Albrecht Altdorfer (1480-1538), peintre emblématique de l’École du Danube : La bataille d’Alexandre le Grand

    Sur la cartouche au milieu des nuages se trouve l’inscription latine : « ALEXANDER M[AGNVS] DARIVM VLT[IMVM] SVPERAT CAESIS IN ACIE PERSAR[VM] PEDIT[VM] C[ENTVM] M[ILIBVS] EQUIT[VM], VERO X M[ILIBVS] INTERFECTIS. MATRE QVOQVE CONIVGE, LIBERIS DARII REG[IS] CVM M[ILLE] HAVD AMPLIVS EQVITIB[VS] FVGA DILAPSI, CAPTIS. »
Soit en français : « Alexandre le Grand vainc le dernier Darius, après que 100 000 fantassins soient tombés et 10 000 cavaliers aient été tués dans les rangs des Perses, et fait prisonniers la mère, l’épouse et les enfants du roi Darius ainsi que 1 000 cavaliers en déroute ».

Altdorfer a écrit au bas de son tableau, sur le bord inférieur :
« 1529 ALBRECHT ALTORFER ZU REGENSPVRG FECIT. »
« 1529, fait par Albrecht Altdorfer à Ratisbonne ».

   Au-dessus de la gigantesque bataille le soleil se couche, de l’autre côté, une lune orientale descendante symbolisée par un croissant est brouillée par des nuages, au-dessous un arrière-plan de reliefs paysages alpins au bleu profond presque méditerranéen touche les nuages, une ville de Tarse2 aux allures gothico-bavaroise et un Nil (à droite) ayant d’étonnantes ressemblances avec le Danube.

« Un éblouissement. Du plus loin qu’on l’aperçoit, l’œuvre aspire le regard. Non l’œuvre dans sa totalité, mais sa partie haute : le ciel, l’inscription flottant dans l’air, dans son cadre qui semble soutenue comme par des ailes par deux draperies rouge et rose, et, plus que tout, le soleil, le soleil comme un œil aux paupières de nuages et de montagnes bleues. Il se couche sur la vallée de l’Issos, alors qu’Alexandre met en déroute l’armée du roi perse Darius III et fait prisonnière la famille de ce dernier. »

Philippe Dagen, critique d’art, Le Monde, 25 août 2020

Albrecht Altdorfer (vers 1480-1538) 

On peut sans hésitation considérer Albrecht Altdorfer (vers 1480-1538), artiste de la Renaissance allemande original et précurseur encore trop méconnu et parfois présenté comme un disciple d’Albrecht Dürer (1471-1528), comme le peintre emblématique d’un mouvement pictural spécifique du XVIe siècle dénommé par la suite « École du Danube », au sein duquel les paysages sauvages, ces « paysages du monde », mis en scène et aux perspectives et à la profondeur infinies, semblables à ceux de la vallée du Haut-Danube et des Alpes occupent à la fois une place autonomes prépondérante dans de nombreuses oeuvres. Altdorfer s’émancipe des canons de la représentation du paysage jusque là en vigueur.
Né en Bavière, probablement à proximité de Ratisbonne (Regensburg), Altdorfer s’installe à Ratisbonne et en devient citoyen en 1505. Il entreprend un voyage sur le Danube en 1515 après avoir gravé plusieurs oeuvres pour l’Empereur du Saint Empire romain germanique Maximilien de Habsbourg (1459-1519).

Sarmingstein sur le Danube, encre sur papier, 1511. Altdorfer rend compte avec ces rochers qui se dressent jusqu’au ciel, de l’étroitesse du défilé de la Strudengau. Au milieu du fleuve deux  embarcations minuscules qui semblent perdues dans le paysage. 

Du voyage sur le Danube ont été conservés plusieurs dessins et petits tableaux de paysage qui préfigurent la place du paysage et de la nature dans les oeuvres ultérieures du peintre, sans doute impressionné par l’environnement danubien encore intact de la Haute-Autriche. En 1518, il est chargé de peindre le Retable de Saint-Florian pour l’abbaye du même nom, retable malheureusement aujourd’hui dispersé dans plusieurs endroits.

Le retable de Saint-Florian, l’arrestation de Saint-Florian, 1518/1520

Devenu un notable de sa ville, il va siéger ultérieurement au Grand Conseil tout en poursuivant ses activités officielles de peintre, de graveur et de dessinateur. Altdorfer dessine en 1519 les plans d’une église dont la construction est prévue sur les ruines de deux synagogues détruites et semble avoir joué un rôle important dans l’expulsion des Juifs de la cité à cette époque de guerre civile. Peut-on parler alors d’un peintre « humaniste » ? Nommé architecte de la ville en 1526, il contribue à l’aménagement de sa ville et de ses remparts mais en 1528, refuse de prendre la charge de bourgmestre pour ne plus se consacrer qu’à son travail artistique. Il commence cette même année ce qui deviendra son plus célèbre tableau « La bataille d’Alexandre », commande du duc Guillaume IV de Bavière (1493-1550), tableau qui se trouve aujourd’hui à l’Alte Pinacothek de Munich.4 Il meurt en 1538. De l’ensemble de son oeuvres ont été conservés une cinquantaine de tableaux et 250 gravures.
« Dans ses paysages, Altdorfer transpose la réalité sur un plan poétique et lyrique, qui semble inspirer un sentiment plus vif d’union avec la nature. Ce n’est pas un hasard si, dans l’une de ses premières peintures, Altdorfer choisit le thème, à peu près inconnu dans le Nord à l’époque, de la Famille du satyre, qui à la suite des « hommes sauvages » du Moyen Âge, symbolise les forces obscures de la nature et de l’instinct. Dans le petit panneau du Saint Georges de 1510, où la lumière ne pénètre que parcimonieusement, comme tamisée par l’épais feuillage, on peine quelque peu à trouver le saint à cheval et plus encore son monstrueux adversaire qui semble faire partie intégrante de cette forêt proliférante. Ses tableaux religieux se distinguent par des recherches d’éclairage créant une atmosphère surnaturelle.

Le retable de Saint-Florian avec en arrière-plan la petite cité d’Enns, les paysages alpins où l’Enns prend sa source, huile sur bois, 1518/1520 

Dans le grand Retable de Saint-Florian (Haute-Autriche), terminé en 1518/1520, Altdorfer s’y révèle un esprit tourmenté, visionnaire, créateur d’atmosphères violemment contrastées, où la nature tout entière amplifie le drame de la Passion qui s’y joue, lui donnant sa dimension de drame cosmique. Dans des couleurs éclatantes, les personnages se détachent cette fois sur des paysages ou des architectures puissamment éclairées, à divers moments du jour ou de la nuit. L’historien d’art Otto Benesch a fait remarquer que les peintures d’Altdorfer datant de cette période sont parmi les premières à représenter un univers convexe, héliocentrique, dans lequel la Terre n’est plus le centre du monde ; l’art dévoile ainsi, par ses moyens propres, la révolution scientifique à laquelle Copernic travaillait au même moment. »

Albrecht Altdorfer, paysage danubien près de Ratisbonne

On lira également au sujet d’Albrecht Altdorfer le chapitre consacré à l’ « École du Danube » par Patrick Leigh Fermor dans son livre Dans la nuit et le vent, Le Temps des offrandes, Entre fleuve et forêt et La Route interrompue (préface et traduction française entièrement revue et complétée de Guillaume Villeneuve), publié aux éditions Nevicata, 2016.

Eric Baude, © Danube-culture, droits réservés, mis à jour décembre 2024

Notes :
1 Guillaume IV de Bavière reste célèbre pour avoir  promulgué dans son duché, le 23 avril 1516, le décret de pureté de la bière qui régit encore aujourd’hui la composition de la bière dans les pays germaniques.

2 Ville de la Turquie asiatique occidentale (province de Mersin) au bord du fleuve Tarsus, haut-lieu de l’Antiquité et du stoïcisme, située autrefois dans la province romaine de Cilicie, ville natale de Saint-Paul.
3 Paul-Louis Rossi, dans son livre « Vies d’Albrecht Altdorfer », peintre mystérieux du Danube, raconte que le tableau de La bataille d’Alexandre  aurait été retrouvé par l’écrivain, philosophe, critique d’art et poète allemand Friedrich von Schlegel (1772-1829) en 1803 lors de son séjour à Paris dans une salle de bain du château de Saint-Cloud. Schlegel en donne cette description :
« Nulle part on ne voit de sang, de choses repoussantes, de bras ou de jambes désarticulées ; au tout premier plan seulement, en y regardant de près, on voit sous les pieds des cavaliers qui se lancent les uns cotre les autres, sous les sabots, de leurs chevaux de batailles, plusieurs rangs de cadavres serrés les uns contre les autres comme un tissu. »
« Voilà ce qui, au yeux du peintre devait figurer les conflits futurs et la genèse des grandes guerres européennes. Alors que cette masse énorme d’hommes d’armes et de cavaliers se transforme en une mêlée gigantesque de soldats et de chevaux, d’oriflammes et de chars, un phénomène inattendu se produit qui dépasse encore l’enchevêtrement des hommes et des bêtes qui s’empare des éléments et brasse le ciel et la terre les nuages et l’eau, la mer, les montagnes et les fleuves en un véritable tourbillon cosmique, tel qu’il ne s’en produira plus dans la peinture. Comme si les feux de l’esthétique pouvait encore encore une fois confondre les combattants et les plonger dans ce chaos pour les mêler fraternellement un dernier instant… »
Paul-Louis Rossi, La bataille d’Alexandre, in Vies d’Albrecht Altdorfer, peintre mystérieux du Danube, Bayard, Montrouge, 2009
Sources :
Albrecht Altdorfer, Die Gemälde, Tafelbilder, Miniaturen, Wandbilder, Bilhauerarbeiten, Werkstatt und Umkreis, Gesamausgabe von Franz Winzinger, R. Piper & Co. Verlag, München, 1975
Butor, Michel, Le Musée imaginaire de Michel Butor, Flammarion, Paris, 2015

Leigh Fermor, Patrick, Dans la nuit et le vent, Le Temps des offrandes, Entre fleuve et forêt et La Route interrompue, préface et traduction française entièrement revue et complétée de Guillaume Villeneuve, éditions Nevicata, Bruxelles, 2016
Rossi, Paul-Louis, Vies d’Albrecht Altdorfer, peintre mystérieux du Danube, Bayard, Montrouge, 2009
Apparence, Histoire de l’Art et Actualité culturelle, www.apparences.net

Eric Baude, © Danube-culture, droits réservés, décembre 2024

La bataille d’Alexandre, détail

Peintres du Danube : Jules Pascin (1885-1930), « prince de Montparnasse »

La robe du soir, 1924

   Jules Pascin, de son vrai nom Julius Mordecaï Pincas, est né le 31 mars 1885 dans une famille de riches commerçants séfarades de Vidin. Il est le septième des neuf enfants. Son père exerce avec succès la profession de marchand en grain et représente l’empereur des Habsbourg dans sa ville en tant que consul d’Autriche. En conflit avec cet homme au caractère tyrannique qu’il dessine sous les traits de l’ogre du Petit Poucet, le jeune adolescent s’enfuie, séjourne et étudie à Bucarest, Budapest, Vienne, Berlin et Munich. Son grand talent de dessinateur lui permet de travailler pour la revue Simplicissimus, revue satirique bavaroise dirigé par Albert Langen (1869-1909) dont l’esprit n’est pas sans rappeler L’assiette au beurre

Vidin et le Danube vers 1900

   Une grande partie de son oeuvre restera d’ailleurs toujours marquée par cette sensibilité, par une force de la satire et de la caricature féroce. Ses dessins aux traits épais, épurés, dans des tonalités claires, aquarellées soulignées de fusain, d’encre et de lavis, se rapprochent des mondes de la gravure sur bois ou de la lithographie.   C’est une période où il rencontre des peintres qui donneront naissance à l’expressionnisme allemand et avec lesquels il parvient à trouver sa ligne et son style graphique exprimant une forte critique de la société de l’époque.

Jules Pascin au café du Dôme en 1910 (photographe non identifié)

   Pascin  arrive par l’Orient express à Paris 1905, à la veille de Noël en espérant y faire carrière. Sa réputation de dessinateur l’a déjà précédé et c’est une vraie délégation de peintres et d’artistes au fait de son talent qui l’accueille et l’emmène immédiatement à Montparnasse.
Son travail de caricaturiste n’a pas cessé et il continue à envoyer toujours régulièrement des dessins à
Simplicissimus qui lui permettent de bien gagner sa vieIl noue aussi des liens avec l’avant-garde française, fait la connaissance de Foujita, Kisling, Soutine, Van Dongen, Derain, Diego Rivera mais aussi de Matisse, des artistes du mouvement du fauvisme et illustre les ouvrages d’amis poètes et écrivains comme Pierre Mac Orlan, Paul Morand ou André Salmon.
   Jules Pascin est assimilé à l’École de Paris, selon l’expression du critique d’art André Warnod, école désignant l’ensemble des artistes étrangers arrivés avant les années 1920 dans la capitale française pour tenter de trouver des conditions plus favorables à l’expression de leur art tout en restant en marge des grands mouvements artistiques de l’avant-guerre, cubisme, fauvisme et futurisme. Ses sujets préférés demeureront tout au long de sa vie les représentations de scènes de la vie quotidienne, du corps féminin, peintures et dessins au caractère érotique.

Jules Pascin, Manolita, 1929, Paris, Musée National d’Art Moderne

   Ses voyages et séjours en Angleterre, aux États-Unis, à New York avec la peintre Hermine David (1886-1970) pendant la première guerre mondiale (1914-1920) et à Cuba, lui permettent de réaliser de très nombreux croquis et aquarelles. L’érotisme de ses oeuvres provoque un scandale outre-Atlantique. Le peintre prétend pourtant, après son retour en France, n’être qu’un admirateur de Boucher et de Fragonard.

Jules Pascin, Alfred Flechtheim habillé en toréador, 1927, Paris, Musée National d’Art Moderne

   Parmi ses modèles on trouve sa femme Hermine David qu’il a épousé pendant son séjour à New York et sa maîtresse Cécile Vidil (1891-1977), la future femme du peintre norvégien Per Lasson Krogh (1889-1965)  avec lesquelles il entretient une relation simultanée.
   « Pourquoi une femme est-elle considérée comme moins obscène de dos que de face, pourquoi une paire de seins, un nombril, un pubis sont-ils de nos jours encore considérés comme impudiques, d’où vient cette censure, cette hypocrisie ? De la religion ? »

Jules Pascin, Hermine (Hermine David, 1886-1970) au lit, aquarelle

   Nous sommes au début des années 1930, époque où Picasso, Braque, Miro, le cubisme, les abstraits, les surréalistes, font littéralement exploser la figuration et la représentation dans la peinture. Tout comme Modigliani, et de nombreux autres artistes, Jules Pascin s’interroge quant à lui, sur la signification de son oeuvre figurative. Il souffre de ne plus être reconnu, et croit perdre le sens, la sensibilité et la puissance qu’il a toujours voulu donner à sa propre peinture. Il sombre et se réfugie peu à peu dans la fuite, les fêtes nocturnes et l’alcool.
   Jules Pacsin adresse à sa compagne Lucy, peu avant de mettre fin à ses jours, une dernière lettre dans laquelle il écrit : « Je suis un maquereau, j’en ai marre d’être un proxénète de la peinture … Je n’ai plus aucune ambition, aucun orgueil d’artiste, je me fous de l’argent, j’ai trop mesuré l’inutilité de tout. » Le peintre se suicide dans son atelier du boulevard de Clichy le 2 juin 1930, à l’âge de quarante-cinq ans. Plus de mille personnes suivent quelques jours plus tard le cortège jusqu’au cimetière du Montparnasse. Les galeries d’art de paris ont fermé leurs portes en signe de deuil. Un poème de son ami André Masson est gravé sur sa tombe : « Homme libre héros du songe et du désir de ses mains qui saignaient poussant les portes d’or esprit et chair Pascin dédaigna de choisir et maître de la vie il ordonna la mort. »

« — Ne vous retournez pas ainsi…Continuez à suivre le corps du pauvre Pascin : Oui je vous laisse ; je reste ici avec son image immatérielle. Avec Chagall mystique, sa fine compagne à ses côtés, avec Kisling et Papazoff qui sont de la même lignée formidable, avec tous ses copains et copines, les yeux rougis, André Salmon et Marcel Sauvage le visage bouleversé, les modèles de tout poil et de toute couleur, les marchands de tableaux, même, dont la douleur se tempère de la hausse brusque que vaut ce bond dans l’éternité… Oui Zadkine, excuse-moi : sculpteur, vous avez le culte de la matière et des formes, dépouilles mortelles que vous suivrez, avec l’espoir d’une survivance, d’une transfiguration, « tel qu’en lui-même, enfin l’éternité le change » ; moi, je le vois encore, hanté par la chair, par l’hallucination du désir, des jambes écartées, des femmes étalées, des croupes obscènes, appel magnifique et terrible de la bête humaine, à quoi répondait triomphalement sa grande et simple bonté. »
W. Mayr, Souvenirs sur Pascin

Eric Baude, © Danube-culture, droits réservés, mis à jour septembre 2023

Sources :
Levy-Kuentz, Stephen, Pascin libertin, Adam Biro, 2009

Lvy-Kuentz, Stephen, Pascin, coll. « Grandes monographies », La Différence, Paris, 2009
Joann Sfar, Joann Pascin, biographie imaginaire, L’Association, 2005
Levy-Kuentz, Pascin et le tourment. Coll. Les essais, La Différence, Paris 2001
Bay, André,, Adieu Lucy, Le roman de Pascin, Albin Michel, Paris, 1983
Dupouy, Alexandre, Jules Pascin, collection Rêveries, Parkstone Press Ltd, New York, 2004

Warnod, André, Pascin, André Sauret, Éditions du livre, Monte-Carlo, 1954
Nieszawer & Princ, Artistes juifs de l’École de Paris 1905-1939, français-anglais, Éditions Somogy, Paris, 2015
Catalogues raisonnés :
Hemin, Yves, Krohg, Guy, Perls, Klaus, Rambert, Abel, Pascin : Catalogue raisonné, vol. 1 : Peinture, Aquarelles, Pastels, Dessins, Bibliothèque des Arts, Paris, 2001
Hemin, Yves, Krohg, Guy, Perls, Klaus, Rambert, Abel : Catalogue raisonné, vol. 2 : Peinture,
Aquarelles, Pastels, Dessins, Bibliothèque des Arts, Paris 2001
Hemin, Yves, Krohg, Guy, Perls, Klaus, Rambert, Abel,
 Pascin : Catalogue raisonné, vol. 3 : Simplicissimus, Gravures, Lithographies, Illustrations, Sculptures, Objets, Bibliothèque des Arts, Paris, 2001
Hemin, Yves, Krohg, Guy, Perls, Klaus, Rambert, Abel, Pascin : Catalogue raisonné,
vol. 4 : Dessins, Aquarelles, Pastels, Peintures, Dessins érotiques, Bibliothèque des Arts, Paris, 2001
Hemin, Yves, Krohg, Guy, Perls, Klaus, Rambert, Abel, Pascin : Catalogue raisonné,
vol. 5 : Peinture, Aquarelles, Pastels, Dessins, Bibliothèque des Arts, Paris, 2010
Filmographie :
Pascin l’oublié (INA) : https://images.app.goo.gl/Aq8WaG6rHc7CREgB7
François Lévy-Kuentz, Pascin l’impudique, Production Lapsus/France 5/Paris première, 2000, 60 mn
https://fr.wikipedia.org/wiki/Jules_Pascin

Jules Pascin, portrait de Lucy Krohg, vers 1925, huile et crayon sur canevas, collection particulière

Un voyage sur le Danube de Vienne à Ofen et Pesth vers 1850

Un exemple de cet engouement pour les voyages Danube est illustré par la publication à Vienne en langue allemande et hongroise, dans les années 1850, du superbe album intitulé Malerische Donaureise von Wien bis Ofen und Pesth/Festői dunahajózás Bécstől Buda-Pestig (Un voyage pittoresque sur le Danube de Vienne jusqu’à Ofen et Pesth), album illustré de peintures et de dessins auquel collaborent des artistes réputés comme Jacob Alt (1789-1872) et Franz Xaver Sandmann (1805-1856). Les lithographies sont gravées par B. Johann Rauch (1803-1863) et l’album est édité avec soin par Josef Bermann à Vienne.
Ces illustrations représentent un extraordinaire état du fleuve et des rives à cette époque. Y figurent de nombreux détails de la vie et des activités qui régnaient sur le fleuve et ses rives comme la présence de bateaux-moulins, de toutes sortes de d’embarcations à la voile et à la rame qui fréquentaient cette partie du fleuve et de métiers traditionnels engendrés par la présence du Danube.
Ce document appartient à la collection du Département des images et des graphiques (Sammlung Bilder und Grafiken) de la Bibliothèque Nationale d’Autriche à Vienne. Nous remercions cette institution de nous l’avoir mis à disposition et de nous avoir autorisé à en reproduire certaines gravures.

Embarcadère du Prater à Vienne avec un bateau-moulin

Hainburg et la manufacture de tabac

Pressburg/Poszony (Bratislava)

La forteresse sur le rocher de Thèbe (Devín) et un bateau-moulin

Gran/Esztergom et la basilique Saint Adalbert

Visegrad

Waizen/Vácz

 Chantier naval d’Alt Ofen (Schiffswerfte bei Alt Ofen/ Ó BudaI hajógyár)

Ofen-Buda

Pest les quais et le pont aux chaines

Rudolf von Alt (1812-1905), peintre et aquarelliste de la Sécession viennoise

Rudolf von Alt, Vue de Budapest avec le pont aux chaînes et le château, aquarelle, 1880

   Ce prolifique et talentueux peintre védutiste1 acquit une grande réputation bien au-delà des frontières de l’Autriche, grâce à ses tableaux et aquarelles représentant la nature, des paysages européens, le Danube, des vues de grandes et petites villes, leur animation avec leurs scènes quotidiennes, en particulier de sa ville natale, Vienne et ses peintures d’intérieurs aux couleurs variées et contrastées

Rudolf von Alt, autoportrait, 1890

   Élève de son père Jakob (1789-1872), peintre, lithographe et aquarelliste allemand venu s’installer à Vienne, frère aîné du peintre Franz Alt (1821-1914), il étudie à partir de 1826 à l’Académie des Beaux-Arts de Vienne mais son travail sur le motif influencera davantage sa formation. Il accomplit de longs voyages dans toute l’Autriche-Hongrie et dans le sud de l’Europe jusqu’en Sicile. En 1828, le jeune peintre accompagne son père dans les Alpes autrichiennes. Sa première exposition à Vienne a lieu en 1830. Il devient professeur à l’Académie des Beaux-Arts à partir de 1879 et sera anobli en 1892. C’est lui qui présente G. Klimt à l’empereur François-Joseph en 1898. Rudolf von Alt fut également Président d’honneur de l’Association Artistique de la Sécession Viennoise.

Rudolf von Alt, À bord du vapeur du vapeur de la D.D.S.G. Maria-Anna, aquarelle, 1837 

   Rudolf von Alt commence par peindre des tableaux aux architectures élaborées, comme la cathédrale saint-Étienne (1832) puis exprimera clairement une préférence pour l’aquarelle. Son travail dans ce domaine peut se comparer aux plus grands des aquarellistes français et anglais de la même époque. Le format de ses aquarelles augmente progressivement et atteindra parfois celui de ses peintures à l’huile, dont le coloris est toutefois plus soutenu y compris dans les scènes d’intérieur.

Rudolf von Alt, Abbaye de Klosterneuburg, aquarelle, 1843

Son inspiration et sa technique se renouvellent constamment ; appartenant au début de sa carrière au sage réalisme du Biedermeier, puis à la peinture de plein air, il se rapproche du style impressionniste qu’il incorpore dans une touche très personnelle. Son style toujours très clair et aéré, sans fadeur ni mollesse, d’une grande délicatesse et poésie, évolue dans ses dernières œuvres vers un sens presque visionnaire de la réalité atmosphérique. Au cours de cette lente évolution, Rudolf von Alt ne se laisse malgré tout jamais entraîner à négliger l’aspect positif des choses.
Les collections les plus importantes de ses aquarelles sont conservées à Vienne en particulier à l’Albertina et au Kunsthistorisches Museum.

Danube-culture, mis à jour août 2023

Notes :
1Le védutisme est l’art de la vue, du paysage urbain ou suburbain et spécialement de ses représentants italiens du XVIIIe, comme Canaletto, Guardi, Belloto, Pannini…

Sources :
SCHRÖDER, Klaus-Albert, STERNATH, Marie-Luise (Herausgegeben), Jakob und Rudolf von Alt, im Auftrag des Kaisers, Ausst.Kat., Albertina, Wien, 2010
KOSCHATZKY, Walter Rudolf von Alt, Residenz Verlag, Salzburg, 1976
Dictionnaire Larousse de la peinture, Éditions Larousse, Paris, 2003

Rudolf von Alt, Dürnstein in der Wachau vu de la rive droite, aquarelle 1852, collection de l’abbaye de Klosterneuburg

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