à Linz et sur la rive gauche à Urfahr où il s’imagine devenir compositeur. Il perd sa mère en 1907, âgée de 47 ans. Entretemps il a tenté d’entrer à l’École des Beaux-Arts de Vienne. Il est n’y est pas admis mais se représente en 1908 et s’en voit de nouveau refuser l’accès par manque de travail. Il subsiste dans la capitale autrichienne en vendant ses peintures participant à des débats politiques, fuira en 1914 l’Autriche afin ne pas porter les armes pour les Habsbourg qu’il déteste et rejoint Munich dans l’espoir d’étudier à l’Académie des Beaux-Arts…

Eric Baude pour Danube-culture, © droits réservés, mis à jour juillet 2024

Linz et la chanson des Nibelungen

   Il s’agit du roi Gunther, souverain burgonde et du musicien Volker von Alzey, son ménestrel, «un homme plein de combativité» qui sera comme son roi et tous les autres Burgondes, tués par les Huns.
   Cette colonne reflète le vieux souhait (rêve) de nombreux habitants de Linz d’établir un lien entre leur ville et la Chanson des Nibelungen comme le pont (Nibelungenbrücke, pont des Nibelungen) datant de 1940 (PK 2135, 10) qui conduit depuis la place de la vieille ville à Urfahr, en témoigne. La ville n’est pourtant pas pas mentionnée dans ce récit et il est peu probable que les Nibelungen, aient jamais franchi les portes de la cité.

Richard Diller (1890-1969), construction du pont des Nibelungen à Linz, 1939-1940, encre de chine aquarellée collection Nordico Museum der Stadt Linz

Le pont des Nibelungen avec les têtes de pont adjacentes est le seul projet de planification nazie réalisé pour Linz. Conformément à son nom, le pont aurait dû être décoré de deux figures de la légende des Nibelungen de chaque côté de la rive. Le sculpteur allemand Bernhard Graf von Plettenberg (1903-1987) fut chargé de la réalisation des sculptures monumentales de Kriemhild, Brunhild, Gunter et Siegfried. À l’occasion d’une visite d’Adolf Hitler à Linz en avril 1943, deux des statues (Kriemhild et Siegried) modelées en argile à dimension réelle furent installées à titre d’essai à leur future place. Aujourd’hui, il n’existe plus que des modèles en plâtre à petite échelle de ces figures. En 1946, le sculpteur demanda à la ville de Linz s’il pouvait compter sur la poursuite de « l’œuvre de sa vie »…
Un autre pont des Nibelungen franchit en amont le Danube à la hauteur de Ratisbonne (Bavière, PK 2378,39).

Sources : 
https://www.ooegeschichte.at

Danube-culture, © droits réservés,  mis à jour juillet 2024

Siegfried, sculpture de Bernhard Graf von Plettenberg, photo droits réservés 

La tarte de Linz !

« Les jours devinrent des semaines, puis aux semaines succédèrent les mois et soudain le printemps était là. La douce lumière du soleil réchauffant l’air nous incitèrent à redevenir des promeneurs heureux de retrouver des sensations presque oubliées. Et quand vous avez la joie de vous assoir sur un banc dans un parc ou tout simplement sur une couverture posée sur l’herbe au bord du Danube avec des amis, ou votre famille réunie ou un être cher, quel qu’il soit, vient l’instant de partager une délicieuse « Linzer Torte ».

La tarte de Linz a-t-elle été inventée à Linz sur les bords du Danube ?

Difficile à dire car la plus ancienne recette de « Linzer Torte » ne se trouve pas à Linz au bord du Danube mais dans une prestigieuse abbaye de Styrie ! Les archives de l’extraordinaire bibliothèque de l’abbaye bénédictine d’Admont1, fondée en 1074 et située sur les bords de l’Enns, un important affluent de la rive droite du Danube haut-autrichien abritent de merveilleux trésors, curiosités et autres objets exceptionnels.

L’abbaye bénédictine d’Admont, berceau de la « tarte de Linz » (?) dans l’ouvrage Topographia ducatus stiria de Georg Matthäus Vischer, 1681

Elles ont aussi l’immense privilège de posséder, trésor parmi les trésors de leur collection de livres de cuisine, la plus ancienne recette connue de « Linzer Torte« . Ce n’est d’ailleurs pas une mais quatre recettes de « Linzer Torte » parmi 490 recettes diverses consignées en 1653 par Anna Margarita Sagramosa, née comtesse Paradeiser, une aristocrate originaire de la région autrichienne de la Carniole (Krain, aujourd’hui en Slovénie, province faisant frontière avec l’Italie) et installée après son mariage à Vérone, dans le Codex 35/31 qui figurent dans cet ouvrage intitulé en langue allemande « Buech von allerley Eingemachten Sachen, also Zuggerwerck, Gewürtz, Khüt- ten und sonsten allerhandt Obst wie auch andere guett und nützlich Ding ». (« Le livre de diverses sortes de réalisations culinaires tout comme des sucreries, des épices, des coings et toutes variétés de fruits et aliments gouteux et utiles »).
La question de la présence de cet ouvrage culinaire dans le fonds de la bibliothèque de l’abbaye bénédictine d’Admont n’a pas encore trouvé de réponse. Mais les moines bénédictins se sont toujours intéressés aux domaines scientifiques les plus variés et aux arts y compris culinaires. Les quatre recettes n’ont été redécouvertes qu’en 2005 par la directrice de la bibliothèque du musée de Haute-Autriche de Linz. La plus ancienne recette connue auparavant et datant de 1696 appartient à la collection du Musée de la ville Vienne.
Un certain Johann Konrad Vogel (1796-1833), originaire de Bavière, se marie en 1822 avec Katherina Kreß, veuve d’un pâtissier de Linz, reprend le commerce et se lance dans la fabrication à grande échelle d’une tarte à base de la fameuse et délicieuse « pâte de Linz », connue, sous une forme similaire, déjà dans l’Égypte ancienne. Cette pâtisserie devient l’emblème culinaire (l’ambassadrice sucrée) de la capitale de la Haute-Autriche et fait ensuite le tour du monde. La recette rapidement imitée a continuellement été renouvelée, réinventées au fil du temps, de l’imagination et de l’inspiration des pâtissiers. Bref on s’est souvent largement éloigné de la ou des recettes recettes d’origine. C’est pourquoi il est passionnant de se pencher sur quelques-unes des plus anciennes et « authentiques » recettes de « Linzer Torte » pour connaître quelle pâtisserie/salon de thé ou Konditorei autrichienne peut à juste titre prétendre vendre la véritable « Linzer Torte » selon les critères définis dans la capitale de la Haute-Autriche.
La « Linzer Torte » est une pâtisserie à base de pâte brisée (pâte de Linz) confectionnée avec une proportion importante de noix. À l’origine, seules des amandes étaient ajoutées à la pâte. Aujourd’hui un mélange d’amandes et de noisettes râpées est généralement utilisé. La « Linzer Torte » authentique ne doit contenir qu’une simple garniture de confiture de groseille. Elle est traditionnellement recouverte avec un treillis de pâte.
Les premières recettes nous montrent une tarte qui n’a pas grand-chose à voir avec celle que nous connaissons aujourd’hui. Les divers ingrédients caractéristiques désormais utilisés tels que par exemple la cannelle, les clous de girofle et les noisettes manquent de même que le treillis caractéristique et souvent aussi la garniture avec de la confiture. Dans les premiers années de sa fabrication on utilisait  des amandes râpées, des citrons ou même du saindoux qui faisaient l’originalité de la véritable « Linzer Torte ». Malgré tout, une caractéristique relie toutes les différentes recettes de « Linzer Torte » au cours de l’histoire, l’incontournable pâte brisée qui fait la saveur inégalable de ce dessert bien évidemment à condition de veiller à ce que celle-ci ne soit pas trop sèche.
Si la plus ancienne recette connue de « Linzer Torte » ne se trouve pas à Linz, la bibliothèque du Musée de Haute-Autriche (Oberösterreichische Landesmuseum) possède toutefois une collection importante de livres de cuisine manuscrits datant d’entre 1700 et 1858 et dans lesquels on trouve pas moins de 95 recettes de « Linzer Torte » ! Parmi celles-ci ces recettes une variante avec du chocolat (Livre de cuisine de Babette Kindler, vers 1850).

Recette manuscripte de « Linzer Torte », collection du Musée du Land de Haute-Autriche de Linz

Note :
1 la plus importante bibliothèque de monastère au monde

La « Linzer Torte » en quelques dates
1653
La comtesse Anna Margarita Sagramosa originaire de Krain (Carniole), domiciliée à Vérone après son mariage, recopie quatre recettes de « Linzer Torte » dans son livre de cuisine manuscrit. Redécouvert à la bibliothèque de l’abbaye d’Admont en 2005, c’est actuellement le plus ancien témoignage connu d’une recette de « Linzer Torte ».
1718
La première recette imprimée du « Guten und Suessen Lintzer-Taiges » est publiée dans le « New Saltzburg Cookery Book » de Conrad Hagger.
1700-1850
Période de gloire de la « Linzer Torte ». Inventions de nombreuses variations tant en termes de goût que d’apparence. Des recettes de « Linzer Torte » sont publiées dans presque tous les premiers livres de cuisine imprimés en Europe.
1842
La « Linzer Torte » est mentionnée pour la première fois dans un récit de voyage (Johann Georg Kohl « Reise von Linz nach Wien », publié à Dresde en 1842).
1855
Franz Hölzlhuber (1826 -1898), peintre, chanteur, poète, bibliothécaire, professeur de dessin, confiseur, né à Steyr (Haute-Autriche) et émigré aux USA fait découvrir la « Linzer Torte » aux américains de Milwaukee (Wisconsin) pendant son séjour (1855-1860). Il compose à Milwaukee son unique opéra (singspiel) qu’il intitule « Das neue Donaureich » (vers 1856).
Le magazine American Heritage de juin 1965 attribue l’introduction de la Linzer Torte en Amérique à Franz Holzlhuber : « En 1856, Hölzlhuber, un jeune Autrichien entreprenant des environs de Linz, s’est embarqué pour l’Amérique. Il n’avait que très peu d’argent mais était équipé d’une cithare, d’un carnet de croquis, d’une formation en droit et en dessin, et de la promesse d’un emploi à Milwaukee en tant que chef d’orchestre. Quelque part entre New York et le Wisconsin, il perd ses bagages et la lettre confirmant son emploi, qui s’avère ne plus être disponible. Nullement découragé, il se mit à travailler comme boulanger, introduisant (selon ses dires) la Linzer Torte en Amérique… »

Franz Hölzlhuber (1826-1898), ambassadeur de la « Linzer Torte » aux États-Unis

1900
L’écrivain prussien Ernst von  Wildenbruch (1845 -1909) immortalise la pâtisserie dans son ode à la  « Linzer Torte ». Il conclue celle-ci sur le vers : « Was sind aller Dichter Worte gegen eine Linzer Torte! » (« Que peuvent faire les vers de tous les poètes en face d’une tarte de Linz ! »)
1927
L’écrivain, journaliste et humoriste viennois Alfred Polgar (1873-1955) sème volontairement et non sans humour la confusion en prétendant que la recette de la « Linzer Torte » a été inventée par un boulanger viennois du nom de « Linzer ». Cette hypothèse est réfutée.
1944
L’opérette « Linzer Torte » du compositeur Ludwig Schmidseder1 (1904-1971 ), né à Passau et mort à Münich sur un livret d’Ignaz Brantner (1886-1960), Johann-Gustav) Kernmayr (1900-1977) et Aldo von Pinelli (1912-1967) est représentée pour la première fois au Théâtre de Haute-Autriche de Linz. Ludwig Schmidseder est aussi l’auteur de l’opérette « Mädel aus der Wachau » créé à Linz en 1951.
2009
Première édition des Journées de la « Linzer Torte »
Cet évènement a lieu à la fin de l’automne : concours de pâtisserie, démonstration de cuissons diverses, présences d’illustres amateurs de la « Linzer Torte » et autres spécialités culinaires locales.
Notes :
1
Ce compositeur de musique légère tendance jazz à été membre du parti nazi dès 1933. Il se fera naturalisé autrichien en 1948.

Parmi les nombreuses personnalités autrichiennes et étrangères qui appréciaient ce met sucré on compte l’archiduc Franz Karl de Habsbourg (1802-1878), père de l’empereur François-Joseph et beau-père de Sissi qui avait pris l’habitude en se rendant dans son élégant palais d’été de Bad Ischl (Salzkammergut) de passer la nuit dans la capitale de la Haute-Autriche et d’emporter avec lui une « Linzer Torte » pour la suite de son voyage. Autant dire que la « Linzer Torte » appartient à l’histoire de l’Autriche.

Deux bonnes adresse à Linz
L’incontournable Konditorei Jindrak confectionne depuis bientôt 100 ans (1929) la « véritable Linzer Torte » à raison d’environ 100 000 exemplaires chaque année ! La maison mère se trouve Herrenstraße 22-24 avec de nombreuses filiales dans la ville.
www.jindrak.at/original-linzer-torte 
La confiserie Isabella/Marc Chocolatier, s’est basée sur l’une des quatre recettes de la bibliothèque de l’abbaye d’Admont pour recréer une « Linzer Torte » parmi les plus savoureuses d’Autriche. On la trouve non seulement dans l’établissement d’une des grandes rues commerçantes de la capitale de Basse-Autriche (Landstrasse) mais aussi sur place à l’abbaye d’Admont.
www.marc-chocolatier.at

Une recette contemporaine 
Ingrédients :
250 grammes de beurre
250 grammes de farine,
125 gramme de sucre glace
150 grammes de noisettes (ou éventuellement amandes) en poudre
2 cuillerées à soupe de chapelure,
1 oeuf, 1 jaune d’oeuf et 1 oeuf pour enduire
Cannelle en poudre, 1 pincée de clou de girofle moulu
1 pincée de sel
zeste citron ou jus de citron
confiture de groseille, amandes effilées.
Préparation :
Disposer la farine en tas sur le plan de travail. Couper le beurre en petits morceaux et les mélanger à la farine en émiettant du bout des doigts. Ajouter le sucre glace, les noisettes et la chapelure, puis l’œuf et le jaune d’œuf. Saupoudrer généreusement de cannelle, d’une pincée de clou de girofle, d’un peu de sel et du zeste ou du jus d’un citron. Travailler l’ensemble rapidement pour obtenir une pâte brisée lisse en formant une boule. La couvrir et la laisser reposer au frais une demi-heure environ.
Préchauffer le four à 180°C et beurrer un moule à manqué pas trop grand.
En appuyant avec le dos des doigts, repartir un peu plus de la moitié de la pâte au fond du moule. Avec le reste, former plusieurs petits boudins (pour les croisillons) ainsi qu’un boudin plus gros pour le bord de la tarte. Couvrir le fond  de la tarte de confiture en laissant un espace libre d’environ 1 cm tout autour pour réaliser le bord. Disposer le gros boudin en rond autour du moule et l’écraser légèrement. Disposer ensuite en treillis les boudins plus fins sur le dessus de la tarte. On peut éventuellement saupoudrer le tout d’amandes effilées.
Recouvrir la pâte avec l’œuf battu puis faire cuire au four pendant 50 à 60 minutes. Sortir du four et laisser refroidir. Recouvrir et laisser reposer une journée.

Selon d’autres recettes la « Linzer Torte » est préparée avec une pâte plus molle. Les croisillons sont alors réalisés à l’aide d’une poche à douille.
Vous pouvez la mettre en valeur en l’accompagnant avec un vin pétillant brut autrichien de la vallée du Danube !

Une recette vegan
Ingrédients :
300 grammes de farine complète ou semi-complète fine
100 grammes de sucre
150  grammes de noisettes en poudre
200 grammes de Margarine végétale
1 cuillère à thé de cannelle
200 grammes de confiture de groseille qui peut être éventuellement remplacée par de la confiture de cerises amères ou de cassis
Crème fraîche végétale
Préparation :
Tamisez la farine sur une plaque à pâtisserie et faites un puits au milieu. Ajouter le sucre, la cannelle et les noisettes. Étaler la margarine en morceaux sur le bord de la farine et pétrir le tout rapidement avec les mains pour former une pâte lisse. Formez une boule, l’enveloppez dans du papier d’aluminium et laissez reposer au réfrigérateur pendant 1 à 2 heures.
Sur un plan de travail fariné, étalez ensuite les trois quarts de la pâte sur une épaisseur d’environ 2 cm et garnissez le fond d’un moule à cake ou à charnière (diamètres de 24 cm) avec celle-ci. Piquez le fond du gâteau plusieurs fois avec une fourchette à petits intervalles et répartir la confiture de groseille uniformément sur le dessus. Façonner le reste de pâte en petits boudins,  disposez-les sur la tarte en les croisant  et recouvrez-les d’une crème chantilly végétale. Faites cuire au four préchauffé à 200°C pendant environ 45-55 minutes.
Au lieu de la confiture de groseille, vous pouvez également utiliser à la place de la confiture de groseille une compote de pommes. la tarte sera alors particulièrement moelleuse.

Et pendant que vous êtes à Linz et séduit par cette ville où passé, présent et futur s’harmonisent ne font pas que s’harmoniser architecturalement, ou peut-être déjà devant la vitrine alléchante d’une Konditorei, partez à la découverte des « Linzer Augen » (« Yeux de Linz »). Une autre spécialité sucrée de la ville, particulièrement appréciée pendant le temps des fêtes de fin d’année avec d’autres biscuits, certes moins connue à l’étranger mais toute aussi délicieuse ! On les achète un peu partout en Autriche.

Linzer Augen, yeux de Linz, autre spécialité fort appréciée des gourmands ! Photo droits réservés

Eric Baude pour Danube-culture, © droits réservés, mis à jour juillet 2024

Sources :
Linzer Torte, Bundesministerium Landwirtschaft, Region und Tourismus,
www.bmlrt.gv.at
www.stiftadmont.at
www.linztourismus.at/fr
www.steyerpioniere.wordpress.com
Josef Hasitschka, Admonter Klosterkochbuch, Barocke Rezepte und Geschichten aus den Stift Admont, Benediktiner Stift Admont, Admont, 1998
Waltraud Faißner, Wie man die Linzer Dortten macht ! (Comment prépare-t-on la tarte de Linz !), 2004
Recettes historiques de la « Linzer Torte » issues de la collection culinaire de la bibliothèque du Musée régional haut-autrichien de Linz.
40 recettes de 1700 à 1848 avec parfois des ingrédients inhabituels comme de l’eau de rose, des morceaux d’orange confite ou des pistaches pour la décoration qui démontrent que la « Linzer Torte » était initialement une pâtisserie à la mode baroque. Les recettes sont accompagnées d’illustrations du XVIIIe et du XIXe siècles.

L’église saint-Martin de Linz, une des plus anciennes églises d’Autriche

   La première mention documentaire concernant cette église date de 799. Au cours des préparatifs de guerre de l’empereur Charlemagne (vers 742-814) contre les Avars installés en Hongrie, le préfet bavarois Gerold le Jeune de Vintzgau (755-799) manifeste son intérêt pour l’église. Il demande alors à l’empereur, marié avec sa soeur Hildegarde (vers 758-783), d’intercéder auprès de l’évêque Waldrich de Passau (?-804), propriétaire du bâtiment, afin qu’il lui confie l’édifice en tant qu’usufruitier. Une charte accédant à cette demande est rédigée le 20 juin 799. La copie la plus ancienne de cette charte, datant du IXe siècle, est conservée aux archives principales de Bavière à Munich.

Intérieur de l’église saint-Martin, photo droits réservés

Au cours des siècles suivants, saint-Martin est transformée et agrandie à plusieurs reprises. Un bâtiment central en forme de trèfle inachevé est incorporé à l’ensemble. Au XVe siècle, elle fait l’objet d’une rénovation dans le style gothique. En 1589, le mur ouest est démoli jusqu’aux fondations puis reconstruit. Un portail ouvert du côté ouest se substitue à l’entrée originelle située sur le côté sud.

Photo © Danube-culture, droits réservés

Le bâtiment sert d’écurie en 1742 pour les troupes françaises et bavaroises occupant Linz à lors de la guerre de succession d’Autriche puis il sert de dépôt militaire de 1810 à 1832 et sera une nouvelle fois rénové en 1841.
Des fouilles concernant la partie centrale carolingienne ont eu lieu en 1978.

Eric Baude pour Danube-culture, © droits réservés, mis à jour juillet 2024

Les portes de Linz, vue depuis le Freinberg, photo Danube-culture © droits réservés

Joseph Fouché, exilé et oublié sur les bords du Danube à Linz

Aucune cour européenne ne l’invite et il n’y a que son vieil « ami » le prince Metternich qui daigne accepter du bout des lèvres qu’il trouve refuge à Prague mais surtout pas à Vienne ni en Basse-Autriche. Tenu à distance par la noblesse bohémienne, espionné, ridiculisé, il sollicite de Metternich l’autorisation de quitter Prague et de se réfugier avec sa jeune et seconde épouse Gabrielle-Ernestine de Castellane (1788-1850) qu’il a épousé en 1818 et sa fille de son précédent mariage, Josephine-Ludmille (1803-1893), en Haute-Autriche. Leur chemin vers Linz les font passer par Carlsbad, la célèbre ville d’eau. Ils traversent le Danube et s’installent confortablement à Linz dans un superbe immeuble, au 27 de la Hauptplatz2 à proximité du fleuve sur les bords duquel Joseph Fouché va marcher, méditant sur son destin, sa solitude, son ennui et son oubli. Peut-être se souvient-il aussi que c’est juste en face de Linz, sur la rive gauche que se sont affrontées le 17 mai 1809 les armées autrichiennes et les troupes napoléoniennes placées sous le commandement du maréchal Bernadotte. Peu lui importe désormais. Il se fait même naturaliser autrichien. En 1819, Metternich autorise Fouché malade à quitter Linz et son climat peu favorable pour s’installer à Trieste. Il meurt à son domicile, le palazzo Vicco, le 26 décembre 1820 assisté de Jérôme Bonaparte qui brûle à sa demande ses papiers, emportant ainsi ses secrets avec lui.
L’écrivain autrichien Stefan Zweig (1881-1942) lui a consacré une biographie. Il décrit brièvement dans celle-ci le contexte de son exil sur les rives du Haut-Danube autrichien.

Linz, gravure d’Adolphe Kunike (1777-1838) d’après Jacob Alt (1789-1972), 1826

« Linz, — on sourit toujours, en Autriche, quand quelqu’un prononce ce nom qui, si involontairement, rive avec Provinz. Une population de petits bourgeois, d’origine rurale, des bateliers, des artisans, pour la plupart de pauvres gens, avec seulement quelques maisons de la vieille noblesse autrichienne. Il n’y a pas, comme à Prague, une grande et glorieuse tradition, pas d’opéra, pas de bibliothèque, pas de théâtre, pas de bals merveilleux donnés par la noblesse, pas de fêtes : une véritable ville de province, sans vie et somnolente, un asile pour vétérans. C’est là que s’établit le vieux Fouché, avec les deux jeunes femmes, presque du même âge, qui sont l’une son épouse et l’autre sa fille. Il loue une superbe maison, la fait magnifiquement mettre en état, au grand plaisir des fournisseurs et des marchands de Linz, qui jusqu’alors n’avaient pas l’habitude d’avoir dans leurs murs de pareils millionnaires.

La résidence de Joseph Fouché au n° 27 de la place principale pendant son exil à Linz, photo Michael Kranewitter, droits réservés

Quelques familles s’efforcent d’entrer en relations avec cet intéressant étranger qui, grâce à son argent, ne manque pas, malgré tout, de distinction ; mais la noblesse préfère, d’une façon très marquée, celle qui est née comtesse de Castellane au fils d’un « épicier », à ce « monsieur Fouché », à qui il a fallu un Napoléon (qui n’est lui-même à ses yeux qu’un aventurier) pour jeter sur ses maigres épaules un manteau ducal. D’autre part, les fonctionnaires ont été secrètement invités par Vienne à le fréquenter aussi peu que possible ; ainsi cet homme qui autrefois était d’une activité passionnée vit complètement isolé et presque en quarantaine.

La comtesse Gabrielle-Ernestine de Castellane (1788-1850), duchesse d’Otrante, épouse de Joseph Fouché 

      Un contemporain le décrit alors, dans ses mémoires, pendant un bal public :« On était frappé par la façon dont la duchesse était fêtée, tandis que Fouché lui-même était négligé. Il était de taille moyenne, fort, sans être épais, et avait un affreux visage. Il paraissait aux lieux où l’on dansait toujours en habit bleu avec boutons d’or, en culottes blanches et en bas blancs. Il portait le grand ordre autrichien de Léopold. D’ordinaire, il se tenait seul, près du poêle, et il regardait danser. Lorsque je considérais celui qui fut autrefois le tout-puissant ministre de l’empire français, qui maintenant était là si isolé, si délaissé et qui paraissait heureux lorsqu’un fonctionnaire quelconque engageait avec lui une conversation ou lui offrait de jouer aux échecs, je pensais involontairement à l’instabilité de toute puissance et de toute grandeur terrestre. »

Stefan Zweig, Joseph Fouché, Bildnis eines politischen Menschen, 1929, traduction en langue française, Grasset, Paris, 1969, traduction d’Alzir Hella (1881-1953) et d’Olivier Bournac

Vue de Linz, gravure colorisée réalisée d’après une image de Perlberg chez C. Rorich et fils, Nuremberg, vers 1850

Stefan Zweig a dédié sa biographie à son ami l’écrivain et médecin autrichien Arthur Schnitzler (1862-1931).
On consultera également la biographie de Joseph Fouché écrite par Louis Madelin (1871-1956) et parue en 1901.
Autres biographies ou ouvrages en français sur Joseph Fouché :
Jean Tulard, Joseph Fouché, Fayard, Paris, 1998
Julien Sapori, L’exil et la mort de Joseph Fouché, Anovi, Paris, 2007
Emmanuel de Waresquiel, Fouché : les silences de la pieuvre, Paris, Tallandier, 2014
Julien Sapori, (dir.), Dictionnaire Fouché, Tours, 2019

Eric Baude, © droits réservés, mis à jour juillet 2024
Notes : 
1 Joseph Fouché, élevé au titre de comte d’empire en 1808 devient duc d’Otrante en 1809. Otrante (Otranto) est une ville de l’Italie du sud, située dans la région des Pouilles au bord du canal du même nom qui sépare l’Italie de l’Albanie.  
2
Place principale à proximité du Danube

La place principale de Linz à l’époque de l’exil de Joseph Fouché, sources : Robert Batty, Rudolf Lehr – Landeschronik Oberösterreich, Verlag Christian Brandstätter, Wien 2008 

Ernst Neweklowsky : la navigation et le flottage sur le Haut-Danube

« L’ingénieur Neweklowsky a passé sa vie à tracer les limites de l’ « Obere Donau », du Danube supérieur, et ― une fois circonscrit ce territoire ― à le passer au crible, à le classifier et à le le cataloguer mètre par mètre dans l’espace et dans le temps, en ce qui concerne la couleur des eaux et les tarifs douaniers, le paysage qu’il offre à la perception immédiate et les siècles qui l’on construit. Comme Flaubert ou Proust, Neweklowsky a consacré toute son existence à son oeuvre, à l’écriture, au livre ; le résultat, c’est un volume en trois tomes de 2 164 pages en tout, y compris les illustrations, qui pèse cinq kilos neuf cents et qui, comme le dit son titre, a, pour sujet non pas le Danube, mais plus modestement La navigation et le flottage sur le Danube supérieur (1952-1964).
Dans la préface, Ernst Neweklowsky précise que son traité concerne les 659 kilomètres compris entre le confluent avec l’Iller1, qui se jette dans le Danube un peu avant Ulm, et Vienne ainsi naturellement que de tous les affluents et sous-affluents de cette zone ; dans l’introduction au tome III, il admet toutefois avec l’impartialité de quelqu’un qui est au service d’une cause suprapersonnelle, que le concept de Danube supérieur — et l’espace correspondant— varie en fonction des points de vue où l’on se place : pour ce qui est de l’aspect strictement géographique cela embrasse les 1100 kilomètres entre la source et la cascade de Gönyü2 ; du point de vie de l’hydrographie les 1010 kilomètres entre la source et le confluent avec le March [Morava] ; et en matière de droit international 2050 kilomètres, jusqu’au Portes-de-Fer, c’est-à-dire jusqu’à l’ancienne frontière avec la Turquie. Les Bavarois, dans une perspective plus étroitement régionale, le font s’arrêter au pont de Ratisbonne, et donnent d’ailleurs ce nom à une des sociétés par actions de leur centrale hydroélectrique — considérant comme « Danube inférieur » la courte section comprise entre Ratisbonne et Passau. Par contre dans la terminologie militaire en vigueur pendant la Première Guerre mondiale, on entendait par « Danube supérieur « , en se référant aux transports de troupes, la partie du cours comprise entre Ratisbonne et Gönyü… »
Claudio Magris, Danube, « Deux mille cent soixante-quatre pages et cinq kilos neuf cents de Danube supérieur »

Né le 26 juillet 1882 à Linz en Haute-Autriche, Ernst Neweklowsky effectue sa scolarité sur place avant d’aller étudier aux universités techniques de Vienne de Graz. C’est dans cette dernière ville qu’il obtient en 1905 son diplôme d’ingénieur. Il entre peu après au service des travaux publics et des chantiers fluviaux de Haute-Autriche où il travaille pendant 40 ans. Il est nommé Directeur de chantier en construction électrique entre 1908 et 1925, puis Chef de district de la construction de Linz de 1925 à 1939. Deux périodes de service militaire interrompent cette activité à une époque d’importants bouleversements dans ces domaines. Il reçoit à Vienne le titre de Docteur ès sciences en 1950 et, le 26 novembre 1954, la Médaille d’or d’ingénieur à Graz.
Orienté vers la nature dès sa jeunesse, Ernst Neweklowsky fonde en 1912 le groupe de Linz des « Wandervogel » (oiseaux migrateurs). À cette époque il est déjà membre du Cercle des Alpes dont il est décoré de l’insigne doré en 1950. Il est également membre actif de nombreuses autres associations, essentiellement liées à l’étude du patrimoine local et au domaine scientifique. De 1926 à 1945, il est membre du comité de l’Oberösterreichische Musealverein (Association d’étude et de protection du patrimoine de Haute-Autriche). Outre la croix de chevalier de l’ordre de l’empereur François-Joseph, il a reçu au cours de sa carrière un grand nombre de distinctions et d’hommages. Il convient de citer à cet égard sa nomination comme membre d’honneur de l’Université d’Innsbruck (1953). En 1956, le gouvernement du Land de Haute-Autriche le nomme Conseiller d’honneur.
Son amour de la nature et son regard aiguisé sur la technique sont à l’origine de ses premières publications sur les problématiques de la construction hydraulique et de la navigation sur la Traun et le Danube (1910). Ce sont les racines de l’œuvre d’une vie au service de quelque chose d’irremplaçable. Ernst Neweklowsky connait les dernières heures de la navigation traditionnelle sur nos fleuves, navigation qui était condamnée à disparaître peu de temps après. C’est à elle qu’il consacre toute son attention et son amour. En tant que collectionneur émérite, il est à même de réunir de nombreux détails grâce à une activité très intense, après sa journée de travail ; il peut ainsi élaborer une œuvre fondamentale sur la navigation et le flottage dans les régions du Danube supérieur.

Flottage du bois sur le Danube

   Dans la bibliographie de l’encyclopédie biographique de Haute-Autriche datant de 1958, ses travaux scientifiques comprennent près de 130 articles dont près des deux tiers sont écrits pendant sa retraite. Au cours des dernières années, ce chiffre a continué à augmenter car E. Neweklowsky a été de plus en plus consulté en tant que spécialiste reconnu aussi bien dans son pays qu’à l’étranger. C’est ainsi qu’il a pu organisé à Linz et à Passau deux expositions majeures sur la navigation fluviale.
En parallèle à son activité de rédaction scientifique, il a en permanence donné des conférences, effectué avec plaisir des visites guidées, réalisé plusieurs série de photographies contribuant à transmettre ses connaissances à un grand nombre de personnes.
C’est incontestablement l’importante thématique de la navigation, thématique abordée dans ses travaux d’un point de vue historique et technique, mais toujours selon une approche humaine, qui l’a fait connaître. Tout événement dans ce domaine n’aurait pu être organisé au cours des dernières années sur le Danube supérieur, non seulement à Passau, Ratisbonne ou Ulm, mais aussi sur la Salzach ou sur d’autres affluents, sans les conseils d’E. Neweklowsky ou du moins sa présence. Neweklowsky s’intéressait aussi de très près à la généalogie. Il a toujours volontiers mis à disposition ses recherches et collections dans ces domaines. Très étroitement lié à ces thèmes depuis de nombreuses années, il s’est encore consacré à l’étude des folklores, publiant des travaux scientifiques de grande valeur.
Ernst Neweklowsky est resté très actif jusqu’à peu de temps avant sa mort, faisant preuve d’une admirable fraîcheur intellectuelle et physique. Sans relâche, il a travaillé jusqu’au dernier moment à l’écriture du 3ème tome de son « encyclopédie » (inachevée) sur la navigation danubienne, le principal objectif de toute sa vie.
Ses nombreux objets de collections, dans la mesure où ils sont liés à la navigation, au flottage du bois dans les régions du Danube supérieur, ont été léguées aux Archives du Land de Haute-Autriche.

Dr. Kurt Holler, Oberösterreichischer Musealverein (Association muséale de Haute-Autriche), traduction et adaptation en français Eric Baude pour Danube-culture, © droits réservés 

Notes :
1 Affluent de la rive droite du Danube d’une longueur de 147 km  qui  conflue avec celui-ci à la hauteur de la ville de Neu-Ulm (Bavière).
2 Avant-port sur le Danube de Györ (km 1794) . L’histoire de la petite ville qui fut la propriété de la puissante abbaye hongroise bénédictine de Pannonhalma et dont la fondation remonte à 996, est intimement liée à la présence du Danube et à la navigation sur le fleuve.

« L’Obere Donau » est pour Neweklowsky un Danube universel, c’est le monde en même temps que sa représentation, c’est le tout qui se contient lui-même. Puisque pour voyager à travers l’existence en toute sécurité, il vaut mieux emporter tout dans ses poches, l’ingénieur, ayant pensé aux exigences pratiques des voyageurs pressés, s’est par ailleurs également employé à condenser ces trois tomes en un petit volume mince et portatif, mais substantiel, de 59 pages. L’ingénieur ordonne, classifie, schématise, subdivise son encyclopédie en chapitres et en paragraphes, pourvoit son texte d’appendices, d’index, d’illustrations, de tableaux géographiques. Né en 1882, cet ingénieur à la passion de la totalité, l’esprit de système des grands philosophes du XIXe siècle ; c’est un épigone, et non des moins dignes, de Hegel ou de Clausewitz, il sait que le monde existe pour être mis en ordre et pour que ses divers détails éparpillés soient reliés par la pensée. Au moment de confier aux imprimeurs cette « exposition globale », il dit qu’il voit là « l’achèvement d’un devoir qui lui a été assigné par le destin…
La thèse de doctorat, puis les trois tomes, constituent le triomphe de Neweklowsky, son accession à la totalité qui n’est réalisée que lorsque le désordre du monde s’ordonne en un livre et s’articule en catégories. Des catégories, Neweklowsky en établit le plus grand nombre possible, il dompte les phénomènes, les met en rang, mais accorde aussi une attention passionnée aux détails éphémères et sensibles, à ce qui est unique et ne se répétera plus. Son traité embrasse même les changements de temps, le vent, les accidents imprévisibles, la liste des malheurs, mortels ou non, arrivés sur ces bords les suicides et les assassinats, les divinités fluviales, les bustes des 132 capitaines d’Ulm ert les vers dédiés à chacun d’eux ; il décrit les têtes des saints protecteurs des ponts, il fait état de la peine prévue pour le cuisinier de bord qui mettrait trop de sel dans la soupe, il dresse la liste des noms des mariniers qui exerçaient également la profession d’aubergistes, ainsi que des endroits où ils l’exerçaient.
En bon amateur de systèmes, il répertorie les variantes phonétiques et orthographiques du mot Zille, qui désigne une embarcation plate ( Zilln, Cillen, Zielen, Zülln, Züllen, Züln, Zullen, Zull, Czullen, Ziln, Zuin), et d’innombrables autres termes techniques ; en tant qu’ingénieur scrupuleux, il note les dimensions des divers types de barques, leur charge utile et leur jauge. L’homme de science universel se fait aussi historiens minutieux, du fait que son appétit de totalité embrasse le monde et son devenir. Il sait que le passé même est encore présent, parce que dans l’univers voyagent et subsistent quelque part, portées par la lumière, les images de tout ce qui a existé. L’encyclopédiste doit faire un portrait complet ; son Danube rend compte simultanément de tous les évènements, c’est le savoir synchronique du grand Tout. C’est ainsi par exemple qu’il nous rapporte qu’en 1552 onze compagnies de soldats du duc Maurice de Saxe sont descendus de Bavière sur soixante-dix radeaux, et qu’à la fin du soècle dernier il y avait encore 130 à 140 pirogues dans la région de Salzbourg, 60 sur le Wolfgangsee, 25 sur l’Attersee, 5 sur l’Altaussersee, 2 ou 3 sur le Grudlsee et sur le Gmundersee… »
Claudio Magris, »Deux mille cent soixante-quatre pages et cinq kilos neuf cents de Danube supérieur » in Danube, collection « L’Arpenteur », Gallimard, Paris, 1986, pp. 73-74

Sources :
MAGRIS, Claudio, « Deux mille cent soixante-quatre pages et cinq kilos neuf cents de Danube supérieur » in Danube, collection « L’Arpenteur », Gallimard, Paris, 1986
NEWEKLOWSKY, Ernst (1882-1963) Die Schiffahrt und Flösserei im Raume der oberen Donau, Oberösterreichischer Landesverlag OLV-Buchverlag, Linz, volume 1, 1952, volume 2, 1954, volume 3, 1964.

Danube-culture, © droits réservés, mis à jour juin 2024

Martin Stachl (1914-1997):  hommage à Ernst Neweklowsky, Auenweg, Passau, photo K. Bepple, droits réservés

Adalbert Stifter (1805-1868)

Adalbert Stifter, Lever de lune (vers 1855)

   Écrivain, pédagogue, poète réaliste et peintre haut-autrichien né en 1805 à Oberplan (Horní Planá, Bohême méridionale), petit village au bord de la Vltava non loin de Český Krumlov (Krumau), à la frontière avec la Haute-Autriche et mort à Linz, grand admirateur de Goethe, Adalbert Stifter est l’une des personnalités culturelles autrichiennes les plus illustres de l’époque post-napoléonienne du Biedermeier (1815-1848). Mais le peintre écrivain ou l’écrivain peintre autrichien, fervent admirateur et observateur de la nature, adepte de la lenteur et du voyage intérieur, ne symbolise en aucune façon cette époque superficielle qui représente le grand triomphe du goût bourgeois et du conservatisme dans les pays de la confédération germanique et en Autriche.

Oberplan (Horní Planá) en Šumava (Forêt de Bohême), village natal d’Adalbert Stifter, vers 1823

A. Stifter perd à l’âge d’à peine douze ans son père qui se tue accidentellement (1817). Traumatisé, son fils tente d’abord de se laisser mourir de faim puis il entreprend l’année suivante, des études à l’abbaye bénédictine de Kremsmünster.

Adalbert Stifter, L’abbaye de Kremsmünster (Haute-Autriche)

Il est admis en 1826, à la Faculté de droit de l’université de Vienne et tombe amoureux de Fanny Greipl, fille d’un commerçant de la bourgeoisie viennoise. Dans ses lettres à Fanny, l’étudiant se dévalorise lui-même comme amant. Son refus de participer à un concours pour obtenir une chaire de physique à l’université de Prague déconcerte ses futurs beaux-parents qui le perçoivent alors comme un homme instable, sans ambition ni avenir. En 1832 a lieu la rencontre avec Amalia Mohaupt, une ancienne prostituée qui devient sa femme en 1837. Sans descendance, le couple adopte plus tard les enfants d’un frère d’Amalia. Une de fille se suicidera en se jetant dans le Danube. Après cet accident tragique, l’écrivain s’enfonce dans une grave dépression.

A. Stifter en 1868, portrait de Bertalan Széchely (1835-1910)

« La peinture m’est plus chère que le monde entier ; il n’y a rien sur la terre qui puisse me saisir plus profondément que la peinture…
Quand l’aube se lève rapidement, je me réveille et je me réjouis déjà de pouvoir à nouveau travailler dans les douces couleurs, et quand le soir arrive, je pense à ce que le jour a favorisé ou à ce qui est resté en arrière et je continue à peindre en pensée … »
Adalbert Stifter, « Nachkommenschaften »

A. Stifter n’arrive toujours pas à choisir entre les vocations de peintre et d’écrivain. Il se décide pourtant en 1840, après de longues hésitations, à devenir écrivain et c’est à travers la littérature et les nouvelles qu’il exprimera son talent d’observateur de la nature et sa passion pour celle-ci.

La parution de sa première nouvelle Der Kondor (1840) à Vienne reçoit un accueil très enthousiaste et le rend célèbre. Pendant huit ans, il arrive à subvenir à ses besoins grâce à la vente de ses livres et des leçons particulières. Stifter est nommé Inspecteur des écoles primaires de Haute-Autriche en 1850, prend sa retraite en 1865 et, gravement malade, met brutalement fin à son existence en se tranchant la gorge le 28 juin 1868.

Le mur du diable, près de Hohenfurt, peinture d'A. Stifter

Le mur du diable, près de Hohenfurt, peinture d’A. Stifter, photo droits réservés

   « Le lendemain, lorsque les premières lueurs de l’aube apparurent dans le ciel, le bateau reprit son chemin vers l’aval. Witiko et Raimund s’étaient à nouveau assis sur le banc au-dessus du toit. Le navire descendit vers les plaines alluviales et poursuivit sa route en cheminant entre elles. Au bout de deux heures, on aperçut sur la rive droite les créneaux et les remparts de la petite ville d’Enns, à l’endroit où l’ancienne cité de Lorch [Lauriacum] avait été édifiée. Le Danube s’était métamorphosé en un grand fleuve car deux rivières la Traun et l’Enns s’y étaient jointes. Et de nouveau deux heures plus tard, on aperçut sur la rive nord le grand château des armées de Wallsee. Le bateau s’engagea alors dans une gorge sombre, comme celle qu’on avait traversée en aval de Passau. Les flots s’étaient rétrécis dans le défilé et s’écoulaient avec une grande rapidité. Après avoir navigué quelque temps dans celui-ci, trois bateliers nous rejoignirent en barque depuis une maison en bois située sur la rive. Ils firent passer le bateau à proximité de Grein. Au-dessous de cette localité, la gorge devint encore plus sauvage. Au-delà de la proue, on vit sur le fleuve une étendue d’eau aussi blanche que de la neige. Les passagers dirent qu’on arrivait aux endroits où le courant et le tourbillon étaient très dangereux pour la navigation. Peu à peu tous se rassemblèrent sur le toit du bateau. Quand on fut à la hauteur de l’étendue d’eau blanche, ils entonnèrent une grande prière. Les bateliers à qui l’on avait confié la conduite du navire s’activaient sans arrêt et le dirigeaient au milieu d’une eau profonde et rapide entre la tour de l’île et l’étendue d’eau blanche et tumultueuse qui écumait sur les écueils.
Le bateau qui descendait rapidement fut guidé vers un rocher derrière lequel on apercevait des tourbillons qui formaient de grands cercles. Les bateliers lui firent longer le bord des cercles. Puis ils se reposèrent, regardèrent vers l’aval et laissèrent le bateau s’avancer dans un fleuve plus large et plus calme. La prière de protection des passagers s’était transformée en louange de remerciements. Quand elle fut terminée, les hommes qui avaient assurés les manoeuvres entre les tourbillons et les récifs reçurent leur salaire puis ils remontèrent sur leur barque et regagnèrent la rive. Une petite embarcation arriva sur laquelle d’autres hommes, tenant un récipient en bois au bout d’une longue perche, demandèrent une offrande pour les pauvres et pour la construction d’une église destinée à la protection des bateaux. Tous les passagers déposèrent une offrande dans le récipient. Puis il vint encore un bateau plus grand qui requit un droit de péage ainsi qu’une redevance sur l’eau. Le péage et la redevance furent acquittés. Le bateau à la proue rouge s’avança ensuite entre les collines boisées vers une contrée ouverte de prairies, de champs, de forêts, d’églises et de châteaux-forts. Le pays était, des deux côtés du fleuve, celui du margraviat d’Autriche : sur la rive droite la ville d’Ybbs. Ensuite et sur la rive gauche une vieille église de couleur marron foncé. Enfin, dressé sur des rochers en saillie, le village de Marbach. C’est là qu’ils amarrèrent le bateau et se reposèrent pendant la nuit… »
Adalbert Stifter, Witiko, roman historique d’un chevalier du XIIe siècle, publié à l’automne 1867 (traduction Eric Baude)

« Si l’on excepte les écrits de Goethe et en particulier les Conversations de Goethe avec Eckermann, le meilleur livre allemand qui existe : que reste-t-il de la littérature en prose allemande qui mérite d’être relu et relu encore ? Les Aphorismes de Lichtenberg, le premier tome de l’Autobiographie de Jung-Stilling, L’été de la Saint-Martin d’Adalbert Stifter et Les Gens de Selwyla de Gottfried Keller, c’est tout pour l’instant. »

Friedrich Nietzsche, « Le Voyageur et son Ombre » in Humain, trop humain. Un livre dédié aux âmes libres., 1879

La maison d’Adalbert Stifter à Linz, à proximité du Danube et du centre ville (rive droite), aujourd’hui siège de l’Institut Adalbert Stifter et d’un musée littéraire consacré à l’écrivain-peintre et à son oeuvre. 

http://www.adalbertstifter.at
http://www.stifterhaus.at

Gerald Stieg, « Stifter (Adalbert) », Dictionnaire du monde germanique, dir. Élisabeth Décultot, Michel Espagne et Jacques Le Rider, Éditions Bayard Paris, 2007

Bibliographie sélective en langue française :
Le Sentier dans la montagne, Éditions Sillage, Paris, 2017
Le cristal de roche, Paris, Éditions Sillage, Paris, 2016
Dans la forêt de Bavière, Premières pierres, Saint-Maurice, 2010
Fleurs des champs, Éditions Circé, Belval, 2008
Les deux soeurs, Éditions Circé, Belval, 2004
L’arrière-saison, récit, Éditions Gallimard, Paris, 2000
Brigitta, Éditions Farrago, Tours, 2000
Descendances : nouvelle, préface de J. Le Rider, Éditions J. Chambon, Nîmes, 1996
Pierres multicolores. 1, Cristal de roche, nouvelles, Éditions J. Chambon, Nîmes, 1995
L’homme sans postérité, Éditions du Seuil, Paris, 1995
Le condor, Éditions Séquences, Rezé, 1994
Le village de la lande, nouvelle, Éditions J. Chambon, Nîmes, 1994
Tourmaline : pierres multicolores II, nouvelles, Éditions J. Chambon, Nîmes, 1990
Les cartons de mon arrière-grand-père, Éditions J. Chambon, Nîmes, 1989
Le château des fous, Éditions Aubier (édition bilingue), Paris, 1979

« Gorgé des rumeurs et des flots de sève montante de leur jeune vie à peine commencée, les jeunes gens escaladaient la pente entre les arbres, parmi les chants des rossignols. Tout autour d’eux se déployait un paysage resplendissant où couraient les nuages. Dans la plaine, en contrebas, on pouvait apercevoir les tours et la masse des demeures d’une grande ville. »
Adalbert Stifter, L’homme sans postérité, traduction de Georges-Arthur Goldschmidt, Éditions du Seuil, Paris, [1995 ?], c. 1978

Adalbert Stifter, le Marais Strasser près de Linz, huile sur toile, vers 1850

Eric Baude pour Danube-culture, © mis à jour mai 2024  

De Linz à Vienne par le Danube en 1860 avec le guide Joanne

Beda Weinmann (1818-1888), panorama de Linz, vers 1860

25 milles (40, 234 km !)
Bateaux à vapeur tous les jours ; départ à 7 heures du matin ; voyage en 9 à 10 h. pour 8 fl. et 5 fl. 20 kr. — De Vienne à Linz remontée en 24 ou 30 heures pour 6 .fl et 4 fl.

Kaspar (Kasparus) Karsten (1810-1896), vue de Linz avec le Danube, huile sur toile

   En aval de Linz, le Danube se divise en un grand nombres de bras formant des îles verdoyantes. On voit sur la rive g. le château ruiné de Steyreregg, pris en 1626 par les paysans ; le village possède une belle église dans l’ancien style allemand. — En face sur la rive droite, la Traun se jette dans le Danube, près de San Peter in der Au et Zizelau.
   Gauche, Pulgarn, village de 200 habitants, situé sur le Reichenbach et dominé par un vieux château.
   Droite, Asten. À une heure au Sud, se trouve le monastère de Saint Florian. Le château de Spielberg s’élève sur une île près de la rive droite.
   Gauche, San Georgen, sur la Gusen, à 30 mn du fleuve ; Frankenberg et Gusen ; puis Mauttausen, bourg de 1160 habitants, presque en face de l’embouchure de l’Enns. On y remarque le château de Pragstein, l’église de Saint-Nicolas ; Niedersebing, village au-dessous duquel l’Augst ou Aigst se jette dans le Danube. Naarn, avec une chapelle byzantine, un château et une église de vieux style allemand. 
  
Droite, Erla, ancien couvent devenu propriété particulière ; Niederwallsee, un des plus beaux châteaux du Danube, bâti sur un rocher escarpé et entouré d’un beau jardin ; on y jouit d’une belle vue sur le fleuve et sur la chaîne des Alpes ; Ardacker, village de 400 habitants au-dessous duquel le Danube entre dans un étroit défilé.
   Gauche, Clam, village de 200 habitants, dont le château fût vainement assiégé en 1626 par les Hussites, en 1487 par Matthias Corvin ; il renferme une collection de vieilles armures ;  — Grein, qu’on voit sur la rive gauche, après un détour vers le Nord, est une des plus pauvres villes de l’Autriche. Son château de Greinburg, bâti en 1493, appartient actuellement au duc de Saxe-Coburg.
    Le lit du fleuve se rétrécit, et on franchit le premier rapide, nommé Greiner Schwall ; on passe le Strudel ou tourbillon, jadis redoutable aux bateaux, avant qu’on eut fait sauter les rochers qui traversaient le fleuve d’une rive à l’autre. On remarque la vielle tour de Woerthschloss, sur l’île de Woerth, et sur la rive gauche les ruines du château de Werfenstein, dont les seigneurs exerçaient la profession de voleurs de grand chemin. On voit se dresser au milieu du fleuve le Haustein, bloc de rochers couronné d’une vieille tour et près duquel se trouvait jadis le Wirbel, autre tourbillon redouté des bateliers du Danube.
   Gauche, Sarblingstein ou Sarminstein, village bâti en amphithéâtre et dominé par une tour circulaire. Près de là, le Sarming (Sarmingbach, ) descend d’un ravin par de nombreuses cascades et se jette dans le Danube. On voit ensuite l’embouchure de l’Imper qui sert de limite aux provinces de la Haute et de la Basse-Autriche. — Donaudorf, village et petit château de la rive droite.
   Gauche, Boesenbeug (mauvais coude) ou Persenbeug, est un château qui date de plus de huit siècles et qui couronne un rocher de granit. Le bâtiment actuel, qui date de 1617, fut souvent habité par l’empereur François, qui l’acheta en 1800. Le village situé à sa base, possède un vaste chantier pour la construction des bateaux du Danube.
   Droite, Ips, pons Isidis ou Gessodunum, est une ville ancienne de 1000 habitants, près de l’embouchure de l’Ips ou Isis. — Sausenstein a gardé les ruines d’une abbaye de l’ordre de Cîteaux, fondée en 1336, et incendiée en 1809 par les Français. — Sur la rive gauche, Marbach, village de 200 habitants, au pied du Taferlberg, que couronne l’église de Maria Taferl (Marie de la petite table), bâtie en 1661 et visitée par des pèlerins dont le nombre annuel est de 50 000 à 120 000. — Plus loin L’Erlaf se jette dans le Danube ; en face de Klein Pechlarn, rive gauche, Gross Pechlarn, l’Arelape des Romains.
Moelk ou Melk ; (hôtels Lamm, Ochs), bourg de 1200 habitants, sur la rive droite du Danube, près de l’embouchure du Moelk, possède une église paroissiale de 1481, et une abbaye de Bénédictins, située sur un rocher haut de 60 mètres, fondée en 984, rebâtie en 1707 ; c’est l’une des plus belles et des plus riches de l’Autriche. — L’église à l’intérieur est décorée de statues colossales , à l’extérieur de fresques de Rottmayr. Les caveaux renferment les tombeaux des princes de la famille de Babenberg et ceux de saint Coloman et saint Gotthalm. — On remarque dans l’abbaye : la maison de l’abbé et sa chapelle particulière : l’appartement de l’empereur ; la bibliothèque de 30 000 vol. et 2000 incunables ou manusc. ; les collections de médailles et d’histoire naturelle, la galerie ; enfin les caves assez vastes pour qu’on puisse y circuler en voiture. — On aperçoit ensuite (riv. gauche) Emmersdorf , village de 400 hab., dominé par un château en ruines et situé en face de l’embouchure de la Bielach (Pielach) : Schoenhubel (Schoenbuhel) (rive dr.), château du comte Beroldingen, puis Aggstein (rive dr.), château en ruines, perché sur un rocher conique qui domine Klein Aggsbach et qui fut habité par un seigneur chef de brigands, Schreckenwald, la terreur des bateliers au XIIIe siècle. Pour visiter ce château, il faut prendre un guide et se munir de la clef à l’auberge située au-dessous.
G[auche]. Au-delà de Schwallenbach on remarque la Teufelsmauer, muraille du diable, arrête rocheuse semblable à un mur en ruine et qui renvoie un très bel écho. — Spitz, bourg de  1000 habitants : — San Michäel, village dont la vieille église fut un jour enfouie dans la neige jusque’à la toiture ; — Weissenkirchen, bourg de 1000 habitants près duquel furent les premières vignes des rives du Danube ; — Dürrenstein ou Tyrnstein, village de 450 habitants qui n’a d’intéressant que le beau tabernacle de son église, et les ruines d’un couvent. Le château, démantelé en 1645 par les Suédois, probablement celui où Richard-Coeur-de-Lion fut retenu prisonnier pendant 15 mois, de 1192 à 1193, est un des plus anciens de l’Autriche. — Stein (hot. Elephant), ville de 2000 habitants située sur la rive g., a été réunie en 1463 par un pont  de bois à Mautern, ville de 700 hab., sur la rive dr. On remarque à Stein la vieille église paroissiale, l’hôtel de ville orné de fresques ainsi que certaines maisons particulières, les ruines du château détruit en 1486 par Mathias Corvin, et les vestiges d’une ancienne forteresse : un monument y a été élevé à la mémoire du feld-maréchal lieutenant Schmidt. — Mautern, (le Mutinum des Romains, la Mutara des Nibelungen), où Mathias Corvin défit en 1484 l’empereur Frédéric III, est également dominé par un château. Une promenade de 15 à 20 mn relie Stein à
Krems (hôt. Rose, Goldene Hirsch), ville de 7000 hab., une des plus anciennes de la Basse-Autriche, situé à l’embouchure de la Krems.

Krems en 1860, gravure d’après un dessin de  J. Alt

   Elle produit une moutarde renommée, de la poudre excellente, et fait le commerce des vins. L’église paroissiale de Saint-Vit et celle de l’Hôpital mérite une visite. — La vallée de Krems renferme la  belle et riche abbaye de Bénédictins de Goettweih (Göttweig), à 230 mèt. d’altitude. On y voit de belles collections d’antiques, de gravures, d’objets d’histoire naturelle et une bibliothèque de 40 000 vol., de 1200 incunables et de 700 man. À partir de Krems, les bords du Danube sont presque plats et insignifiants.
Dr[oite]. Tulln, Comagena, jadis station d’une des trois flottilles romaines, ville de 1850 hab., possède une chapelle romane des Trois-Rois, aujourd’hui’hui transformée en magasin à sel : c’est dans la plaine voisine que se réunit l’armée polonaise (commandée par Jean Sobieski), qui alla délivrer Vienne de l’invasion turque. En face de Zeiselmauer, patrie de Saint-Florian, on aperçoit les Tours de Stockerau. — Greifenstein, ancien château, appartient actuellement au prince Liechtenstein. — Klosterneuburg, ville de 3700 hab., possède une riche abbaye de bénédictins. Le bâtiment actuel date de 1730. À g. on laisse Kornneuburg, station du chemin de Stockerau.
   Nussdorf, petit v. situé à 1h de Vienne. On y débarque ordinairement et on y donne son passe-port pour le recevoir seulement au bureau de la compagnie des bateaux à vapeur de Vienne (la compagnie  transporte gratuitement à Vienne les bagages que le voyageur ne prend pas avec lui.) Des omnibus, des stellwagen et des fiacres attendent au débarcadère. On fait son prix d’avance pour les fiacres ;  on paie de fl. 6 kr. à 2 fl. 30 kr.
96 à 100 h de Donauwoerth, Vienne.

Notes :
1 les concurrents les plus redoutables pour les Guides-Joanne furent ceux de l’Allemand Karl Baedeker (1801-1859) qui aura pour politique de publier la plupart de ses guides en trois langues : allemand, français (dès 1846) et anglais (à partir de 1861). La bibliographie d’Alex Hinrichsen ne recense, pour la période 1832-1944, pas moins de 477 éditions en allemand, 226 éditions en français, et 266 éditions en anglais.

Eric Baude pour Danube-culture, © droits réservés, août 2023

Ports de plaisance, emplacements d’amarrage, barrages-écluses et autres informations pour naviguer sur le Danube autrichien (I) : du Km 2215 (rive gauche) au Km 2058, 5 (Ybbs/Donau)

Km 2215
Rive gauche
Château-fort moyen-âgeux de Krämpelstein (propriété privée, pas de visite).  Ce château-fort a appartenu autrefois aux évêques de Passau qui exigeaient un droit de passage pour les bateaux. Il a été dans les années soixante, le siège du club de bateaux à moteur de Krämpelstein.

Km 2213
Rive droite
Emplacement d’amarrage (20 m) de la communauté de communes d’Esternberg

Km 2208, 4
Rive droite
Port de plaisance de Kasten
Longueur maximum : 15 m, mouillage : 1, 5 m
Informations et contacts :
Tobias Ebner
Tél. portable : 0049/172 8588548
Johann Pilsl
Tél. : 0043/7714/81 21
Herbert Bauer
Tél. : 0043/7714/80 20

Km 2203, 3
Barrage-écluse de Jochenstein
Contacts :
Tél. : 0049/8591/ 91 19 81 11
Canal 22
Toute proche de l’écluse-barrage de Jochenstein, sur la rive gauche allemande, se tient la « Haus am Strom » (« La Maison au bord du fleuve ») : expositions sur le thème de l’eau et de l’environnement.
www.hausamstrom.de
Ne pas manquer d’admirer au passage la jolie sirène de Jochenstein (rive droite)

Km 2200, 6
Rive droite
Amarrage autorisé et gratuit au ponton ( longueur : 200 m) de la commune d’Engelhartszell
Cafés, restaurants, station-service dans le village.
Parc pédagogique d’attraction «Donauwelt» (ouvert de mai à septembre)
www.donau-welt.at
Belle abbaye cistercienne trappiste d’Engelhartszell, seule abbaye cistercienne trappiste d’Autriche
www.stift-engelszell.at

Km 2197, 6
Rive gauche
Port de plaisance de Schattental
Longueur maximale : 8 m, mouillage : 3 m, eau et électricité au ponton, douches à l’auberge « Luger ». Excellente cuisine !
☛ Le tirant d’eau à l’entrée du port peut être réduit à 1 m en fonction de l’ensablement.
Contacts :
Gasthof Luger
Tel. : 0043/7285507
office@gasthof-luger.at
www.gasthof-luger.at

Km 2197
Rive gauche
Château fortifié de Rannariedl (XIIIème siècle)

Km 2194, 8
Rive gauche
Commune de Niederanna
Emplacement d’amarrage de l’auberge «Draxler»
Contacts :
Auberge «Draxler»
Tél. : 0043/728 55/11
Les fameuses embarcations en bois danubiennes à rames et à moteur les « Zille »,  sont encore fabriquées dans ce village par deux artisans.
Rudolf Königsdorfer
Tel : 0043/7285 508
www.zille.at
Anton Witt
Tel. : 0043 7285 63 90

Km 2188, 5
Rive gauche
Ruines du château-fort de Haichenbach
Ancienne forteresse romaine

Km 2187
Rive droite
Port de plaisance de Schlögen
Contacts :
Tél. 0043/7279/87 22 ou 0043/7279/82 41

www.freizeitanlage-schloegen.at
Un endroit magique où il faut impérativement faire halte. Extraordinaire boucle de Schlögen, un des plus beaux panoramas du parcours du fleuve ! Le Danube effectue ici une rotation de 180°.
Beaucoup de monde à la belle saison sur l’eau et sur les rives.
Il est possible de voir des castors au bord du fleuve en soirée.

Km 2182, 5
Rive gauche
Emplacement d’amarrage des auberges «Reisinger» et «Zum Heiligen Nikolaus».
Il n’est pas possible d’y passer la nuit.

Km 2178
Rive gauche
Port de plaisance d’Obermühl au confluent de la Petite Mühl et du Danube
Contacts :
Gasthof « Gierlinger »
Tél. 0043/7286/72 13
www.gasthof-gierlinger.at

Gasthof « Aumüller »
Tél. 0043/7286/72 16

Km 2170,5
Rive gauche
Emplacement d’amarrage de l’auberge « In der Exlau »
☛ Mouillage réduit au ponton (0,5 m)
Contacts:
Famille Arnezeder
Tél. 0043/7232/29 07
www.gasthof-exlau.com

Km 2168, 2
Rive gauche
Port de plaisance d’Untermühl au confluent de la Grande Mühl avec le Danube. Bel emplacement !
Contacts :
Rudolf Helm, capitaine du port
Tél. 0043/7232/21 69
Port.
0043/664/344 53 10
www.sportboothafen.at
Château de Neuhaus (XIIIème siècle)

Km 2162, 7
Écluse d’Aschach
Contacts :
Canal 18
Tél. 0043/504/321 66 10

Km 2160
Rive gauche
Emplacement d’amarrage de la commune d’Aschach.
Il est préférable de passer la nuit au port de plaisance de Kachlet en aval.

Km 2159, 5
Rive gauche
Port de plaisance du club de bateaux à moteur de Kachlet. Bien équipé.
Contacts :
Tél. 0043/664/ 36 85

www.myc-kachlet.at

Km 2157
Rive droite
Port de plaisance de Branstatt
Longueur maximale 8 m
Contacts :
Auberge «Dieplinger»
Tél. 0043/664/131 57 86
www.langmayr.at
Distillerie sur place !

Km 2147
Écluse d’Ottensheim
Pontons d’attente pour les bateaux de plaisance en amont et aval de l’écluse
Canal 20
Contacts :
Tél. 0043/504/321 66 20

Km 2145, 5
Rive gauche
Ancien bras d’Altarm
Possibilité d’ancrer à l’entrée de l’ancien bras.
Navigation au moteur interdite au-delà.

Km 2144
Rive gauche
Emplacement d’amarrage d’Ottensheim
Contacts :
WGD Tourismus
Tél. 0043/732/ 727 78 11
www.oberoesterreich.at/ottensheim

☛ Attention au bac Ottensheim-Wilhering
Château d’Ottensheim (XIIIème siècle)
Magnifique cloître cirstercien de Wilhering (rive droite)

Km 2135
Rive droite
Linz, capitale de la Haute-Autriche, 200 000 habitants
Une ville culturelle et entreprenante très agréable à découvrir. Capitale européenne de la culture en 2009.
À ne pas manquer  : Ars Electronica (Musée du futur), le Lentos Museum, deux institutions au bord du  Danube,  la pimpante vieille ville et bien la véritable Tarte de Linz !
La ville de Linz classée UNESCO City of Media Arts
En 2016, la capitale européenne de la culture invite ses visiteurs à explorer une cité contemporaine, tournée vers l’avenir. L’objectif du syndicat d’initiative de Linz est de permettre de découvrir par les cinq sens la ville admise dans le Réseau des villes créa-tives de l’UNESCO.
Office du Tourisme de Linz :
Tél. 00/43/732 70 70 20 09
www.linz.at
linz-panorama.webfly.at

Km 2134, 6
Linz
Emplacement d’amarrage au bateau-restaurant «Li+do»
Contacts :
schiffART – li+do
schiffART – Kapitän Schaurecker
Tel. 0043/664/15 36 164
steuerfrau@liplusdo.at

La DSS (Station de bateaux de Linz) qui gère l’embarcadère des bateaux de croisières autorise les bateaux de plaisance à s’amarrer au ponton n°1  (km 2134, 5 rive droite).
Contacts :
Tél. 0043/7433/25 90 82

Km 2131, 8
Rive droite
Port de plaisance d’hiver de Linz
Le MYCN (Club de bateaux à moteur Nibelungen) accueille volontiers les visiteurs. Un club très actif.
Contacts :
Niclas Jancso

Tél. 0043/664 61 51 407
nicolas.jancso@outlook.com
ou
Hans Fritz Krempl
Tél. 0043/699/88 79 38 51
www.mycn.at

Km 2130
Rive droite
Port de plaisance « Steinernes Brückl »
Le port est géré par le club de bateaux à moteur Nibelungen (MYCN) et le club ASKÖ de Linz
Contacts :
Robert Robert Mayer (MYCN)
Tél. port. 0043/664/80 7
8 27 74
r.mayer@mycn.at
www.mycn.at

ASKÖ
Tél. 0043/732/794 590
www.askoe-wsk-linz-at
office@askoe-wsk-linz.at

Km 2124, 6
Rive droite
Confluent de la Traun avec le Danube

Km 2124
Rive gauche
Port de plaisance de Steyregg
Club de bateaux à moteur de Steyregg
Contacts :
Ernst Trahl (président du club)
Tél. port. 0043/676/88 60 02 07
www.mycs.at
info@mycs.at
Lac de baignade à proximité

Km 2119, 7
Écluse d’Abwinden-Asten
Contacts :
Canal 22
Tél. 0043/504/321 66 30

Km 2118, 5
Rive gauche
Ancien bras d’Abwinden
Possibilité d’ancrer en aval de l’écluse dans l’ancien bras d’Abwinden mais il faut sonder régulièrement la profondeur.

Km 2113, 5
Rive  droite
Bras secondaire d’Enhagen
Possibilité d’ancrer dans le bras secondaire. Il faut toutefois sonder régulièrement la profondeur avant de s’avancer dans celui-ci.

Km 2112
Mauthausen
La commune de Mauthausen autorise l’amarrage d’un ou deux bateaux de plaisance au ponton. Utiliser à cet effet les installations de couleur grise.
Le Club de bateaux à moteur de Mauthausen se trouve au port de plaisance d’Au (Km  2107,1).
Le mémorial du camp du concentration de Mauthausen (3 km du ponton).

Km 2111, 8
Confluent de l’Enns (320 km) avec le Danube
Port industriel d’Enns

Km 2108, 8
Rive droite
Canal de l’Enns
Après le confluent de l’Enns avec le Danube on peut s’amarrer avec un petit bateau sur la rive droite du Canal de l’Enns.
Contacts :
Josef Gatterbauer, commune de St. Pantaleon-Erla
Tél. port. 0043/676/603 90 48

Km 2108, 5
Rive gauche
Confluent de l’Aist avec le Danube

Km 2107, 1
Rive gauche
Port de plaisance d’Au/Danube
Contacts :
Tél. port. 0043/699 10 86 55 31
ch_schuhmayer(@)hotmail.com

www.myc-au.at
Club de bateaux à moteur de Mauthausen
M. Poppe, responsable
Tél. port. 0043/676/627 59 65
Stefan Kreuzer
Tél. port. 0043/676/362 83 41
Km 2095, 6

Écluse de Wallsee 
Contacts :
Tél. 0043/504/321 66 40
Canal 18

Km 2093, 5
Rive droite
Emplacement d’amarrage dans le bras mort de Wallsee, rive droite (Club de bateaux à moteur et de ski nautique de Wallsee) et rive gauche (Steyrer Yachtclub)
Contacts :
Club de bateaux à moteur de Wallsee
M. Mühlbacher, capitaine du port
Tél. port. 0043/664/ 351 92 62

Steyrer Yachtclub
Tél. port. 0043/664/115 28 94

Alexander Bruha, responsable du ponton
Tél. port. 0043/660 354 27 27

www.1syc.at
E-Mail: office@1syc.at

Km 2084, 3
Rive droite
Marina Raderbauer
Longueur maximale pour les bateaux de plaisance des visiteurs : 13, 50 m
Contacts :
Firma Alois Raderbauer
Tél. 00/43/676 38 37 688
marina@raderbauer.at
www.raderbauer.at
Château de Dornbach (fin XIXème), rive gauche. En aval d’Ardagger commence la région de la Strudengau, connue autrefois pour ses tourbillons, sa navigation délicate et ses légendes. De nombreuses ruines de châteaux-forts dominent les rives du Danube jusqu’à Ybbs.

Km 2082, 7
Rive droite
Port de plaisance d’Ardagger
Contacts :
Sigi Wagner
Tél. port. 0043/664/413 79 31

www.steckerlfisch-Ardagger.at

Km 2080, 9
Rive droite
Signal de Tiefenbach.
Le signal (feux) indique le chenal à suivre en aval à hauteur de l’île de Wörth (Km 2077,3). En général les avalant empruntent le chenal sud (Hössgang) et les montant le chenal nord (Strudenkanal). Le signal pour les montant se trouve à la hauteur de la commune de St. Nikola (km 2074, 8).
☛ Pour les bateaux sortant du port de plaisance de Grein (Km 2079, 4, rive gauche), il est nécessaire d’appeler le bureau de surveillance pour connaître le chenal à emprunter.
Contacts :
Tél. 0043/7268/320
ou 0043/7268/321 

Km 2079, 4
Rive gauche
Port de plaisance de Grein.
Faire attention aux bancs de sable près de la rive à l’entrée du port, à proximité de l’arrivée du petit torrent dans le Danube.
Possibilité de s’amarrer aux pontons du Verein Turul.
Contacts :
Robert Koller
Tél. port. 0043/664/211 90 13 

www.turul.at
Ne pas manquer de visiter le Musée de la Navigation sur le Danube (château), le théâtre Roccoco datant de 1791 (le plus ancien théâtre d’Autriche) et du côté de la gourmandise l’excellente Konditorei Schörgi.

P1050981

Port de plaisance de Grein/Donau (photo droits réservés)

Km 2079, 2
Rive gauche
Station de bateaux de croisière du Danube de Grein.
Les bateaux de plaisance doivent s’amarrer au ponton n°3.
Contacts :
Tél. 0043/7433/25 90 82

Km 2076
Rive gauche
Château-fort de Werfenstein

Km 2069, 4
Rive gauche
Emplacement d’amarrage de l’auberge « Ziseritsch » (Neustadtl/Donau)
Au pied des ruines du château-fort de Freyenstein
Contacts :
Tél. 0043/7471 2272
gasthofziseritsch@gmx.at

Km 2067, 6
Rive droite
Willersbach
Emplacement d’amarrage de la collectivité de Willersbach-Neustadtl

Km 2065, 7
Rive gauche
Confluent de L’Ysper avec le Danube

Km 2060, 4
Barrage-écluse d’Ybbs-Persenbeug
Contacts :
canal 20
Tél. 0043/504/321 66 50

Barrage d'Ybbs:Donau- Perseuburg_écluses

Portes d’entrée aval de l’écluse du barrage d’Ybbs-Persenbeug (photo droits réservés)

Km 2058, 5
Rive gauche
Emplacement d’amarrage de la commune d’Ybbs/Donau. L’emplacement sert également de ponton d’attente pour le passage de l’écluse. Il n’est pas possible d’y rester pour la nuit à cause du fort courant en aval du barrage.
Le centre historique de la petite ville d’Ybbs a été entièrement  rénové. Le grand batelier Matthias Feldmüller, surnommé « l’amiral du Danube », y avait sa maison. Elle se visite. Amusant musée de la bicyclette.
En aval d’Ybbs/Donau commence la région de la Nibelungengau dans laquelle se situe plusieurs épisodes de la Chanson des Nibelungen.

 

 

 

 

 

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