Peintres du Danube : Emil Jakob Schindler (1842-1892), peintre de la lumière et de ses reflets

Emil Jakob Schindler, blanchisseuse sur la rive du Danube, huile sur bois, 1868

   E. J. Schindler fait la connaissance lors d’un séjour à Milan du peintre paysagiste allemand Albert Zimmermann (1808-1888), professeur à l’Académie de Milan puis à l’Académie des Beaux-Arts de Vienne où son disciple le suit en 1859. Zimmermann ne tarde pas à discerner son talent. Il l’emmène avec lui dans les montagnes de Bavière, à Ramsau dans le massif du Dachstein… C’est dans ces paysages alpins que s’éveille la profonde sensibilité de Schindler pour la forêt et les éléments de la nature. Après la démission de Zimmermann, le jeune artiste se perfectionne en étudiant la peinture paysagiste néerlandaise du XVIIe siècle, la peinture de l’École de Barbizon et tombe sous le charme de Charles-François Daubigny (1817-1878), qui expose à Vienne au début des années 70. Le peintre qui fait face à des difficultés financières se rend avec l’aide de son mécène en Dalmatie en 1874 puis  aux Pays-Bas en 1875 en compagnie de la peintre viennoise Tina Blau-Lang (1845-1916) avec laquelle il partage un atelier pour les mois d’été dans l’un des bâtiments du Prater de l’Exposition universelle (1873). Malade, sa situation financière ne s’améliorera qu’à partir de 1881 grâce à l’obtention du Reichel-Preis décerné par l’Académie des Beaux-Arts.

E. J. Schindler, scène du Prater, 1872, collection privée

Schindler visite à Munich la première exposition internationale d’art y découvrant des peintures de Gustave Courbet, Camille Corot (1791-1975) et s’installe dans le parc du Prater en 1869 où l’atmosphère matinale des prairies et forêts alluviales sous la brume est pour lui une puissante source d’inspiration, à l’image de ce que Ville-d’Avray a représenté pour Camille Corot à la fin de sa vie. Il participe à l’Exposition de Vienne en 1873. Il passe ensuite les mois d’été de 1881 à 1884 en compagnie de sa famille et de son élève Karl Moll (1861-1945) à Bad Goisern (Haute-Autriche) puis, à partir de 1885, s’installe comme locataire au château de Plankenberg, une propriété d’une des branches de la famille Liechstenstein située près de Neulengbach (Basse-Autriche).

E. J. Schindler, Lune montante sur les prairies alluviales du Prater, huile sur toile, 1877, collection de la galerie du Belvédère de Vienne

Une petite colonie d’artistes se forme autour de lui avec ses élèves Carl Moll qui épousera trois années après la mort du peintre la veuve d’E. J. Schindler, la cantatrice d’origine allemande et mère d’Alma Mahler (1879-1964), Anna Sofie Bergen (1857–1938), Olga Wisinger-Florian (1844-1926), Marie Egner (1850-1940), Eduard Zetsche (1844-1927) et Theodor Hörmann von Hörbach (1840-1895).

E. J. Schindler, au bord du Danube, huile sur toile, vers 1870, collection du Leopold Museum, Vienne. Le peintre anticipe, dans cette première étude, réalisée vers 1870, les préoccupations centrales de son œuvre ultérieure. Il peint un chemin de halage ordinaire bordé d’arbres le long de la rive droite. Le Danube, aux reflets bleus, blancs et roses, à gauche, n’est en réalité qu’une simple suggestion mais la présence d’un bateau baigné de lumière, amarré à la rive, donne l’impression d’une relation intime et harmonieuse entre l’homme, le fleuve et la nature. Avec une palette de couleurs essentiellement réduite aux tons bruns et verts, appliqués avec de larges coups de pinceau, E. J. Schindler offre au regard la contemplation d’un paysage estival avec ses conditions météorologiques du moment, imprégnant l’atmosphère du tableau d’une forme d’apothéose poétique.

   Les lieux semblent avoir fait une forte impression sur sa fille Alma alors enfant : « Le château était pour moi plein d’horreur, de légendes et de beauté. On disait qu’un fantôme rôdait, nous, les enfants, en avions peur des nuits entières. Au milieu du grand escalier, un autel trônait dans une petite chapelle, et mon père y trouva une madone en bois et des chandeliers baroques dorés. L’autel était entouré de fleurs et n’était bien sûr jamais utilisé ; il n’était là que pour la beauté ».

E. J. Schindler, Chasse au canard dans le Prater, huile sur toile, 1884, collection de la galerie du Belvédère de Vienne

   En 1887/88, il retourne en Dalmatie, visite Corfou et participe avec quatre de ses tableaux (achevés en 1889) à l’aménagement du nouveau Musée d’Histoire Naturelle de la capital impériale. Nommé membre d’honneur de l’Académie des Beaux-Arts de Vienne en 1888 (le peintre n’obtiendra curieusement jamais de poste de professeur dans cette même Académie des Beaux-Arts !), il reçoit deux ans plus tard la médaille d’or de l’État impérial austro-hongrois. Une exposition au Künstlerhaus de Vienne présente pour la première fois un grand nombre de ses peintures.

E. J. Schindler portrait

Portrait d’E. J. Schindler

   Ses premières études de la nature font référence au réalisme de Ferdinand Georg Waldmüller (1793-1865). Sa peinture qualifiée d’impressionnisme d’ambiance se situe délibérément à l’opposé de la peinture alpine académique « officielle » héroïsée, romantisée, grandiloquente et figée de l’époque. Sa volonté est d’abord de fixer l’essence des choses et non pas de se contenter de refléter leur apparence réelle et vide de sens. Il parvient à rendre et à transmettre dans ses oeuvres une impression globale du motif, de l’instant de la journée, de l’atmosphère, de la lumière et des conditions météorologiques qui sont presque comme exacerbé dans l’environnement du fleuve. Son influence sur la peinture viennoise de paysages s’est prolongée jusqu’au XXe siècle.

E. J. Schindler, huile sur carton, 1892, collection privée

   Dans ses oeuvres de peintre paysagiste, E.J. Schindler transmet une manière très personnelle de vivre et de ressentir la présence de la nature, sans imposer sa technique picturale à ses élèves. Ses motifs préférés ont été les plaines alluviales du Danube, le parc du Prater avec ses arbres immenses et ses pièces d’eau, la Forêt viennoise, la région de la Wachau…
Le peintre décède en 1892 à l’âge de cinquante ans lors d’un séjour de convalescence en Allemagne sur l’île de Sylt (Frises du nord) et est inhumé au Zentralfriedhof (cimetière central) de Vienne comme tant d’autres personnalités artistiques autrichiennes.

E. J. Schindler par Edmund Hellmer (1895), Stadtpark  (parc municipal) de Vienne, photo droits réservés

À l’initiative de Carl Moll, un monument en marbre dédié au peintre est réalisé en 1895 par un de ses proches, Edmund Hellmer (1850-1935) et installé dans le parc municipal de Vienne. C’est à ce même sculpteur autrichien, auteur également du tombeau d’E. J. Schindler au cimetière central de Vienne que l’on doit encore le monument dédié à Johann Strauss dans le même parc municipal de la ville et qui attire tant d’admirateurs du compositeur.

Galerie autrichienne du Belvédère
www.belvedere.at/en/museum

Eric Baude pour Danube-culture, novembre 2024, © droits réservés

Emil Jakob Schindler, débarcadère des bateaux à vapeur sur le Danube près de Kaisermühlen, galerie du Belvédère, Vienne, vers 1872

Peintres du Danube : Gyula (Julius) Háry (1864-1946), Hongrie

Gyula Háry, peintre, illustrateur réputé fut élève de l’École des Arts appliqués de Budapest et se perfectionna en Italie et aux Pays-bas. Il est surtout connu pour ses dessins et aquarelles détaillées de scènes pittoresques de l’Empire Austro-Hongrois et d’Italie.

Gyula Háry, Visegrád, huile sur toile

De nombreux dessins de cet artiste illustrent « Die österreichisch-ungarische Monarchie in Wort und Bild » (« La monarchie austro-hongroise en mots et en images »), une monumentale encyclopédie illustrée en 24 volumes sur toutes les terres et tous les peuples de la la monarchie habsbourgeoise, publiée de 1886 à 1902 en allemand et en hongrois. Cette publication, initiée et supervisée jusqu’à sa mort en 1889 par l’archiduc Rodolphe, reflète sa foi dans le libéralisme, la science et le progrès. La vision de Rudolf était de représenter sans parti pris et sur un pied d’égalité tous les peuples et groupes ethnographiques de la monarchie.
Danube-culture, mis à jour décembre 2023

Gyula Háry, Veröce, coude du Danube, huile sur toile

G. Hary, Fêtes à Budapest

Gyula Háry, Orşova et le Danube, à l’arrière-plan l’île d’Ada-Kaleh, dessin à l’encre pour « Die österreichisch-ungarische Monarchie in Wort und Bild » 

Albert Marquet (1875-1947) : voyage à Galaţi et dans le delta du Danube en 1933

« Marquet a beaucoup voyagé. Qui le connaissait peu aurait pu s’en étonner. Discret et ne demandant qu’à passer inaperçu, il paraissait fait pour vivre une vie tranquille, volontiers contemplative, entièrement occupée à peindre et dessiner, isolé, un peu en retrait, derrière une fenêtre soigneusement choisie. Mais non, il était curieux des êtres. Il aimait la rue, son mouvement, tout ce qui décelait la vie. Il était aux aguets de ce qui lui permettait de prendre connaissance des gens que le hasard lui faisait rencontrer. Il se méfiait des paroles trop contrôlées, plus souvent dites pour masquer que pour confier et pensait que des attitudes, des mouvements, des tressaillements de visages moins surveillés livraient davantage de vérité. Quand il eut assez d’argent pour partir à l’étranger, peu lui importa de déambuler dans un pays dont il ignorait la langue. Il n’avait qu’à se promener au hasard des rues pour trouver compagnie, et une compagnie qui ne lui pèserait pas. Elle lui laisserait sa liberté intacte. Ne s’apercevant pas de sa discrète présence elle ne risquerait pas de le contraindre à supporter une curiosité qui se serait refermée sur lui et l’aurait emprisonné. »

Albert Marquet vers 1920

D’Athènes à Galatz

   « Nous devions avoir instinctivement besoin de nous retrouver dans de l’habituel et du connu car nous avions passé le printemps sur les bords du Danube. Un de nos amis diplomate y était envoyé pour quelques semaines et craignant de s’y ennuyer il nous avait incité à le suivre. Tenté par un voyage en Méditerranée, coupé d’escale dont il avait apprécié le charme au cours d’une précédente croisière, Marquet n’hésita pas. Il revit Athènes et le Parthénon, en goûta la mesure et l’équilibre, la couleur du marbre que l’action conjointe du temps et du soleil était arrivée à incorporer à la colline qui le portait. Il s’attarda longuement au musée où des sculptures archaïques offraient leurs jeunes sourires et leurs grâces. Aucun enseignement, aucune contrainte, seulement l’acceptation des conditions de la vie, dans ses limites et ses dimensions. Plus de perfection peut-être dans les oeuvres du grand musée de la ville mais l’émerveillement de l’enfance était passé ; passé ou dépassé ? L’appréciation dépendait de la qualité de son visiteur, de son humeur ou de son émotion. Marquet se sentit plus à l’aise à Athènes qu’en Égypte.

Albert Marquet, les quais de Galatz. Au premier plan deux bateaux portant pavillon de la C.E.D. Le premier aurait pu être celui mis à la disposition du peintre lors de son séjour en 1933.

À Galatz où nous savions devoir rester, nous fûmes logés dans le meilleur hôtel du pays mais quand le lendemain matin Marquet ouvrit sa fenêtre sur une rue étroite, sans caractère, il déclara tout net : « Autant nous installer à Bécon-les-Bruyères. Nous partirons demain. » La Commission du Danube tenait en ce moment séance sous la présidence d’un haut fonctionnaire roumain, et sa femme mise au courant par moi, de la subite décision de Marquet tenta d’arranger les choses. Elle fit tenir un mot à son mari pour l’instruire de l’affaire et lui suggérer un possible accommodement.  Il donna son accord. Alors elle nous informa que la Commission avait sur le Danube un bateau qu’elle mettait à notre disposition. Il ne nous offrait qu’une cabine étroite mais sur le pont, Marquet se trouverait en plein milieu du trafic fluvial. De quoi le séduire et le fixer pour un bout de temps. Le beau Danube bleu : une valse, une chanson. Sous nos yeux s’étalait un large fleuve, grossi par les eaux limoneuses du printemps et sur lesquelles pour la délectation de Marquet s’entrecroisaient des bateaux de tous tonnages et battant divers pavillons. L’animation gagnait les quais où de gros camions mêlés à de légères carrioles  apportaient diverses marchandises que des dockers entassaient dans des entrepôts ou dans des cales béantes. La coulée des eaux lourdes du Danube nous incita à nous laisser emporter par elle jusqu’à l’embouchure et sans quitter notre bateau nous arrivâmes à Sulina. Les mêmes eaux blondes et puissantes, une immense plaine marécageuse et couverte de joncs, livrée à toutes sortes d’oiseaux que le bruit de notre moteur effrayait. Ils s’envolaient avec des cris et un grand bruit d’ailes pour se reposer à nouveau confiants, quelques mètres plus loin. Comme nous exprimions notre surprise et notre ravissement il nous fut dit que si nous souhaitions en voir davantage une voiture serait mise à notre disposition avec un soldat comme guide. « Vous traverserez le delta et dans une heure ou deux vous serez à Vulkov, une Venise verte. Vous n’aurez qu’à louer un bateau pour y circuler. Vous en trouverez facilement, chaque famille a le sien. Pas d’hôtel. Vous logerez chez l’habitant. »
La voiture avait des ressorts grinçants. Elle avança sur une piste sablonneuse ou défoncée en côtoyant d’abord la mer puis traversant une terre à peine émergée des eaux où des oiseaux nageaient, se poursuivaient et criaient, nous aboutîmes à un large bras du fleuve3. Un bateau nous attendait et bientôt, après l’avoir traversé et marché quelque peu, entendu les paroles de bienvenue d’un maire souriant et barbu qui, sans doute, donna des directives à notre soldat, nous fûmes abandonnés, nous et nos valises, dans une pièce blanchie à la chaux. « Nous airons de la chance, dit Marquet, si nous arrivons demain à trouver le Danube. » Pourquoi pas ? J’étais optimiste. Nous étions arrivés à nous faire servir à dîner dans une chambre encombrée d’icônes, de broderies et de dentelles par une fillette loquace qui, en roumain, en russe et par gestes nous fit connaître toute sa famille4. Elle eut aussi recours à quelques photographies.

Valcov (Vylkove) dans les années trente, photo du photographe allemand Kurt Hielscher (1881-1948) 

Le Danube nous le retrouvâmes sans peine. La compagnie de navigation qui nous avait pris en charge envoya un de ses employés à notre recherche et il lui fut facile de nous rejoindre. Nous étions les seuls étrangers dans le pays et nous ne pouvions pas y faire un pas sans être suivis par une nuée d’enfants. Il nous fit prendre place dans sa barque et nous dit sa joie de parler français, sa fierté de constater qu’il pouvait comprendre et être compris dans une langue dont il ne s’était jamais servi depuis qu’il l’avait apprise à l’école. Dans son euphorie il entreprit de nous enseigner le russe et le roumain et comme nous avions plus envie de regarder que d’écouter il se donna beaucoup de mal pour rien.

Albert Marquet, Les quais de Galatz, 1933

Quand vint le moment de quitter Galatz nous n’eûmes pas d’hésitation. Nous regagnerions Vienne en remontant le Danube. Nous n’avions pas envie de nous en séparer brutalement. Nous entreprîmes un long voyage que Marquet illustra d’aquarelles faites vivement du bateau qui côtoyait des rives fuyantes. De petits villages, une église se détachant d’une verte colline, des prés, des paysans, une charrette traînée par un cheval maigre, des bateaux que le nôtre dépassait ou rencontrait, une gorge resserrée entre de vraies montagnes : le récit se poursuivait séduisant et varié. « Pourquoi, demanda un de nos compagnons, un ingénieur roumain, ne prenez-vous pas de photos, et tranquillement dans votre atelier vous feriez vos aquarelles. » Comment faire comprendre à cet homme raisonnable qu’il est plus tentant d’essayer d’appréhender ce qui vous échappe ? »

Marcelle Marquet, Marquet, Voyages, Série Rythmes et Couleurs, Éditions Librex S.A., Lausanne, 1968

Notes : 
1 Sulina,  port (autrefois port franc) et petite ville à l’extrémité du delta sur le bras du Danube du même nom, bras aménagé par la Commission Européenne du Danube pour la navigation maritime. La Commission Européenne du Danube effectua d’importants travaux de canalisation et installa ses services techniques à Sulina qui se développa dans la deuxième moitié du XIXe siècle et connut une économie prospère au début du XXe siècle.
2 Valçov, village de pécheurs lipovènes (Vieux-Croyants orthodoxes) situé sur le bras de Kilia. La petite ville d’aujourd’hui se trouve en Ukraine et porte le nom de Vylkove ou Vilkovo.
3 Le bras de Kilia ou Chilia, bras septentrional du delta du Danube. Une piste relie Sulina (rive gauche) au bras de Kilia (rive droite) qu’il faut franchir pour atteindre Vylkove (rive gauche).
4 A. Marquet et sa femme sont hébergés dans une famille lipovène.

Sources :
MARQUET, Marcelle, Marquet, Voyages, Série Rythmes et Couleurs, Éditions Librex S.A., Lausanne, 1968
MARQUET, Marcelle, Le Danube, voyage de printemps, Mermod, 1954 (32 pages)

  István Szőnyi (1894-1960)

István Szőnyi, barque et Danube, 1935 

István Szőnyi dans son atelier, 1959, sources https://fortepan.hu 

« Est-il possible de découvrir Szőny alors que tout le monde sait quel grand artiste il est ?
Tout ce grand thème : ce Zébegenyi et sa campagne au loin, dans les champs et le long des rivières – c’est sa vision et sa gloire particulières. Tout est pour lui, ce Zebegény et sa campagne, plutôt que pour Zebegenyi. Tout cela vit et fonctionne comme si cela avait jailli de son âme et était né sur sa palette ! István Szőnyi est le poète du Danube. »
Dezső Szomory (1869-1944), écrivain et dramaturge hongrois

« István Szőnyi vit dans sa maison de village à Zebegény et y travaille l’été. Il réalise des dessins de la taille d’une feuille de papier, y inscrit les couleurs et réalise ensuite une peinture à l’huile d’une taille allant jusqu’à 2X3 mètres dans son atelier (par exemple son tableau « Traversée du Danube »). Il raconte qu’une fois il a peint à l’aquarelle et que l’aquarelle a été mouillée par la pluie. Il n’a jamais peint aussi bien. Il travaille souvent dans un bateau sur le Danube, et pendant qu’il travaille, il est emporté par le courant jusqu’à une bonne hauteur de chaux, et doit ensuite ramer pour revenir à l’endroit initial. Sinon, il a à sa disposition le plus beau jardin de Zebegény. »
Theatre Life – 1935

Né dans une famille catholique d’origine allemande à Újpest en 1894, István Szőnyi fréquente tout d’abord l’école indépendante de l’Académie Hongroise des Beaux-Arts de Budapest à partir de 1911 puis l’école de formation des professeurs d’art (1913).

István Szőnyi, autoportrait, 1920

   Mobilisé pendant la Première Guerre mondiale, il sert dans l’armée austro-hongroise en tant que lieutenant et devient l’élève des peintres hongrois Károly Ferenczy (1862-1917)1 d’abord dans le cadre de l’école de Nagybánya2 où il se trouve pendant le conflit et ensuite dans sa classe à l’Académie Hongroise des Beaux-Arts de Budapest et d’István Réti (1872-1945). En raison de sa participation aux manifestations de la République soviétique hongroise et de son appartenance à un groupe d’étudiants demandant des réformes à l’Académie des Beaux-Arts, il en est exclu en 1920. Lors de ses premiers voyages en Europe (Vienne et Berlin), il fait la connaissance de grands maîtres européens de la peinture. 

Istvan Szőnyi, Famille au bord de l’eau, huile sur canevas, 1926, collection privée

    István Szőnyi organise la première exposition collective de peinture au Musée Ernst de Budapest en 1920.2 Son deuxième mariage3 avec Melinda Bartóky (1896-1967) est une étape décisive dans sa vie et dans son oeuvre tout comme son installation au bord du Danube à Zebegényi (Dunakanyar) en 1924 dans l’ancienne ferme que son beau-père, József Bartóky (1865-1928) avait achetée en 1905 pour en faire sa résidence d’été. Deux enfants naîtront de ce mariage, Zsuzsa (1924-2014) qui s’enfuira de Hongrie pour l’Italie en 1949 et deux années plus tard, Péter qui mourra d’une méningite à l’âge de 18 ans.

István Szőnyi, Lumière au-dessus de l’eau, 1935

Le peintre reçoit en 1929 une bourse du gouvernement pour séjourner à l’Académie hongroise de Rome mais, préférant les paysages du coude du Danube à ceux de l’Italie, il rentre en Hongrie au bout de quelques mois. Il obtient le poste de professeur à l’Académie hongroise des Beaux-Arts en 1937 tout en participant à la vie artistique en tant que membre du cercle artistique Gresham. C’est à cette époque qu’éclaircissant sa palette de couleurs il réalise ses tableaux les plus radieux. La géographie poétique du fleuve, les paysages danubiens et le mode de vie de la population locale parmi lesquels les pêcheurs, ont exercé une grande influence sur son travail artistique l’imprégnant intimement de leur présence, de leur rythme et de leur tonalité.

István Szőnyi, Zebegény, aquarelle sur papier

   Il s’occupe à partir des années quarante d’une école libre à Zebegény, commence également à peindre à l’aquarelle et utilisant principalement la technique de la gouache. De nombreux artistes hongrois de la nouvelle génération sont influencés par son style. Le peintre et sa famille cacheront et fourniront de faux papiers à de nombreux Juifs ainsi qu’à des personnes persécutées pendant la Seconde Guerre mondiale ce qui lui vaudra de recevoir avec les siens le titre de « Juste parmi les Nations » en 1984. Les intenses bombardements de Budapest détruisent son appartement, son atelier et une grande partie de ses peintures. Sa fille l’invite à Rome en 1959-1959, séjour à l’occasion duquel le peintre est impressionné par le ciel bleu de Fiumicino. István Szőnyi  meurt en 1960 dans sa maison de Zebegény qui sera transformée en musée à partir de 1967.

István Szőnyi, Nus, gravure à l’eau-forte, 1960

« C’est un événement décisif et crucial pour le développement de ma vie et de mon œuvre qu’en 1924, après m’être marié, je me suis installé à Zebegény, où j’ai trouvé toutes les expériences nécessaires au développement de mon art. J’y ai vu l’unité interconnectée et inséparable du paysage et de ses habitants dans un milieu qui correspondait tout à fait à mes idées. Les sujets de mes tableaux sont les deux choses au monde auxquelles je suis le plus attaché : Zebegény et ma famille. J’ai toujours été intéressé par la peinture des choses qui sont les plus proches et les plus immédiates pour les gens. Tous mes sujets sont nés non pas à Zebegény, mais dans mon grand atelier en plein air, où alternent deux montagnes, deux vallées, un verger de pommiers et une forêt de pins. Je n’ai presque pas besoin de quitter l’endroit. »
Eric Baude pour Danube-culture, © droits réservés, mis à jour novembre 2023

I. Szonyi route du Danube avec une troupeau d’oies, huile sur toile, 1932

Notes :
1 Le musée Károly Ferenczy (FERENCZY MÚZEUMI CENTRUM), Kossuth Lajos u. 5,, 2000 Szentendre, est consacré aux oeuvres des artistes de la famille Ferenczy.
https://www.femuz.hu

2 Baia Mare, aujourd’hui en Roumanie chef -lieu du Judeţ du Maramureş
3 Ce musée abrite désormais le Centre de photographie contemporaine Robert Capa, https://capacenter.hu/en
4 Le peintre perd sa première femme peu après la naissance de sa fille. Il perdra également son fils 

La maison (musée) du peintre István Szőnyi à Zebegény, photo © Danube-culture, droits réservés

István Szőnyi dans son atelier à Zebegény en 1950

Musée Istvan Szőnyi, Bartóky út 7.  2627 Zebegény
https://szonyimuzeum.hu

I. Szönyi, Zebegény 

Albert Marquet (II) : Le Danube, voyage de printemps à Galatz, Sulina et Vulkov

Albert Marquet met à profit ce voyage fluvial pour réaliser de nombreuses aquarelles et faire des croquis. C’est sa femme qui écrit les textes relatant ce périple. Les réflexions sur le monde du delta que le couple français découvre à l’occasion de leur périple roumain sont à l’image de l’étonnement et du dépaysement que la plupart des voyageurs ont ressenti autrefois en parcourant ce territoire aquatique et sauvage des confins de l’Europe. « Nous y étions un peu perdu et, comme au bout du monde ». Illustrés d’une sélection d’une quinzaine d’aquarelles et de quelques croquis ils seront édités sous la forme d’un carnet en 1954 chez l’éditeur suisse Mermod dans la collection « Carnets de Françoise ».
L’ordre d’insertion des aquarelles dans les textes a été volontairement modifié par rapport  à la publication de 1954.

Le Danube, Voyage de printemps 

   Le beau Danube bleu, ce ne fut pas pour le voir que nous embarquâmes au printemps 1933 et heureusement car nous aurions été déçus. Il n’est bleu que dans la chanson ou peut-être, nous n’y sommes pas allés voir, près de ses sources. De son delta à Vienne, les deux points limite de notre voyage, il roule des eaux limoneuses entre des rives le plus souvent plates et faites surtout des marais et des alluvions qu’il abandonne et renouvelle au gré des crues et des saisons.

 Les entrepôts (de Sulina)

Marquet, entraîné par un amis que ses fonctions appelaient là et qui craignait, sans compagnon éprouvé, de s’y ennuyer, accepta sans hésiter de partir pour Galatz, simplement parce que cette sollicitation tombait au moment où il n’avait pas de projet et qu’un grand fleuve inconnu avec ses promesses de bateaux et de mouvement ne pouvait que le tenter.

 Matinée sur le Danube

Ce fût d’abord une déception. L’hôtel qu’on nous offrit était dans une rue sans caractère et, dès qu’il fût dans la chambre, les fenêtres grandes ouvertes, Marquet, consterné, se trouva devant une façade grise, haut dressée à quelques mètres de lui. Il ne pouvait même pas apercevoir un coin de ciel. Il soupira :
« Autant se fixer à Bécon-les-Bruyères, ça ne vaut pas le voyage », et sur-le-champs décidé :
« Ne défais pas les valises. Je ne resterai pas quarante-huit heures ici. »
Des amis roumains qui avaient été contents de le voir arriver dans leur pays ne l’entendirent pas ainsi :
« Que vous manque-t-il ? Le port, vous avez pu vous en rendre compte, est grand. Les quais sont sillonnés de voitures, de camions, de charrettes, le fleuve de remorqueurs, de barques, de vapeurs, s’il vous faut une installation là, nous vous la trouverons. » Et deux heures plus tard nous étions sur un bateau amarré pour quelques semaines en l’un des points les plus vivants du fleuve. Marquet, à son affaire, se mit au travail.

 Flotille à Galatz

Il ne resta pas à Galatz tout le temps de son séjour en Roumanie. Quand on vit sur l’eau, il est tentant de prendre un bateau qui navigue et, pour Marquet qui passait ses journées sur le pont, bien tentant de dessiner ce qui défilait sous ses yeux : des verdures, des petites villes groupées autour de leur église ou de leur minaret, des charrettes qu’on devinait grinçantes, des passants, paysans lents et pesants, des soldats fusil à l’épaule dont on imaginait mal qu’ils eussent quelque chose à garder, des nuages qui tout au long des heures dérivaient bas sur l’horizon.

La charrette sous l’orage

    Marquet avait comme à son habitude un carnet, un stylo, des crayons, des pinceaux, un gobelet d’eau, une petite boîte d’aquarelle dans ses poches. Il semblait vraiment faire partie du groupe formé par ses amis et moi, devisant et jouissant du soleil sur la plage arrière du bateau, mais à un moment imprévu, sans qu’aucun de nous ne l’eût pressenti, il s’éloignait d’un pas tranquille et décidé.

Maisons au bord du Danube

Il venait de découvrir un coin isolé, bien placé, nous n’existions plus pour lui, tout à coup et totalement absorbé par le problème auquel toute sa vie il chercha une solution : fixer les rapports éphémères de la lumière et de l’eau et, dans un point ou un trait immobile, emprisonner de la vie en lui laissant de sa palpitation. Un ingénieur qui nous avait été présenté s’effarait. Pourquoi se mettre martel en tête afin de tenter une besogne impossible, saisir ce qui passe si vite que des yeux humains ne sauraient le retenir. Ne serait-il pas plus commode pour Monsieur Marquet de dessiner et de peindre  à son aise dans son atelier en s’aidant de photographies ?

Sur place, il n’a pas tracé une ligne que déjà ce qu’il voulait représenter a disparu. Chacun a ses méthodes et ses préférences, mais comment arriver à faire comprendre à un homme raisonnable que la fuite des choses aide à mieux les connaître, que l’immobilité est un mensonge dont Marquet se refusait à être le complice.

La remontée du Danube

Avant de remonter le Danube, après une courte escale à Sulina, petit port bâti à l’une de ses embouchures, une visite à Vulkov nous fut conseillée, et dans cette bourgade fleurie en cette saison de tous ses cognassiers, coupée d’eau, plutôt faite de jardins que de maisons, notre passage insolite (il n’y avait pas d’hôtel et nous logions chez l’habitant), ameutait à nos trousses les enfants du pays.

Nous errions dans ce village dont nous n’arrivions pas à saisir la forme, sans cesse ramenés à notre point de départ par un canal, un ruisseau, un étang qui arrêtaient notre marche et nous obligeaient à revenir sur nos pas, quand nous fûmes hélés par un jeune homme depuis une heure à notre recherche, envoyé par la compagnie de navigation à laquelle il appartenait afin de nous guider et de nous avertir qu’une cabine était mise à notre disposition sur un de ses bateaux pour assurer notre retour à Galatz. Il nous invita à continuer notre promenade en barque, dans un silence que le chant des oiseaux aurait seul troublé, si notre cicerone n’avait décidé de mettre à profit notre compagnie pour parfaire sa connaissance du français. Comme il était honnête, il voulut partager les avantages de la situation et ne prononça pas un mot sans nous en donner la traduction, d’abord en roumain, sa langue, ensuite en russe, puisque nous étions en Bessarabie. Nous l’écoutions d’une oreille distraite. je crois que Marquet ne l’écoutais pas du tout, il était pris par ce qu’il voyait : des masses de verdure croulant dans les méandres de l’eau, des petits ponts en dos d’âne et dessus, des porteuses d’eau qui cheminaient avec précaution, leurs deux sceaux ruisselants attachés chacun à l’une des extrémités du long fléau en équilibre sur l’épaule. Les bruits soyeux des rames, le clapotement de l’eau, les fuites des insectes, les chants des oiseaux et l’intarissable bavardage du compagnon que nous allions perdre n’arrivaient pas à disperser le silence enveloppant les jardins que nous ne finissions pas de contourner.

Nuages de beau temps

Nous avions l’impression d’errer dans un pays qui commençait d’être, sur des eaux lourdes, molles, limoneuses, visiblement nourricières, charriant en leur sein ce qui deviendrait terre, herbages, taillis, aliment et refuge d’animaux que nous avions entendu ramper, glisser, voleter tout au long du chemin qui nous avait amenés ici. Cet étrange chemin, le sable trempé des plages en fut la meilleure partie. Ailleurs ce n’était qu’une piste caillouteuse, souvent creusée d’ornières profondes qui avaient eu le temps de se solidifier depuis les dernières pluies, et coupées de ponts si haut perchés qu’il nous fallut à plusieurs reprises descendre de voiture afin de permettre à notre mince cheval de les franchir dans un élan où il employait toutes ses forces ramassées. Pendant ce voyage, qui dura quelques heures, nous aurions pu nous croire les seuls habitants du monde : des joncs, des plantes à ras de terre, de l’eau un peut partout, stagnante ou courante, et par-dessus, un ciel immense où paraissaient des nuages qui s’étiraient, se gonflaient, s’amassaient, se dispersaient, fuyaient, revenaient, promettaient, menaçaient, restant, avec la brise qui courait entre les joncs, la seule manifestation tangible de la vie. Une méchante carriole, pour cocher, et nous ne savions pas pourquoi, un soldat, nous deux, notre valise, et nous avancions dans un pays où la présence de l’homme n’était décelable qu’à l’existence d’une piste en mauvais état suivie ce jour-là par nous, que poussait, dans l’idée de notre soldat, une incompréhensible curiosité.
« Vulkov », vous verrez, c’est un pays comme il n’y en a pas deux », et il fallait vraiment que nous n’ayons rien à faire pour qu’une si banale réflexion suffît à nous décider d’y partir.
Nous y étions un peu perdu et, comme au bout du monde. Le fleuve en nous emmenant demain nous en délivrerait. Jamais nulle part nous ne nous étions senti  tellement étrangers et, je ne sais pas pourquoi, sur le point d’être oubliés.

 Iles et collines

Il nous semblait assister aux hésitations d’une ébauche, à moins que ce ne fussent les prémices d’une disparition. Trop d’eau, trop de ciel, et ce pêcheurs en loques, éventrant un esturgeon pour en extraire la masse d’un caviar qui serait, à des lieues d’ici, dégusté dans des restaurants rutilants de lumières, de musiques, de fleurs et de femmes luxueusement parées, manquait de réalité.
Tout ce que nous avions sous les yeux nous apparaissait sans lien avec le reste du monde. Ces enfants rencontrés dans les chemins, ces enfants que nous avions effrayés, intrigués, que raconteraient-ils après notre départ ? Et toute leur vie, la passeraient-ils contre ce bras puissant du Danube qu’aucun pont ne traverse là et dont les eaux profondes et lourdes les maintenaient dans l’isolement ? Des jardins, de petites maisons, des fleurs, des fruits, des poissons, cela constituait un univers bien clos. Leur serait-il suffisant ? Nous le voyions au printemps, épanoui dans des verdures et des floraisons, mais l’hiver quand les vents froids balaient cette immensité à laquelle le rend le dépouillement de ses jardins, à quoi peut-on penser ou rêver dans les petites maisons blanchies à la chaux, ornées de fleurs artificielles et de napperons brodés, placées encore en cette année 1933 sous la protection d’ icônes qu’honoraient de tremblants lampions ?

Nous quittons le port

Le lendemain nous abandonnions Vulkov et alors commença notre remontée vers Vienne. Aux marais succédèrent des prairies, aux joncs, des peupliers et des bouleaux, quelques usines, de vraies villes, parfois un resserrement du fleuve entre des collines, mais partout le Danube restait le maître, apportant aux pays qu’il traverse leur mélancolie ou leur fertilité, leurs façons et leurs raisons de vivre.
Marcelle Marquet, juillet 1954

Danube-culture, mis à jour mars 2023

 L’entrée des Portes-de-Fer

 Les Portes-de-Fer

 Un village en Cracovie (Croatie)

La sortie du port

Peintres du Danube : Nicolae Spirescu (1921-2009)

Nicolae Spirescu, linogravure, 1963
« Je me retrouve dans la paix du Danube, du Delta. Son silence est une initiation à un dialogue avec moi-même, avec ce qui m’entoure, et ce qui m’entoure devient couleur ».    

Paysagiste remarquable, graveur inspiré, Nicolae Spirescu aime sa ville et sa région d’adoption. Elles lui révèlent des trésors insoupçonnées, des mystères et des miracles qu’il reflète dans sa peinture. L’artiste transforme la campagne danubienne des environs en images d’une beauté sublime et grave aussi des scènes réalistes de son environnement.
Nicolae Spirescu enseignera dans plusieurs établissements de Galaţi. Il fonde en 1951, avec Nicolae Mantu, Lola Schmierer-Roth, Ion Bârjoveanu, Elena Hanagic, Lelia Oprișan, Constanța Grigoriu et Gheorghe Levcovici, le premier cercle d’artistes de la ville à partir duquel se développera plus tard la section locale de l’Union des artistes roumains. En 1952, il est nommé assistant honoraire à l’Institut des Arts Plastiques de Bucarest.

J.A. Steriadi

J.A. Steriadi (1880-1956), bateaux dans le port de Brăila, huile sur toile, 1909

Son attachement à Galaţi s’exprime par sa généreuse donation à celle-ci de tableaux en 1990, donation portant le nom de « Collection Eminesciana »  dont les oeuvres ornent les murs de la salle de lecture « Mihai Eminescu » de la bibliothèque départementale V. A. Urechia.
Le peintre qui est lauréat de nombreuses récompenses tant en Roumanie qu’en Italie est nommé « citoyen d’honneur de Galaţi ». Le magazine « Dunărea de Jos » a institué un prix en son honneur. Décerné chaque année celui-ci récompense des contributions exceptionnelles au développement et à la promotion des beaux-arts dans la ville.

Nicolae Spirescu, Pêcheurs, linogravure, 1961

Nicolae Spirescu reste un nom de référence dans l’histoire des beaux-arts roumains apportant le même état d’esprit qu’il exprimait dans ses propos : « Moi, le peintre de mes propres silences, j’entends, dans le tumulte de mes années, l’agitation des eaux. Si vous avez de la peine prêtez l’oreille au murmure des eaux, et vous obtiendrez à la guérison, car il en est du ciel comme de la terre… ».
Ses œuvres se trouvent dans des musées et des collections privées en Roumanie, en Autriche, en Angleterre, au Canada, en Suisse, en France, en Grèce, en Israël, en Italie, en Allemagne, en Suède, aux États-Unis et en Russie.

Sources :
Albumul Nicolae Spirescu-Pictura-Grafica, Alma Print (2008)

Eric Baude pour Danube-culture, septembre 2022, © droits réservés

Peintres du Danube : Nicolae Dărăscu (1883-1959)

Nicolae Darascu, bateaux à Valcov
Nicolae Dărăscu, Bateaux sur le Danube à Vălcov (Vylkove, en ukrainien Вилкове, autrefois en Roumanie, aujourd’hui sur le territoire aujourd’hui ukrainien du delta du Danube) huile sur toile, 1924

Nicolae Dărăscu étudie la peinture à l’Académie des beaux-arts de Bucarest entre 1902 et 1906, dans la classe de George Demetrescu Mirea (1852-1934). Après en avoir été lauréat et avoir reçu une bourse pour l’Académie Julian à Paris qu’il souhaitait fréquenter en tant qu’admirateur de ses prédécesseurs Nicolae Grigorescu (1838-1907) et Ştefan Luchian (1868-1916) où le jeune artiste va suivre d’abord les cours de Jean-Paul Laurens (1838-1921) puis à partir de en 1907, de Luc-Olivier Merson (1846-1920) à l’École des beaux-arts.

 Bateau à voile dans le delta, huile sur toile, 1914, une des nombreuses « marines » de Nicolae Dărăscu

Il voyage dans le sud de la France (Toulon et Saint-Tropez, 1908), à Venise (1909), en Roumanie (à Vlaici, comté d’Olt, 1913, et dans le sud de la Dobroudja et au bord de la mer Noire, à Balcic en 1919, principale résidence d’été de la reine Marie de Roumanie (1875-1938) entretenant des contacts permanents avec des artistes d’autres cultures, visitant les grands musées d’art européens et élargissant ses horizons pour découvrir et tenter de nouvelles formes d’expression artistique. Contrairement à nombre de ses contemporains, N. Dărăscu peint rarement des intérieurs ou des natures mortes.

N. Darascu maison avec tilleul à Balcik 1933

Nicolae Dărăscu, Maison avec tilleul à Balcic (Balčik, aujourd’hui en Bulgarie appartint à la Roumanie qui avait annexé la Dobroudja du sud de 1913 à 1916 puis de 1918 à 1940) huile sur toile, 1933

En 1917, N. Dărăscu fonde en compagnie des peintres de sa génération, Camil Ressu (1880-1962), Ștefan Dimitrescu (1886-1933), Iosif Iser (1881-1958), Marius Bunescu (1881-1971) et les sculpteurs Dimitrie Paciurea (1873 ou 1875-1932), Cornel Medrea (1888-1964), Ion Jalea (1887-1983) et Oscar Han (1891-1976), l’association Arta Română à Iaşi.
N. Dărăscu a été également professeur à l’Académie des beaux-arts de Bucarest entre 1936 et 1950.

Sources : 
Radu Ionescu, Vasile Florea
Nicolae Dărăscu, Editura Meridiane, București, 1987
https://ro.wikipedia.org/wiki/Nicolae_Dărăscu

Danube-culture © droits réservés, août 2022

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