Linz, capitale de la Haute-Autriche, ville des métamorphoses !

   « Les façades décorées, peintes en marron foncé, en vert, en violet, en blanc cassé et bleu s’y dressaient de toutes parts. Des médaillons en relief les ornaient et des volutes de stuc et de pierre les animaient. Des oriels1 sur le pan s’avançaient au premier étage et des échauguettes arrondissaient les angles, les uns et les autres s’élevant jusqu’au toit où ils rétrécissaient puis retrouvaient leur taille première pour s’achever en exubérantes coupoles ou en globes ; des pots à feu2, des pinacles, des obélisques escortaient ces bulbes décoratifs sur la ligne d’horizon de la ville. Au niveau du sol, des colonnes torsadées commémoratives se dressaient sur les dalles des places, couronnées de disques rayonnant des piques d’or, sortes d’ostensoirs post-tridentins suspendus dans l’air. La sévère forteresse exceptée, campée sur son rocher, la cité était toute vouée au plaisir et à la splendeur. On respirait en tout lieu, la beauté, l’espace et la grandeur. »
Patrick Leigh Fermor, Dans la nuit et le vent, À pied de Londres à Constantinople, « Le Danube, ô saisons, ô châteaux », Éditions Nevicata, Bruxelles, 2016, traduction de Guillaume Villeneuve

Notes :
1 Fenêtre en encorbellement faisant saillie sur un mur de façade
2 Les pots à feu en zinc ou cuivre sont des ornements de toiture composés d’un vase décoratif surmonté dans la plupart des cas par une flamme. Le vase peut être de différentes formes : vase poire, vase effilé, vase en forme de coupe ou vasque. Ces ornements de toiture ont en général une taille supérieure à un mètre. 

Linz transformée ou ville-métamorphose

   Hier, et encore aujourd’hui, grande et dynamique cité commerciale et industrielle, Linz a  trouvé un judicieux compromis qui lui permet de conjuguer harmonieusement des objectifs parfois contradictoires (développement industriel, protection du patrimoine et de l’environnement) et d’accueillir des touristes de plus en plus nombreux.

Sans doute cette politique dynamique et consensuelle, alliée à des ambitions culturelles légitimes ont-t-elles aussi permis à Linz d’être élue dès 2009 « Capitale européenne de la culture ». Mais Linz ne s’est pas arrêtée à 2009. L’Opéra-théâtre, réalisé par l’architecte britannique Terry Pawson, connu pour son goût du minimalisme, et inauguré en avril 2013, en est une des preuves les plus convaincantes.

La capitale de la Haute-Autriche, déjà bien desservie par des infrastructures routières est désormais en train, grâce aux récents aménagements ferroviaires dans la plaine de Tulln, à 1h 30 de Vienne.

Grande ville culturelle contemporaine danubienne, membre du Réseau des villes créatives de l’UNESCO, elle se situe de plus à la croisée des magnifiques paysages danubiens de la Strudengau et de la Nibelungengau.

Linz a toujours su entretenir tout au long de son histoire, des liens étroits avec le fleuve, la construction navale et la navigation sur le Danube. Linz fut reliée à Vienne par le « Maria-Anna » un bateau à vapeur de la D.D.S.G.  dès 1837. Son port est l’un des plus modernes et des plus actifs du Haut-Danube et le plus important d’Autriche en terme de trafic de marchandises. C’est toutefois l’invention du chemin de fer qui entraîna l’impressionnant développement industriel de cette cité. La première ligne d’Autriche, inaugurée dès 1832, reliait la cité à sa soeur slave de Bohême du Sud, České Budějovice (Budweis) par un chemin de fer dont les wagons étaient tirés par des chevaux.

Le Maria-Anna, un des premiers vapeurs de la D.D.S.G. assurent les liaisons régulières entre Vienne et Linz dès 1837

Pour avoir aujourd’hui un panorama général de la ville il faut se rendre sur la rive gauche, au sommet du Pöstlingerberg (rive gauche). De cet endroit on jouit de la plus belle vue sur Linz, sur son patrimoine architectural et la vallée du Danube en aval avec son impressionnante zone industrielle (rive droite).

La colline du Pöstlingerberg (539 m) est aussi un lieu de pèlerinage, photo © Danube-culture droits réservés

Un train à crémaillère (Pöstlingerbahn) permet d’y accéder facilement depuis la place principale (Hauptlatz).

Le « Pöstlingerbahn » photo © Danube-culture, droits réservés

Un peu d’histoire…

Vue de Linz au XVIIe siècle depuis la rive gauche, gravure de M. Merian, 1650

Linz doit tout d’abord étymologiquement son nom à « son fleuve », à son changement de direction et à la langue celte. Le mot celte « Lentos » (courbé) a donné son nom à la citadelle romaine de Lentia établie à un carrefour stratégique permettant de contrôler à la fois d’importants territoires danubiens et la Route du sel. Même si elle ne fut que brièvement ville impériale sous le règne de Frédéric III de Habsbourg (1415-1493), la cité n’en continua pas moins à prospérer.

la Place principale en 1821, sources : Robert Batty,Rudolf Lehr – Landeschronik Oberösterreich, Wien, Verlag Christian Brandstätter, 2008 

De nombreux lieux et monuments comme la Place principale au centre ville, le château Renaissance, de style maniériste qui abrite désormais le Musée régional de Haute-Autriche, l’ancienne cathédrale Saint-Ignace, les églises gothiques et baroques, l’impressionnante nouvelle cathédrale (1924), l’usine de tabac (1929-1935) et d’autres édifices témoignent de la vitalité de la ville à travers l’histoire.

La nouvelle cathédrale néo-gothique dédiée à l’Immaculée Conception, fut construite entre 1862 et 1924. Sa flèche mesure 134 m de haut, photo © Danube-culture, droits réservés

La guerre civile de 1934 et la sombre période du national-socialisme ont aussi laissé leur empreinte dans la ville tel le pont des Nibelungen. Adolf Hitler, né en Haute-Autriche à Braunau/Inn passa son adolescence dans les environs de Linz et envisagea de concrétiser dans cette cité ses rêves paranoïaques.

Projet architectural du régime nazi pour les bords du Danube à Linz

Linz devint alors la cible privilégiée des mesures nazies de planification urbaine et économique mais heureusement, seul le pont des Nibelungen vit le jour. En 1945, ce pont séparant la rive droite occupée par les forces américaines et la rive gauche du Danube, tenue par l’armée russe, faisait dire aux habitants, non dépourvus d’humour, que « c’est le pont le plus long du monde de l’après guerre. Il commence à Washington et finit en Sibérie ! »

La Place principale et sa colonne protectrice de la Sainte Trinité érigée en 1723 contre les épidémies de peste et autres calamités, photo © Danube-culture, droits réservés

Au milieu de la place principale trône la haute et blanche colonne de la Sainte-Trinité (1723), flanquée d’un Jupiter et d’un Neptune. Elle rappelle les miracles qui ont permis aux habitants d’échapper au feu, à la peste et aux envahisseurs ottomans. Cette belle place aux dimensions impressionnantes a longtemps servi de champ de foire et de marché. Joseph Fouché (1759-1820) a habité avec sa femme et sa fille  au n° 27, pendant son exil en Autriche (1816-1820). Ministre de la police du Directoire à l’Empire, ayant voté la condamnation à mort de Louis XVI, il avait du quitter la France en 1816. Exilé d’abord à Prague, Fouché demandera au prince de Metternich la permission de s’installer à Linz. Il mourra peu de temps après avoir été autorisé à déménager à Trieste en 1820. Au n° 34 de la même place logeait le compositeur Ludwig van Beethoven (1770-1827) lors de ses visites à son frère, pharmacien de son état. Le musicien y composa sa huitième symphonie. Un peu plus loin dans une ruelle longeant l’Hôtel-de-ville (Rathausgasse), se trouve la maison qui abrita le célèbre astronome, mathématicien et théologien allemand Johannes Kepler (1571-1630). Mozart y séjourne en 1783 et compose, à l’âge de 27 ans, une symphonie dite « de Linz » en ut majeur n°36, KV 425.

Johannes Kepler (1571-1630)

L’ancienne cathédrale, autrefois église des Jésuites, conserve intact l’orgue aménagé par le musicien et compositeur Anton Bruckner (1824-1896) et sur lequel il joua de 1856 à 1868.

Anton Bruckner, portrait d’Hermann Kaulbach (1846-1909), huile sur toile, vers 1885

D’autres personnalités telles le peintre Alfred Kubin (1877-1959), le graphiste Herbert Bayer (1900-1985, typographe et affichiste du Bauhaus, le ténor Richard Tauber (1891-1948), le philosophe Ludwig Wittgenstein (1889-1951), le mathématicien et physicien Christian Doppler (1803-1853) se rattachent également à l’histoire de la ville. On ne peut pas non plus parler de Linz sans évidemment citer le nom de l’écrivain, peintre et pédagogue de l’époque Biedermeier Adalbert Stifter (1805-1868), fondateur en 1855 de la Landesgalerie, aujourd’hui le Lentos Kunstmuseum de Linz (Musée d’art moderne et contemporain de Haute-Autriche lui aussi au bord du fleuve).

Adalbert Stifter (1805-1868), écrivain, peintre, pédagogue, inspecteur des écoles primaires de Haute-Autriche

Ces dernières années d’importants projets d’aménagement urbain, culturels et architecturaux ont vu le jour. Difficiles de les citer tous tant ils sont nombreux : le nouveau quartier de la gare (Bahnhofviertel) avec l’Opéra-théâtre (Musiktheater), inauguré en avril 2013, des immeubles à l’architecture innovante, le magnifique Musée d’art moderne au bord du fleuve, (Lentos Kunstmuseum Linz) dont la façade éclairée se reflète de nuit dans le Danube, le passionnant Musée du futur (Ars Electronica Center), l’espace de découverte de l’acier (Voestalpine Stahlwert), la solarCity, le Parc du Danube et ses sculptures contemporaines grand format, de nouveaux ponts… Linz est une cité qui ne cesse d’innover !

À Linz, on aime construire des ponts sur le Danube ! Photo © Danube-culture, droits réservés

 À ne pas manquer…

Culture
Lentos, Kunstmuseum Linz
Musée d’art moderne et contemporain sur le bord du fleuve. À voir pour ses collections et son architecture réussie, l’illumination nocturne de ses façades.
www.lentos.at

Vue de Linz (et du Danube) en 1955 par le peintre « expressionniste » Oskar Kokoschka (1886-1980), collection du Musée Lentos de Linz. Oskar Kokoschka, né à Pöchlarn, sur les bords du Danube, non seulement peintre mais graveur, décorateur, écrivain, auteur dramatique, est un des artistes les plus complets de sa génération. « Je suis le seul véritable expressionniste : le mot expressionnisme est un mot commode qui veut tout dire de nos jours. Je ne suis pas expressionniste parce que l’expressionnisme est un des mouvements de la peinture moderne. Je n’ai pris part à aucun mouvement. Je suis expressionniste parce que je ne sais pas faire autre chose qu’exprimer la vie … »  

Ars Electronica Center – Bio Lab
Le « Musée de l’avenir » se trouve sur la rive gauche du Danube dans le quartier d’Urfahr. Espace interactif et ludique de découverte dans les domaines des nouvelles technologies et des arts numériques, l’AEC organise un festival chaque année au mois de septembre et de nombreuses autres manifestations.
www.aec.at

Les reflets colorés de la façade éclairée d’Ars Electronica Center se mirent aussi dans le fleuve miroir, photo © Danube-culture, droits réservés

Brucknerhaus
www.brucknerhaus.at
Salle de concert sur la rive droite du fleuve, « port d’attache » du Brucknerorchester Linz
www.bruckner-orchester.at

La Brucknerhaus et le Danube, photo © Danube-culture, droits réservés

Musiktheater Linz
Le « Musiktheater » de Linz est l’une des salles les plus modernes d’Europe. Elle bénéficie d’une acoustique exceptionnelle.
www.landestheater-linz.at

Posthof – Culture
Centre culturel à la programmation contemporaine, ancienne annexe de la poste dans le quartier du port.
www.posthof.at

Schlossmuzeum Linz
Le château de Linz, construit au XIIsiècle (l’aile sud a été restaurée, agrandie et inaugurée en 2009) abrite un musée universel : histoire naturelle, culturelle, artistique et technologique de la Haute-Autriche. Des collections d’art régional magnifique ! Vue exceptionnelle sur la ville et le fleuve et la rive gauche depuis les terrasses.
www.schlossmuseum.at

Le Schloßmuseum possède une magnifique collection d’art populaire de la Haute-Autriche, photo © Danube-culture, droits réservés

Mariendom (nouvelle cathédrale)
Le plus grand bâtiment religieux d’Autriche, achevé en 1924
www.mariendom.at

Tabakfabrik Linz
Un beau témoignage de l’histoire de l’architecture industrielle européenne moderne.
www.tabakfabrik-linz.at

Botanischer Garten (jardin botanique)
Les serres abritent notamment une impressionnante collection de cactus et d’orchidées.
www.linz.at/botanischergarten

Francisco Carolinum Linz, Maison de la photo et des arts contemporains
www.ooelkg.at

Institut Adalbert Stifter
www.stifterhaus.at

La maison de l’écrivain et peintre Adalbert Stifter, toute proche du fleuve

Voestalpine Stahlwelt
Site dédié aux nouvelles technologies de production de l’acier
www.voestalpine.com/stahlwelt

 Pour les enfants et les adultes 

Linz est aussi une ville très agréable pour séjourner en famille.

Ars Electronica Center – Bio Lab (voir ci-dessus)
Le Drachenexpress (l’express des dragons)
www.grottenbahn.at

Du côté du Danube

   Il est tout à fait possible de prévoir une excursion en bateau sur le Danube. Linz est le port d’attache de l’élégant Schönbrunn, un des plus anciens bateaux à vapeur conservés dans son état d’origine en Europe.
ÖGEG Dampfschiff Schönbrunn : www.oegeg.at

Le Schönbrunn, dont le port d’attache est Linz, dernier bateau à vapeur d’une flotte de 300 navires qui, autrefois parcouraient le Danube sous le drapeau de la D.D.S.G. Construit en 1912 dans le chantier naval d’Obuda/Hongrie, il assure un service régulier entre Vienne et Passau jusqu’en 1985. Mis hors service en 1988, il est ancré à Budapest et transformé en casino flottant. En 1994, le Schönbrunn qui n’est plus en état de fonctionnement échoue à Engelhartszell et sert de bateau d’exposition à la Oberösterreichische Landesausstellung (Exposition Nationale de la Haute-Autriche). Il est alors mis au rebut. La République autrichienne le cède en toute dernière minute à l’association de passionnés Ö.G.E.G. qui l’a remis en état et le fait naviguer régulièrement pour diverses croisières. (sources : www.kaeser.fr

De nombreux autres bateaux descendent et remontent le Danube depuis Passau en amont ou Vienne, Budapest et au-delà et font bien évidemment escale à Linz.

Croisières Würm+Köck
www.donauschiffahrt.at

Croisières MS Helene
www.donauschifffahrt.at

Donautouristik
MS Kaiserin Elisabeth
www.donaureisen.at

Hébergement/gastronomie

Hôtel restaurant Pöstlingberg-Schlössl
Vue magnifique sur la ville depuis le Pöstlingberg et cuisine d’excellent niveau
www.poestlingbergschloessl.at

Hôtel Harry’s Home Linz
Hôtel contemporain
www.harrys-home.com/linz

Hôtel Wolfinger
Atmosphère désuète et accueil chaleureux
www.hotelwolfinger.at

Hôtel-restaurant Prielmayer’s
www.prielmayerhof.at

Restaurant Essig’s
Le meilleur restaurant de Linz actuellement : belle atmosphère, service attentif et carte de vins remarquable
www.essigs.at

À noter également la présence de très bons restaurants de cuisine indienne et grecque :
Royal Bombay Palace : www.bombaypalace.at
Zum kleinen Griechen : www.zumkleinengriechen.at

À proximité…

   Après avoir pris le temps de visiter Linz et d’en découvrir quelques-uns de ses trésors, on remontera la rive droite du fleuve jusqu’à l’abbaye cistercienne de Wilhering. On mettra une nouvelle fois ses pas dans ceux du compositeur et organiste romantique autrichien Anton Bruckner en visitant la non moins impressionnante abbaye de Saint-Florian, fondé au XIsiècle par les chanoines de Saint-Augustin, réaménagée aux XVIIe et XVIIIe siècles, autre chef d’oeuvre du Baroque de la vallée du Danube autrichien.

L’abbaye et la basilique augustinienne de Saint-Florian, photo © Danube-culture, droit réservés

Les grandes abbayes autrichiennes de Wilhering, Saint-Florian, Melk, Göttweig et Klosterneuburg sont toutes situées sur la rive droite du Danube.
Au nord de Linz, la région bucolique du Mühlviertel est une chaleureuse invitation aux randonnées et aux promenades en forêt.

Mémorial de Mauthausen (rive gauche)
Dans ce camp de concentration construit par les Nazis, périrent pendant la seconde guerre mondiale plus de 100 000 victimes.
www.mauthausen-memorial.org

Porte d’entrée du camp de concentration de Mauthausen, photo © Danube-culture, droits réservés

Maison d’Oskar Kokoschka (Kokoschkahaus), Pöchlarn (en aval de Linz, rive droite)
http://www.oskarkokoschka.at

Photo Mussklprozz, droits réservés

 Danube-culture © droits réservés, mis à jour mars 2023

L’église saint-Martin de Linz, une des plus anciennes églises d’Autriche

Photo droits réservés
La première mention documentaire concernant cette église date de 799. Au cours des préparatifs de guerre de l’empereur Charlemagne (vers 742-814) contre les Avars installés en Hongrie, le préfet bavarois Gerold le Jeune de Vintzgau (755-799) manifeste son intérêt pour l’église. Il demande alors à l’empereur, marié avec sa soeur Hildegarde (vers 758-783), d’intercéder auprès de l’évêque Waldrich de Passau (?-804), propriétaire du bâtiment, afin qu’il lui confie l’édifice en tant qu’usufruitier. Une charte accédant à cette demande est rédigée le 20 juin 799. La copie la plus ancienne de cette charte, datant du IXe siècle, est conservée aux archives principales de Bavière à Munich.

Intérieur de l’église saint-Martin, photo droits réservés

Au cours des siècles suivants, saint-Martin est transformée et agrandie à plusieurs reprises. Un bâtiment central en forme de trèfle inachevé est incorporé à l’ensemble. Au XVe siècle, elle fait l’objet d’une rénovation dans le style gothique. En 1589, le mur ouest est démoli jusqu’aux fondations puis reconstruit. Un portail ouvert du côté ouest se substitue à l’entrée originelle située sur le côté sud.

Photo © Danube-culture, droits réservés

Le bâtiment sert d’écurie en 1742 pour les troupes françaises et bavaroises occupant Linz à lors de la guerre de succession d’Autriche puis il sert de dépôt militaire de 1810 à 1832 et sera une nouvelle fois rénové en 1841.
Des fouilles concernant la partie centrale carolingienne ont eu lieu en 1978.

Les portes de Linz, vue depuis le Freinberg, photo Danube-culture © droits réservés

Ernst Neweklowsky (1882-1963) : la navigation et le flottage sur le Danube supérieur

   « L’ingénieur Neweklowsky a passé sa vie à tracer les limites de l’ « Obere Donau », du Danube supérieur, et ― une fois circonscrit ce territoire ― à le passer au crible, à le classifier et à le le cataloguer mètre par mètre dans l’espace et dans le temps, en ce qui concerne la couleur des eaux et les tarifs douaniers, le paysage qu’il offre à la perception immédiate et les siècles qui l’on construit. Comme Flaubert ou Proust, Neweklowsky a consacré toute son existence à son oeuvre, à l’écriture, au livre ; le résultat, c’est un volume en trois tomes de 2 164 pages en tout, y compris les illustrations, qui pèse cinq kilos neuf cents et qui, comme le dit son titre, a, pour sujet non pas le Danube, mais plus modestement La navigation et le flottage sur le Danube supérieur (1952-1964).
Dans la préface, Ernst Neweklowsky précise que son traité concerne les 659 kilomètres compris entre le confluent avec l’Iller1, qui se jette dans le Danube un peu avant Ulm, et Vienne ainsi naturellement que de tous les affluents et sous-affluents de cette zone ; dans l’introduction au tome III, il admet toutefois avec l’impartialité de quelqu’un qui est au service d’une cause suprapersonnelle, que le concept de Danube supérieur — et l’espace correspondant— varie en fonction des points de vue où l’on se place : pour ce qui est de l’aspect strictement géographique cela embrasse les 1100 kilomètres entre la source et la cascade de Gönyü2 ; du point de vie de l’hydrographie les 1010 kilomètres entre la source et le confluent avec le March ; et en matière de droit international 2050 kilomètres, jusqu’au Portes de Fer, c’est-à-dire jusqu’à l’ancienne frontière avec la Turquie. Les Bavarois, dans une perspective plus étroitement régionale, le font s’arrêter au pont de Ratisbonne, et donnent d’ailleurs ce nom à une des sociétés par actions de leur centrale hydroélectrique — considérant comme « Danube inférieur » la courte section comprise entre Ratisbonne et Passau. Par contre dans la terminologie militaire en vigueur pendant la Première Guerre mondiale, on entendait par « Danube supérieur « , en se référant aux transports de troupes, la partie du cours comprise entre Ratisbonne et Gönyü… »
Claudio Magris, Danube, « Deux mille cent soixante-quatre pages et cinq kilos neuf cents de Danube supérieur »

Né le 26 juillet 1882 à Linz en Haute-Autriche, Ernst Neweklowsky effectue sa scolarité sur place avant d’aller étudier aux universités techniques de Vienne de Graz. C’est dans cette dernière ville qu’il obtient en 1905 son diplôme d’ingénieur. Il entre peu après au service des travaux publics et des chantiers fluviaux de Haute-Autriche où il travaille pendant 40 ans. Il est nommé Directeur de chantier en construction électrique entre 1908 et 1925, puis Chef de district de la construction de Linz de 1925 à 1939. Deux périodes de service militaire interrompent cette activité à une époque d’importants bouleversements dans ces domaines. Il reçoit à Vienne le titre de Docteur ès sciences en 1950 et, le 26 novembre 1954, la Médaille d’or d’ingénieur à Graz.
Orienté vers la nature dès sa jeunesse, Ernst Neweklowsky fonde en 1912 le groupe de Linz des « Wandervogel » (oiseaux migrateurs). À cette époque il est déjà membre du Cercle des Alpes dont il est décoré de l’insigne doré en 1950. Il est également membre actif de nombreuses autres associations, essentiellement liées à l’étude du patrimoine local et au domaine scientifique. De 1926 à 1945, il est membre du comité de l’Oberösterreichische Musealverein (Association d’étude et de protection du patrimoine de Haute-Autriche). Outre la croix de chevalier de l’ordre de l’empereur François-Joseph, il a reçu au cours de sa carrière un grand nombre de distinctions et d’hommages. Il convient de citer à cet égard sa nomination comme membre d’honneur de l’Université d’Innsbruck (1953). En 1956, le gouvernement du Land de Haute-Autriche le nomme Conseiller d’honneur.
Son amour de la nature et son regard aiguisé sur la technique sont à l’origine de ses premières publications sur les problématiques de la construction hydraulique et de la navigation sur la Traun et le Danube (1910). Ce sont les racines de l’œuvre d’une vie au service de quelque chose d’irremplaçable. Ernst Neweklowsky connait les dernières heures de la navigation traditionnelle sur nos fleuves, navigation qui était condamnée à disparaître peu de temps après. C’est à elle qu’il consacre toute son attention et son amour. En tant que collectionneur émérite, il est à même de réunir de nombreux détails grâce à une activité très intense, après sa journée de travail ; il peut ainsi élaborer une œuvre fondamentale sur la navigation et le flottage dans les régions du Danube supérieur.

Flottage du bois sur le Danube

   Dans la bibliographie de l’encyclopédie biographique de Haute-Autriche datant de 1958, ses travaux scientifiques comprennent près de 130 articles dont près des deux tiers sont écrits pendant sa retraite. Au cours des dernières années, ce chiffre a continué à augmenter car E. Neweklowsky a été de plus en plus consulté en tant que spécialiste reconnu aussi bien dans son pays qu’à l’étranger. C’est ainsi qu’il a pu organisé à Linz et à Passau deux expositions majeures sur la navigation fluviale.
En parallèle à son activité de rédaction scientifique, il a en permanence donné des conférences, effectué avec plaisir des visites guidées, réalisé plusieurs série de photographies contribuant à transmettre ses connaissances à un grand nombre de personnes.
C’est incontestablement l’importante thématique de la navigation, thématique abordée dans ses travaux d’un point de vue historique et technique, mais toujours selon une approche humaine, qui l’a fait connaître. Tout événement dans ce domaine n’aurait pu être organisé au cours des dernières années sur le Danube supérieur, non seulement à Passau, Ratisbonne ou Ulm, mais aussi sur la Salzach ou sur d’autres affluents, sans les conseils d’E. Neweklowsky ou du moins sa présence. Neweklowsky s’intéressait aussi de très près à la généalogie. Il a toujours volontiers mis à disposition ses recherches et collections dans ces domaines. Très étroitement lié à ces thèmes depuis de nombreuses années, il s’est encore consacré à l’étude des folklores, publiant des travaux scientifiques de grande valeur.
Ernst Neweklowsky est resté très actif jusqu’à peu de temps avant sa mort, faisant preuve d’une admirable fraîcheur intellectuelle et physique. Sans relâche, il a travaillé jusqu’au dernier moment à l’écriture du 3ème tome de son « encyclopédie » (inachevée) sur la navigation danubienne, le principal objectif de toute sa vie.
Ses nombreux objets de collections, dans la mesure où ils sont liés à la navigation, au flottage du bois dans les régions du Danube supérieur, ont été léguées aux Archives du Land de Haute-Autriche.

Dr. Kurt Holler, Oberösterreichischer Musealverein (Association muséale de Haute-Autriche)

Notes :
1 Affluent de la rive droite du Danube d’une longueur de 147 km  qui  conflue avec celui-ci à la hauteur de la ville de Neu-Ulm (Bavière).
2 Avant-port sur le Danube de Györ (km 1794) . L’histoire de la petite ville qui fut la propriété de la puissante abbaye hongroise bénédictine de Pannonhalma et dont la fondation remonte à 996, est intimement liée à la présence du Danube et à la navigation sur le fleuve.

Sources :
MAGRIS, Claudio, « Deux mille cent soixante-quatre pages et cinq kilos neuf cents de Danube supérieur » in Danube, collection « L’Arpenteur », Gallimard, Paris, 1986
NEWEKLOWSKY, Ernst (1882-1963) Die Schiffahrt und Flösserei im Raume der oberen Donau, Oberösterreichischer Landesverlag OLV-Buchverlag, Linz, volume 1, 1952, volume 2, 1954, volume 3, 1964.

Danube-culture, © droits réservés, mis à jour mars 2023

Martin Stachl (1914-1997):  hommage à Ernst Neweklowsky, Auenweg, Passau, photo K. Bepple, droits réservés

Des aventuriers sur le Danube (II) : l’Américain Paul Boyton descend le fleuve à la nage de Linz à Budapest en 1875

Né à Pittsburgh Pennsylvanie en 1849 sur les rives de la rivière Allegheny, un affluent de l’Ohio de 523 km appartenant au bassin versant du Mississipi, Paul Boyton, « The Fearless Frogman », a un profil d’aventurier, de sportif et d’inventeur. Nageur performant, il réussit son premier sauvetage à l’âge de douze ans. Trois années plus tard il quitte les siens pour s’engager dans la marine américaine, rejoint ensuite les révolutionnaires mexicains et sert dans la marine française pendant le conflit franco-prussien. Après son retour en Amérique il participe à l’organisation du United States Lifesaving Service, organise le premier département de sauvetage d’Atlantic City (New Jersey) et en devient capitaine en 1873. Pendant les deux années suivantes, il n’y aura pas un seul noyé à Atlantic City, Paul Boyton étant personnellement responsable du sauvetage de soixante et onze personnes.
C’est dans le cadre de ses activités dans cette ville qu’il commence à  expérimenter de nouveaux équipements de sauvetage, en particulier une combinaison en caoutchouc inventée par C.S. Merriman. Cette combinaison, facile à enfiler peut maintenir le nageur dans l’eau indéfiniment, le gardant parfaitement au sec1. L’équipement se complète d’une double pagaie pour faciliter le déplacement dans l’eau. P. Boyton réalisera son exploit dans le Danube de 1876 avec cette combinaison.
À l’automne 1874, il est à New York, déterminé à faire une démonstration qui prouverait au monde entier l’intérêt de cette invention. Il se rend également en Europe pour la promouvoir et réussit en 1875 la traversée à la nage de la France vers l’Angleterre revêtu de sa combinaison étanche sur laquelle est fixée une petite voile. Un grand enthousiasme entoure ses performances. Des messages de félicitations sont envoyés par la reine d’Angleterre et le prince de Galles mais le succès commercial se fait attendre.


Le sportif et inventeur américain nage pendant sa tournée européenne dans le Rhin de Bâle à Cologne, réussit à descendre en 84 heures le Danube de Linz à Budapest, accomplit les exploits de nager en 92 heures dans le Pô de Turin à Ferrare, dans l’Arno de Florence à Pise et dans Tibre d’Ortie à Rome. À cette occasion il est accueilli très chaleureusement en particulier à Rome où il est acclamé par plus de 100 000 personnes se tenant les rives du fleuve. Paul Boyton nage également, lors de son séjour en Italie, dans la Méditerranée, de l’île de Capri à Naples. Le roi Victor Emmanuel II d’Italie le nomme Chevalier de l’ordre de la Croix. Il traverse encore le détroit de Gibraltar et en août 1878, infatigable, descends la Seine de Nogent à Paris. Lorsqu’il arrive dans la capitale française, le correspondant du New York Times estime la foule à près d’un million de personnes. L’aventurier et sportif émérite descendra d’autres fleuves européens comme le Rhône, la Loire et le Tage. À l’occasion de sa descente de la Loire il rencontre Jules Verne (1828-1905) en aval d’Ancenis qui remonte le fleuve sur un bateau avec quelques-uns de ses mariniers. L’écrivain accompagne Paul Boyton jusqu’à Nantes. Les deux hommes devinrent de grands amis. Paul Boyton profitera de l’hospitalité de Jules Verne sur son yacht et dans sa résidence à Nantes et Jules Verne s’inspirera de sa combinaison flottante pour illustrer certaines scènes de son roman « Les tribulations d’un Chinois ». De retour aux États-Unis en décembre 1878 Paul Boyton nage dans l’Hudson d’Albany à Manhattan et, en septembre 1881, réussit la performance de nager de 3200 miles dans le Mississippi.
Paul Boyton publie en 1892 le récit de ses voyages et de ses multiples aventures sous le titre « The Story of Paul Boyton ».

À la nage de Linz à Budapest…
« Peu après, Paul Boyton se rendit à Louisville, dans le Kentucky, où il nagea en amont des chutes de l’Ohio. Cet exploit suscita l’effervescence à Louisville et dans les environs. Il partit ensuite en Europe et commença en mai sa tournée par Amsterdam. À cette époque il était déjà bien connu du  monde du spectacle. Ses exhibitions eurent beaucoup de succès dans tous les Pays-Bas et en Allemagne.
Le 3 août 1876, Paul Boyton arriva à Linz en Autriche. Il eut alors un accident qui faillit lui faire perdre l’œil droit à cause de l’explosion prématurée d’une torpille. Invalide, il resta pendant deux semaines dans une chambre d’un hôtel sur les rives du Danube. La vue permanente des eaux du fleuve qui semblaient l’inviter fit naître dans son cœur le désir d’une nouvelle expédition. Il ne lui fallut pas longtemps pour se décider à descendre à la nage le Danube de Linz à Budapest, situé à environ quatre cent cinquante miles2 en aval. Lorsqu’il annonça son intention de réaliser cet exploit, la nouvelle fut aussitôt télégraphiée à toutes les régions bordant le fleuve.

Linz (Haute-Autriche) à la fin du XIXe -début du XXe siècle, collection particulière Danube-culture

Quand il entra dans l’eau, toute la ville ou peu s’en faut, s’était donné rendez-vous pour lui faire ses adieux Le courant était très rapide mais, heureusement, de nombreuses îles et des épis3 se trouvaient au long du fleuve. Le nageur ne trouva rien de bleu dans ce Danube presque aussi jaune que le Mississippi. À l’instar de tous les fleuves du monde, celui-là a ses passages redoutés, comme les tourbillons de Struden. Ces périlleux rapides du Haut-Danube sont entourés d’un paysage pittoresque de hautes collines boisées. Une foule nombreuse s’était amassée à cet endroit pour voir Paul Boyton passer les obstacles. Il plongea sous deux ou trois grosses vagues qui le submergèrent complètement. Alors qu’il  luttait contre le courant impétueux, il répondit aux acclamations en brandissant sa pagaie.
Son accueil à Vienne fut des plus enthousiastes. À Presbourg4, le club de natation local l’accompagna pendant environ deux miles. L’institution lui décerna le titre de membre honoraire alors même qu’il nageait dans le fleuve au milieu de ses amis. Il continua ensuite son chemin seul et traversa toute la journée un pays stérile et désert, rencontrant de temps en temps des chercheurs d’or installés sur des bancs de sable. Ils avaient l’air farouches et portaient tous des chemises blanches et des pantalons larges. Son apparition, alors qu’il nageait dans le courant, ne manquait jamais de susciter la plus grande stupéfaction parmi les groupes de gens qui n’avaient probablement jamais entendu parler de lui. C’était un jour torride et le soleil lui brûlait cruellement le visage. Le soir, des nuages de moustiques l’entourèrent, lui rendant la vie infernale. Cette nuit-là, il somnola, épuisé par les efforts qu’il avait dû prodiguer. Vers onze heures, malgré lui, il s’endormit, pourtant conscient du danger que lui faisaient courir les bateaux-moulins. Ces bateaux-moulins du Danube sont constitués de deux barges reliées l’une à l’autre par des poutres autour desquelles tourne une grande roue. Ils sont ancrés dans la partie la plus rapide du courant qui entraîne le mécanisme.

Bateaux-moulins sur le Danube hongrois, collection particulière

Paul fut sorti brusquement de son sommeil par un énorme bruit de fracas et se retrouva juste entre deux grosses barges. En à peine de deux secondes il serait à la merci d’une roue en mouvement rapide. Le courant le projeta contre elle. Avant même qu’il ne puisse prendre la mesure de la situation, l’une des planches le frappa au-dessus des sourcils et la suivante l’atteignit à l’arrière de la tête, le faisant sombrer complètement. Sa pagaie pour nager s’était cassée en deux et l’une des moitiés disparut tandis qu’il pouvait sentir un sang chaud couler sur son front. À l’aide de la moitié de pagaie cassée qui lui restait, il gagna les remous à la poupe d’une des barges. Le meunier fut réveillé par ses appels à l’aide. Un robuste Hongrois apparut sur le pont, une lanterne à la main, et lança une corde au nageur presque évanoui. Paul s’y accrocha fermement et fut hissé. La lumière de la lanterne révéla alors son visage couvert de sang et son bonnet de nage en caoutchouc brillant. Le meunier poussa un cri de terreur, lâcha la corde et courut se réfugier dans le moulin où il s’enferma à double tour, pensant sans doute qu’un mauvais esprit du Danube lui était apparu. Lorsque le meunier épouvanté relâcha son emprise sur la corde, Paul, presque entièrement épuisé, se laissa flotter dans le courant où il demeura, dans un état semi-conscient. Avec sa demi-pagaie, il réussit à se tenir à l’écart des autres moulins et se laissa porter jusqu’à l’aube. Ses yeux étaient presque fermés à cause de l’enflure de son front tuméfié. Peu après, il découvrit un château sur les berges d’un côté du fleuve. Il en réveilla les habitants par un coup de  alors qu’il dérivait impuissant. Un bateau quitta la rive et le recueillit. Il y avait à bord un officier autrichien et deux soldats.
L’officier l’informa que le château vers lequel on le transportait était la forteresse de Komorn5. Un chirurgien pensa rapidement ses blessures. En deux jours il fut suffisamment rétabli pour reprendre son voyage.

Paul Boyton avec sa combinaison étanche flottante et sa double pagaie

Depuis Komorn, il nagea toute la journée et la nuit suivante pour rattraper le temps perdu. Le lendemain, à l’aube, de grandes montagnes s’élevaient de chaque côté d’un Danube dans un lit étroit et au fort courant.Vers huit heures du soir, il atteint un petit village et appris qu’il s’agissait de Nagy6, à environ quarante miles au-dessus de Budapest. Là, il prit quelques rafraîchissements et se mit en route pour la dernière étape de course nautique. Quelques kilomètres plus bas, il découvrit une très haute montagne, surmontée d’une croix, sur laquelle courait un chemin en zigzag. À chaque tournant de ce chemin était érigée une grotte contenant quelque scène de la Passion de Notre Seigneur. Ce chemin de croix est un lieu de dévotion célèbre pour le peuple croyant de Budapest7. En passant devant la montagne, il salua un groupe de dames et de messieurs qui se tenaient sur la rive. L’un d’eux l’interpella en allemand et lui demanda de relâcher un peu son rythme de nage afin qu’ils puissent descendre à ses côtés en barque. Paul se plia à leur demande, se tint droit dans l’eau et dériva tranquillement. La barque fut bientôt près de lui : deux dames y étaient assises, de toute évidence une mère et sa fille ainsi que deux messieurs. La  jeune fille, âgée d’environ dix-huit ans, était, de l’avis de Paul, la plus jolie fille qu’il ait jamais vue de sa vie. Il admirait sa merveilleuse beauté et ne prêtait que peu d’attention aux flots de questions qui lui étaient posées en hongrois-allemand par les hommes. Dans son meilleur allemand, il demanda à la jeune fille ce qu’il savait déjà, c’est-à-dire « À quelle distance se trouve Budapest ? ». Elle sourit et répondit en français : « Environ trente-cinq miles. Je suppose que vous parlez mieux le français que l’allemand ? »
C’est exactement ce que Paul souhaitait. Elle servait maintenant d’interprète pour tout le groupe et sa douce voix chassait tout sentiment de fatigue. Comme le courant poussait la barque à descendre le fleuve rapidement, sa mère suggéra qu’il était temps de se dire au revoir. Avant de partir, un des messieurs lui demanda par l’intermédiaire de la jeune femme « si M. le Capitaine voulait bien prendre un verre de vin ». Paul répondit qu’il était bien tôt pour porter un toast, mais que s’il lui était permis de trinquer à la santé de la plus belle fille de Hongrie, il se sacrifierait volontiers.
Avec un rire musical, elle lui tendit un verre rempli de Tokay pétillant. Une poignée de main générale s’ensuivit et, tandis que la main humide et recouverte de caoutchouc de Paul saisissait celle de la jeune femme, il la pria de lui offrir le bouquet de violettes qu’elle avait épinglé sur sa poitrine, en souvenir des instants inoubliables qu’il avait passés en sa compagnie. Elle accepta sa demande. Il embrassa le bouquet galamment et le fit glisser à travers l’ouverture au niveau de son visage de sa combinaison en caoutchouc pour les blottir contre sa poitrine. Alors qu’il reprenait sa pagaie, la pensée lui vint que la franche cordialité des occupants masculins du bateau au début de leur rencontre avait soudainement changé et que leurs adieux étaient plus formels que leur présentation ; mais il n’y prêta guère attention et s’éloigna vers Budapest d’un mouvement ferme et régulier, tout en fredonnant :
« Son sourire lumineux me hante encore. »8
 Budapest avait été informé par télégraphe de son arrivée imminente. Lorsqu’il atteint la capitale hongroise, les deux rives et les ponts étaient noirs de monde et les clameurs de « Éljen Boyton, éljen America »résonnèrent de tous les côtés. La chaleur de son accueil à Budapest fut tout simplement indescriptible.

Budapest dans les années 1870. La ville connut après 1838, à la fin de 1875 et au début de 1876, de nouvelles inondations catastrophiques.

En racontant l’histoire de sa nage danubienne, il mentionna la merveilleuse rencontre qu’il avait faite à Visegrad. Son récit fut dûment publié dans les journaux avec ses autres aventures. De Budapest, Paul retourna en en chemin de fer à Vienne, où il s’était engagé à faire une démonstration pour le Club nautique. Ce contrat étant rempli et libre d’aller où bon lui semblait, il suivit sa fantaisie et prit le premier train pour la capitale hongroise. Ses nombreuses démonstrations y eurent un grand succès ; l’une des plus importantes était au profit d’un foyer pour jeunes filles, une œuvre de charité réputée de la ville. À la fin de sa démonstration, une pluie de fleurs et de bouquets lancés sur lui dans l’eau l’impressionna. Le lendemain, il reçut une lettre adressée comme suit : 

Sir Capitaine Paul Boyton à Budapest, Hôtel Europa.

La lettre était ainsi rédigée : 

Sir,
   Nous vous prions d’accepter nos sincères remerciements pour votre généreuse complaisance, ayant secouru des intérêts étrangers dans un pays étranger. Nous vous assurons que votre nom et le souvenir de votre noble action ne quitteront jamais le cœur de ces jeunes filles, que nous pouvons aider par votre bienfaisance à s’instruire des professions nécessaires. Permettez-moi de vous adresser nos remerciements. Nous n’oublierons jamais votre conduite de gentleman.

   Je vous suis très reconnaissante, votre estimée ELMA HENTALLERF, Secrétaire ;

MRS. ANNA KUHNEL, Présidente de l’Union des Dames. Budapest,

18 septembre 1876

Pendant son séjour, Paul garda les yeux grands ouverts dans l’espoir de rencontrer à nouveau la merveilleuse jeune femme qui avait fait une telle impression sur son cœur. Un jour, un officier hongrois le croisa dans la rue et lui dit :
« Capitaine, n’aimeriez-vous pas être présenté à la jeune femme que vous avez rencontrée sur le Danube à Visegrad ? »
L’officier lui dit de se préparer le soir même et qu’il l’emmènerait dans sa loge privée au Théâtre Tational. Paul fut prêt quelques heures avant l’heure prévue. Ils entrèrent dans la loge. L’objet de ses rêves se leva de son siège et, avançant avec un charmant sourire charmant, lui dit en anglais :

« Je suis si heureuse de vous voir, capitaine. »
« Pas plus que je ne le suis moi-même de vous revoir. Pourquoi ne m’avez-vous pas parlé anglais sur le fleuve ? »
« Eh bien, s’exclama-t-elle, j’étais un peu confuse et je ne me souvenais pas que les Américains parlaient anglais, mais laissez-moi vous présenter à ma mère et à ces messieurs. »
Paul fut alors présenté à un officier autrichien et à un comte qui, avec sa mère, occupaient la loge. Il ne prêta guère attention à la pièce qui était jouée car il entretint une conversation soutenue en anglais mêlé de français avec la charmante jeune femme à ses côtés. En diplomate averti, il adressa par la même occasion quelques remarques ponctuelles à sa mère. À la fin de la représentation, Paul offrit son bras à la jeune femme, tandis que l’officier autrichien prenait celui de sa mère. Les autres messieurs du groupe prirent les devants à la porte. Ils rentrèrent tranquillement par les rues étroites et l’officier qui escortait la mère de la jeune femme fit tinter le fourreau de son long sabre sur les pavés d’une manière virile. Avant qu’ils ne se séparent à la porte de la maison, Paul demanda et obtint la permission de téléphoner à la jeune femme le lendemain. Il s’éloigna ensuite et, accompagné du militaire hongrois, prit la direction de son hôtel. L’officier lui demanda combien de temps il comptait encore rester à Budapest. Paul ne put satisfaire à sa curiosité, car il était libre à ce moment-là et n’avait pas de plan de route particulier. En arrivant à l’hôtel, le capitaine proposa de prendre un verre. Alors qu’il était assis à table, l’officier mit la conversation sur le sujet du duel et posa à son interlocuteur des questions sur ses codes en vigueur en Amérique. Paul, devinant facilement le fil de ses pensées, le divertit avec des récits de combats farouches avec des couteaux Bowie, des revolvers, des fusils et des canons, lui assurant qu’ils étaient fréquents dans la partie des États-Unis d’où il venait. Il affirma à l’officier qu’il ne connaissait pas un seul de ses amis qui ne préféraient pas participer à un duel plutôt que d’être invité à un banquet. Lorsque celui-ci se sépara de Paul, ses pensée étaient envahies des récits poignants auxquels il semblait croire, du moins son comportement était-il beaucoup plus doux que lorsqu’ils étaient entré dans l’hôtel.
Paul resta à Budapest deux semaines de plus qu’il ne l’avait prévu. Pendant cette période, il se rendit fréquemment chez la belle Irène, où il fut toujours accueilli par elle-même et ses parents. S’en suivit un voyage à travers les principales villes de Hongrie… »

PAUL BOYTON, THE STORY OF PAUL BOYTON, VOYAGES ON ALL THE GREAT RIVERS OF THE WORLD, PADDLING OVER TWENTY-FIVE THOUSAND MILES IN A RUBBER DRESS, A RARE TALE OF TRAVEL AND ADVENTURE, THRILLING EXPERIENCES IN DISTANT LANDS, AMONG STRANGE PEOPLE. A BOOK FOR BOYS, OLD AND YOUNG.
To my beloved and gentle wife, whose patience and help have enabled me to present the public the story of my life.
George Routledge & Sons, London, 1892
Chapter XI, « A short run on the Mississippi. The funny Negro pilot. Down the Danube and the Po. Attacked by fever. Lucretia Borgia’s castle. »
Traduction Alain Chotil-Fani, Eric Baude

Notes :
1 « La combinaison était fabriquée en deux parties, reliées à la taille par une ceinture métallique ronde, sur laquelle un revêtement en caoutchouc était si bien fixé qu’il était tout à fait étanche. La tête était recouverte d’un capuchon, qui cachait tout sauf les yeux, la bouche et le nez. À l’arrière du bonnet, il y avait une chambre à air qui, une fois remplie, donnait au voyageur un oreiller très confortable. Le long des côtés, se trouvaient deux autres grandes chambres à air et deux autres encore en dessous, pour soutenir les jambes. » selon une description de l’époque.
2 Soit environs 720 kilomètres si l’on prend le mile américain comme référence. Linz se trouve au PK 2135 et Budapest au PK 1647 soit une distance officiel de 488 km par le fleuve. Paul Boyton aurait-il volontairement exagéré le nombre de km parcourus ?
3 Un épi est un ouvrage hydraulique construit à partir d’une berge dans le lit du cours d’eau pour freiner le courant, enrayer les mouvements de sédiments et améliorer les conditions de navigation.
4 Bratislava (PK 1868)
5 Impressionnante forteresse militaire construite par les Autrichiens sur le Danube hongrois à la hauteur de Komorn (Komárno-Komárom) pour face aux menaces d’invasions ottomanes. Elle leur permettait de contrôler le fleuve et sa navigation et fut surnommée « La Gibraltar du Danube ».
6 Le village de Nagymaros (PK 1695) sur la rive gauche du fleuve situé en face de Visegrád dans le « Coude du Danube ». Le fleuve se fraie alors un chemin entre les monts Börsöny (rive gauche) et le massif de Visegrád (rive droite), en aval d’Esztergom et en amont de Budapest.
7 Il pourrait s’agir des neuf stations du chemin de croix du calvaire de Zebegény ( PK 1703, 30, rive gauche) au sommet duquel se trouve une chapelle construite en 1853 par Mme József Fischer Borbála Zoller. Le petit village de Zebegény est toutefois situé en amont de Visegrád, ancienne capitale du royaume de Hongrie.
8 « Her bright smile haunts me still » : chanson célèbre du Sud confédéré de la décennie 1860, musique de William Thomas Wrighton, paroles de Joseph Edwards Carpenter. 

https://www.loc.gov/item/jukebox-762555
9
Vive Boyton, vive l’Amérique ! 

Annonce du décès de Paul Boyton, nageur et ornithologiste (collectionneur d’oiseaux !) le 19 avril 1892 dans la presse new-yorkaise

Eric Baude, Danube-culture © droits réservés, janvier 2022

La tarte de Linz !

« Les jours devinrent des semaines, puis aux semaines succédèrent les mois et soudain le printemps était là. La douce lumière du soleil réchauffant l’air nous incitèrent à redevenir des promeneurs heureux de retrouver des sensations presque oubliées. Et quand vous avez la joie de vous assoir sur un banc dans un parc ou tout simplement sur une couverture posée sur l’herbe au bord du Danube avec des amis, ou votre famille réunie ou un être cher, quel qu’il soit, vient l’instant de partager une délicieuse « Linzer Torte ».

La tarte de Linz a-t-elle été inventée à Linz sur les bords du Danube ?

Difficile à dire car la plus ancienne recette de « Linzer Torte » ne se trouve pas à Linz au bord du Danube mais dans une prestigieuse abbaye de Styrie ! Les archives de l’extraordinaire bibliothèque de l’abbaye bénédictine d’Admont1, fondée en 1074 et située sur les bords de l’Enns, un important affluent de la rive droite du Danube haut-autrichien abritent de merveilleux trésors, curiosités et autres objets exceptionnels.

L’abbaye bénédictine d’Admont, dans l’ouvrage Topographia ducatus stiria de Georg Matthäus Vischer, 1681

Elles ont aussi l’immense privilège de posséder, trésor parmi les trésors de leur collection de livres de cuisine, la plus ancienne recette connue de « Linzer Torte« . Ce n’est d’ailleurs pas une mais quatre recettes de « Linzer Torte » parmi 490 recettes diverses consignées en 1653 par Anna Margarita Sagramosa, née comtesse Paradeiser, une aristocrate originaire de la région autrichienne de la Carniole (Krain, aujourd’hui en Slovénie, province faisant frontière avec l’Italie) et installée après son mariage à Vérone, dans le Codex 35/31 qui figurent dans cet ouvrage intitulé en langue allemande « Buech von allerley Eingemachten Sachen, also Zuggerwerck, Gewürtz, Khüt- ten und sonsten allerhandt Obst wie auch andere guett und nützlich Ding ». (« Le livre de diverses sortes de réalisations culinaires tout comme des sucreries, des épices, des coings et toutes variétés de fruits et aliments gouteux et utiles »).
La question de la présence de cet ouvrage culinaire dans le fonds de la bibliothèque de l’abbaye bénédictine d’Admont n’a pas encore trouvé de réponse. Mais les moines bénédictins se sont toujours intéressés aux domaines scientifiques les plus variés et aux arts y compris culinaires. Les quatre recettes n’ont été redécouvertes qu’en 2005 par la directrice de la bibliothèque du musée de Haute-Autriche de Linz. La plus ancienne recette connue auparavant et datant de 1696 appartient à la collection du Musée de la ville Vienne.
Un certain Johann Konrad Vogel (1796-1833), originaire de Bavière, se marie en 1822 avec Katherina Kreß, veuve d’un pâtissier de Linz, reprend le commerce et se lance dans la fabrication à grande échelle d’une tarte à base de la fameuse et délicieuse « pâte de Linz », connue, sous une forme similaire, déjà dans l’Égypte ancienne. Cette pâtisserie devient l’emblème culinaire (l’ambassadrice sucrée) de la capitale de la Haute-Autriche et fait ensuite le tour du monde. La recette rapidement imitée a continuellement été renouvelée, réinventées au fil du temps, de l’imagination et de l’inspiration des pâtissiers. Bref on s’est souvent largement éloigné de la ou des recettes recettes d’origine. C’est pourquoi il est passionnant de se pencher sur quelques-unes des plus anciennes et « authentiques » recettes de « Linzer Torte » pour connaître quelle pâtisserie/salon de thé ou Konditorei autrichienne peut à juste titre prétendre vendre la véritable « Linzer Torte » selon les critères définis dans la capitale de la Haute-Autriche.
La « Linzer Torte » est une pâtisserie à base de pâte brisée (pâte de Linz) confectionnée avec une proportion importante de noix. À l’origine, seules des amandes étaient ajoutées à la pâte. Aujourd’hui un mélange d’amandes et de noisettes râpées est généralement utilisé. La « Linzer Torte » authentique ne doit contenir qu’une simple garniture de confiture de groseille. Elle est traditionnellement recouverte avec un treillis de pâte.
Les premières recettes nous montrent une tarte qui n’a pas grand-chose à voir avec celle que nous connaissons aujourd’hui. Les divers ingrédients caractéristiques désormais utilisés tels que par exemple la cannelle, les clous de girofle et les noisettes manquent de même que le treillis caractéristique et souvent aussi la garniture avec de la confiture. Dans les premiers années de sa fabrication on utilisait  des amandes râpées, des citrons ou même du saindoux qui faisaient l’originalité de la véritable « Linzer Torte ». Malgré tout, une caractéristique relie toutes les différentes recettes de « Linzer Torte » au cours de l’histoire, l’incontournable pâte brisée qui fait la saveur inégalable de ce dessert bien évidemment à condition de veiller à ce que celle-ci ne soit pas trop sèche.
Si la plus ancienne recette connue de « Linzer Torte » ne se trouve pas à Linz, la bibliothèque du Musée de Haute-Autriche (Oberösterreichische Landesmuseum) possède toutefois une collection importante de livres de cuisine manuscrits datant d’entre 1700 et 1858 et dans lesquels on trouve pas moins de 95 recettes de « Linzer Torte » ! Parmi celles-ci ces recettes une variante avec du chocolat (Livre de cuisine de Babette Kindler, vers 1850).

Recette manuscripte de « Linzer Torte », collection du Musée du Land de Haute-Autriche de Linz

Note :
1 la plus importante bibliothèque de monastère au monde

La « Linzer Torte » en quelques dates
1653
La comtesse Anna Margarita Sagramosa originaire de Krain (Carniole), domiciliée à Vérone après son mariage, recopie quatre recettes de « Linzer Torte » dans son livre de cuisine manuscrit. Redécouvert à la bibliothèque de l’abbaye d’Admont en 2005, c’est actuellement le plus ancien témoignage connu d’une recette de « Linzer Torte ».
1718
La première recette imprimée du « Guten und Suessen Lintzer-Taiges » est publiée dans le « New Saltzburg Cookery Book » de Conrad Hagger.
1700-1850
Période de gloire de la « Linzer Torte ». Inventions de nombreuses variations tant en termes de goût que d’apparence. Des recettes de « Linzer Torte » sont publiées dans presque tous les premiers livres de cuisine imprimés en Europe.
1842
La « Linzer Torte » est mentionnée pour la première fois dans un récit de voyage (Johann Georg Kohl « Reise von Linz nach Wien », publié à Dresde en 1842).
1855
Franz Hölzlhuber (1826 -1898), peintre, chanteur, poète, bibliothécaire, professeur de dessin, confiseur, né à Steyr (Haute-Autriche) et émigré aux USA fait découvrir la « Linzer Torte » aux américains de Milwaukee (Wisconsin) pendant son séjour (1855-1860). Il compose à Milwaukee son unique opéra (singspiel) qu’il intitule « Das neue Donaureich » (vers 1856).

Franz Hölzlhuber (1826-1898), ambassadeur de la « Linzer Torte » aux États-Unis, source :  www.steyerpioniere.wordpress.com

1900
L’écrivain prussien Ernst von  Wildenbruch (1845 -1909) immortalise la pâtisserie dans son ode à la  « Linzer Torte ». Il conclue celle-ci sur le vers : « Was sind aller Dichter Worte gegen eine Linzer Torte! » (« Que peuvent faire les vers de tous les poètes en face d’une tarte de Linz ! »)
1927
L’écrivain, journaliste et humoriste viennois Alfred Polgar (1873-1955) sème   volontairement et non sans humour la confusion en prétendant que la recette de la « Linzer Torte » a été inventée par un boulanger viennois du nom de « Linzer ». Cette hypothèse est réfutée.
1944
L’opérette « Linzer Torte » du compositeur Ludwig Schmidseder1 (1904-1971 ), né à Passau et mort à Münich sur un livret d’Ignaz Brantner (1886-1960), Johann-Gustav) Kernmayr (1900-1977) et Aldo von Pinelli (1912-1967) est représentée pour la première fois au Théâtre de Haute-Autriche de Linz. Ludwig Schmidseder est aussi l’auteur de l’opérette « Mädel aus der Wachau » créé à Linz en 1951.
2009
Première édition des Journées de la « Linzer Torte »
Cet évènement a lieu à la fin de l’automne : concours de pâtisserie, démonstration de cuissons diverses, présences d’illustres amateurs de la « Linzer Torte » et autres spécialités culinaires locales.
Notes :
1
Ce compositeur de musique légère tendance jazz à été membre du parti nazi dès 1933. Il se fera naturalisé autrichien en 1948.

Parmi les nombreuses personnalités autrichiennes et étrangères qui appréciaient ce met sucré on compte l’archiduc Franz Karl de Habsbourg (1802-1878), père de l’empereur François-Joseph et beau-père de Sissi qui avait pris l’habitude en se rendant dans son élégant palais d’été de Bad Ischl (Salzkammergut) de passer la nuit dans la capitale de la Haute-Autriche et d’emporter avec lui une « Linzer Torte » pour la suite de son voyage. Autant dire que la « Linzer Torte » appartient à l’histoire de l’Autriche.

Deux bonnes adresse à Linz
L’incontournable Konditorei Jindrak confectionne depuis bientôt 100 ans (1929) la « véritable Linzer Torte » à raison d’environ 100 000 exemplaires chaque année ! La maison mère se trouve Herrenstraße 22-24 avec de nombreuses filiales dans la ville.
www.jindrak.at/original-linzer-torte 
La confiserie Isabella/Marc Chocolatier, s’est basée sur l’une des quatre recettes de la bibliothèque de l’abbaye d’Admont pour recréer une « Linzer Torte » parmi les plus savoureuses d’Autriche. On la trouve non seulement dans l’établissement d’une des grandes rues commerçantes de la capitale de Basse-Autriche (Landstrasse) mais aussi sur place à l’abbaye d’Admont.
www.marc-chocolatier.at

Une recette contemporaine 
Ingrédients :
250 grammes de beurre
250 grammes de farine,
125 gramme de sucre glace
150 grammes de noisettes (ou éventuellement amandes) en poudre
2 cuillerées à soupe de chapelure,
1 oeuf, 1 jaune d’oeuf et 1 oeuf pour enduire
Cannelle en poudre, 1 pincée de clou de girofle moulu
1 pincée de sel
zeste citron ou jus de citron
confiture de groseille, amandes effilées.
Préparation :
Disposer la farine en tas sur le plan de travail. Couper le beurre en petits morceaux et les mélanger à la farine en émiettant du bout des doigts. Ajouter le sucre glace, les noisettes et la chapelure, puis l’œuf et le jaune d’œuf. Saupoudrer généreusement de cannelle, d’une pincée de clou de girofle, d’un peu de sel et du zeste ou du jus d’un citron. Travailler l’ensemble rapidement pour obtenir une pâte brisée lisse en formant une boule. La couvrir et la laisser reposer au frais une demi-heure environ.
Préchauffer le four à 180°C et beurrer un moule à manqué pas trop grand.
En appuyant avec le dos des doigts, repartir un peu plus de la moitié de la pâte au fond du moule. Avec le reste, former plusieurs petits boudins (pour les croisillons) ainsi qu’un boudin plus gros pour le bord de la tarte. Couvrir le fond  de la tarte de confiture en laissant un espace libre d’environ 1 cm tout autour pour réaliser le bord. Disposer le gros boudin en rond autour du moule et l’écraser légèrement. Disposer ensuite en treillis les boudins plus fins sur le dessus de la tarte. On peut éventuellement saupoudrer le tout d’amandes effilées.
Recouvrir la pâte avec l’œuf battu puis faire cuire au four pendant 50 à 60 minutes. Sortir du four et laisser refroidir. Recouvrir et laisser reposer une journée.

Selon d’autres recettes la « Linzer Torte » est préparée avec une pâte plus molle. Les croisillons sont alors réalisés à l’aide d’une poche à douille.
Vous pouvez la mettre en valeur en l’accompagnant avec un vin pétillant brut autrichien de la vallée du Danube !

Une recette vegan
Ingrédients :
300 grammes de farine complète ou semi-complète fine
100 grammes de sucre
150  grammes de noisettes en poudre
200 grammes de Margarine végétale
1 cuillère à thé de cannelle
200 grammes de confiture de groseille qui peut être éventuellement remplacée par de la confiture de cerises amères ou de cassis
Crème fraîche végétale
Préparation :
Tamisez la farine sur une plaque à pâtisserie et faites un puits au milieu. Ajouter le sucre, la cannelle et les noisettes. Étaler la margarine en morceaux sur le bord de la farine et pétrir le tout rapidement avec les mains pour former une pâte lisse. Formez une boule, l’enveloppez dans du papier d’aluminium et laissez reposer au réfrigérateur pendant 1 à 2 heures.
Sur un plan de travail fariné, étalez ensuite les trois quarts de la pâte sur une épaisseur d’environ 2 cm et garnissez le fond d’un moule à cake ou à charnière (diamètres de 24 cm) avec celle-ci. Piquez le fond du gâteau plusieurs fois avec une fourchette à petits intervalles et répartir la confiture de groseille uniformément sur le dessus. Façonner le reste de pâte en petits boudins,  disposez-les sur la tarte en les croisant  et recouvrez-les d’une crème chantilly végétale. Faites cuire au four préchauffé à 200°C pendant environ 45-55 minutes.
Au lieu de la confiture de groseille, vous pouvez également utiliser à la place de la confiture de groseille une compote de pommes. la tarte sera alors particulièrement moelleuse.

Et pendant que vous êtes à Linz et séduit par cette ville où passé, présent et futur s’harmonisent ne font pas que s’harmoniser architecturalement, ou peut-être déjà devant la vitrine alléchante d’une Konditorei, partez à la découverte des « Linzer Augen » (« Yeux de Linz »). Une autre spécialité sucrée de la ville, particulièrement appréciée pendant le temps des fêtes de fin d’année avec d’autres biscuits, certes moins connue à l’étranger mais toute aussi délicieuse ! On les achète un peu partout en Autriche.

Linzer Augen ! Photo droits réservés

Sources :
Linzer Torte, Bundesministerium Landwirtschaft, Region und Tourismus,
www.bmlrt.gv.at
www.stiftadmont.at
www.linztourismus.at/fr
Josef Hasitschka, Admonter Klosterkochbuch, Barocke Rezepte und Geschichten aus den Stift Admont, Benediktiner Stift Admont, Admont, 1998
Waltraud Faißner, Wie man die Linzer Dortten macht ! (Comment prépare-t-on la tarte de Linz !), 2004
Recettes historiques de la « Linzer Torte » issues de la collection culinaire de la bibliothèque du Musée régional haut-autrichien de Linz.
40 recettes de 1700 à 1848 avec parfois des ingrédients inhabituels comme de l’eau de rose, des morceaux d’orange confite ou des pistaches pour la décoration qui démontrent que la « Linzer Torte » était initialement une pâtisserie à la mode baroque. Les recettes sont accompagnées d’illustrations du XVIIIe et du XIXe siècles.

Joseph Fouché, exilé et oublié sur les bords du Danube à Linz

Aucune cour européenne ne l’invite et il n’y a que son vieil « ami » le prince Metternich qui daigne accepter du bout des lèvres qu’il trouve refuge à Prague mais surtout pas à Vienne ni en Basse-Autriche. Tenu à distance par la noblesse bohémienne, espionné, ridiculisé, il sollicite de Metternich l’autorisation de quitter Prague et de se réfugier avec sa jeune et seconde épouse Gabrielle-Ernestine de Castellane (1788-1850) qu’il a épousé en 1818 et sa fille de son précédent mariage, Josephine-Ludmille (1803-1893), en Haute-Autriche. Leur chemin vers Linz les font passer par Carlsbad, la célèbre ville d’eau. Ils traversent le Danube et s’installent confortablement à Linz dans un superbe immeuble, au 27 de la Hauptplatz2 à proximité du fleuve sur les bords duquel Joseph Fouché va marcher, méditant sur son destin, sa solitude, son ennui et son oubli. Peut-être se souvient-il aussi que c’est juste en face de Linz, sur la rive gauche que se sont affrontées le 17 mai 1809 les armées autrichiennes et les troupes napoléoniennes placées sous le commandement du maréchal Bernadotte. Peu lui importe désormais. Il se fait même naturaliser autrichien. En 1819, Metternich autorise Fouché malade à quitter Linz et son climat peu favorable pour s’installer à Trieste. Il meurt à son domicile, le palazzo Vicco, le 26 décembre 1820 assisté de Jérôme Bonaparte qui brûle à sa demande ses papiers, emportant ainsi ses secrets avec lui.
L’écrivain autrichien Stefan Zweig (1881-1942) lui a consacré une biographie. Il décrit brièvement dans celle-ci le contexte de son exil sur les rives du Haut-Danube autrichien.
« Linz, — on sourit toujours, en Autriche, quand quelqu’un prononce ce nom qui, si involontairement, rive avec Provinz. Une population de petits bourgeois, d’origine rurale, des bateliers, des artisans, pour la plupart de pauvres gens, avec seulement quelques maisons de la vieille noblesse autrichienne. Il n’y a pas, comme à Prague, une grande et glorieuse tradition, pas d’opéra, pas de bibliothèque, pas de théâtre, pas de bals merveilleux donnés par la noblesse, pas de fêtes : une véritable ville de province, sans vie et somnolente, un asile pour vétérans. C’est là que s’établit le vieux Fouché, avec les deux jeunes femmes, presque du même âge, qui sont l’une son épouse et l’autre sa fille. Il loue une superbe maison, la fait magnifiquement mettre en état, au grand plaisir des fournisseurs et des marchands de Linz, qui jusqu’alors n’avaient pas l’habitude d’avoir dans leurs murs de pareils millionnaires.

La résidence de Joseph Fouché au n° 27 de la place principale pendant son exil à Linz, photo Michael Kranewitter, droits réservés

Quelques familles s’efforcent d’entrer en relations avec cet intéressant étranger qui, grâce à son argent, ne manque pas, malgré tout, de distinction ; mais la noblesse préfère, d’une façon très marquée, celle qui est née comtesse de Castellane au fils d’un « épicier », à ce « monsieur Fouché », à qui il a fallu un Napoléon (qui n’est lui-même à ses yeux qu’un aventurier) pour jeter sur ses maigres épaules un manteau ducal. D’autre part, les fonctionnaires ont été secrètement invités par Vienne à le fréquenter aussi peu que possible ; ainsi cet homme qui autrefois était d’une activité passionnée vit complètement isolé et presque en quarantaine.

La comtesse Gabrielle-Ernestine de Castellane (1788-1850), duchesse d’Otrante, épouse de Joseph Fouché 

   Un contemporain le décrit alors, dans ses mémoires, pendant un bal public :« On était frappé par la façon dont la duchesse était fêtée, tandis que Fouché lui-même était négligé. Il était de taille moyenne, fort, sans être épais, et avait un affreux visage. Il paraissait aux lieux où l’on dansait toujours en habit bleu avec boutons d’or, en culottes blanches et en bas blancs. Il portait le grand ordre autrichien de Léopold. D’ordinaire, il se tenait seul, près du poêle, et il regardait danser. Lorsque je considérais celui qui fut autrefois le tout-puissant ministre de l’empire français, qui maintenant était là si isolé, si délaissé et qui paraissait heureux lorsqu’un fonctionnaire quelconque engageait avec lui une conversation ou lui offrait de jouer aux échecs, je pensais involontairement à l’instabilité de toute puissance et de toute grandeur terrestre. »

Stefan Zweig, Joseph Fouché, Bildnis eines politischen Menschen, 1929, traduction en langue française, Grasset, Paris, 1969, traduction d’Alzir Hella (1881-1953) et d’Olivier Bournac
Stefan Zweig a dédié sa biographie à son ami l’écrivain et médecin autrichien Arthur Schnitzler (1862-1931).
On consultera également la biographie de Joseph Fouché écrite par Louis Madelin (1871-1956) et parue en 1901.
Autres biographies ou ouvrages en français sur Joseph Fouché :
Jean Tulard, Joseph Fouché, Fayard, Paris, 1998
Julien Sapori, L’exil et la mort de Joseph Fouché, Anovi, Paris, 2007
Emmanuel de Waresquiel, Fouché : les silences de la pieuvre, Paris, Tallandier, 2014
Julien Sapori, (dir.), Dictionnaire Fouché, Tours, 2019

Notes : 
1 Joseph Fouché, élevé au titre de comte d’empire en 1808 devient duc d’Otrante en 1809. Otrante (Otranto) est une ville de l’Italie du sud, située dans la région des Pouilles au bord du canal du même nom qui sépare l’Italie de l’Albanie.  
2
Place principale à proximité du Danube

La place principale de Linz à l’époque de l’exil de Joseph Fouché, sources : Robert Batty, Rudolf Lehr – Landeschronik Oberösterreich, Verlag Christian Brandstätter, Wien 2008 

Adalbert Stifter (1805-1868) : écrivain, peintre et pédagogue haut-danubien

Adalbert Stifter, lever de lune (vers 1855)

   Écrivain, pédagogue, poète réaliste et peintre haut-autrichien né en 1805 à Oberplan (Horní Planá, Bohême méridionale) petit village au bord de la Vltava non loin de Český Krumlov (Krumau), à la frontière avec l’Autriche (Haute-Autriche) et mort à Linz, grand admirateur de Goethe, Adalbert Stifter est une des personnalités culturelles autrichiennes incontournables de l’époque post-napoléonienne du Biedermeier (1815-1848). Mais le peintre écrivain ou l’écrivain peintre autrichien, fervent admirateur et observateur de la nature et adepte de la lenteur et du voyage intérieur, ne symbolise en aucune façon cette époque superficielle qui représente le grand triomphe du goût bourgeois et du conservatisme dans les pays de la confédération germanique et en Autriche.

Oberplan (Horní Planá)  en Šumava (Forêt de Bohême), village natal d’Adalbert Stifter, peinture d’A. Stifter, vers 1823

A. Stifter perd à l’âge d’à peine douze ans son père qui se tue accidentellement (1817). Traumatisé, son fils tente d’abord de se laisser mourir de faim puis il entreprend l’année suivante, des études à l’abbaye bénédictine de Kremsmünster.

L’abbaye de Kremsmünster, peinture d’A. Stifter

Il est admis en 1826, à la Faculté de droit  l’Université de Vienne et s’éprend de Fanny Greipl, fille d’un commerçant de la bourgeoisie viennoise. Dans ses lettres à Fanny, l’étudiant se dévalorise lui-même comme amant. Son refus de participer à un concours pour obtenir une chaire de physique à l’Université de Prague déconcerte ses futurs beaux-parents, qui le perçoivent alors comme un homme instable, sans ambition ni avenir. En 1832 a lieu la rencontre avec Amalia Mohaupt, une ancienne prostituée, qui devient sa femme en 1837. Sans descendance, le couple adopte plus tard les enfants d’un frère d’Amalia. Une fille se suicidera en se jetant dans le Danube. Après cet accident tragique, l’écrivain s’enfonce dans une grave dépression.

A. Stifter en 1868, portrait de Bertalan Széchely (1835-1910)

A. Stifter n’arrive pas à choisir entre les vocations de peintre et d’écrivain. Il se décide en 1840, après de longues hésitations, à devenir écrivain et c’est à travers la littérature et les nouvelles qu’il exprimera son talent d’observateur de la nature et sa passion pour celle-ci.
La parution de sa première nouvelle Der Kondor (1840) à Vienne reçoit un accueil très enthousiaste et le rend célèbre. Pendant huit ans, il arrive à subvenir à ses besoins grâce à la vente de ses livres et des leçons particulières. Stifter est nommé Inspecteur des écoles primaires de Haute-Autriche en 1850, prend sa retraite en 1865 et, gravement malade, met brutalement fin à son existence en se tranchant la gorge le 28 juin 1868.

Le mur du diable, près de Hohenfurt, peinture d'A. Stifter

Le mur du diable, près de Hohenfurt, peinture d’A. Stifter, photo droits réservés

« Si l’on excepte les écrits de Goethe et en particulier les Conversations de Goethe avec Eckermann, le meilleur livre allemand qui existe : que reste-t-il de la littérature en prose allemande qui mérite d’être relu et relu encore ? Les Aphorismes de Lichtenberg, le premier tome de l’Autobiographie de Jung-Stilling, L’été de la Saint-Martin d’Adalbert Stifter et Les Gens de Selwyla de Gottfried Keller, c’est tout pour l’instant. »

Friedrich Nietzsche, « Le Voyageur et son Ombre » in Humain, trop humain. Un livre dédié aux âmes libres., 1879

La maison d’Adalbert Stifter à Linz, à proximité du Danube et du centre ville (rive droite), aujourd’hui siège de l’Institut Adalbert Stifter et d’un musée littéraire (dans l’appartement occupé par A. Stifter au deuxième étage) consacré à l’écrivain-peintre et à son oeuvre. 

http://www.adalbertstifter.at
http://www.stifterhaus.at

Gerald Stieg, « Stifter (Adalbert) », Dictionnaire du monde germanique, dir. Élisabeth Décultot, Michel Espagne et Jacques Le Rider, Éditions Bayard Paris, 2007

Bibliographie sélective en langue française :
Le Sentier dans la montagne, Éditions Sillage, Paris, 2017
Le cristal de roche, Paris, Éditions Sillage, Paris, 2016
Dans la forêt de Bavière, Premières pierres, Saint-Maurice, 2010
Fleurs des champs, Éditions Circé, Belval, 2008
Les deux soeurs, Éditions Circé, Belval, 2004
L’arrière-saison, récit, Éditions Gallimard, Paris, 2000
Brigitta, Éditions Farrago, Tours, 2000
Descendances : nouvelle, préface de J. Le Rider, Éditions J. Chambon, Nîmes, 1996
Pierres multicolores. 1, Cristal de roche, nouvelles, Éditions J. Chambon, Nîmes, 1995
L’homme sans postérité, Éditions du Seuil, Paris, 1995
Le condor, Éditions Séquences, Rezé, 1994
Le village de la lande, nouvelle, Éditions J. Chambon, Nîmes, 1994
Tourmaline : pierres multicolores II, nouvelles, Éditions J. Chambon, Nîmes, 1990
Les cartons de mon arrière-grand-père, Éditions J. Chambon, Nîmes, 1989
Le château des fous, Éditions Aubier (édition bilingue), Paris, 1979

« Gorgé des rumeurs et des flots de sève montante de leur jeune vie à peine commencée, les jeunes gens escaladaient la pente entre les arbres, parmi les chants des rossignols. Tout autour d’eux se déployait un paysage resplendissant où couraient les nuages. Dans la plaine, en contrebas, on pouvait apercevoir les tours et la masse des demeures d’une grande ville. »
Adalbert Stifter, L’homme sans postérité, traduction de Georges-Arthur Goldschmidt, Éditions du Seuil, Paris, [1995 ?], c. 1978

Eric Baude, © Danube-culture, mai 2020, révisé septembre 2021

Ports de plaisance, emplacements d’amarrage, barrages-écluses et autres informations pour naviguer sur le Danube autrichien (I) : du Km 2215 (rive gauche) au Km 2058, 5 (Ybbs/Donau)

Km 2215
Rive gauche
Château-fort moyen-âgeux de Krämpelstein (propriété privée, pas de visite).  Ce château-fort a appartenu autrefois aux évêques de Passau qui exigeaient un droit de passage pour les bateaux. Il a été dans les années soixante, le siège du club de bateaux à moteur de Krämpelstein.

Km 2213
Rive droite
Emplacement d’amarrage (20 m) de la communauté de communes d’Esternberg

Km 2208, 4
Rive droite
Port de plaisance de Kasten
Longueur maximum : 15 m, mouillage : 1, 5 m
Informations et contacts :
Tobias Ebner
Tél. portable : 0049/172 8588548
Johann Pilsl
Tél. : 0043/7714/81 21
Herbert Bauer
Tél. : 0043/7714/80 20

Km 2203, 3
Barrage-écluse de Jochenstein
Contacts :
Tél. : 0049/8591/ 91 19 81 11
Canal 22
Toute proche de l’écluse-barrage de Jochenstein, sur la rive gauche allemande, se tient la « Haus am Strom » (« La Maison au bord du fleuve ») : expositions sur le thème de l’eau et de l’environnement.
www.hausamstrom.de
Ne pas manquer d’admirer au passage la jolie sirène de Jochenstein (rive droite)

Km 2200, 6
Rive droite
Amarrage autorisé et gratuit au ponton ( longueur : 200 m) de la commune d’Engelhartszell
Cafés, restaurants, station-service dans le village.
Parc pédagogique d’attraction «Donauwelt» (ouvert de mai à septembre)
www.donau-welt.at
Belle abbaye cistercienne trappiste d’Engelhartszell, seule abbaye cistercienne trappiste d’Autriche
www.stift-engelszell.at

Km 2197, 6
Rive gauche
Port de plaisance de Schattental
Longueur maximale : 8 m, mouillage : 3 m, eau et électricité au ponton, douches à l’auberge « Luger ». Excellente cuisine !
☛ Le tirant d’eau à l’entrée du port peut être réduit à 1 m en fonction de l’ensablement.
Contacts :
Gasthof Luger
Tel. : 0043/7285507
office@gasthof-luger.at
www.gasthof-luger.at

Km 2197
Rive gauche
Château fortifié de Rannariedl (XIIIème siècle)

Km 2194, 8
Rive gauche
Commune de Niederanna
Emplacement d’amarrage de l’auberge «Draxler»
Contacts :
Auberge «Draxler»
Tél. : 0043/728 55/11
Les fameuses embarcations en bois danubiennes à rames et à moteur les « Zille »,  sont encore fabriquées dans ce village par deux artisans.
Rudolf Königsdorfer
Tel : 0043/7285 508
www.zille.at
Anton Witt
Tel. : 0043 7285 63 90

Km 2188, 5
Rive gauche
Ruines du château-fort de Haichenbach
Ancienne forteresse romaine

Km 2187
Rive droite
Port de plaisance de Schlögen
Contacts :
Tél. 0043/7279/87 22 ou 0043/7279/82 41

www.freizeitanlage-schloegen.at
Un endroit magique où il faut impérativement faire halte. Extraordinaire boucle de Schlögen, un des plus beaux panoramas du parcours du fleuve ! Le Danube effectue ici une rotation de 180°.
Beaucoup de monde à la belle saison sur l’eau et sur les rives.
Il est possible de voir des castors au bord du fleuve en soirée.

Km 2182, 5
Rive gauche
Emplacement d’amarrage des auberges «Reisinger» et «Zum Heiligen Nikolaus».
Il n’est pas possible d’y passer la nuit.

Km 2178
Rive gauche
Port de plaisance d’Obermühl au confluent de la Petite Mühl et du Danube
Contacts :
Gasthof « Gierlinger »
Tél. 0043/7286/72 13
www.gasthof-gierlinger.at

Gasthof « Aumüller »
Tél. 0043/7286/72 16

Km 2170,5
Rive gauche
Emplacement d’amarrage de l’auberge « In der Exlau »
☛ Mouillage réduit au ponton (0,5 m)
Contacts:
Famille Arnezeder
Tél. 0043/7232/29 07
www.gasthof-exlau.com

Km 2168, 2
Rive gauche
Port de plaisance d’Untermühl au confluent de la Grande Mühl avec le Danube. Bel emplacement !
Contacts :
Rudolf Helm, capitaine du port
Tél. 0043/7232/21 69
Port.
0043/664/344 53 10
www.sportboothafen.at
Château de Neuhaus (XIIIème siècle)

Km 2162, 7
Écluse d’Aschach
Contacts :
Canal 18
Tél. 0043/504/321 66 10

Km 2160
Rive gauche
Emplacement d’amarrage de la commune d’Aschach.
Il est préférable de passer la nuit au port de plaisance de Kachlet en aval.

Km 2159, 5
Rive gauche
Port de plaisance du club de bateaux à moteur de Kachlet. Bien équipé.
Contacts :
Tél. 0043/664/ 36 85

www.myc-kachlet.at

Km 2157
Rive droite
Port de plaisance de Branstatt
Longueur maximale 8 m
Contacts :
Auberge «Dieplinger»
Tél. 0043/664/131 57 86
www.langmayr.at
Distillerie sur place !

Km 2147
Écluse d’Ottensheim
Pontons d’attente pour les bateaux de plaisance en amont et aval de l’écluse
Canal 20
Contacts :
Tél. 0043/504/321 66 20

Km 2145, 5
Rive gauche
Ancien bras d’Altarm
Possibilité d’ancrer à l’entrée de l’ancien bras.
Navigation au moteur interdite au-delà.

Km 2144
Rive gauche
Emplacement d’amarrage d’Ottensheim
Contacts :
WGD Tourismus
Tél. 0043/732/ 727 78 11
www.oberoesterreich.at/ottensheim

☛ Attention au bac Ottensheim-Wilhering
Château d’Ottensheim (XIIIème siècle)
Magnifique cloître cirstercien de Wilhering (rive droite)

Km 2135
Rive droite
Linz, capitale de la Haute-Autriche, 200 000 habitants
Une ville culturelle et entreprenante très agréable à découvrir. Capitale européenne de la culture en 2009.
À ne pas manquer  : Ars Electronica (Musée du futur), le Lentos Museum, deux institutions au bord du  Danube,  la pimpante vieille ville et bien la véritable Tarte de Linz !
La ville de Linz classée UNESCO City of Media Arts
En 2016, la capitale européenne de la culture invite ses visiteurs à explorer une cité contemporaine, tournée vers l’avenir. L’objectif du syndicat d’initiative de Linz est de permettre de découvrir par les cinq sens la ville admise dans le Réseau des villes créa-tives de l’UNESCO.
Office du Tourisme de Linz :
Tél. 00/43/732 70 70 20 09
www.linz.at
linz-panorama.webfly.at

Km 2134, 6
Linz
Emplacement d’amarrage au bateau-restaurant «Li+do»
Contacts :
schiffART – li+do
schiffART – Kapitän Schaurecker
Tel. 0043/664/15 36 164
steuerfrau@liplusdo.at

La DSS (Station de bateaux de Linz) qui gère l’embarcadère des bateaux de croisières autorise les bateaux de plaisance à s’amarrer au ponton n°1  (km 2134, 5 rive droite).
Contacts :
Tél. 0043/7433/25 90 82

Km 2131, 8
Rive droite
Port de plaisance d’hiver de Linz
Le MYCN (Club de bateaux à moteur Nibelungen) accueille volontiers les visiteurs. Un club très actif.
Contacts :
Niclas Jancso

Tél. 0043/664 61 51 407
nicolas.jancso@outlook.com
ou
Hans Fritz Krempl
Tél. 0043/699/88 79 38 51
www.mycn.at

Km 2130
Rive droite
Port de plaisance « Steinernes Brückl »
Le port est géré par le club de bateaux à moteur Nibelungen (MYCN) et le club ASKÖ de Linz
Contacts :
Robert Robert Mayer (MYCN)
Tél. port. 0043/664/80 7
8 27 74
r.mayer@mycn.at
www.mycn.at

ASKÖ
Tél. 0043/732/794 590
www.askoe-wsk-linz-at
office@askoe-wsk-linz.at

Km 2124, 6
Rive droite
Confluent de la Traun avec le Danube

Km 2124
Rive gauche
Port de plaisance de Steyregg
Club de bateaux à moteur de Steyregg
Contacts :
Ernst Trahl (président du club)
Tél. port. 0043/676/88 60 02 07
www.mycs.at
info@mycs.at
Lac de baignade à proximité

Km 2119, 7
Écluse d’Abwinden-Asten
Contacts :
Canal 22
Tél. 0043/504/321 66 30

Km 2118, 5
Rive gauche
Ancien bras d’Abwinden
Possibilité d’ancrer en aval de l’écluse dans l’ancien bras d’Abwinden mais il faut sonder régulièrement la profondeur.

Km 2113, 5
Rive  droite
Bras secondaire d’Enhagen
Possibilité d’ancrer dans le bras secondaire. Il faut toutefois sonder régulièrement la profondeur avant de s’avancer dans celui-ci.

Km 2112
Mauthausen
La commune de Mauthausen autorise l’amarrage d’un ou deux bateaux de plaisance au ponton. Utiliser à cet effet les installations de couleur grise.
Le Club de bateaux à moteur de Mauthausen se trouve au port de plaisance d’Au (Km  2107,1).
Le mémorial du camp du concentration de Mauthausen (3 km du ponton).

Km 2111, 8
Confluent de l’Enns (320 km) avec le Danube
Port industriel d’Enns

Km 2108, 8
Rive droite
Canal de l’Enns
Après le confluent de l’Enns avec le Danube on peut s’amarrer avec un petit bateau sur la rive droite du Canal de l’Enns.
Contacts :
Josef Gatterbauer, commune de St. Pantaleon-Erla
Tél. port. 0043/676/603 90 48

Km 2108, 5
Rive gauche
Confluent de l’Aist avec le Danube

Km 2107, 1
Rive gauche
Port de plaisance d’Au/Danube
Contacts :
Tél. port. 0043/699 10 86 55 31
ch_schuhmayer(@)hotmail.com

www.myc-au.at
Club de bateaux à moteur de Mauthausen
M. Poppe, responsable
Tél. port. 0043/676/627 59 65
Stefan Kreuzer
Tél. port. 0043/676/362 83 41
Km 2095, 6

Écluse de Wallsee 
Contacts :
Tél. 0043/504/321 66 40
Canal 18

Km 2093, 5
Rive droite
Emplacement d’amarrage dans le bras mort de Wallsee, rive droite (Club de bateaux à moteur et de ski nautique de Wallsee) et rive gauche (Steyrer Yachtclub)
Contacts :
Club de bateaux à moteur de Wallsee
M. Mühlbacher, capitaine du port
Tél. port. 0043/664/ 351 92 62

Steyrer Yachtclub
Tél. port. 0043/664/115 28 94

Alexander Bruha, responsable du ponton
Tél. port. 0043/660 354 27 27

www.1syc.at
E-Mail: office@1syc.at

Km 2084, 3
Rive droite
Marina Raderbauer
Longueur maximale pour les bateaux de plaisance des visiteurs : 13, 50 m
Contacts :
Firma Alois Raderbauer
Tél. 00/43/676 38 37 688
marina@raderbauer.at
www.raderbauer.at
Château de Dornbach (fin XIXème), rive gauche. En aval d’Ardagger commence la région de la Strudengau, connue autrefois pour ses tourbillons, sa navigation délicate et ses légendes. De nombreuses ruines de châteaux-forts dominent les rives du Danube jusqu’à Ybbs.

Km 2082, 7
Rive droite
Port de plaisance d’Ardagger
Contacts :
Sigi Wagner
Tél. port. 0043/664/413 79 31

www.steckerlfisch-Ardagger.at

Km 2080, 9
Rive droite
Signal de Tiefenbach.
Le signal (feux) indique le chenal à suivre en aval à hauteur de l’île de Wörth (Km 2077,3). En général les avalant empruntent le chenal sud (Hössgang) et les montant le chenal nord (Strudenkanal). Le signal pour les montant se trouve à la hauteur de la commune de St. Nikola (km 2074, 8).
☛ Pour les bateaux sortant du port de plaisance de Grein (Km 2079, 4, rive gauche), il est nécessaire d’appeler le bureau de surveillance pour connaître le chenal à emprunter.
Contacts :
Tél. 0043/7268/320
ou 0043/7268/321 

Km 2079, 4
Rive gauche
Port de plaisance de Grein.
Faire attention aux bancs de sable près de la rive à l’entrée du port, à proximité de l’arrivée du petit torrent dans le Danube.
Possibilité de s’amarrer aux pontons du Verein Turul.
Contacts :
Robert Koller
Tél. port. 0043/664/211 90 13 

www.turul.at
Ne pas manquer de visiter le Musée de la Navigation sur le Danube (château), le théâtre Roccoco datant de 1791 (le plus ancien théâtre d’Autriche) et du côté de la gourmandise l’excellente Konditorei Schörgi.

P1050981

Port de plaisance de Grein/Donau (photo droits réservés)

Km 2079, 2
Rive gauche
Station de bateaux de croisière du Danube de Grein.
Les bateaux de plaisance doivent s’amarrer au ponton n°3.
Contacts :
Tél. 0043/7433/25 90 82

Km 2076
Rive gauche
Château-fort de Werfenstein

Km 2069, 4
Rive gauche
Emplacement d’amarrage de l’auberge « Ziseritsch » (Neustadtl/Donau)
Au pied des ruines du château-fort de Freyenstein
Contacts :
Tél. 0043/7471 2272
gasthofziseritsch@gmx.at

Km 2067, 6
Rive droite
Willersbach
Emplacement d’amarrage de la collectivité de Willersbach-Neustadtl

Km 2065, 7
Rive gauche
Confluent de L’Ysper avec le Danube

Km 2060, 4
Barrage-écluse d’Ybbs-Persenbeug
Contacts :
canal 20
Tél. 0043/504/321 66 50

Barrage d'Ybbs:Donau- Perseuburg_écluses

Portes d’entrée aval de l’écluse du barrage d’Ybbs-Persenbeug (photo droits réservés)

Km 2058, 5
Rive gauche
Emplacement d’amarrage de la commune d’Ybbs/Donau. L’emplacement sert également de ponton d’attente pour le passage de l’écluse. Il n’est pas possible d’y rester pour la nuit à cause du fort courant en aval du barrage.
Le centre historique de la petite ville d’Ybbs a été entièrement  rénové. Le grand batelier Matthias Feldmüller, surnommé « l’amiral du Danube », y avait sa maison. Elle se visite. Amusant musée de la bicyclette.
En aval d’Ybbs/Donau commence la région de la Nibelungengau dans laquelle se situe plusieurs épisodes de la Chanson des Nibelungen.

 

 

 

 

 

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