Radu Anton Roman : le delta du Danube

Entre ces trois bras principaux, ainsi qu’au sud et au nord, s’entrelace un réseau infini de canaux, d’étangs, de forêts, de lacs, de déserts de sable, de marécages, d’îles et d’îlots flottants, dominé par une masse impénétrable de roseaux. De tout temps, l’homme a répugné à fréquenter ces lieux inhospitaliers, et aujourd’hui encore, l’île du Delta ne compte guère plus de quinze mille habitants, dispersés dans des villages isolés. Ni terre ni eau, mais aussi à la fois terre et eau, le Delta offre au visiteur un paysage d’une variété hallucinante, où les lianes tropicales côtoient des espaces désertiques, où les forêts jaillissent du sable au milieu de la jungle d’algues des lacs, où les fleurs carnivores voisines avec des insectes étranges, où l’homme, bien que rare, est en vérité parfaitement intégré à la nature, et où la vie paraît immuable depuis des centaines si ce n’est des milliers d’années.
Les historiens de l’Antiquité, déjà, faisaient état de l’Ister (ancien nom donné au Danube) et de son delta regorgeant de poissons, ainsi que de la mythique cité de Leuce, jamais découverte à ce jour. Carrefour de la navigation et du commerce fluvial pendant deux millénaires, le Delta est devenu, au début XVIIIe siècle, un refuge pour les malheureux, les persécutés et les vaincus d’Ukraine, de Biélorussie et de Russie. Refuges à la fois sûrs et inaccessibles, où gibier et poisson se trouvent en abondance, les minces bandes de terre sablonneuse situées entre roseaux et lacs ont accueilli aussi bien des cosaques de la Volga et du Dniepr, surnommés haholi1 à cause de leurs crânes rasés, que des lipovènes, gardiens de traditions orthodoxes séculaires, qui ont préservé jusqu’à nos jours leur calendrier prégrégorien, leurs barbes touffues et certains rituels religieux et laïques originaux que l’on ne retrouve dans aucune des autres branches du christianisme.
Si la principale occupation des lipovènes est, depuis toujours, la pêche, les haholi pratiquent, en plus de celle-ci l’agriculture et l’élevage sur les terres sablonneuses, et la piraterie ailleurs.

Lipovène à Vilkove, Photo Willy Pragher

Les uns et les autres ont été rejoints, à la faveur des années de sécheresse, par des Roumains du sud de la Transylvanie, venus hiverner avec leurs troupeaux de vaches et de moutons, et dont certains sont devenus pêcheurs, tandis que d’autres préféraient conserver leur métier traditionnel.
Qui s’aventure dans le Delta ne manquera pas de devenir que peu de choses ont changé. On peut y voir les mêmes barques étroites et noires, unique moyen de transport, la même pêche périlleuse et solitaire, les mêmes chasses au sanglier, avec javelot et lasso, les mêmes toits de roseaux, la même autarcie chaque jour reconquise, la même pesante solitude, dans une nature sauvage que l’hiver, glaces et brouillard « aidant », rend farouchement inaccessible. Ici, les grandes conquêtes de la civilisation sont les bottes en caoutchouc et l’électricité, au demeurant fournie de manière intermittente et parcimonieuse, pour ne pas dire avare, par un État qu’a encore appauvri un demi-siècle de féodalisme communiste.
Au lendemain de la mainmise de l’Union soviétique sur la Roumanie en 1945, la mise en valeur économique du Delta fut prétexte à la création d’un véritable Goulag roumain, d’une sorte de de Sibérie danubienne. Afin de rendre les roselières exploitables, on a fait endiguer cent mille hectares de marécages par des dizaines de milliers de prisonniers politiques, astreints au travail forcé. Les conditions de vie étaient effroyables, et toute évasion impossible. Pataugeant sans cesse dans l’eau et la boue, harcelés par les moustiques, les taons, les sangsues, les serpents, les larves, les parasites, décimés par la faim, l’épuisement et le choléra, la malaria, la dysenterie et la torture, les meilleurs d’entre les Roumains ont ainsi été détruits, en même temps qu’ils détruisaient, bien malgré eux, le Delta.
Sous Ceauscescu, dans les années 1980, commença la seconde étape de l’ « aménagement » du Delta. Il devait être endigué à 80 % de sa superficie et transformé en polder à vocation agricole. De grands lacs de mille, voire deux mille hectares, tels Fortuna et Gorgova, devaient être asséchés. Il s’agissait à la fois d’un crime écologique, d’une atteinte à l’écosystème, mais aussi d’une aberration économique, les dépenses qu’exigeaient l’assèchement, l’endiguement, le transport, l’entretien, la récolte et la déstalinisation dépassant de très loin les possibilités d’une économie déjà exsangue.

Zones du delta et du bas-Danube transformées en polder sous Ceaucescu, sources Julieta39 — Travail personnel, CC BY-SA 4.0, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=50729342

Mais quelque de chose de pire encore a bien failli se produire : à la suite s’une étude géologique erronée, on avait cru déceler des métaux nobles dans les sols sablonneux situés entre les bras de Sulina et Sfîntul Gheorghe, où l’on a donc installé au prix de nouvelles et abyssales dépenses, une carrière d’exploitation, une usine de traitement du sable, des immeubles, et plusieurs fosses géantes pour y « laver » le sable… à la soude caustique ! On imagine les conséquences qu’auraient entraînées pour le Delta et pour ses habitants — hommes et animaux — ces lacs de soude creusés dans le sable…
Vers 1987, on a cependant fini par s’apercevoir que le sable du Delta n’avait rien de particulier, et qu’il coûtait trois fois plus cher à extraire et à transporter que celui de n’importe quelle autre rivière du pays. Les travaux n’en ont pas moins continué, par crainte de l’effet dévastateur qu’aurait eu  — sur le pouvoir — la révélation de la vérité.
Les évènements de décembre 1989 ont donc sauvé le Delta d’une mort certaine et irréversible. Si les zones immenses entourées de digues ne sont plus que des déserts sans vie, dont la vue remplit d’horreur quiconque les contemple, s’il est probable que la réhabilitation écologique du Delta durera plusieurs dizaine d’années et que son coût sera supérieur aux prévisions les plus pessimistes, la création d’une Réserve de la biosphère2, abritant plus de cent espèces de poissons, trois cent espèces d’oiseaux et des milliers d’espèces de plantes et d’insectes, constitue déjà une victoire de la civilisation européenne — dont les Européens eux-mêmes, malheureusement, sont loin de mesurer toute la portée… »

Zone protégée delta du Danube roumain

Radu Anton Roman (1948-2005),  « Le delta du Danube : une île », Des poissons sur le sable (Zile de pescuit), traduction d’Odile et René Cagnat. Éditions en roumain ; 1985, 1996, 2002, 2010, édition en français Les Éditions Noir sur blanc, Montricher, 1997.

Radu Anton Roman, photo droits réservés

Notes :
1 Les haholi, (Ukrainiens d’Autriche-Hongrie) se sont installés dans le Delta en gardant leurs traditions au début du XVIIIe siècle après la bataille de Poltava ( 1709) que Pierre le Grand a remporté sur les armées de  Charles XII de Suède Il a exercé des représailles contre ceux qui s’étaient rangés du côté du roi scandinave et avaient demandé la libération de l’Ukraine. La deuxième vague de réfugiés haholi est arrivée dans la région après 1775, lorsque Catherine II de Russie a dissous l’armée ukrainienne basée à Zaporozhe. On trouve encore une population haholi à Sfîntul Gheorghe, Dunavățu de Sus et de Jos (bras de Sfîntul Gheorghe) , Caraorman et Letea où la grande majorité des habitants sont d’origine haholi.
2 La réserve a été créée en 1992 du côté roumain et en 1998 dans le delta ukrainien

Anton Roman, le bortsch du pêcheur et le commandant Cousteau…

« Il existe véritablement trois bortsch du pêcheur, que préparent les hommes qui restent la nuit sur les dunes désertes et glacées, juste avec le produit de leur pêche ; ajoutons-y celui que fait la khaziaïca [maîtresse de maison] chez elle, où l’on trouve de tout en abondance, même l’hiver.

   La nuit, quand les hommes du delta partent à la pêche, ils n’emportent qu’un peu de pain, un ou deux oignons, du sel, du vinaigre et du piment fort. Il est rare que le Lipovène oublie une ou deux pommes de terre au fond de son sac. mais il saura préparer au coeur de la végétation luxuriante du delta, tel un architecte divinement inspiré, la plus savoureuse des soupes de poisson d’eau douce ayant jamais existé (qui ressemble à la célèbre bouillabaisse du midi).

   En disant poisson, je veux évidemment parler de tous les poissons du delta réunis ! Parce que sans légumes ni bouquet garni, c’est justement la variété de ce qui cuit qui donne son goût formidable à la ciorba des cosaques.

   Prenons les choses dans l’ordre et allons-y tranquillement : quelques conseils en préambule. Le poisson pour le bortsch doit être archifrais. Presque vivant ! Ne le lavez pas trop énergiquement. Grattez les écailles, coupez-lui le ventre. Videz-le (les oeufs, les laitance et les abats des carnassiers iront dans le bouillon), rincez-le une fois à l’eau fraîche et c’est tout. Quels poissons faut-il mettre dans le bortsch ? Déjà, pas de ciorba qui tienne sans carassins, sans ides à la chair rose-dorée – ou au moins des brèmes – et une carpe de bonne taille. Mais il serait dommage de ne pas faire cuire ensemble un triangle de carnassiers – un silure, un sandre, un brochet – avec un peu de poissons à chair blanche comme les petites brèmes et les gardons, une ablette et deux carassins avec leurs oeufs et tout, sans oublier une tanche douceâtre, et un barbeau dont la chair est très raffinée (attention, ses oeufs sont toxiques, ils provoquent maux de tête et vertiges). Et on mettra aussi deux ou trois perches de bonne taille, dont la chair a une texture blanche, ferme et salée.

Le brochet avec son parfum d’algues et son goût d’amandes, le silure qui sent les châtaignes grillées et qui en a le goût, l’ide jaunâtre au parfum aphrodisiaque, sont uniques : de véritables créations divines. Tout se combine pourtant dans le bortsch du pêcheur comme – dois-le dire ? – dans une symphonie. C’est un terme rebattu ! Une assemblée superbement démocratique réunie devant les urnes et qui votera pour faire triompher l’unique, la colossale, l’indubitable volonté populaire. »
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2 litres d’eau

1 oignon

1 cuillerée rase de sel

5 à 6 kilos de poisson

vinaigre (j’en mets une cuillère à soupe par assiette mais c’est selon votre goût)

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Dès les premiers bouillons, mettre l’oignon haché et le poisson, tout ce que peut recouvrir l’eau.

Vingt minutes après le début de l’ébullition, ajouter le vinaigre, comme on aime (le bouillon va blanchir), le bortsch est prêt !

Le bortsch rempli (de viande) les lundis et vendredis est un plat du diable. Pour l’en délivrer, mets-y du sel et quelques morceaux de charbon, l’autre ne pourra plus approcher.

Dans le delta, on mange le bortsch selon un rituel particulier… On sort le poisson. Dans un grand plat creux on mélange le bouillon, le sel, le vinaigre, on coupe en petits morceaux le piment fort et l’ail. On remet le poisson dans cette saumure acidulée et piquante, et avec les mains, les pieds, la bouche, et tout ce qui se présente (parce que si l’on a passé sa journée à ramer et qu’on est transi de froid on ne cherche pas, là-bas, parmi les roseaux, à avoir de bonnes manières), on mange comme on peut ! Et il y a de quoi !

   Quand on commence à ressentir bien-être et satiété, alors on met du bouillon dans les écuelles, juste le bouillon, et on le boit, bouillant, épais et vivifiant, en pensant qu’il y a bien peu de plaisirs dans la vie et que cela vaut la peine d’aller le chercher même très loin et à des époques peu propices.

   Radu Anton Roman, Savoureuse Roumanie, 358 recettes culinaires et leur histoire, traduit du roumain par Marily le Noir, Les Éditions Noir sur Blanc, Montricher, 2004

Radu Anton Roman

Journaliste, écrivain, réalisateur, chroniqueur, essayiste, personnage rabelaisien, grand épicurien et pêcheur devant l’éternel, passionné de gastronomie et de culture populaire, Radu Roman (1948-2005) est un personnage incontournable du paysage culinaire roumain et du delta du Danube. Né à Fǎgǎras en Transylvanie, une petite ville située dans le département de Brašov et traversée par la rivière l’Olt, affluent du Danube de la rive gauche il déménage avec sa jeune sœur à Bucarest suite au décès de sa mère. Après ses études secondaires il s’inscrit en droit à l’université, abandonne rapidement, fait son service militaire et revient à Bucarest avec l’intention de devenir écrivain.
Au début de sa carrière littéraire, il occupe divers emplois (maçon, gardien de nuit, bibliothécaire…) pour subvenir à ses besoins et ceux de sa soeur, tout en suivant les cours de la faculté de journalisme où il obtient son diplôme en 1976 avec une thèse intitulée « Clichés impératifs dans les chroniques d’art ». La découverte en 1983, suite à une fracture, d’une maladie congénitale, l’incite à partir se réfugier dans le delta d’où il ne reviendra qu’en 1984.
Radu Anton Roman publie en 1985 « Jours de pêche », onze histoires se déroulant dans une petite ville de pêcheurs du delta du Danube qui valent à son auteur, en raison d’une critique sociale perçue comme hostile au régime, les foudres des dirigeants  communistes. Il perd son poste de rédacteur en chef du journal « Munca », et cesse ses activités pour raisons médicales. Il revient ensuite au journalisme après la révolution et signe de nombreux articles critiques envers les nouveaux dirigeants post-communistes roumains. Au cours de cette période, Radu Anton Roman réalise également deux documentaires sur le delta du Danube, qui lui assure une réputation dans son pays et à l’étranger : « Paradise Lost » (1990), et « Delta, Now ! » (1991), documentaires produits et diffusés par la télévision roumaine. Jacques-Yves Cousteau invite ce grand connaisseur du delta du Danube et de ses ressources à rejoindre son équipe pour ses deux expéditions scientifiques1 du printemps et de l’automne 1991, expéditions à laquelle participent également d’autres personnalités roumaines comme les zoologistes Mihai C. Băcescu, Alexandru Marinescu, le chercheur Adrian Gagea et le géographe Ion Cepleanu. « J’ai du mal à croire qu’il n’y ait plus rien de tout cela en Europe », dira le commandant Cousteau à propos du delta du Danube.

Avec le commandant Cousteau en 1991

Cette expédition du commandant Cousteau et de son équipe a été présentée au public en 1992 dans Redécouverte du monde II. Roman Radu a publié un récit personnel dans un carnet de voyage intitulé « Dans le delta avec Jacques-Yves Cousteau » en 2001.

Son émission de cuisine La cuisine de Radu (Bucătăria lui Radu) pour  la télévision roumaine dans les années 2001-2005, rencontra un immense succès.2

Bibliographie :
Poésie :
Ohaba, Țara asta, Editura Cartea Românească, București, 1972
Elegii, Editura Cartea Românească, București, 1980
Romans :
Vara nimănui, Editura Eminescu, București, 1978
Zile de pescuit (Jours de pêche), Editura Cartea Românească, București, 1985, Editura Metropol, București, 1996, Editura Paideia, București, 2002, 2010, traduit en français sous le titre « Des poissons sur le sable » (Éditions Noir sur Blanc, avec une préface du commandant Cousteau), 2004

Precum fumul, Editura Cartea Românească, București, 1996,
Histoires :
Haz cu… pește, Editura Globus, București, 1994,
Journaux de voyage :
Țările de sus ale merilor, Editura Eminescu, București, 1974
Călătorie spre Nord, Editura Eminescu, București, 1976
În Deltă cu Jacques-Yves Cousteau, Editura Paideia, București, 2001
Gastronomie :

Bucate, vinuri și obiceiuri românești, Editura Paideia, București, 1998, 2001, 2008, 2014, traduit en français sous le titre « Savoureuse Roumanie » : 358 recettes culinaires et leur histoire, éditions Noir sur Blanc, 2001, 2004
Bucate, vinuri și obiceiuri românești, vol. I, Hop și noi pe papa-mond, Editura Paideia, București, 2008
Bucate, vinuri și obiceiuri românești, vol. II, Ardealul, la pohta ce pohtim, Editura Paideia, București, 2008
Bucate, vinuri și obiceiuri românești, vol. III, Valahia de miazăzi, Editura Paideia, București, 2008
Bucate, vinuri și obiceiuri românești, vol. IV, Banatul și Muntenia colinară, Editura Paideia, București, 2008
Bucate, vinuri și obiceiuri românești, vol. V, Moldova atributelor, Editura Paideia, București, 2008
Bucate, vinuri și obiceiuri românești, vol. VI, Mese și obiceiuri românești, Editura Paideia, București, 2008
Bucate, vinuri și obiceiuri românești, vol. VII, De la munte la deltă, Editura Paideia, București, 2008
Bucate tradiționale românești. Muntenia-Moldova, Editura Paideia, București, 2009, 2011,
Bucate tradiționale românești. Banat-Ardeal, Editura Paideia, București, 2009, 2013
Sărbătoarea Paștilor, Editura Paideia, București, 2010, 2013,
Bucate foarte românești, Editura Paideia, București, 2011, 2012, 2013, 2014,
Bucate românești recomandate de Radu Anton Roman, Editura Paideia, București, 2011, 2013,
Bucate de post, Editura Paideia, București, 2011,
Vinuri din România, Editura Paideia, București, 2011, 2012,
Wine from Romania, Editura Paideia, București, 2011 (en), 2012 (en), 2014 (bilingvă ro-en),
Bucate, tradiții și obiceiuri de Crăciun, Editura Paideia, București, 2012, 2014 (bilingvă ro-en),
Dragobete în rețete, Editura Paideia, București, 2013.
photographie :
Suflet candriu de papugiu vol. 1 Scrisă dintâi, Editura Noi Media Print, București, 2006
Suflet candriu de papugiu vol. 2 Scrisă din urmă, Editura Noi Media Print, București, 2008,
Delta Dunarii (fotografie), Editura Artec Impresiones, 2009, Editura Vellant, 2013 (bilingvă ro-en)
Films (documentaires) :
« Paradise Lost » (1990)

« Delta, Now ! » (1991)

 « Nous devons une partie de la renommée du delta à Jacques-Yves Cousteau qui, juste après la chute du rideau de fer, a navigué sur le Danube,descendant à deux reprises pour des voyages de recherche depuis les sources du fleuve jusqu’au delta. Je ne sais pas pourquoi, je ne peux pas dissocier la présence du célèbre commandant Cousteau de celle de Radu Anton Roman, qui fut son guide. L’expérience de Radu est consignée dans son journal În Deltă cu Jacques-Yves Cousteau » (« Dans le delta du Danube avec Jacques-Yves Cousteau« , Éditions Paideia, 2001), bien que son intérêt pour le delta se reflète également dans deux romans et un livre de notes. »

Notes :
1 L’expédition du commandant Cousteau dans le Delta permit à Radu Anton Roman de découvrir les raffinements de la cuisine française. Le talentueux chef de l’équipe réussit à affiner ses goûts et à lui donner sa première grande leçon de gastronomie comparée ; une leçon perfectionnée au plus haut niveau et qui marquera Radu à vie : « … Le passage du poulet amer du type « frères Petreuș » et des pieds de porc détrempés – les fameux « adidași » – aux ragouts et aux « dindes à la Patrick » a été catastrophique pour moi : j’ai pris 20 kg ; ensuite, je n’ai plus jamais réussi à maigrir : au printemps 1991, je pesais 100 kg pour 1,85 m, et en 1992, pour Noël, j’étais passé à 140 ! Les Français me regardaient avec stupéfaction dévorer des bols de terrine, des plateaux de canard aux oranges, des plateaux de tartes aux fraises… Ils m’apportaient du saumon fumé farci aux mangetouts et aux amandes, du poulet cantonais à la purée de coco, du jarret de veau mariné au vinaigre de framboise, des pointes d’asperges braisées au madère… Je me battais comme un hystérique, comme si je voulais retrouver ces années de misère, une enfance avec de la marmelade au menu, un âge adulte avec du fromage rationné et du pain avec beaucoup de sauce, une vie au service… » (Dans le Delta avec Jean-Yves Cousteau, p. 84).
Au cours de ces expéditions le commandant Cousteau découvre le cimetière des lotcas du lac Matiţa près de Mila 23. Des centaines de barques renversées, brûlées par le soleil et battues par le vent, ayant appartenues à des Lipovènes  gisent abandonnées au bord du lac. Radu Anton Roman, après s’être découvert et à sa suite le commandant,  lui raconte cette tradition lipovène qui veut qu’après la mort d’un pêcheur lipovène, la lotca ne soit plus utilisée et vienne finir ses jours à cet endroit.  Voir le documentaire sur le delta et les deux expéditions (en anglais…) :  https://youtu.be/dpdbf3C8NoE?feature=shared (extraits)
2  « La nourriture, je l’ai découverte par la faim. Nous avions une petite sœur et nous devions vivre avec le peu qu’il y avait… qu’il n’y avait pas. Bien sûr, dans ces circonstances, la nourriture devient très importante. Lorsque vous mangez une fois par jour, par chance ou par hasard, vous devez chérir la nourriture. Ma mère est morte alors que nous étions très jeunes, j’avais 14 ans et ma sœur 12, et mon père était assez absent, je ne veux pas entrer dans les détails. Nous vivions tous avec une pension de 900 lei par mois et, pendant les premiers mois, nous avons d’abord acheté du savarin, puis nous avons mangé ce que nous pouvions. Petit à petit, nous avons appris à nous débrouiller, à cuisiner, à aimer le temps qu’il fait, bref une aventure d’adolescents. »

Sources :
https://ro.wikipedia.org › wiki › Radu_Anton_Roman
https://adevarul.ro › stil-de-viata › magazin › aventurile-lui-jacques-yves-
https://adevarul.ro › stiri-locale › tulcea › aventurile-marelui-explorator-
https://youtu.be/dpdbf3C8NoE?feature=shared

Danube-culture © droits réservés,  mis à jour 10 juillet 2025

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