Le parc du Prater
Le parc du Prater de Vienne : entre nature et divertissement
« Le Prater communique à l’Augarten par deux allées : c’est une forêt magnifique, d’une demi-lieue de long sur un quart de lieue de large, dont les arbres respectés par la cognée, depuis plusieurs siècles, présentent un abri majestueux et sombre où l’on respire toujours le frais. Comme ces arbres sont très- élevés, la terre qu’ils ombragent est couverte d’un tapis de verdure que le soleil ne jaunit jamais. Cette pelouse immense est parsemée de jolis pavillons, de maisonnettes, de cabanes d’une construction très variée. Ce sont des kiosques chinois turcs, indiens, de petites fabriques hollandaises, des chalets suisses, des huttes de sauvages, des masures gothiques. Chacune de ces habitations a une destination particulière : ce sont des cafés, des billards, des restaurateurs, des jeux de bagues, des salles de danse, des joueurs de gobelets, des cirques pour les exercices de chevaux ; les danseurs de corde, les feux d’artifices, tous les plaisirs enfin que réunissent à Paris les boulevards, les Champs-Élysées, le bois de Boulogne et les foires : mais Paris ne possède aucune promenade dans ses environs qui puisse être comparée au Prater par son étendue, la beauté de la végétation et l’extrême variété des sites.
Quoique le Prater soit éloigné de la ville d’un bon quart de lieues, le peuple s’y porte en foule, tous les dimanches et toutes les fêtes, pendant la belle saison ; les gens riches, tous les jours. Quel tableau charmant et animé ! Où le rencontrer ailleurs ? Princes, bourgeois, moines, militaires et grisettes s’y trouvent confondus. On y voit vingt peuples et vingt costumes différents : ce sont des Turcs, des Grecs, des Bohémiens, des Hongrois, des Cosaques, des juifs, les uns coiffés d’un turban, les autres d’un béret ; les Israélites barbus ; les Anabaptistes en lévite brune, et la tête couverte d’un grand chapeau ; les Viennoises de la classe des riches artisans portant une toque d’or de la forme du bonnet phrygien, des corsets d’une riche étoffe, des jupons plissés ; les paysans et les paysannes ayant des bretelles noires sur leur justaucorps. Au milieu de ce bizarre assemblage se promènent les élégants de la ville habillés à la française , mais ayant toujours dans leur mise et dans leur maintien quelque chose de tudesque. Dans les grandes allées du Prater, trois ou quatre files d’équipages circulent lentement au bruit de vingt ou trente orchestres distribués dans la forêt. Ceux qui préfèrent une promenade solitaire s’enfoncent jusqu’au bord du Danube, où la nature agreste et sauvage présente mille aspects enchanteurs qui inspirent le poète et font rêver le philosophe. Mais, dès que le soleil a quitté l’horizon, il faut abandonner le Prater, dont s’emparent en quelques minutes des myriades d’insectes importuns ; cousins, taons, maringouins : l’air en est obscurci ; ils fondent sur les promeneurs comme des nuées, ils les piquent, les dévorent. Un observateur allemand à qui je parlai de ce désagrément, me dit : C’est une police céleste. Sans ces insectes, l’amour ferait au Prater trop de ravage pendant le crépuscule. »
VOYAGE EN AUTRICHE, EN MORAVIE ET EN BAVIÈRE. FAIT A LA SUITE DE L’ARMÉE FRANÇAISE, PENDANT LA CAMPAGNE DE 1809 PAR LE CHEVALIER C. L. CADET DE GASSICOURT, PARIS, 1818
Charles-Louis Cadet de Gassicourt, fils illégitime de Louis XV, est un avocat, pharmacien, écrivain et goguettier français. Il séjourne à Vienne à la suite des armées napoléoniennes en 1809.
« Je regrette de ne pouvoir te parler encore que des plaisirs d’hiver de la population viennoise. Le Prater, que je n ‘ai vu que lorsqu’il était dépouillé de sa verdure, n’avait pas perdu pourtant toutes ses beautés ; les jours de neige surtout, il présente un coup d’oeil charmant, et la foule venait de nouveau envahir ses nombreux cafés, ses casinos et ses pavillons élégants, trahis tout d’abord par la nudité de leurs bocages. Les troupes de chevreuils parcourent en liberté ce parc où on les nourrit, et plusieurs bras du Danube coupent en îles les bois et les prairies. À gauche commence le chemin de Vienne à Brünn. À un quart de lieue plus loin coule le Danube (car Vienne n’est pas plus sur le Danube que Strasbourg sur le Rhin). Tels sont les Champs-Élysées de cette capitale… »
Gérard de Nerval (1808-1855), Voyage en Orient, IX, « Introduction, suite du Journal » par M. Gérard de Nerval, à un ami, Vers l’Orient, Troisième édition, revue, corrigée et augmentée, Tome premier, Paris, Charpentier, Librairie-Éditeur, 1851
« Le Prater est un lieu bas, humide, mal entretenu, où l’on doit se trouver fort bien aux heures les plus chaudes des jours d’été. Je n’ose avancé que les Viennois, qui ont aux environs de leur ville tant de sites charmants, abandonnent le Prater ; il faut cependant, qu’en historien fidèle je dise qu’au moment où j’y arrivais je n’y trouvais personne, pas un promeneur, un cavalier ou un équipage mais treize cerfs et un grand seigneur. Le grand seigneur passait rapidement pour regagner soin hôtel, et les cerfs qui sont en liberté et qui n’en abusent pas, venaient très débonnairement chercher leur pâture au lieu accoutumé. Comme tant d’autres choses, le Prater s’en va : les chemins de fer l’ont tué et l’on ne fait rien pour lui rendre la vie… »
Victor Duruy (1811-1864), Causeries de voyage, De Paris à Bucharest, Première partie. De Paris à Vienne, Librairie de L. Hachette, Paris, 1864
On se rend au Prater facilement par les moyens de transports ou à bicyclette, seul ou en famille pour jouir de l’atmosphère festive et populaire de ses attractions foraines, de sa légendaire et historique Grande-Roue sans laquelle Vienne ne serait pas Vienne et de ses cafés et restaurants mais aussi pour ses allées ombragées très fréquentées en toutes saisons par les sportifs et les promeneurs et une nature préservée qui s’étend jusqu’au Danube et au quartier de Freudenau, un des ports de la ville. Peut-être certains se souviendront-ils à l’occasion de leur promenade que le Prater fut aussi un haut-lieu des débuts de la démocratie, de la musique, de la chanson mais aussi de tous les genres musicaux et de l’histoire du cinéma viennois. D’autres, amateurs de suspens, préfèreront l’ambiance effervescente des courses hippiques du Wiener Trabennverein et se rendront à l’hippodrome classé monument historique tout proche de la Kriau pour y assister. L’atmosphère plus paisible du golf de Freudenau qui, comme les stades de football, a également empiété sur le Prater d’origine, invite les pratiquants de ce sport à savourer des heures de détente aux lisières de la zone industrielle.
Le Prater dans l’histoire et dans les arts
Comme tout bon Viennois Mozart eut l’occasion d’aller se promener dans le grand parc du Prater.
MOZART, Wolfgang Amadeus (1756-1791)
Gehn wir im Prater, gehn wir in d’Hetz (Allons au Prater…)
Canon KV 558 en si bémol majeur (2 septembre 1788)
https://youtu.be/BoL2NUnldDU
Le Prater est mentionné dans des sources écrites de la Renaissance en l’an 1403. Il occupe alors une superficie bien plus importante que celle d’aujourd’hui et une grande partie des terrains sont des marécages dus à la présence de plusieurs bras Danube. Ces terrains appartiennent à divers monastères et paroisses.
En 1560, l’empereur Maximilien II de Habsbourg (1527-1576), fait clôturer ces bois et ces prés et les transforme en réserve de chasse réservée aux membres de la Maison des Habsbourg. La noblesse n’est autorisée à s’y rendre qu’au mois de mai, et ce bien évidemment « sans pistolet ni chien ».
Peu après son couronnement, le jeune monarque Joseph II (1741-1790), fils aîné de Marie-Thérèse d’Autriche et de François Ier de Habsbourg-Lorraine décide en 1766 d’ouvrir une partie du parc au public sauf la Hirschau qui demeure interdite et est réservée à l’élevage du gibier.
Ce qui n’empêche nullement certains visiteurs de franchir la clôture pour y organiser des rencontres galantes et discrètes ou éventuellement pour s’y battre en duel en toute tranquillité. Cette ouverture au public du Prater fut suivie par un réel engouement des Viennois pour ce nouvel espace accessible et, par beau temps, de longues files de fiacres s’y rendent. Toute la ville ou presque se donne alors rendrez-vous au Prater.
Joseph II fait également bâtir la Lusthaus (La maison du plaisir) par un architecte autrichien d’origine française qu’il apprécie, Isidore Canevale (1730-1786). Le terrain choisi fut celui d’une cabane de chasse, aux abords d’un ancien bras du Danube, le Wiener Wasser qui a été par la suite transformé en plan d’eau.
Le nouveau bâtiment fut surélevé pour éviter les inondations fréquentes et destructrices. Les nombreuses parois vitrées et les portes ont été dessinées afin de permettre à la nature de pénétrer facilement dans le bâtiment. Les murs sont peints avec une couleur verte. On s’y donne rendez-vous, on y discute, mange, joue, on y écoute de la musique, flirte… Cinq allées partant de ce bâtiment sont aménagées et complètent l’allée principale, ce qui permet également à l’empereur de mieux faire surveiller son peuple. La Lusthaus et ses abords abritent une grande fête en 1814 organisée en l’honneur de la victoire sur Napoléon, manifestation à laquelle les soldats autrichiens de retour chez eux sont conviés.
La Lusthaus abrite toujours un excellent restaurant ainsi qu’un espace où sont organisées de nombreuses manifestations culturelles.
www.lusthaus-wien.at
Les grands cafés du Prater
Les premiers cafés et restaurants du Prater remontent au XVIIIe siècle. Trois établissements sont érigés dans les années 1786 sur l’allée principale. Le premier propose initialement des concerts de musique classique. Beethoven s’y produit en 1814, Joseph Lanner en 1824. Mal géré ou déficitaire, l’établissement change 21 fois de propriétaire entre 1854 et 1938 et sera détruit par les bombardements alliés en 1945.
Le deuxième café était encore plus vaste et plus chic que le premier. C’est à la valse que sont dédiés les concerts qui s’y dérouleront au XIXe siècle. Johann Strauss junior et ses deux frères le fréquente à plusieurs reprises. À côté du bâtiment principal se trouvent une salle de billard, un buffet, un grand salon avec son propre scène pour un orchestre, quatre autres salons ainsi qu’un un jardin d’hiver. L’établissement subit le même sort que le premier café à la fin de la seconde guerre mondiale.
Le troisième café fonctionne toute l’année. De grandes fêtes y sont également organisées, auxquelles participent des musiciens célèbres. Ce café est transformé en « Singspieltheater » pouvant accueillir jusqu’à 5 000 personnes (1871). L’entrepreneur et impresario Anton Ronacher (1841-1892) rachète le restaurant en 1877 et y fait représenter des opérettes et des spectacles de variétés. Le café est lui aussi touché par les bombardements à la fin de la seconde guerre mondiale et définitivement démoli en 1962 pour laisser la place au « Brunswick Bowling Hall ».
La Schweizerhaus, une institution gastronomique viennoise
« J’étais hier au Prater en compagnie du vice-chancelier, le comte Schönhorn. C’est un parc ravissant à l’étendue resplendissante. Nous avons jugé bon de quitter la grande allée à cause de la poussière et de nous diriger vers la forêt. Nous nous sommes arrêtés dans une petite auberge qui, d’après mon compagnon, s’appelle « Zur Schweizer Hütte ». Il y a des centaines d’années, un ermite vendait ici du poisson et des champignons aux chasseurs impériaux qui venaient s’y reposer. Les domestiques étaient des Suisses du Sundgau, réputés pour l’excellence et la loyauté de leur conduite, et le nom « SchweizerHütte » aurait été conservé depuis cette époque. Le propriétaire actuel est un homme d’un grand calme qui fait frire habilement des petits poissons à la broche et sert un délicieux jus de sureau que nous avons bu dans deux cruches … »
Lady Worthley Montaigu, 1766
La Schweizerhaus a été construite en 1868 sur l’emplacement de la « Zur Schweizer Hütte », un lieu fréquenté initialement par des chasseurs originaires de Suisse (d’où son nom) qui y recevaient l’aristocratie du Saint-Empire romain germanique. Elle est rachetée en 1920 par un jeune boucher de 19 ans d’origine tchèque, Karl Kolarik (1901-1993). Celui-ci y installe une cuisine qui permet aux clients d’observer la préparation des plats. Le bâtiment est détruit à son tour pendant les bombardements alliés de 1945. La famille Kolarik reprend ses activités en 1947 accueillant sa clientèle dans un ancien wagon de la Grande Roue et dans une cabane en bois de vigneron. Ce restaurant saisonnier (de mi-mars à fin octobre), une des adresses gastronomiques les plus populaires pour les amateurs de cuisine viennoise et bohémienne copieuse accompagnée de bières légendaires, demeure dans la possession de la même famille depuis 1920.
www.schweizerhaus.at
Outres de nombreux et impressionnants feux d’artifice qui sont tirés régulièrement depuis un emplacement spécifique du Haut-Prater, toutes sortes de tentatives et expériences scientifiques, parfois réussies, ont eu lieu dans le cadre du parc. Après le britannique Charles Hyam et l’artificier autrichien Johann Georg Stuwer en 1784, l’aéronaute français Jean-Pierre Blanchard (1753-1809) tente d’effectuer le premier vol libre en ballon depuis l’Autriche mais c’est d’abord un échec. Le public qui a du payer un droit d’entrée, est en colère et l’aéronaute doit être protégé de la foule par la police. Le 6 juillet 1791, il réussit toutefois à s’envoler du Prater jusqu’à Groß-Enzersdorf sur la rive gauche du Danube. Puis c’est au tour de l’horloger et génial inventeur Jakob Degen (1760?-1848) de s’envoler avec une machine volante à ailes mobiles actionnées par ses propres forces le 13 novembre 1808, réussissant le premier vol libre au-dessus du Prater. Huit ans plus tard, en 1816, le même Degen qui a inventé entretemps une hélice mécanique, fait monter un premier hélicoptère (sans pilote) jusqu’à une hauteur de 160 mètres.
Les grands travaux de régulation du Danube dans les années 1870 permettent la disparition quasi totale des marécages. À l’occasion de la grande Exposition universelle de Vienne en 1873, une partie des terrains du Prater sont défrichés et de nouveaux chemins sont aménagés pour les promeneurs.
Les bâtiments construits pour l’Exposition Universelle seront par la suite démolis, à l’exception de quelques-uns d’entre eux qui sont transformés en ateliers et loués à des artistes. Les autres bâtiments seront partiellement détruits par des bombardements en 1945. Le parc du Prater se trouve en zone d’occupation soviétique après la seconde guerre mondiale mais les Russes autorisent les Britanniques à y accéder et à y organiser des courses hippiques.
Le quai du Prater (Praterkai) a été aménagé en zone industrielle vers la fin du XIXe siècle. La zone de Freudenau est transformée en port fluvial. Des résidences sont construites le long du canal du Danube, un ancien bras du fleuve aménagé et des villas sont édifiées pour héberger de riches industriels anglais venus en Autriche profiter de la croissance économique. Ces derniers affectionnent particulièrement le Prater, car ils peuvent y pratiquer leurs sports favoris comme le cricket.
Le parc d’attractions
Gabor Steiner (1858-1944), directeur de théâtre, impresario et créateur du parc d’attractions Venedig in Wien (Venise à Vienne), inauguré en 1895, fait construire en 1897 la Wiener Riesenrad (Grande Roue de Vienne), un an avant le cinquantième anniversaire du règne de l’empereur François-Joseph de Habsbourg par les ingénieurs britanniques Walter Bassett Bassett (1864–1907) et Harry Hitchins.
Elle est fermée durant la premier guerre mondiale, sert comme poste d’observation militaire et faillit être détruite en 1916 mais le coût prohibitif de sa démolition incite le nouveau propriétaire des lieux à y renoncer. Elle brûle à l’occasion des bombardements de la ville en 1944 et sera reconstruite en 1953 en n’intégrant toutefois que 15 des trente nacelles qui équipaient la Grande Roue Viennoise d’origine. Elle est alors restituée aux héritiers d’Édouard Steiner, propriétaire qui en avait été dépossédé en 1938 à l’occasion de la promulgation de lois antisémites lors de l’Anschluss.
La discrète église Maria Grün, lieu de de pèlerinage
À l’opposé du parc d’attraction, presque invisible, la discrète petite église Maria Grün, cachée dans son écrin de verdure près de l’allée d’Aspern et du Danube du Danube fut autrefois un haut-lieu de pèlerinage. Elle a été construite sur les plans de Josef Münster (1869–1946), architecte de la ville de Vienne en 1924 et consacrée le 21 décembre de la même année. Le bâtiment a été endommagé à plusieurs reprises pendant la seconde guerre mondiale par des bombardements qui visaient la zone industrielle et le port voisin de Freudenau. Restaurée par la suite elle fut réouverte au service religieux en 1948. Elle possède un orgue depuis 1985 et a été de nouveau entièrement rénovée en 1989. Maria Grün reste une destination privilégiée de pèlerinage pour les habitants d’origine croate de Vienne et du Burgenland.
Le Prater et le cinéma
La plupart des toutes premières projections et spectacles cinématographiques ont lieu à Vienne en 1896 dans le cadre du parc d’attractions « Venise à Vienne » ouvert en 1895. Mais ce n’est qu’au tout début du XXe siècle que sont construites au Prater des petites salles de cinémas indépendantes. Gustav Münstedt diffuse des films dans une salle adjacente de sa « Prater Hütte » à partir de 1904 puis dans la grande salle. 5 cinémas jouissent d’une situation de monopole jusqu’en 1920, année où est inauguré la salle de cinéma du cirque Busch dans les anciens locaux de celui-ci. Toutes les salles à l’exception du Lustspieltheater seront détruites en 1945 par les bombardements alliés.
Le Prater dans le patrimoine littéraire, cinématographique et musical : une source d’inspiration féconde
Le Prater et les prairies alluviales danubiennes, ces « espaces du bonheur pas cher », cadres d’idylles ou d’intrigues, champs géographique d’expérimentation de tous les possibles, du bonheur le plus pur mais aussi le plus kitsch, cultivé à merveille par les classes populaires ou du désespoir le plus profond et d’expression de frustrations, de déviations, apparaissent régulièrement dans les romans, romans policiers, nouvelles, pièces de théâtre, récits et poèmes d’auteurs autrichiens et étrangers. Quelques-uns d’entre eux sont traduits en français parmi lesquels La Ronde, Le sous-lieutenant Gustel d’Arthur Schnitzler (1862-1931), La nuit fantastique, L’amour d’Erika Ewald de Stefan Zweig (1881-1942), Le Flambeau dans l’oreille – Histoire d’une vie 1921-1931 d’Elias Canetti (1905-1994), Un autre Kratki-Baschik (récit) d’Heimito von Doderer (1896-1966), Ashantee de Peter Altenberg (1859-1919), Histoire d’une fille de Vienne racontée par elle-même de Josephine Mutzenbacher (1906), roman érotique attribué postérieurement à Felix Salten (1869-1945), Le Tabac Tresniek de Robert Seethaler (1966).
Quant à Ödon von Horváth (1901-1938), auteur qualifié de « dégénéré » par les Nazis et dont ils brûleront les livres en 1933, il fait de ces prairies alluviales précisément l’un des cadres de sa pièce Légendes de la forêt viennoise (Geschichten aus dem Wienerwald, 1931) dans lequel les protagonistes, petits-bourgeois et commerçants de Josefstadt, déshabillés brutalement de leur verni comportemental et social superficiel, sont livrés à leurs attirances pulsionnelles. Là encore le kitsch s’invite et triomphe au milieu de cette farce tragicomique danubienne cruelle. Horváth emmène dans un épilogue pathétique ses personnes au paroxysme de leurs trivialité jusque dans le décor naturel et romantique de la Wachau, à Dürnstein, un des lieux favoris d’excursion des Viennois par bateau. Revenant comme des refrains tout au long de la pièce, les valses de Strauss qui « symbolisent la gaieté et l’insouciance, ainsi que le rayonnement culturel de Vienne dans la deuxième moitié du XIXe siècle, relèvent désormais d’un âge d’or idéalisé et entrent en collision avec les comportements triviaux des petits-bourgeois horvathiens : Le Beau Danube bleu est joué par l’orchestre du bar « Maxim » pour servir de toile de fond au numéro de « trois filles à moitié nues, les jambes prises dans une queue de poissons » qui sont supposer figurer « les sirènes du Danube ». La valse est réduite à l’état d’ornement dans un tableau de mauvais goût : à l’esthétique se substitue le pornographique. »1
Dans La pianiste d’Elfriede Jelinek « l’interdit social tissé par sa mère ne laisse chez Erika qu’une soupape, la rupture clandestine des digues, l’irruption des pulsion »2. Là encore le Prater sert de cadre au voyeurisme et à l’assouvissement des pulsions de son héroïne. « Elle part en chasse dans les « gorges goulues » de prairies désertes, dans cette steppe incertaine où « le paysage s’étend à perte de vue jusqu’à des pays étrangers [la Slovaquie et la Hongrie], jusqu’au Danube, au port pétrolier de Lobau [rive gauche, un territoire de prairies alluviales conquis par la ville industrielle au XXe siècle], au port de Freudenau. [port d’hiver et port commercial de Vienne, sur la rive droite, au-delà du Prater vers l’aval]. Le port aux grains de Albern. La jungle à l’entour du port de Albern. Puis l’Eau-Bleue et le cimetières des Sans-Noms [Namenslos Friedhof]. (Pierre Burleaud, idem, p. 169). Comme le souligne P. Burleaud, l’élément liquide « joue là son rôle métaphorique: écoulement, inondation, vagues et flots. »3
Le Prater, autrefois haut-lieu de fêtes mais aussi de prostitution (tout Vienne ne fut-elle pas à une certaine époque qu’un vaste bordel ?) et ses éléments naturels n’exorcisent-ils pas le besoin de liberté d’habitants d’un pays tourmenté par son passé récent et qui n’a gardé de son ancien et immense territoire s’étendant auparavant jusqu’à la mer Adriatique, qu’une partie d’un fleuve symbole emportant avec lui des souvenirs de grandeur déchue.
Quelques films mettant en scène le Prater :
Merry-go-round (Erich von Stroheim, 1923)
Pratermizzi (Gustav Ucicky, 1927)
Prater (Willy Schmidt-Gentner, 1936)
Wiennerinnen —Schrei nach Liebe (Kurt Steinwendner, 1952)
Im Prater blüh’n wieder die Bäume (Hans Wolff, 1958)
Lo Strangolatore di Vienna (Guido Zurli, 1971)
Exit… nur kein Panik (Franz Novotny, 1980)
Malambo (Milan Dor, 1984)
The living Daylights (John Glen, 1987)
Der Prater – Eine wilde Geschichte, documentaire (Manfred Corrine, 2008)
Der Räuber (Benjamin Heisenberg, 2010)
Der Prater, documentaires en trois parties (Peter Grundei, Roswitha Vaughan, Ronald Vaughan, 2016)
Mein Prater, reportage pour la télévision (Franz Gruber, Andreas Dorner, 2017)
G’schichten aus dem Wiener Prater, documentaire (Thomas Rilk, musique Ernst Molden, 2017)
Quant à la Grande-Roue emblématique, elle figure aussi dans de nombreux films de cinéastes ayant pris pour cadre Vienne et son patrimoine culturel comme Le Troisième Homme de Carol Reed (1949), d’après le scénario et le roman de Graham Greene et Tuer n’est pas jouer (1987) de John Glen qui fut lui-même assistant monteur pour le Le Troisième Homme.
En littérature… (langue allemande) et en musique :
« Im Prater blühn’ wieder die Bäume » (« Au Prater les arbres refleurissent »), chanson viennoise de Robert Stolz (1880-1975)
https://youtu.be/g4ibJ7FLMHs
Altenberg, Peter, Ashantee, Berlin, S. Fischer, 1897
Altenberg, Peter, « Blumen–Korso », in Wie ich es sehe, Prosaskizzen, Berlin, S. Fischer, 1898
Altenberg, Peter, « Bäume im Prater/ Große Prater–Schaukel/ Café de L’opéra (im Prater)/Newsky Roussotine–Truppe », in Was der Tag mir zuträgt, Fünfundfünfzig neue Studien, Berlin, S. Fischer, 1901
Altenberg, Peter, « Sonnenuntergang im Prater », in Märchen des Lebens, Berlin, S. Fischer, 1908
Altenberg, Peter, Extrakte des Lebens, Gesammelte Skizzen 1898–1919, Hg. von Werner J. Schweiger. Wien und Frankfurt, Löcker/S. Fischer, 1987
Amanshauser, Gerhard, Als Barbar im Prater, Autobiographie einer Jugend, Salzburg–Wien–Frankfurt, Residenz, 2001
Amon, Michael, Wehe den Besiegten, Wien, echomedia, 2013 (= Wiener Trilogie der Vergeblichkeiten 2)
Andersen, Hans Christian, « Nur ein Geiger », in Gesammelte Werke Bd. 9, 10 und 11, Leipzig, Karl Lord, 1847
Artmann, H.C., « blauboad 1/brodaschbiagelgalerie », in gedichteaus bradensee. Salzburg, O. Müller, 1958
Artmann, H.C., Wenn du in den Prater kommst, Berlin, Volk und Welt, 1988
Auernheimer, Raoul, Laurenz Hallers Praterfahrt, Berlin, S. Fischer, 1913
Bartl, Fritz, Freudenau 1943, Ein wienerisches Epos in Spielszenen, Wien, Rido, 1945
Bartl, Fritz, Der Wurstelprater, Ein wienerisches Epos, Wien, Titan, 1946
Bartl, Hans, Der Eifersüchtige im Wurstelprater, Posse mit Gesang, Wien, C. Fritz, 1885
Bayer, Karl, Ein Engagement im Prater, Gelegenheitsstück mit Gesang, [UA 21.April 1862]
Bayer, Karl, Der/Ein Praterscheiber, Singspiel mit Gesang. Musik Karl Kleiber, Handschrift [UA 31. Mai 1862]
Bayer, Karl, Der 1. Mai oder Die Wettfahrer im Prater, Musik arl Kleiber, [UA 1. Mai 1862]
Bayer, Karl, Ein Praterwurstel, Musik Karl Kleiber, [UA 6. Juli 1862]
Bayer [Karl?] Die schönen Praterwirthstöchter, Posse mit Gesang. Handschrift. [k.A.]. Blank (?) Die Praterhirschen, Scherz mit Gesang, Handschrift. [k.A.]
Blissett, Fanny, Jesuitenwiese, Ein leicht revolutionärer Poproman, Wien, Zaglossus, 2014
Bolla, Jakob Ignaz, Die Josephsaue, oder das Mayenfest im Prater, Wien, gedruckt bey Joh. Thom. Edl. von Trattnern, 1781
Brandstetter, Ernst (Hg.), G`schichten vom Praterkasperl, Wien, Austria Press, 2004
Bujak, Hans, Der Blumenkorso, Wien, Wiener Verlag, 1945
Bujak, Hans, Fiakerlied, Wien, Rudolf Cerny, 1948
Busson, Paul, « Praterabend », in Wiener Stimmungen, Wien, Robert Mohr, 1913
Canetti, Elias, Die Fackel im Ohr. Lebensgeschichte 1921–1931, München, Hanser, 1980
Canetti, Veza [Magd, Veza], « Der Verbrecher », in Arbeiterzeitung 31. August 1933
Chobot, Manfred, « S risnradl », in Kumm haam in mei Gossn, Dialektgedichte,Weitra, Bibliothek der Provinz, 2000
Denis, [Michael], Ode auf den Prater, Wien,Mai 1766 www.digital.wienbibliothek.at/nav/classification/1827078
Denis, Michael, « Das Kunstfeuer im sogenannten Prater », in Leiter, Helmut (Hg.), Wien im Gedicht, Wien, Belvedere Verl. Wilhelm Meissel, 1967
Doderer, Heimito von, « Ein anderer Kratky–Baschik », in Die Erzählungen, Herausgegeben von Wendelin Schmidt–Dengler, München, Biederstein, 1972
Doderer, Heimito von, Roman No. 7/I. Die Wasserfälle von Slunj, München, Biederstein, 1963
Doderer, Heimito von, « Praterabend », in Leiter, Helmut (Hg.), Wien im Gedicht, Wien, Belvedere Verl. Wilhelm Meissel, 1967
Doppler, Josef, Vor und nach der Weltausstellung, Zeitbild mit Gesang und Tanz, Musik Karl Kleiber [UA 5. Juli 1873]
Eberl, Ferdinand, Die Limonadenhütte, Ein Lustspiel in drey Aufzügen, 1793 http://lithes.unigraz.at/maezenepdfs/translit_eberl_limonadehuette.pdf
Feldmann, Else, « Das Nachttier », in Die Zeit 16. Jänner 1916
Feldmann, Else, Löwenzahn. Eine Kindheit, Wien, Rikola, 1921
Ferra–Mikura, Vera, « Wurstelprater », in Leiter, Helmut (Hg), Wien im Gedicht, Wien, Belvedere Verl. Wilhelm Meissel, 1967
Fiebrich, F.[ranz] P.[aul], Weg von unser`m Prater (Opus 357). [k.A.]
Friedel, Johann, Briefe aus Wien verschiedenen Inhalts an einen Freund in Berlin, Leipzig undBerlin, 1783
Gärtner, Wilhelm, « Soirée im Prater », in Kaleidoskop. Novellen, Wien, 1845
Gail, Hermann, Prater, Frankfurt/Main, S. Fischer, 1976
Gaheis, Franz Anton de Paula, « Spazierfahrt in den Prater », in Wanderungen und Spazierfahrten in die Gegenden um Wien, Drittes Bändchen,Wien, 1809
Gaheis, Franz Anton de Paula, « Das Feuerwerk im Prater (den 26. Juli 1807) », in Wanderungen und Spazierfahrten in die Gegenden um Wien, IX. Bändchen, Wien
Glaßbrenner, Adolf, Der Prater, in Bilder und Träume aus Wien, Erster Band, Leipzig, F. Wolckmar, 1836
Gottsleben, Ludwig, Die Prater–Vögel, Liederspiel aus dem Wienerleben in 1 Akt, 1879
Greene, Graham, Der dritte Mann und Kleines Herz in Not, Zürich, Artemis, 1951
Grieser, Dietmar « Auf stillen Praterpfaden », in Des Pudels Kern, Das Beste vom Literatur–Detektiv. Wien, Amalthea Signum, 2002
Grieser, Dietmar « Gelbes Wasser, Buffalo Bill II Messegelände », in Weltreise durch Wien, St. Pölten–Wien–Linz, Niederösterreichisches Pressehaus, 2002
Grieser, Dietmar « Bitte sehr, bitte gleich » Der Komiker Carl Blasel, in Verborgener Ruhm, Österreichs heimliche Genies. Wien, Amalthea Signum, 2004
Hanner [Johann David] Das Vergnügen in Prater und Augarten, Wien, 1793
Hebbel, Christian Friedrich, « Aus dem ,Wiener Prater », in Hebbels Werke, Erster Band, Herausgegeben von Dr. Karl Zeiß, Leipzig und Wien, Bibliographisches Institut, 1899 Heeger, J[ohann] und Legrün, A[lois], Wiener Kinder, I. Buch, erarbeitet von einer Wiener Lehrergemeinschaft, Wien–Leipzig, Deutscher Verl. für Jugend und Volk, 1923
Herz, Peter und Schick, Zdenko, Pratermärchen, Maschinenschriftliches Libretto zur
Operette [k.A.]
Herz, Peter, Gestern war ein schöner Tag, Wien, Österr. Bundesverlag, 1985.
Herzl, Theodor, « Der Menschengarten », in Neue Freie Presse 6. Juni 1897
Herzl, Theodor, « Juli–Sonntag im Prater », in Neue Freie Presse 23. Juli 1899
Hinterberger, Ernst, Jogging, Wien–Berlin, Medusa, 1984
Hinterberger, Ernst, Doppelmord, Ein Fall für Trautmann, Wien, echomedia, 2005
Hinterberger, Ernst, Die Tote lebt, Ein Fall für Trautmann, Wien, echomedia, 2006
Hinterberger, Ernst, Mord im Prater, Ein Fall für Trautmann, Wien, echomedia, 2007
Hinterberger, Ernst, Blutreigen, Ein Fall für Trautmann, Wien, echomedia, 2011
Hoffmann, Carl, Der Praterwurstel, Wien, Selbstverlag der Hg., [k. A.], (= F.J. Singer und O.F. Ebersberg (Hg), « Lustige Bibliothek » 4)
Hofmann, Oskar, Die Praterfee, Walzerlied, Handschrift. [k.A.]
Hofmannsthal, Hugo, Der Rosenkavalier, Opernlibretto [UA 1911]
Hofmannsthal, Hugo, Arabella, Opernlibretto [UA 1933]
Hollaus, Anton, Lied der Arbeiter am Überschwemmungs–Dammbau in Prater, [1848]
Jelinek, Elfriede, Die Klavierspielerin, Reinbek, Rowohlt, 1983
Jones, J. , Das Haus der Spiegel, Berlin, Aufbau, 2010
Karlweis, Carl, Wiener Kinder, Ein Roman. Stuttgart, Adolf Bonz & Comp., 1887
Kauer, Max, Pratermonster, Kriminalroman, Wien, Emons, 2016
Kneifl, Edith, Der Tod fährt Riesenrad, Innsbruck–Wien, Haymon, 2012
Kneifl, Edith (Hg.), Tatort Prater, 13 Kriminalgeschichten aus Wien, Wien, Falter, 2012
Kneifl, Edith, Endstation Donau, Ein Wien–Krimi. Innsbruck–Wien, Haymon, 2014
Kraus, Karl, Die letzten Tage der Menschheit, Tragödie in fünf Akten mit Vorspiel und Epilog, Wien/Leipzig, Verl. « Die Fackel », 1922
Kreisler, Georg: Ein Prophet ohne Zukunft, Zürich, Diana, 1990
Kreuzig, Friedrich Peter, « Hauptallee/ Prater/ Pantomime/ Venedig in Wien/ Rennen in derFreudenau », in Die andere Donau, Wiener Sonette. Wien, Bergland, 1955 (= Neue Dichtung aus Österreich 6).
Kuh, Anton, « Praterausrufer/ Die Parkbank am Abende », in « Der unsterbliche Österreicher », München, Knorr & Hirth, 1931
Lahner, Franz, « Puppentheata/ A Riesenradl/ Des Leben–A Geistabauhn », in « Gsehgn undGheat– in da Weanastadt », Wien, Europäischer Verlag, 1972
Lahner, Franz, « Im Prater », in Wia d`Leut so san, Wels, Mohl, 1979
Lahner, Franz, « Weihnacht im Prater », ins Christkindl redt wienerisch, [Wien] Gutenberg, [k.A.]
Langer, Anton, « Ein Hanswurst », In Wien gegeben unter dem Titel, Ein Prater–Wurstl, Original–Lebensbild in 3 Akten, Musik vom Kapellmeister Adolf Müller, in Wien am 19. August 1858 zum ersten Male gegeben und mit enthusiastischem Beifall aufgenommen, Libretto als Manuscript gedruckt, Wien 1858
Lindenbaum, Walter, « Prater », in Arbeiterzeitung 21. Juli 1933
Lippenberger, Bettina « Krümelchen und seine Freunde in Wien », Wien, Karina, 2014 Löw, Fritz, « Wurstelprater », Illustrationen: Atelier « Otto », Wien, Österreichische Staatsdruckerei [1930]
Mastalier, Carl, « Der Prater », in Carl Mastaliers Gedichte nebst Oden aus dem Horaz, Wien, Ghelensche Buchhandlung, 1774
Mathews, Adrian, Wiener Blut, Frankfurt/Main, Eichborn, 2000
Mauz, Christoph, Motte Maroni, Horrorfahrt der Dämonenbahn, St. Pölten–Salzburg, Residenz, 2011
Meder, Erich « Der Wurschtl », in: …Heinz Conrads, Guten Abend die Madl`n, Servus die Buam… Wien, Doblinger, 1974 [Text von 1945]
Meisl, Carl, Das Gespenst im Prater, Als Fortsetzung des Gespenstes auf der Bastey, in zwei Akten, Musik vom Herrn Capellmeister [Franz] Volkert, in Theatralisches Quodlibet oder sämtliche dramatische Beyträge für die Leopoldstädter Schaubühne von Carl Meisl, 8. Band. Wien, Mörschner und Jasper, 1824. [auch, Der Geist im Prater, UA 1821]
Meisl, Carl, Wien mit seinen Vorstädten humoristisch geschildert von Gewey und Meisl, Fünftes Heft. X. Jägerzeil XI. Prater, Wien, Geistinger [k.A., 1820]
Merkt, Eduard, Das Lied vom Prater, Musik Ferdinand Leicht, Wien, Leipzig, Hugo Bernhard Winkelmann. [k.A.]
Merz, Carl und Qualtinger, Helmut, « Die Kastanien blühen », in Travniceks gesammelte Wer-ke und andere Texte für die Bühne. Wien, Deuticke, 1996. (= Tritschke, Traugott (Hg.), Helmut Qualtinger Werksausgabe 3)
Merz, Carl und Qualtinger, Helmut, « Geisterbahn der Freiheit », in Brettl vor dem Kopf undandere Texte für die Bühne, Wien, Deuticke, 1996 (= Tritschke, Traugott (Hg.), Helmut Qualtinger Werksausgabe 2)
Modl, Josef, Der Praterausrufer, Soloscene. Wien, [J. Blaha, 1898]
Molnár, Ferenc, Liliom, Vorstadt–Legende in sieben Bildern und einem szenischen Prolog, Für die deutsche Bühne bearbeitet von Alfred Polgar, Wien: Deutsch–Österreichischer, Verlag, 1912
Morton, Frederic, Ewigkeitsgasse, Wien, Deuticke, 1996
Mozart, Wolfgang Amadeus, Gehn wir im Prater, gehn wir in d` Hetz, KV 588, 1782
Muhr, Adelbert, Praterbuch, Wien, Erwin Müller, 1947
Musil, Robert, « Als Papa Tennis lernte », in Der Querschnitt XI. Jahrgang Heft 4. Berlin, Propyläen, 1931
Mutzenbacher, Josefine [Felix Salten], Meine 365 Liebhaber, Paris: Neue Bibliophilen–Vereinigung, 1925
Neidhardt, August, Die Praterfee, Volksstück mit Gesang in 5 Bildern.Musik, Josef Fromm, Partitur [UA 2.9.1904]
N.N. Der Prater, Epistel an die Wiener, Wien, bey Ignaz Alberti`s Witwe, 1798
N.N Die Abendlust im Prater zu Wien, in den Geschichten verschiedener Personen vom Stande. Ulm, Bartholomai, 1773
N.N. Über den Kleiderpracht im Prater, Wien: 1781
N.N. Für den beleidigten Kammerdiener an den Verfasser der Schrift, über den Kleiderpracht, im Prater, Wien: 1781
N.N. Ausführliche Beschreibung von einem Mädchen, das ihr eigener Liebhaber im Prater in die Donau gestürzet, Flugblatt, 1786
N.N. Loblied auf den Prater, Wien [k.A]
Oleksander Olez, titelloses Gedicht, in Simonek Stefan (Hg.), Versperrte Tore, Ukrainische Autoren in Wien, Passau, Karl Stutz, 2006. [Erstmals erschienen in: Čužynoju. Vydannja « Dniprosojuza » Viden 1919]
Perinet, Joachim, « Siebzehnte Annehmlichkeit », Der Prater, in Annehmlichkeiten in Wien, Von einem Satyr. 29 Annehmlichkeiten, Wien, 1788
Perinet, Joachim, Neunzehnte Annehmlichkeit, « Das Feuerwerk », in Annehmlichkeiten in Wien, Von einem Satyr. 20 und 4 Annehmlichkeiten, Drittes und letztes Heft. Wien, 1788
Pittler, Andreas, Tacheles, Wien, echomedia, 2008
Pittler, Andreas, Chuzpe, Ein Fall für Major Bronstein, Wien, echomedia, 2010
Pittler, Andreas, Zores, Wien, echomedia, 2010
Pittler, Andreas, Tinnef, Wien, echomedia, 2011
Pittler, Andreas, Mischpoche, 14 Kriminalgeschichten, Meßkirch, Gmeiner Verl., 2011
Pittler, Andreas, Der Fluch der Sirte, Wien, echomedia, 2013
Pittler, Andreas, Charascho, Inspektor Bronsteins kehrt zurück, Wien, echomedia, 2014
Pittler, Andreas, Goodbye, Inspektor Bronsteins Abschied, Wien, echomedia, 2015
Polgar, Alfred, Der Prater, in Die Schaubühne XIII (50), 13. Dezember 1917
Qualtinger, Helmut, Im Prater blühn wieder die Bäume, Satiren, Auswahl Werner Liersch, Berlin, Volk und Welt, 1977 (= Volk und Welt Spektrum 107)
Qualtinger, Helmut und Hubmann, Franz, Der Wiener Prater oder Die schönste Illusion der Gegenwart. Schießbudenfiguren, Watschenmänner und das Ringelspiel des Lebens, Wien–München, Christian Brandstätter, 1986
Rabinowich, Julya, Krötenliebe, Wien, Deuticke im Paul Zsolnay Verl., 2016
Rafelsberger, Marcus, Menschenteufel, Köln, Emons, 2009
Raimund, Ferdinand, Der Barometermacher auf der Zauberinsel, Handschrift, [UA 18. Dezember 1823]
Realis, Der Prater, Wien, Pfautsch & Compagnie, 1846
Retcliffe, John, Sebastopol, Historisch–politischer Roman aus der Gegenwart, 4 Bände,Berlin, Nöhring, 1855–57
Richter, Joseph, « Briefe eines Eipeldauers an seinen Herrn Vetter in Kakran, über
d’Wienerstadt. Und’s ist alles noch wahr! » Denk- und Merkwürdigkeiten aus
« Briefe eines Eipeldauers an seinen Herrn Vetter in Kakran, über d`Wienerstadt. », 1785- 1813, Mit Fußnoten versehen von Paul Angerer, Wien München, Christian Brandstätter, 1998
Roth, Josef, « Praterkino », in Der Neue Tag 4. April 1920
Roth, Josef, Die Kapuzinergruft, Bilthoven, De Gemeenschap,1938
Roth, Josef, Die Geschichte von der 1002 Nacht, Bilthoven, De Gemeenschap, 1939
Roth, Josef, « Der Wiener Prater » – einst und jetzt, in: Roth, Joseph, Werke Bd.3, Das journalistische Werk 1929-1939, Hg. und Nachwort, Klaus Westermann. Köln, Kiepenhauer & Witsch, 1991
Rouland, Ernst August, « Prater/ Praterfahrt im Mai/ Die Praterfee/ Abend im Prater/
Wurstelprater », in Mein Wien! Gedichte. Wien und Leipzig, Karl Harbauer, 1919.
Saar, Ferdinand von, « Schade um die Bäume! » in, Wiener Elegien, Heidelberg, G. Weiss, 1893
Salten, Felix, « Fünfkreuzertanz », in Das Österreichische Antlitz, Essays. Berlin, S. Fischer, 1910
Salten, Felix, Wurstelprater mit Bildern von Dr. Emil Mayer, WienLeipzig, Brüder Rosenbaum, 1911
Saphir, M.[oritz] G.[ottlieb], Prater-Melodien zum 1. Mai, in Allgemeine Theaterzeitung und Unterhaltungsblatt für Freunde der Kunst, Literatur und des geselligen Lebens, Wien, 1. Mai 1824
Saphir, Moritz Gottlieb, « Prater-Devisen », in Allgemeine Theaterzeitung und Originalblatt für Kunst, Literatur, Musik, Mode und geselliges Leben, Wien, 24. Februar 1835
Scapinelli, Carl Conte, Prater, Leipzig, Staackmann, 1909
Schikaneder, Emanuel, Der Tyroler Wastl, Eine komische Oper in drei Aufzügen, Musik von Herrn Haibel Mitglied des k.k. privil. Wiedner Theaters, Leipzig, August Geers, 1798
Schittlersberg, Augustin Veith von, Augusti Veith a Schittlersberg S.C. et A. M., Actual Intim. et Generalis Rationum Directorii Praesidis Nemus Urbi Vindobonensi: Proxi-mum Vulgo Prater Poema Posthumum, Edidit adiecta versione germanica Ant. Stein Philologiae Professor, Vindobonae, Strauß, 1811
Schlögl, Friedrich, « In der Firmwoche/ Beim Trabwettfahren im Prater », in Wiener Blut, Kleine Culturbilder aus dem Volksleben der alten Kaiserstadt an der Donau, Wien, Rosner, 1873
Schnitzler, Arthur, Leutnant Gustl, Berlin, S. Fischer, 1901 [erstmals als Lieutenant Gustl in der Weihnachtsbeilage der Neuen Freien Presse 25. Dezember 1900]
Schnitzler, Arthur, « Die Toten schweigen », in Die Frau des Weisen, Noveletten, Berlin, S. Fischer, 1898, [erstmals in Cosmopolis, Internationale Revue, BerlinWien: 8. Bd., Oktober 1897]
Schnitzler, Arthur, Der Reigen, Wien, Wiener Verlag, 1903 [Privatdruck 1900]
Schnitzler, Arthur, « Zum großen Wurstel », in Marionetten drei Einakter, Berlin, S.Fischer, 1906
Schnitzler, Arthur, « Das Schicksal des Freiherrn von Leisenbogh », in Dämmerseelen Novellen, Berlin, S. Fischer, 1907 [erstmals in Neue Rundschau, Berlin, 15. Jg, H. 7. Juli 1904]
Schnitzler, Arthur, Spiel im Morgengrauen, Berlin, S. Fischer, 1927, [erstmals in Berliner Illustrierte Zeitung 5. Dezember 1926 bis 9. Januar 1927]
Schnitzler, Arthur, Der Weg ins Freie, Berlin, S. Fischer, 1908 [erstmals In: Die Neue Rundschau, XIX. Jahrgang, 1. bis 6. Heft, JanuarJuni 1908]
Schnitzler, Arthur, Therese, Berlin, S. Fischer, 1928
Schönner, Johannes, Traite des Blanches, Mädchenhandel [Wattens], Berenkamp, 2012
Schreiber, Hermann, Kaiserwalzer, Ein sinnlicher Roman aus dem alten Österreich, München, Franz Schneekluth, 1976
Schuster, Josef, « Der Wilde Mann im Prater », Zauberposse mit Musik. Musik Franz Volker, 3 Lieder in Komische Theatergesänge. Wien, Diabelli. Nr. 34, 35 und 36. [k.A.]
Seethaler, Robert, Der Trafikant, Zürich, Berlin, Kein &Aber AG, 2012
Starnfeld, T.G. [Tonina GerstnerStevens], Allerlei vom kleinen Pickerl. 21.– 40.Tausend, Wien–Leipzig, Deutscher Verlag für Jugend und Volk, [k.A., 1. Aufl. 1930]
Stifter, Adalbert, « Der Prater » In: Stifter, Adalbert: Wien und die Wiener in Bildern aus dem Leben, Pest: Heckenast, 1844
Stifter, Adalbert, « Volksprater » in Gerstinger, Heinz, Wien von gestern. Ein literarischer Streifzug durch die Kaiserstadt, Wien, Jugend und Volk, Edition Wien, 1991
Stoessl, Otto, Negerkönigs Tochter, Eine Erzählung, München–Leipzig, Georg Müller, 1910
Stoessl, Otto, Morgenrot, München, Georg Müller, 1912
Süß, Walter, « Mord im Riesenrad », in Das kleine Blatt 11. November – 17. Dezember 1934
Torberg, Friedrich, « Wurschtelprater am Nachmittag/ Wurschtelprater bei Nacht/ Prater Hauptallee » (= Wiener Sonette ), in Lebenslied Gedichte aus 25 Jahren, München, Langen–Müller, 1958
Torberg, Friedrich, Auch das war Wien, München, Müllelangen, 1984 (= Gesammelte Werke, 15).
Weigel, Hans : « Der Wurstelprater », in O du mein Österreich, Versuch des Fragments einer Improvisation für Anfänger und solche, die es werden wollen. Stuttgart, Steingruben, 1956
Weinheber, Josef « Wurstelprater », in: Wien wörtlich. Gedichte, Wien–Leipzig, Adolf Luser, 1935
Weininger, Peter, Die kleine Frau Hofmann, Zwei Fast–Kriminalgeschichten aus der Wiener Leopoldstadt, Illustrationen Jürg Moser, Krems a.d. Donau, Österr. Literaturforum, 1999
Weys, Rudolf, « Pratermärchen », Volksstück, 1936, in Literatur am Naschmarkt, Kultur-geschichte der Wiener Kleinkunst in Kostproben, Wien, Erwin Cudek, 1948 [UA Mai 1936]
Wolf, Susanne, Felicitas, Calafatis Traum,Wien, Thomas Sessler, 2008
Zeska, Philipp, Unsterblicher Prater, Wien, Obelisk, 1947
Zuckermann, Hugo, « Pfingstmontag im Prater », in Gedichte. Wien, R. Löwit, 1915
Zweig, Stefan, « Praterfrühling », Eine Novelle, in Freund, Jutta (Hg), Wien erzählt.25 Erzählungen, Frankfurt/Main, S. Fischer, 1987 [erstmals in: Stimme der Gegenwart. Monatsschrift für moderne Literatur und Kritik, Eberswalde, Jg. 1 H. 7 Okt. 1900 und H. 8 Nov. 1900]
Zweig, Stefan, Die Liebe der Erika Ewald, Novellen. Berlin, Fleischel & Co., 1904
Zweig, Stefan, Erstes Erlebnis, Vier Geschichten aus Kinderland, Leipzig, Insel, 1911
Zweig, Stefan, « Hydepark/ Frühling in Sevilla », in Fahrten, Landschaften und Städte, Leipzig, E. P. Tal, 1919 (=Bd. 3 von Die Zwölf Bücher).
Zweig, Stefan, Phantastische Nacht, Erzählung. Berlin, S. Fischer, 1922 [erstmals in Die Neue Rundschau, Jahrgang 33. H. 5 Mai und H. 6 Juni 1922]
Zweig, Stefan, « 24 Stunden aus dem Leben einer Frau », in Verwirrung der Gefühle, Leipzig, Insel, 1927
Zweig, Stefan, Drei Dichter ihres Lebens: Casanova – Stendhal – Tolstoi, Leipzig, Insel, 1925
Zweig, Stefan, Brief einer Unbekannten, Dresden, Lehmann & Schulze, 1922
Zweig, Stefan, Die Heilung durch den Geist, Mesmer–Mary Baker Eddy – Freud, Leipzig, Insel, 1931
Zweig, Stefan, Das Wien von gestern, Vortrag im Théâtre de Marigny in Paris, 1940
Zweig, Stefan, Die Welt von gestern, Stockholm, Beermann, 1942
Le Prater en musique
« Le Prater est un contrepoint de Vienne, c’est le plus ancien parc d’attractions d’Europe, et c’est une immense salle de décompression, une salle d’illusion, une salle de promesses dans laquelle on peut laisser le quotidien de la ville derrière soi. La définition du Viennois ne peut se passer du Prater, le Prater fait partie de lui-même. »
Zusana Zapke, historienne de la musique, Wien-Museum magazine, mars 2020
Le Prater est une histoire à lui tout seul dans l’histoire de la musique de Vienne. Dans ce parc, ses établissements gastronomiques et ses lieux de distraction se sont croisés, se croisent et parfois se mélangent les amateurs de la valse, du foxtrot, du jazz, de la chanson viennoise (Wienerlieder), de la « Schrammelmusik » et du Singspiel si populaires, de l’opérette, de la musique pop, aujourd’hui du rap et hip hop…. Tout y est concentré, y compris toutes les formes de musique innovantes et les plus expérimentales. L’histoire de la valse s’est aussi déroulée dans le parc du Prater avec les fils Strauss, Joseph Lanner et des compositeurs locaux. D’autres musiciens ont dédié à celui-ci quelques-unes de leur oeuvres comme Ralph Benatzky, Emmerich Kálmán, Franz Lehar Edmund Eysler, Robert Stolz avec sa célèbre chanson et musique de film « Im Prater blühn wieder die Bäume » (« Au Prater les arbres refleurissent ») composée en 1916. Aucun parc au monde n’a engendré un tel élan musical !
Vienne, ses faubourgs, le Prater et le Danube…
« Un petit bras du Danube sépare la Léopoldstadt ou ville de Léopold, de Vienne propre. On y trouve quelques rues larges et droites, le superbe jardin Augarten et le bois charmant dit le Prater. Le faubourg et le joli quartier de Jaegerzeil, semblable aux anciens boulevards de Paris, sont situés sur une île au nord de la ville. Tous les autres s’étendent sur une ligne demi-circulaire qui va de sud-est à nord-ouest.
Les deux faubourgs de Weissgoerber et d’Erberg, peuplés de grands manufacturiers, s’étendent le long du Danube à l’est de la ville ; entre ces faubourgs est le palais d’été du comte Razumowsky avec un jardin anglais, vis-à-vis le Prater. Les points de vue sont si bien pris, que le prince de Ligne a dit du possesseur de ce lieu charmant : « Il a su faire entrer tout le Prater dans son jardin… »
« L’Augarten, dont Joseph II ouvrit l’entrée au peuple, offre un coup d’oeil imposant par la magnificence un peu monotone, à la vérité, de ses grandes allées d’arbres, bien couvertes et bien alignées. Devant un vaste édifice qu’on trouve à l’entrée, et qui, sous de grandes galeries très bien décorées, présente au peuple de Vienne un grand nombre des restaurateurs, est une place circulaire, environnée de hauts marronniers où l’on trouve toute sorte de rafraîchissements. Les allées de l’Augarten conduisent à un cours, le long duquel règne une agréable prairie. Cette partie du jardin est environnée d’une terrasse au pied de laquelle coule le Danube. De ce point élevé, l’oeil parcourt des bois et des habitations champêtres, une foule de hameaux et de villages semés dans de riants vallons. Des groupes de collines couronnées de bocages, contrastent avec de vastes prairies où paissent de nombreux troupeaux. Cette scène d’enchantement est terminée par la vue de Brigitt. Cette forêt, qui forme la partie sauvage et romantique du jardin, s’étend à une lieue, et est traversée, dans toute sa longueur, par le Danube dont les bords offrent de délicieuses promenades. À l’entrée de ce bois, sur l’une des rives du fleuve, nombre de maisonnettes procurent au peuple qui s’y promène en foule, les jours de fêtes surtout, les plaisirs de la bonne chère, assortis à l’aisance plus ou moins grande de ces diverses classes.
Les cabanes sont également répandues dans les prairies et sur le rivage du fleuve. Les instruments qui se font entendent dans toutes les parties du bois ajoutent à la gaité qu’inspire la table.
En traversant le Danube qui sépare cette partie de la forêt, on trouve sur la partie opposée où ce fleuve se divise en plusieurs branches, un grand nombre d’île, les unes ombragées par des bois épais, d’autres couvertes de bocages riants ou de prairies émaillées. Toutes sont animées par le chant de divers oiseaux et par les bondissements des cerfs, des daims, des chevreuils. À l’extrémité de la forêt disparait entièrement le Danube pour faire place à à un charmant hameau composé de petites maisons à un seul étage, agréablement construites et peintes en dehors.
Malgré la réunion de tant d’agréments dans le jardin d’Augarten et dans ses dépendances, il est moins varié que le Prater. C’est un vaste pré, couvert de forêts que partage une belle allée d’une lieue de long. Sur l’un des côtés, le seul qui soit fréquenté, cette forêt présente l’aspect d’un village, par un grand nombre de maisonnettes et de cabanes ajustées dans les bois. Ce sont des cafés turcs, chinois, italiens, anglais ; ce sont des salles de bal, de billard : tout cela est peint et décoré de mille manières. Sous l’ombrage se mêlent, avec une agréable confusion, princes, militaires, bourgeois, moines, grisettes : la cour elle-même vient s’y populariser. Les jolies femmes ne s’y montrent qu’au soleil couchant. Outre les cabanes consacrées au plaisir de la gourmandise, une infinité de tables sont répandues ça et là dans le bois, et l’on y sert toutes sortes de rafraîchissements. Les sons du cor, de la flûte, et d’autres instruments à vent se font entendre dans toutes les parties du bois.
Pendant qu’on s’y livre à la joie des milliers de voitures de toute espèce qui rivalisent de rapidité dans leur course, des chevaux barbes, anglais, espagnols, traversent en tout sens la grande allée par laquelle on entre dans le bois, et qui aboutit à un pavillon, le but de ces courses. On retrouve là le Danube, et sur ses bords, un cours planté d’arbres.
Pour ajouter au charme de cette promenade, on y donne, dans diverses occasions, de superbes feux d’artifice ; un bel amphithéâtre particulier est consacré à ce divertissement. Chaque allée des avenus de la forêt offre des perspectives ingénieusement ménagées, telles que la vue des hameaux, de quelques parties de la ville, du fleuve et de la montagne.
Ajoutons que cinq cents cerfs, très peu timides, tantôt se promènent à côté des voitures, et tantôt s’enfuient en bondissant à travers les bois.
Certes, ce Prater est bien autre chose que le pitoyable bois de Boulogne ou les monotones Champs-Élysées de Paris… »
Conrad Malte-Brun, ANNALES DES VOYAGES, DE LA GÉOGRAPHIE ET DE L’HISTOIRE, 1810
« Le Prater est, pour les Viennois, ce que sont les Champs-Élysées pour les Parisiens, Hyde-Park pour les Anglais. C’est là que la fashion, noble et bourgeoise, se plaît dans la belle saison, à parader, soit à cheval soit en voiture, dans tout l’éclat de toilettes qui empruntent à nos modes leur élégance et leur caprice. Le Prater est à deux cents pas du faubourg du Jaegerzeil, situé sur la même île que le Leopoldstadt et le superbe jardin d‘Augarten. De magnifiques prairies, des faisanderies bien boisées se rencontrent là, ensemble. Du temps de Joseph II, les daims, les sangliers y vivaient de compagnie. Les accroissements considérables de ce parc sont dus particulièrement à ce monarque. Je ne sais quel courtisan voulait qu’il en interdit l’entrée au peuple pour que les grands seigneurs n’y trouvassent que leurs pairs. « Eh mon dieu ! répliqua le prince, il me faudrait donc, pour ne rencontrer que les miens, aller, vivant, m’enfermer dans les caveaux des Capucins. » Il fit détourner un bras du Danube qui séparait le faubourg du Parc. Hors de Jaegerzeil quatre grandes avenues conduisent au Prater : deux à gauche sont peu fréquentées, la troisième, qui aboutit au château d’où partent, dans les fêtes, les feux d’artifice, l’est beaucoup. C’est là que des guinguettes de formes gracieuses, construites en bois et dont le seuil offre plusieurs tables, invitent les promeneurs à se reposer. On y joue, on y boit, on y mange à l’ombre de majestueux arbres, sous les rameaux desquels l’artisan et le petit bourgeois oublient leurs soucis et rêvent quelquefois le bonheur. La quatrième est livrée à la haute aristocratie ; les piétons y trouvent, comme aux Tuileries, des chaises pour se reposer, des cafés, en plus grand nombre et peut-être aussi plus élégants, pour s’y rafraîchir et jouir de la vue des équipages armoriés, des brillantes cavalcades qui, à certains jours, se pressent en ce lieu. C’est en avril, mai, septembre et octobre, et surtout le lundi de Pâques que le Prater est envahi par la foule opulente et titrée. C’est là que les princes, les courtisans, les riches seigneurs luttent de magnificence ; c’est là que les jeunes dandys appartenant au beau monde, viennent déployer toute leur science hippique et faire admirer les allures superbes de leurs destriers dont la généalogie n’est pas moins noble que la leur.
Le lundi de Pâques est pour le Prater ce qu’étaient, pour les Champs-Élysées, les jours de Long-Champs, quand nous avions encore un Long-Champs… »
Le Danube illustré, Édition française revue par H.-L. Sazérac., H. Mandeville, Libraire-Éditeur, Paris, 1849, pp. 12-13
« À Vienne, le dimanche qui suit la pleine lune du mois de juillet de chaque année, ainsi que le jour d’après, est un véritable jour de fête, si tant est qu’une fête ait jamais mérité ce nom. Le peuple en est le visiteur et l’acteur tout en un ; et si des gens du monde s’y rendent, ce ne peut être qu’en leur qualité de membre du peuple. Il n’y a là aucune possibilité de se distinguer ; du moins en était-il ainsi il y a quelques années encore.
Ce jour-là, la Brigittenau, reliée à l’Augarten, à la Leopoldstadt et au Prater par une suite ininterrompue de distractions, fête sa kermesse. Entre deux Sainte-Brigitte, le peuple des ouvriers compte ses bonnes journées. Longtemps attendue, la fête des saturnales finit par arriver. Alors la bonne et paisible ville est saisie par le tumulte. Une marée humaine remplit les rues. Bruits de pas, murmures de gens en train de converser que vient traverser ici où là une exclamation bruyante. Les différences sociales ont disparu ; civils et soldats se côtoient dans ce mouvement. Aux portes de la ville, la poussée s’accroît. Après avoir gagné, perdu, puis regagné du terrain, on parvient enfin péniblement à s’extraire. Mais le pont du Danube offre de nouvelles difficultés. Victorieux là encore, deux flots qui se croisent l’un au-dessus de l’autre, le vieux Danube et la houle toujours plus grosse du peuple, le Danube coulant vers son ancien lit tandis que le flot du peuple, échappé à l’étranglement du pont, se déverse tel un vaste lac mugissant, submergeant tout sur son passage. Un nouvel arrivant trouverait ces signes inquiétants. Mais il n’y a là que joyeuse effervescence, plaisir déchaîné.
Déjà, entre la ville et le pont, des charrettes d’osier se sont avancées pour les véritables hiérophantes de la fête que sont les enfants des domestiques et des ouvriers. Surchargées, elles n’en fendent pas moins au grand galop la marée humaine qui s’entrouvre juste devant elle pour se refermer aussitôt après, insouciante et indemne. Car il existe à Vienne une alliance tacite entre les voitures et les hommes : ne pas écraser, même en pleine course, et ne pas se faire écraser, même si l’on ne fait pas attention le moindre du monde… »
Franz Grillparzer, Le musicien des rues, Éditions Jacqueline Chambon, Paris, 2000, traduction de Jacques Lajarrige, publié en allemand dans l’Almanach Iris en 1848
« Le Prater, qui vit les chasses des prince au Moyen-Âge et fut ouvert dès 1766 au public, a été un parc admirable, et le reste, parce qu’il est très vaste, en ses parties préservées : il a vu défiler toutes les étoiles de Vienne et passer plus d’une fois, dans l’hiver 1930, un promeneur qui était Robert Musil. Mais on y a construit un stade, un hippodrome, les encombrants bâtiments de la Foire de Vienne (au-delà desquels on accède à des terrains vagues et à des fabriques qui longent le Canal du Danube, où quelques chalands, portant parfois des noms russes, sont à l’ancre). Et le « Wurstlprater », le Prater de la Grande-Roue, le célèbre Lunapark, n’a été reconstruit après la guerre que très partiellement et de façon, dit-on, trop organisée. Il est vrai qu’un dimanche d’avant-printemps n’y offre pas un spectacle très gai. Il y avait là quelques rares touristes, des soldats, des amoureux, des familles, un public clairsemé ; des garçons tournaient sur les tournantes pistes de « karting », l’air hébété; à côté de stands de tir presque vides, des Hongrois (vrais ou faux émigrés de 1956 ou revenants de l’Empire) vendaient des spécialités de leur pays. Dans le soir qui tombait, du haut de rochers de carton anfractueux, de souples squelettes invitaient la clientèle à un voyage au pays de l’horreur ; un manège tournoyait encore, dont les sièges étaient des vases de nuit de fer blanc bosselé. Dans le coin des enfants, près d’un petit train immobile et vide, qu’était censé conduire un mannequin de cire emprunté à une vitrine de mode, une réplique minuscule de la Grande-Roue s’élevait, emportant lentement dans les airs, mue ç bras d’homme ou peu s’en faut, un seul couple de clients assis face à face dans une nacelle ; un gros homme au visage jaune et bouffi, vêtu de noir, impassible (peut-être un fripier comme on en croise encore dans la Judengasse ?) et une petite fille. Ils ont dû faire deux fois, trois fois leur tour dérisoire ; quand la nacelle était au sommet de sa course, elle ne s’élevait guère plus haut que les arbustes voisins. Ils ne disaient mot. La petite fille n’eut pas un sourire… »
Philippe Jaccottet, Autriche, L’Âge d’Homme, Lausanne, 1966
Eric Baude pour Danube-culture, © Danube-culture, droits réservés mis à jour septembre 2024
Notes :
1 Florence Baillet, « Des pièces populaires sous la République de Weimar (1930-1933), Circularités et ritournelles » in Ödön von Horvath, Voix allemandes, Belin, Paris, 2008, p. 132.
2 Pierre Burleaud, « L’idylle des prairies perverties » in Danube-Rhapsodie, Images, Mythes et représentation d’un fleuve européen, Grasset, 2001, p. 168
3 Pierre Burleaud, idem p. 169
Sources :
Begleitende Broschüre zur Sonderausstellung « LiteraTOUR durch 250 Jahre Prater » vom 24.10.2016 bis Ende Februar 2017, für den Inhalt verantwortlich: Mag. arch. Georg Friedler, Textzusammenstellung Dr. Gertraud Rothlauf, Ausgabe, 1/2016, Bezirksmuseum Leopoldstadt, Wien
BURLEAUD, Pierre, Danube-Rhapsodie, Images, Mythes et représentation d’un fleuve européen, Grasset, Paris, 2001
DEWALD Christian, LOEBENSTEIN, Christian, SCHWARZ, Werner Michael, Wien in Film, Stadtbilder aus 100 Jahren, Wien Museum, Czernin Verlag, Vienne 2010
DEWALD, Christian, LOEBENSTEIN, Michael, Prater, Kino, Welt. Der Wiener Prater und die Geschichte des Kinos, Verlag Filmarchiv Austria, Wien, 2005
GRILLPARZER, Franz, Le musicien des rues, Éditions Jacqueline Chambon, Paris, 2000, traduction de Jacques Lajarrige, publié en allemand dans l’Almanach Iris en 1848
JACCOTTET, Philippe, Autriche, L’Atlas des Voyages, Éditions Rencontre, Lausanne, 1966,
MALTE-BRUN, Conrad, ANNALES DES VOYAGES, DE LA GÉOGRAPHIE ET DE L’HISTOIRE ; OU COLLECTION des Voyages nouveaux les plus estimés, traduits de toutes les langues européennes ; Des Relations originales inédites, communiquées par des Voyageurs Français et Etrangers ; Et des Mémoires Historiques sur l’origine, la Langue, les Moeurs et les Arts des Peuples, ainsi que le Climat, les Productions et le Commerce des Pays jusqu’ici peu ou mal connus ; ACCOMPAGNÉES D’un Bulletin où l’on annonce toutes les Découvertes, Recherches et Entreprises qui tendent à accélérer les progrès des Sciences Historiques, spécialement de la Géographie, et où l’on donne des nouvelles des Voyageurs et des extraits de leur Correspondance.Avec des Cartes et des Planches gravées en taille-douce, PUBLIÉES PAR M. MALTE-BRUN, Correspondant de l’Académie Italienne, de la Société d’Émulation de l’Île-de-France, et de plusieurs autres Sociétés savantes et littéraires, Seconde Édition, revue et corrigée.TOME HUITIÈME., À PARIS, Chez F. Buisson, Libraire-Editeur, rue Gilles-Coeur, n° 10., 1810
ÖHLINGER, Walter (Herausgegeben), Die Pläne der K.K. Haupt- und Residenzstadt Wien von Carl Graf Vasquez, Edition Winlker-Hermaden, Schleinbach, 2011
Wiener Prater, Wikipedia
www.bezirksmuseum.at
www.wienmuseum.at