Dürnstein

Les lieux sont colonisés par les hommes dès la période néolithique et l’âge du bronze ainsi que de nombreuses autres places favorables des rives du Danube. Le domaine de Dürnstein est donné par le duc de Bavière Henri IV, futur empereur du Saint- Empire romain germanique (1014-1024) sous le nom d’Henri II-le-Saint, au couvent bénédictin bavarois de Tergernsee au bord du lac du même nom.

Nichol Elliot, On the Danube (Dürnstein), Some memories of a Scottish Photographer, Mezzogravure, The Vandyck Printer, Bristol  and London, Ltd, 1919

How soft on tow’r and wall the summer glow,
Dear townlet smiling like a sunlit dream
“Twixt pyramid of crag and swirling stream,
Deep mirrored in the Danube’s lucid flow,
Such walled and sunny nook of “long ago”
As dwells in golden peace an artist’s theme,
Though earth with death and desolation teem
Beyond the crags, beyond the flood below.

Warm smile ye welcome home to halcyon days,
O sunshine places treasured of the heart,
Life’s integral, unlost, eternal part
And inmost realm, where, reached by shining ways,
Our golden joys, no wavering image fleet,
Dwell sunlight citadelled the soul to greet.
Alice Elliot

Robert Russ (1847-1922), motif de Dürnstein, (église sainte Cunégonde)

  Une première église paroissiale est édifiée au XIIIe siècle. Elle est consacrée à sainte-Cunégonde (vers 975-1033/1039), femme de Henri II. Cette église sera en grande partie démolie en 1803. Les éléments restant, la tour et un mur de la nef, forment avec le petit cimetière du XIVe siècle et les remparts, un ensemble de construction médiévale entièrement préservée.

L’église sainte-Cunégonde et son environnement médiéval aujourd’hui, photo © Danube-culture, droits réservés

   La forteresse, construite dans les années 1150 par Albero III von Kuenring (vers 1115-1182) aurait servi de prison à Richard Coeur-de-Lion. Celui-ci se serait fait surprendre, arrêter en automne 1192 près de Vienne puis enfermer à Dürnstein au retour de la troisième croisade en Palestine par le duc Léopold V d’Autriche dit « Le vertueux » (1157-1194 ) qu’il avait précédemment humilié lors du siège de Jérusalem.

La capture de Richard-Cœur-de-Lion, enluminure extraite du Liber ad honorem Augusti, 1197, sources Wikipedia

   La légende raconte que ce serait son fidèle trouvère Blondel qui aurait retrouvé son souverain après des mois de recherches.

 Quand Blondel retrouve Richard-coeur-de-Lion à Dürnstein, photo © Danube-culture, droits réservés

Elle est détruite en représailles par le duc d’Autriche et de Styrie, Frédéric II de Babenberg (1211-1246) vers 1730-1731, en conflit avec Hadmar III (vers 1185-1231) et son frère Heinrich (1185-1233), surnommés « les chiens de Kuenring » qui possèdent également les forteresses voisines de Spitz et d’Aggstein sur le Danube depuis laquelle ils commettent de nombreuses exactions et rançonnent les bateaux de commerce sur le Danube en entravant la navigation à l’aide d’une lourde chaine en fer. 

La forteresse de Dürnstein où aurait été enfermé Richard-Coeur-de-Lion à son retour de croisade, photo © Danube-culture, droits réservés

   Albero V de Kuenring (vers 1215-1260), fils de Hamar III, reste malgré tout en possession de Dürnstein. Tentant de racheter le comportement de son père et de son oncle,  il y fonde une paroisse en 1240 et Leutold I (1243-1312), son fils aîné, fait don en 1289 à l’ordre des Clarisses d’un terrain au bord du fleuve pour la construction d’un couvent qui sera achevé en 1294. Celui-ci est fermé en 1575 au temps de la Réforme. Les bâtiments seront rénovés et transformés, à la demande de Hieronymus Übelbacher (1674-1740), abbé du monastère des chanoines augustins de Dürnstein, en grenier à grain par l’architecte Jakob Prandtauer (1660-1726) en 1715-17163. Le bâtiment est ensuite vendu en 1820 et deviendra la propriété de la famille Thierry qui l’aménage en hôtel de luxe (1884). Leurs descendants en sont toujours les propriétaires .

L’ancienne église du couvent des Clarisses qui fut transformée en grenier à grain par l’architecte Jakob Prandtauer au début du XVIIIe siècle, photo © Danube-culture, droits réservés

Avec la mort de Leutold III, sans descendant en 1355 s’éteint la dynastie des Kuenring de Dürnstein. Dürnstein devient successivement la propriété des Seigneurs de Maissau, du duc Albrecht IV d’Autriche (1377-1404), d’Ulrich von Eitzing (1395-1460) et revient aux seigneurs de Zelking en 1609. Dürnstein a été pillée à deux reprises par les Hussites (1428 et 1432), assiégée par les armées impériales en 1458, dévastée par les troupes hongroises de Matthias Corvin en 1477 et 1485, détruite par un incendie en 1551 et occupée en 1645 pendant la guerre de trente ans par les Suédois du général Torstenson (1603-1651) qui aménage la forteresse puis la fait sauter au moment de leur repli après avoir échoué à s’emparer de Vienne. C’est à Dürnstein que l’empereur Léopold Ier de Habsbourg apprend en 1683 la fin du siège de Vienne, la défaite des Ottomans et la libération de la ville.

Le clocher de l’église paroissiale du couvent des Augustins surnommé « le doigt de Dieu », photo Danube-culture, droits réservés

   Le clocher bleu et blanc surnommé « le doigt de Dieu » de l’église paroissiale sainte-Marie-de-l’Assomption, oeuvre des architectes Matthias Steinl (1644-1727) et Josef Mungennast (1680-1741) datant des années 1728-1733 tourné vers le Danube comme pour protéger et encourager les bateliers d’autrefois, les nombreux pèlerins ou autres voyageurs qui se risquaient à descendre le fleuve sur des embarcations parfois difficiles à manoeuvrer, est avec l’abbaye de Melk (rive droite) emblématique de la région de Wachau.

   L’église sainte-Marie fait partie du monastère des chanoines augustins construit en 1410 par Otto IV von Maissau (?-1440) sur l’emplacement d’une chapelle dédiée à la Sainte Vierge, à saint-Laurent et saint-André (1372). Les bâtiments sont rénovés en style baroque par Jakob Prandtauer assisté de son neveu Josef Mungennast et de Matthias Steinl entre 1715 et 1733.   

L’église sainte-Marie, photo Danube-culture, © droits réservés

  L’intérieur de l’église est d’une étonnante luminosité malgré un décor chargé et tout en relief. La voute a été réalisée par l’artiste de la cour Santino Bassi, l’autel par Carl Haringer, le tabernacle en forme de globe en bois, décoré de 44 scènes de la vie de Jésus est vraisemblablement l’oeuvre de Johann Schmidt père de même que les reliefs dorés de la chaire et la plupart des autres sculptures de l’abbaye et de son église. Son fils Martin Johann Schmidt, connu sous le nom de Kremser Schmidt (Schmidt de Krems, 1718-1801) a peint les retables de sainte-Monique et sainte-Catherine des deux chapelles latérales du milieu.D’importants travaux de restauration conduits de 1985 à 2019 ont permis d’établir que le clocher affichait uniquement les couleurs bleues et blanches, notamment grâce à l’utilisation d’un bleu de cobalt, ou smalt. Il en a été tenu compte lors de sa restauration et c’est ainsi que le clocher a retrouvé sa couleur originale.

Le peintre Martin Johann Schmidt dit Kremser-Schmidt (1718-1801), 1790

   La petite plaine avoisinante fut aussi le lieu en 1805 d’une sévère bataille pendant la campagne d’Autriche entre les troupes russes et une partie des troupes napoléoniennes en nombre largement inférieur. Il semblerait que ce soit le seul affrontement perdu par les armées françaises lors de cette campagne avec la bataille d’Aspern, dans les environs de Vienne sur la rive gauche du Danube.

Guilleminot Armand-Charles et Didier George, plan du champ de bataille de Dürnstein

   Le Maréchal Mortier (1768-1835), maréchal d’Empire, duc de Trévise, dont les troupes sont vaillantes mais débordées par les armées de la coalition alliée austro-russe (les troupes russes du Maréchal Kutusov) doit s’enfuir avec quelques-uns de ses soldats à bord d’embarcations jusqu’à Krems en aval.

Pas de miracle pour la Grande Armée : les Français, commandés par le maréchal Mortier, sont encerclés de trois côtés à la bataille de Dürnstein et cherchent finalement leur salut dans une retraite sur le Danube.

   De manière générale le Danube (souvent en crue) n’a pas été l’allié de Napoléon durant ses campagnes de 1805 et 1809 mais les équipages des ponts de son armée ont toutefois fait preuve d’un savoir-faire exceptionnel et ont largement contribué aux succès des armées françaises.

La vue sur le Danube depuis la terrasse de l’église paroissiale sainte-Marie. Un angelot veille sur l’embarcadère, photo © Danube-culture, droits réservés

La Wachau bénéficie d’un microclimat particulièrement favorable et généreux pour certaines cultures ce que ne manque pas de signaler immanquablement tous les guides et les brochures touristiques autrichiennes et étrangères ce qui a pour effet d’attirer une foule de visiteurs de plus en plus nombreux. Les vergers d’abricotiers (Marillen) s’épanouissent particulièrement sur les rives du Danube. Quand aux vignobles vertigineusement pentus mais prodigues en grands crus, les hommes les ont fait grimper les coteaux sur la rive gauche favorablement orientée jusqu’aux lisières de la forêt.

Dürnstein et le Danube, gravure sur linoleum d’Hugo Hanneberg imprimée par K. Nickmann, 1923

Le « vaisseau de Troie » du Danube
   En 1231, les Kuenringer mènent une révolte ministérielle contre le duc de Babenberg, Frédéric II, dit « le belliqueux », parce que celui-ci exempte les monastères et les villes d’impôts, mais en contrepartie, il impose des charges plus lourdes aux nobles. Frédéric II réprime la révolte et détruit les châteaux de Weitra, Aggstein et Dürnstein. Dürnstein, la forteresse la plus puissante du duché, ne peut être conquise que par une ruse de guerre : Comme Hadmar de Kueringe III bloquait régulièrement le Danube avec une lourde chaîne pour arrêter et rançonner les bateaux de commerce, Frédéric le Belliqueux arme en secret à Ratisbonne un bateau de commerce avec de nombreux chevaliers, ce qui permet de capturer Hadmar, qui doit ainsi livrer le château et la ville de Dürnstein au duc de Babenberg. Le donjon, c’est-à-dire la tour de défense la plus haute et la plus solide, est détruit par les troupes du duc.

Dürnstein et le Danube, gravure sur linoleum d’Hugo Hanneberg imprimée par K. Nickmann, 1923

   La suprématie des Kuenringer dans le duché fut dès lors anéantie. Par la suite, ils furent également appelés « chevaliers pillards », bien que leur révolte fut politique. Leur position de pouvoir était depuis longtemps une épine dans le pied des Babenberg. Avec leurs forteresses modernes et puissantes d’Aggstein et de Dürnstein, ils dominaient le cours du Danube en Wachau et pouvaient contrôler le trafic fluvial. Depuis leur château de Weitra, ils exerçaient en outre leur influence politique dans tout le Waldviertel et jusque loin en Bohême.

La forteresse d’Aggstein, gravure sur linoleum d’Hugo Henneberg, imprimée par K. Nickmann, 1923

   Dès la fondation du royaume des Babenberg, la stratégie des nouveaux seigneurs du Saint Empire romain germanique avait été de réduire la noblesse locale à l’impuissance et de modifier les structures ecclésiastiques en faisant appel à de nouveaux ordres religieux. Les petites familles de la noblesse, comme les seigneurs de Lengenbach, furent tout d’abord victimes de cette politique, tandis qu’il leur fallut d’abord s’accommoder des Kuenringer en raison de leur puissance, car les princes du pays, comme Léopold V, participèrent aux croisades, ce qui affaiblit tout d’abord leur position politique intérieure. La révolte de la noblesse menée par les Kuenringer fut donc une occasion bienvenue pour les Babenberg de stabiliser son territoire en réprimant la révolte. Comme les Kuenringer étaient en outre des partisans d’Ottokar II de Bohême, ils perdirent leur influence politique dès le début du règne des Habsbourg en Autriche.
Après l’extinction de la lignée de Dürnstein en 1355, le fief revient au duc Albrecht II. À l’époque de la Réforme, la lignée de Weitra se convertit au protestantisme et s’éteignit en 1598. Le château, détruit par les Suédois en 1645, est depuis la propriété de la famille Starhemberg. Les domaines de l’abbaye sont devenus la propriété de la famille Starhemberg tandis que et les bâtiments appartiennent aux chanoines de l’abbaye augustinienne de Herzogenburg.

Dürnstein, photographie de Amand Helm (1831-1893), 1870

Dürnstein, photographie de Eduard Hackel (1850-1926), 1886, sources Deutsche Photothek

www.duernstein.at

Eric Baude pour Danube-culture, © droits réservés, mis à jour octobre 2025

Dürnstein, vue de la rive droite, photo droits réservés

Krems et la Wachau

« Urbs Chremisa », vieille de plus de mille ans, autrefois coeur du commerce du sel et du vin, est également classée au patrimoine mondial de l’Unesco depuis 2001. Krems-Stein offre, outre ses églises comme la Frauenbergkirche, l’église des Frères Mineurs, l’Hôtel de ville, ses maisons du XVIIe et du XVIIIe, des lieux d’exposition d’art contemporain, un musée du vin (nous sommes en Wachau, le plus extraordinaire vignoble du cours du Danube !) et un remarquable musée de la caricature qui organise de nombreuses expositions temporaires. Différents évènements culturels  dont le réputé Donaufestival et d’autres manifestations artistiques ont lieu à Krems-Stein tout au long de l’année.

Une cité plus que millénaire
La ville double de de Krems-Stein, l’une des plus anciennes villes d’Autriche, a fêté le millénaire de sa fondation en 1995. Le relief en terrasses régulières descendant vers le fleuve, le climat favorable et la situation au carrefour de la route commerciale du Danube avec les liaisons nord-sud en provenance du Waldviertel et du Weinviertel ont favorisé très tôt le peuplement de la région et ont largement contribué à son développement en tant que point central centre de cette région du Danube.
Les découvertes du paléolithique (Hundssteig, Wachtberg, 30 000-25 000 av. J.-C.), du néolithique (cultures céramiques), mais aussi le rôle particulier de la région dans la culture d’Aunjetitz du début de l’âge du bronze (1800-1500 av. J.-C.) ainsi que les traces de la culture des champs d’urnes de la fin de l’âge du bronze et de la culture de Hallstatt (800-400 av. J.-C.) témoignent d’une présence humaine qui remonte loin dans le temps. Des populations nomades, probablement d’origine celtes, s’y installent à l’époque de La Tène. À la période romaine, la région fait partie de la zone d’influence des Marcomans, une tribut germanique occidentale installée au nord du Danube qui entrera souvent en conflit avec Rome avant d’être chassée par les Huns à la fin du IVe siècle après avoir été christianisée. D’après la description de la vie de saint-Séverin, le centre des Rugiens germaniques se trouvait probablement dans la région de Krems-Stein dans la deuxième moitié du Ve siècle. Le cimetière d’Unter-Rohrendorf il atteste de la présence des Lombards (VIe siècle).
Le nom de Krems est mentionné pour la première fois dans un document de l’empereur Otto III (980-1002) du 9 août 995 comme une place fortifiée à l’est, appelée « Chremisa ». L’agglomération se trouve alors à la frontière orientale de la petite marche d’Ostarrîchi, à proximité immédiate de la Moravie. Elle s’tend rapidement au-delà de la forteresse et se développe au XIe siècle pour former une agglomération de marché autour du « Hoher Markt ». Krems devient en 1014, suite à une donation royale une paroisse.
Quant à Stein, son nom apparaît plus tard, à partir de la seconde moitié du XIe siècle (1072). Son centre est l’église saint-Michel, qui appartenait à la paroisse de Krems. Le village est à cette époque d’abord un lieu de péage, de chargement et de déchargement des bateaux pour le transport du sel, du vin et des céréales. La présence de bateliers engendre la naissance d’un marché puis au XIIe siècle puis d’une colonie urbaine (1144).
La situation sur le Danube des deux cités leur permet de jouer un rôle complémentaire : Stein se trouve directement au bord du fleuve et devient un lieu de douane et d’accostage pour les bateaux, mais n’a en fait que peu de place pour de grands espaces de commerce, de foire et pour des activités de construction en raison de la proximités des collines. Krems, en revanche, séparé du fleuve par de petits affluents de la rive gauche (comme la Krems d’où le nom de la ville) et des plaines alluviales, offre suffisamment de surface pour la construction d’habitations et l’organisation de foire sous la protection d’une puissante forteresse.
Krems devient dans les années 1150 le principal centre commercial de la région. Entre 1130 et 1190, la première monnaie de la dynastie des Babenberg, le « Pfennig de Krems », est frappée dans la tour de la forteresse au-dessus du « Hohen Markt » (haut marché). La ville est mentionnée avant Vienne, qui ne dépassera Krems en taille qu’ultérieurement, sur la carte du monde du savant, géographe et voyageur arabe géographe arabe, Al-Idrîsî (1100-vers 1165). Sa croissance rapide a probablement rendu nécessaire, dès la première moitié du XIIe siècle, le transfert de la paroisse de l’église saint-Étienne du Frauenberg (aujourd’hui l’église des Piaristes) au pied de la colline, où la nouvelle église saint-Guy devient l’église paroissiale. À la fin de ce même siècle un mur d’enceinte entoure la ville. Un premier juge de la cité est attesté en 1196. La ville s’agrandie à plusieurs reprises et s’étend à la fin du Moyen Âge de la Steiner Tor (Porte de Stein) à l’ouest jusqu’à la Krems, à l’est. Le couvent des dominicains, fondé en 1236, se trouve en dehors de l’enceinte.
Stein se développe à partir de la haute terrasse en direction de l’église saint-Nicolas, élevée au rang d’église paroissiale en 1283. À la fin du Moyen Âge, les surfaces situées entre la Landstrasse et les rives du Danube sont également construites et la ville s’étend dans le secteur du couvent des Minorites fondé en 1223/1224 (la consécration de l’église aura lieu en 1264) ainsi qu’entre la vallée du Reisperbach et la Linzertor (Porte de Linz).
Les deux villes font partie de la souveraineté du Land depuis le début du XIIe siècle et se complètent mutuellement en tant que lieux de commerce à terre et au bord du Danube. Leurs liens étroits engendrent une unité de construction. Chacune des deux villes dispose d’un titre de commune bourgeoise avec sa propre souveraineté en matière de défense et de finances. Par contre elles possèdent un droit de cité commun (1305), un même juge municipal et, à partie de 1416 un seul maire. En 1463, l’empereur du Saint Empire Romain germanique Frédéric III de Habsbourg (1415-1493) accorde aux deux villes un blason commun, l’aigle impérial double d’or sur fond noir. Outre Krems-Stein, seules Wiener Neustadt et Vienne ont alors le privilège de pouvoir arborer sur leurs armoiries l’aigle bicéphale. L’union des deux villes durera jusqu’en 1849. De cette date à 1939,  année où les deux villes décident de se réunifier à nouveau, les deux cités ont une gestion séparée.
La prospérité économique de la fin du Moyen Âge repose sur la viticulture, le commerce et le transport du vin, du sel et du fer. La navigation sur le fleuve est un facteur économique essentiel pour Stein. En 1463, la ville obtint du même empereur Frédéric III le privilège d’établir un pont fixe, le deuxième pont le plus ancien après celui de Vienne sur le Danube autrichien. La richesse et la confiance en soi de la bourgeoisie locale sont attestées par le « Gozzoburg » construit vers 1265 par le puissant juge de la ville Gozzo von Krems (?-vers 1291), une maison de ville aux allures de château fort avec loggia. L’aspect des deux cités est marqué par les nombreuses maisons bourgeoises des XVe et XVIe siècles, richement décorées d’encorbellements, de sgrafites et de peintures tout en possédant des cours à arcades à l’intérieur. Une caractéristique des deux villes est l’existence, depuis le haut Moyen Âge, de « cours de vendanges » des monastères et des évêchés, qui servaient à stocker le vin et à gérer leurs biens , comme les cours de Passau (« Passauer Höfe »), la cour de Kremsmünster (« Kremsmünstererhof ») ou la cour de Göttweig (« Göttweigerhof »). La chapelle de la cour de Göttweig est ornée de fresques datant du début du XIVe siècle. Krems est, au début du siècle suivant, un centre de l’École du Danube grâce à la présence du peintre bavarois originaire d’Augsburg, Jörg Breu dit l’Ancien (1475-1537), auteur du retable de l’abbaye de Melk (1502).
Krems devient majoritairement protestante pendant la seconde moitié du XVIe siècle. La résistance de ses citoyens à la contre-réforme, entraine la perte de tous les privilèges en 1593. Ce n’est qu’en 1615 que l’empereur Matthias (1557-1619) annule cette décision et rétablit l’indépendance de la ville. Les jésuites, installés en 1616, jouent évidemment un grand rôle dans la reconquête catholique. Ils dirigent le collège et deviennent célèbres pour leurs représentations théâtrales. Outre ce collège jésuite, le couvent des capucins d’Und (1614) et la nouvelle église paroissiale de Krems, de style baroque précoce, sont édifiées  à cette époque, avec l’intervention d’artistes italiens renommés.
Le XVIIe siècle est marqué par un déclin économique dû au déplacement des routes commerciales internationales et à la diminution de l’importance du commerce sur le Danube. La ville de Krems est en partie détruite lorsque les Suédois l’assiègent (1645). Après l’avoir prise, ils en font leur principale place forte, la perdent puis la reprennent un an plus tard. Ce n’est qu’après 1700 que Krems connaitra un nouveau développement. Il s’accompagne d’une baroquisation de son architecture sous l’impulsion des grands monastères des environs (Melk, Göttweig, Dürnstein). L’un des peintres baroques les plus importants, Martin Johann Schmidt, dit Schmidt de Krems (1718-1801), tiendra un atelier de peinture à Stein jusqu’à sa mort en 1801.

Maison du peintre Kremser Schmidt à Stein

Les structures ecclésiastiques de la ville vont évoluer dans la seconde moitié du XVIIIe siècle. L’église Frauenberg, appartenant à l’ordre des jésuites depuis 1616, ordre qui sera dissous en 1773 sur ordre de l’empereur Joseph II, est reprise en main par les piaristes en 1776. Le couvent des dominicains est fermé en 1783, les couvents des frères mineurs et des capucins en 1796.

Stein, gravure de Jakob Alt, vers 1820

La plus grande modification de la physionomie de la ville depuis les transformations du Moyen-Âge, aura lieu au XIXe siècle, suite à la démolition des remparts et des portes de la ville. Seule la Steinertor, devenue l’emblème de la ville va subsister ainsi que des vestiges des remparts. Parmi les fabriques créées dans le cadre de l’industrialisation, celles de Rehberg (cuir), de fabrication de nattes et de tapis en fibres de coco et la première fabrique de meules en quartz d’Autriche jouent un rôle important. Les facteurs d’orgues Zachistal, Capek et Hradetzky ainsi que les fondeurs de cloches de Krems (Matthias Prininger, Ferdinand Vötterlechner et Johann Gottlieb Jenichen) jouissent également d’une grande renommée. Le dernier tiers du siècle voit le raccordement de la ville au réseau ferroviaire et à Vienne. En 1909, la ligne le long du Danube (chemin de fer de la Wachau). est inaugurée.
Malgré le bombardement intense du 2 avril 1945, on parvient à sauver une grande partie du patrimoine architectural dans son état d’origine et à y joindre de nouveaux éléments architecturaux. Cette revitalisation réussie et reconnue au niveau international permet à Krems-Stein d’être lauréate du prix Europa Nostra en 1975, 1979 et 2009.

Richard Lux (1877-1939), Autriche, Le Danube à la hauteur de Krems et Stein avec une vue sur l’abbaye bénédictine de Göttweig et Wetterkreuz, lithographie sur papier, 1906

La ville est considérée aujourd’hui comme l’un des centres culturels les plus dynamiques de Basse-Autriche grâce à son « Kunstmeile » (Stein), sa Kunsthalle, son musée de la caricature, son artothèque, sa galerie régionale de Basse-Autriche, ses ateliers d’artistes, son festival du Danube et ses nombreuses autres manifestations qui ont instauré un dialogue permanent entre l’art contemporain et le patrimoine architectural. Le Musée de Krems-Stein, logé dans l’ancienne église des dominicains, permet de découvrir les trésors artistiques de la ville ainsi que les traditions et l’histoire de la viticulture, traditions sans laquelle Krems-Stein ne serait pas devenue ce qu’elle est aujourd’hui, une petite cité séduisante et colorée, classée avec la région de la Wachau au patrimoine mondial de l’Unesco.

Inondation à Stein en 1910, photo collection de la bibliothèque Nationale d’Autriche

Krems-Stein possède également son université (privée) et son campus, ouvert en 2005, dont une partie est hébergée dans l’ancienne manufacture de tabac restaurée.
Idéalement situé à l’entrée de la Wachau, bien dotée en infrastructures hôtelières, sportives et culturelles, universitaires, desservie rapidement par le train depuis Vienne (environ une heure), un réseau de bus et les compagnies de navigation sur le Danube, cette cité de caractère est un lieu de villégiature très agréable à partir de laquelle on peut rayonner vers l’amont comme vers l’aval. Le port de plaisance de Krems est parfaitement équipé pour les plaisanciers.
De Krems partent en saison plusieurs compagnies de bateaux pour des croisières à travers la Wachau (voir croisières fluviales ci-dessous).

Krems assiégé par les troupes impériales en mai 1646

Krems subit de lourdes pertes au niveau de son patrimoine architectural pendant la guerre de Trente Ans. En mars 1645, les troupes suédoises du maréchal Lennart Torstensson et, en avril 1646, les troupes impériales du maréchal-lieutenant Hans Christoph von Puchheim (1605-1657) assiègent la ville.
Les conséquences des deux bombardements et de l’occupation furent catastrophiques pour la petite cité de la rive gauche du Danube. Une description de Krems datant de mai 1648 mentionne que sur 308 maisons, 111 ont dû être rasées, 18 autres étaient inhabitables et seules 179 n’ont subi aucun dommage. Ces pertes ont pu être ensuite progressivement compensées puisque 44 maisons bourgeoises ont été reconstruites entre 1648 et 1666 et 36 autres nouvelles maisons ont été bâties jusqu’en 1702. À Stein, en 1648, sur 129 maisons imposées, 27 étaient en bon état, 43 délabrées et 59 considérées comme abandonnées.
L’île qu’on voit sur cette gravure d’époque colorée, conquise en 1645 par les troupes suédoises pour fermer le fleuve à la navigation et reprise par les troupes impériales, a aujourd’hui disparu tout comme la confluence de la rivière Krems (à gauche sur la gravure) qui a été déplacée vers l’aval à la hauteur d’Altenwörth dans le cadre de l’aménagement et de la régulation du fleuve.

Eric Baude pour Danube-culture, © droits réservés, mis à jour octobre 2025

Sources :
https://www.gedaechtnisdeslandes.at

Collectivité locale de Krems/Stein et office de tourisme
www.krems.at (site en anglais et allemand)
www.krems.info

Port de plaisance de Krems
www.motoryachtclubwachau

Hébergement/restauration
Nombreuses possibilités d’hébergement et de restauration de toutes catégories dans la ville et à proximité.

Hotel Steigenberger and Spa
www.krems.steingenberger.at
Grand confort

Arte Hotel
www.arte-hotel.at
Design
contemporain, en retrait du Danube mais proche de l’université et de son campus

Culture
Kunsthalle Krems (Espace d’art moderne et contemporain)
www.kunshalle.at

Forum Frohner
www.forum-frohner.at

Musée de la caricature
www.karikaturmuseum.at
Expositions temporaires intéressantes de caricaturistes d’autrefois et contemporains du monde entier

Artothèque de Basse-Autriche
www.artothek.at

Museumkrems
www.weinstadtmuseum.at
Musée municipal dédié au vin et à ses traditions installé dans l’ancien couvent des dominicains.

Gustav Bamberger (1860-1936), vue de Krems/Stein avec le Danube en arrière-plan, huile sur toile

Nature
Promenades au bord du Danube, nombreux sentiers de randonnées dans les vignes et sur les hauteurs. Ne manquez pas d’aller vous promener dans le superbe jardin d’agrément Kittenberger (www.kittenberger.at)qui met en scène de nombreuses thématiques (50 000m2) et où vous pourrez à la belle saison et si vous le souhaitez) vous baigner dans un  des quatre bassins/piscines naturels. À proximité de Krems, sur la commune de Schiltern, le jardin et conservatoire de semences biologiques de l’Arche de Noë (arche-noah.at) mérite largement une visite.
Piste cyclable Eurovélo 6 (locations de bicyclettes)

Patisserie-Konditorei
Cafe-Konditorei Reimitz
www.raimitz.at
Salon de thé réputé à la décoration un peu kitsch à proximité de la gare de Krems. Strudel aux pommes, au pavot, au fromage blanc et autres spécialités d’anthologie dont les chocolats à la liqueur d’abricot de la Wachau.

Mautern (km 2004, rive droite) la romaine

 Stein et Mautern à l’arrière-plan

Mautern fait face à Krems/Stein sur la rive droite et est relié à la rive gauche par un pont métallique. Les romains s’établirent à Mautern dès le premier siècle après Jésus-Christ et nombreux sont les témoignages architecturaux de leur présence. Les dépendances baroques du château abritent un petit musée romain. Le petit musée des « coiffes dorées » et des costumes traditionnels de la Wachau au centre de Mautern est à ne pas manquer. On trouve encore à Mautern l’un des meilleurs restaurants de toute l’Autriche.

Entrée du musée romain de Mautern, photo Danube-culture,  © droits réservés

Le pont en bois du XVe siècle (1463), le deuxième plus ancien pont sur le Danube en Autriche après celui de Vienne qui reliait autrefois les deux rives à cette hauteur a été détruit par les troupes napoléoniennes et remplacé par un pont métallique.

Collectivité locale de Mautern
 www.mautern.at

Hébergement/restauration
Chambres d’hôte Ad Vineas Nikolaihof
www.advineas.at,
Proche du Danube, une maison de vigneron où la cuisine est savoureuse, les chambres agréables. Piscine naturelle. Les vins, une des références en Wachau, sont biologiques et réputés. Superbes caves construites en partie avec des éléments de murs romains.
Chambres d’hôte Severinhof Schwaighofer
www.severinhof.at

Restaurant d’exception :
www.landhaus-bacher.at

Eric Baude pour Danube-culture, © droits réservés, mis à jour octobre 2025 

La Wachau

  « La Wachau ? Un collier de perles du Baroque qui brille au cou d’une région fascinante que le Danube enlace sur son chemin ! »
Jonas von Engelstein (1801-1847)

   « C’est aussi ce que j’aime dans la Wachau : ce n’est pas un séjour habituel à la campagne, aménagé uniquement pour les estivants, c’est une région qui se suffit à elle-même, qui n’a pas encore absolument besoin de nous et où nous sommes donc d’autant plus volontiers invités. »
Hermine Cloeter (1879-1970)

La basilique saint-Pierre et saint-Paul de l’abbaye bénédictine de Melk, photo © Danube-culture, droits réservés

L’abbaye bénédictine de Melk (rive droite) ouvre majestueusement en amont les portes de la douce et épicurienne Wachau et celles de sa soeur bénédictine et dominatrice de Göttweig un peu en retrait de la même rive les referment avec solennité, laissant le Danube couler « librement » vers la plaine de Tulln et Vienne. Ces grandes abbayes danubiennes sont parmi les plus beaux monuments religieux baroques de tout le continent européen.

L’abbaye bénédictine de Göttweig au sommet de sa colline, un peu plus près du ciel, photo © Danube-culture, droits réservés

De la centrale hydroélectrique en amont de Melk jusqu’à Krems et sa sortie de la Wachau, le Danube a, ô miracle !, a pour le moment échappé à sa canalisation. C’est même, avec la traversée des prairies alluviales danubiennes (Donau Auen) et leur magnifique parc national (National Donauauen Park) en aval de Vienne et du barrage de Freudenau, l’un des deux seuls parcours autrichiens où le fleuve peut encore jouir d’une relative liberté. Ne voilà-t-il pas que le Danube presse son allure entre le Jauerling et les reliefs de la Dunkelsteinerwald ?
Enrichi des eaux de nombreux affluents d’origine alpine qui ont souvent par le passé poussé le fleuve à sortir de son lit, à inonder les cités riveraines et contre lesquelles les collectivités locales se sont mobilisées avec patience et détermination, la région de la Wachau apparaît bien comme une des plus attachantes d’Autriche.

Heinrich Tomec (1863-1928), Excursion en Wachau, huile sur toile, 1928

Des paysages classés au patrimoine mondial de l’Unesco
   Depuis l’an 2000, la Wachau est classée au patrimoine mondial de l’Unesco au titre de ses  paysages préservés, à l’instar de ceux du Val-de-Loire. Mais ici, comme partout ailleurs en Autriche, contrairement aux bords de la Loire, pas de centrales nucléaires. Sur un relief prononcé alternent vignes, vergers, forêts, forteresses au pied desquels se blottissent de joyeux et petits villages colorés et animés. Impossible quand on se penche sur le Danube et l’Autriche danubienne, de faire l’impasse sur cette magnifique région tant elle est parée d’attraits.

Dürnstein depuis la rive droite, perle du Baroque de Basse-Autriche et sujet d’inspiration inépuisable pour les peintres, photo © Danube-culture, droits réservés

Cette région, depuis fort longtemps habitée par l’homme comme en témoignent plusieurs statuettes statuette de 25 000/30 000 ans connues sous le nom de « Vénus de Willendorf » et « Vénus de Galgenberg » (Fanny de Galgenberg) est plus qu’hospitalière et attachante. Tout y est fait pour que le visiteur s’y sente chez lui et s’y attarde en logeant dans l’une des confortables auberges, chambres d’hôte ou petites pensions avenantes. La gastronomie n’est pas en reste non plus, la région étant l’une des plus prodigues de toute l’Autriche en produits locaux.
La Wachau mérite donc que l’on y prenne son temps, que l’on y séjourne plusieurs jours et qu’on lui témoigne ainsi qu’à ses habitants, sa fidélité et sa reconnaissance en y revenant.
La Wachau qui commence à Melk (rive droite) est traversée par le Danube sur 36 km jusqu’à la petite ville de Krems-Stein (rive gauche).

La Wachau d’autrefois : Oswald Eibl, Sonnige Idyll in der Wachau, Dürnstein, 1937

En amont de Melk et jusqu’à Ybbs/Donau s’étendent deux autres régions au riche patrimoine historique et culturelle, d’abord le Nibelungengau, terre des chevauchées légendaires de la célèbre et tragique épopée de la Chanson des Nibelungen puis, d’Ybbs jusqu’à Grein, en remontant le fleuve vers Linz et la Haute-Autriche, le Strudengau au relief accidenté, aux paysages plus sauvages, plus romantiques avec autrefois, au temps de la navigation à la rame et d’avant celle à vapeur, des tourbillons (Strudel) redoutés par les bateliers et leurs passagers.
   La Wachau est aisément accessible depuis Linz, Vienne, Krems et Melk. Elle peut se découvrir soit par bateau soit en saison par train avec la ligne touristique et historique de la Wachau (Wachauerbahn) qui circule de Krems à Mauthausen, en bus ou en voiture mais encore à pied et en vélo grâce à une excellente infrastructure de chemins balisés, de pistes cyclables remarquablement aménagées dont la très fréquentée Eurovéloroute 6 (www.eurovelo6-france.comqui serpentent et suivent le Danube sur ses deux rives et offrant des points de vue sur ses plus beaux paysages.
Il est possible et ce n’est pas une activité des moins agréables, traverser d’une rive du fleuve à l’autre suivant son humeur grâce aux deux bacs à fil traditionnels (Rollfähre) de la Wachau qui, inlassablement, du matin au soir en saison, convoient paisiblement randonneurs, cyclistes et voitures sur les deux bords. Des « Zille » assurent encore localement le passage pour les randonneurs et les cyclistes en plusieurs points de la Wachau comme à Dürnstein.

En Wachau à la hauteur de Weissenkirchen (rive gauche),  photo © Danube-culture, droits réservés

Ces traversées conviviales, trop éphémères, permettent d’avoir, au milieu du fleuve, une perspective unique sur l’environnement et l’harmonie paisible et préservée de ces « vieux » paysages de la Wachau. On s’aperçoit alors, sous un ciel pur, quelle qu’en soit la saison, que le beau Danube bleu n’est pas qu’une légende viennoise. Le fleuve joue les caméléons avec le ciel et la palette de couleurs des paysages et des villages de vignerons et d’arboriculteurs.
C’est peut-être en Wachau, que le fleuve se pare dans son parcours autrichien de ses plus belles nuances, aussi variées que la palette d’un peintre impressionniste. Le Danube et ses rives dialoguent inlassablement, de l’aube jusqu’au crépuscule, dans une langue aux profondes, mystérieuses et multiples résonances. Mais, contrairement au visiteur qui est tenté de s’attarder dans ces lieux séduisants, le fleuve coule ici plus vite qu’ailleurs en territoire autrichien ce qui n’empêchent pas les bateaux de croisières de le sillonner aisément. 60 km séparent la puissante centrale hydrolectrique de Melk de celui, plus en aval, d’Altenwörth, 60 km sans barrage !
À peine sorti du relief la Wachau, le Danube se dirige vers la plaine de Tulln et le massif de la Wienerwald (Forêt viennoise) pour rejoindre Vienne après avoir contourné le massif forêt viennoise (rive droite). Vienne peut s’enorgueillir d’être la première capitale que le fleuve rencontre.

Vue sur le Danube et ses méandres depuis l’abbaye de Göttweig, photo © Danube-culture, droits réservés

Gastronomie et oenologie en Wachau : un hymne épicurien au bon vivre !
La Wachau abrite un des plus beaux vignobles de vins blancs du pays et d’Europe, parfois au relief abrupt et qui couvre près de 16.000 hectares. Bacchus aurait pu incontestablement s’y établir et y vivre satisfait pour l’éternité, s’y désaltérant du divin breuvage et des arômes fascinants, de la saveur délicate des fruits des vergers, pommes, poires, abricots (les fameux Marillen de la Wachau) dont on tire aussi d’excellents alcools, des spécialités culinaires régionales, du microclimat et de la douceur relative des hivers. Bref, il fait toujours bon vivre en Wachau !

Vignobles en Wachau au printemps, photo © Danube-culture dr,oits réservés

Un grand nombre de restaurants témoignent généreusement de ce savoir-faire. Les cuisiniers déclinent aussi une remarquable variété de plats de viande et, proximité du fleuve oblige, de poissons auxquels les cépages Grüner Veltliner, Chardonnay, Riesling, Müller-Thurgau, Neuburger et Gelber Muskateller et autres vins blancs distingués, s’accordent à merveille. Quant aux vins rouges qu’on trouve en quantité infime, ils restent anecdotiques. 

Chatoiement des couleurs dans les vignes de la Wachau à l’automne, photo Danube-culture © droits réservés

La Wachau est encore une région au microclimat qui favorise également, aux côtés de la vigne, les arbres et arbustes fruitiers. Poiriers, framboisiers, abricotiers, pommiers des coteaux danubiens donnent des fruits particulièrement savoureux dont la cuisine régionale sait tirer la quintessence dans l’élaboration de recettes de succulents desserts comme les Marillenknödel, dessert farci aux abricots.

Aprikosenknödel Wachau

Les délicieuses Marillenknödel, un des délicieux desserts de la Wachau, photo Danube-culture © droits réservés

À noter pour les oenophiles que les vins blancs de la Wachau obtiennent régulièrement les toutes premières places aux concours de dégustation de vins blancs à l’aveugle en Europe. Les curieux ne manqueront pas de goûter à l’automne le moût de raisin appelé localement « Sturm ».

Le cornouiller, un arbre dont le bois est fort apprécié par les ébénistes, pousse également mais plus rarement en Wachau. Ses baies contiennent de nombreuses propriétés, photo Danube-culture, © droits réservés

Wachau pratique

Office de Tourisme du Danube et de Basse-Autriche (Donau Niederösterreich Tourismus GmbH), Schlossgasse 3, 3620 Spitz/Donau
www.donau.com
(site partiellement en français)
wachau@donau.com

www.bestof-wachau.at
Un site sur l’art de vivre et la gastronomie et  les spécialités de la Wachau mais qui s’adresse en priorité aux touristes de langue allemande.

Train touristique de la Wachau : Un joli parcours en train historique ou touristique entre Danube et vignobles
www.wachauerbahn.at

Le train touristique de la Wachau, photo droits réservés

Avant de partir, jetez un coup d’oeil juste pour le plaisir sur le site de Gregor Semrad, un photographe amoureux de la Wachau :
www.gregorsemrad.com

Melk et son abbaye bénédictine

« Mea dilecta » se serait exclamé Jules César lorsqu’il vit Melk pour la première fois selon l’historien local Ignaz Kaiblinger. En fait il n’est pas sûr que César soit venu à Melk (encore que…) et de plus l’étymologie du nom de Melk, à l’image de nombreux autres toponymes de la Wachau vient du slave et est lié à la présence de la rivière du même nom qui conflue avec le Danube à cette hauteur, la Melk. Il y eut à l’époque romaine une forteresse du nom de « Namare » sur l’emplacement de l’abbaye.


C’est à « Medelike » (Melk) que la puissante famille princière des Babenberg, originaires de Bavière, grands propagateurs du catholicisme, promoteurs de la construction de quelques-unes des plus belles abbayes d’Autriche et du Danube (Melk, Saint-Florian, Herzogenburg, Klosterneuburg…) s’installe à la fin du Xe siècle. Ils s’installeront ensuite à Vienne, cédant leur résidence en Wachau aux bénédictins qui s’empressent d’y construire une abbaye fortifiée. À la dynastie des Babenberg qui s’éteint en 1246 succèdera celle des Habsbourg.

L’abbaye baroque de Melk

Cour intérieure de l’abbaye et coupole de la basilique saint-Pierre et saint-Paul de l’abbaye , photo © Danube-culture, droits réservés

« Et comment dire la beauté de Melk élevant sa façade ocrée au-dessus du Danube, le jeu subtil qui s’y joue entre la droite et la courbe, et comment les surfaces s’y animent en s’incurvant, à croire que c’est dans les eaux mêmes du fleuve que l’architecte est allé puiser ses formes ? Ces églises surchargées, et légères pourtant, ces immenses abbayes sont moins des lieux pour la prière, le recueillement et la pénitence que pour la célébration et l’apothéose. À la sévérité de la Réforme, aux menaces musulmanes, à celles plus lointaines de la Révolution, il a fallu opposer ce délire maîtrisé, cette vitalité foisonnante, ces jeux, ces trouvailles, ces mensonges, ce tissu compliqué de symboles, ces matières riches et brillantes, ces espèces de laque qui sont à la fois fragiles, précieuses, froides, couvrantes (alors que l’art austère des cloîtres romans c’est la vérité de la pierre qui parle), cet art qui est mis en scène, surprise, ivresse, et la plus sensuelle…
Philippe Jaccottet, « En descendant le Danube », in Autriche, L’Age d’Homme, Lausanne, 1994

La salle de la bibliothèque de l’abbaye avec son plafond en trompe-l’oeil peint par Paul Troger, photo droits réservés

L’agencement, la forme et la couleur des bâtiments au sommet de la colline qui semblent le prolongement artistique raffiné des éléments naturels, la grande cour et les cours secondaires, les pavillons latéraux, le couloir impérial, les jardins, l’orangerie, le fleuve au pied de l’abbaye, le paysage aux alentours, tout concoure à une extraordinaire mise en scène qui n’a rien du hasard et dont la grandeur tout autant qu’une certaine retenue s’avèrent fascinantes et paraissent avoir été volontairement soumises à l’ordre et à la raison.

Une mise en scène permanente jusque dans les moindres détails, l’art de l’illusion, photo Danube-culture, © droits réservés

L’abbaye baroque de Melk, à la saisissante unité domine tout à la fois le fleuve, la jolie petite ville et la rivière du même nom qui se jette dans le Danube. Elle subit l’assaut des armées turques à la fin du XVIIe siècle. Sa reconstruction commence peu de temps après en style baroque sur les plans de  l’architecte Jakob Prandtauer (1660-1726) de Sankt Pölten auquel succède son élève Josef Muggenast. Les travaux d’achèvement vont durer 36 années ! Napoléon y établit son quartier général et un hôpital militaire en 1805 et 1809, à l’occasion de ses campagnes contre l’Autriche et la Russie.
L’abbaye est inscrite au patrimoine mondial de l’Unesco depuis l’an 2000.
Le plafond de l’extraordinaire et conséquente bibliothèque a été réalisé par une autre grande figure du baroque autrichien, le peintre Paul Troger (1698-1762). Cette bibliothèque comprend 1800 manuscrits dont le plus ancien, un Beda Venerabilis, date du début du IXe siècle. D’importantes copies des commentaires de Saint-Jérôme, des commentaires de la Règle de Saint- Benoît, des copies de l’Écriture sainte, des collections de recueils de formules et des textes juridiques remontent à la première apogée de la vie monastique de l’abbaye (1140-1250).
Une grande partie des anciens documents historiques ont malheureusement été détruits au cours du grand incendie de 1297, un évènement auquel fait référence l’écrivain italien Umberto Eco dans son livre Au nom de la Rose. Les deux tiers des manuscrits datent de la période ultérieure de réforme des monastères au XVe siècle, période au cours de laquelle l’abbaye de Melk est considérée comme un modèle et attire des étudiants et des professeurs de l’université de Vienne. La majorité des textes rédigés et copiés à cette époque sont des livres de piété et des sermonnaires. Les lieux abritent encore 750 incunables, 1700 oeuvres du XVIe siècle, 4500 volumes du XVIIe et 18 000 livres du XVIIIe siècle. La collection de la bibliothèque de Melk se monte en totalité à plus de 100 000 livres. Elle contient encore de superbes globes terrestres illustrant l’inextinguible soif de connaissance universelle des moines bénédictins.

La Chanson des Nibelungen, manuscrit conservé à l’abbaye de Melk photo © Danube-culture, droits réservés

« Surtout, me dit-il, n’écoute pas le guide ! Il veut te prendre à la glu du détail et des décors. Bla-bla-bla le faux marbre est moins froid au toucher que le vrai… bla-bla-bla la quantité d’or utilisée par la coupole est supérieure à celle de …etc. Mais écoute bien : pour voir cette abbaye, il faut fermer les yeux et te laisser frissonner. Remonte jusqu’au lieu dans le temps où elle est semence dans l’esprit d’un seul, de quelques seuls… »
C’est un lieu de vertige.
À force de traiter les oeuvres d’art comme de la matière et non comme des visions hissées jusqu’à la visibilité, on perd la trace de l’essentiel : le lieu où la vision a germé, a surgi, s’est déployée. C’est à ce lieu qu’il faut s’attarder. C’est celui de notre humanité co-créatrice, la grande pépinière de l’aujourd’hui. Pénétrer jusque dans le coeur de l’homme (des hommes) où germe l’idée créatrice sous la nécessaire poussée du Vivant. Assise, les yeux fermés, à vingt ans, dans l’abbaye de Melk, j’ai touché ce secret. »
Christiane Singer, N’oublie pas les chevaux écumants du passé, Albin Michel, Paris 2005

L'escalier de la bibliothèque de Melk

L’escalier de la bibliothèque de l’abbaye bénédictine de Melk, photo © Danube-culture, droits réservés

Ce monastère est aujourd’hui le lieu de nombreuses manifestations culturelles durant toute l’année parmi lesquelles un festival de musique ancienne (Pâques).

Abbaye de Melk
www.stiftmelk.at

Office de tourisme de Melk
www.stadt-melk.at

Hébergement/restauration
Hotel-Restaurant zur Post
 www.post-melk.at
L’accueil et le bon confort à l’autrichienne

Famille Kalkbrenner
www.urlaubambauernhof.at/gaudihof
Chambres à la ferme, bon rapport qualité/prix

Melk

Abbaye bénédictine de Melk, détail, photo © Danube-culture, droits réservés

Dans les environs de Melk
Château de Schallaburg, édifice de la Renaissance, nombreuses expositions, concerts…
www.schallaburg.at

Château de Schönbühel, photo © Danube-culture, droits réservés

Schönbühel-Aggsbach Dorf (PK 2032, 2 – 2029)
Le château de Schönbühel qui offre une des plus belles émotions des croisières danubiennes en Wachau, a été édifié au début du XIXe siècle sur une ancienne forteresse médiévale. Depuis 1929 il est la propriété de la famille Seilen-Aspang et ne se visite pas. Le cloître en aval qui appartenait à l’ordre des Servites (ordre mendiant catholique fondé en Toscane), a été abandonné en 1980 et l’église sert désormais de paroisse communale. Au dessous de celle-ci se trouve une grotte baroque de Bethléem unique en Autriche.

L’ancien cloître des Servites de Schönbühel, aquarelle de Ludwig Hans Fischer (1848-1915)

Hébergement/restauration
Gasthof und camping Familie Stumpfer
www.stumpfer.com
Cuisine régionale

Emmersdorf (PK 2035, rive gauche)
D’Emmersdorf/Donau partent des randonnées qui cheminent à travers le Parc Naturel du Jauerling, espace protégé. Le sommet du Jauerling, « toit de la Wachau » culmine à 960 m et permet de profiter d’une jolie vue sur la région. Le parc est associé au programme européen Natura 2000 (Faune-Flores-Habitat-Protection des voies d’oiseaux migrateurs).

Collectivité locale d’Emmersdorf
www.emmersdorf.at

Parc Naturel du Jauerling
www.naturpark-jauerling.at

Parcs Naturels en Basse-Autriche
www.naturparkenoe.at

Maison du parc – restaurant Am Jauerling
www.naturpark-gasthaus.at

Willendorf (PK 2024, rive gauche)
C’est dans la petite localité de Willendorf qu’a été découverte en 1908, lors des travaux de construction de la voie ferrée, une merveilleuse petite statue en calcaire vieille de 25 000 ans et aux proportions toutes en rondeurs, symbole de la fertilité et connue sous le nom de Vénus dite « de Willendorf ».

La petite Vénus dite « de Willendorf » en calcaire et datant du Paléolithique supérieur (23-25 000 ans av. J.-C.) mesure 11 cm. La statue originale est conservée au Muséum d’Histoire Naturelle de Vienne (Naturhistorisches Museum Wien). photo droits réservés

Sur l’autre rive, les ruines de la forteresse imposante d’Aggstein, construite au XIIe siècle sont accessibles par une petite route escarpée depuis le hameau du même nom.

Collectivité locale de Willendorf
www.willendorf.info

Spitz/Donau (PK 2019, rive gauche)

Spitz/Donau et son église saint-Maurice dans un écrin de vignobles en terrasses, se trouvent au coeur de la Wachau, photo © Danube-culture, droits réservés

Le village de Spitz/Donau, entouré d’un écrin de vignobles en terrasses des plus réputés, est considéré comme l’épicentre de la Wachau. On ne manquera pas de séjourner et de se promener dans les rues de ce joli village viticole tout en relief, d’admirer le château Renaissance, l’église saint-Maurice, la Porte rouge et l’ancien Hôtel de ville, les maisons à arcades, de monter jusqu’aux ruines de la forteresse d’Hinterhaus, de profiter des panoramas exceptionnels sur la vallée fluviale et de conclure (ou de commencer) par une visite au passionnant musée consacré à la navigation et au halage des bateaux, animé par une équipe d’historiens et de bénévoles compétente et dévouée.

Musée de la nav de Spitz_BV2

Musée de la navigation sur le Danube, équipage pour le halage des trains de bateaux (Hohenauer), photo © Danube-culture, droits réservés

Le musée, légèrement en retrait du fleuve et abrité dans les salles du château baroque d’Erlahof, présente d’une manière très vivante l’histoire oubliée de la navigation et des différents type de bateaux, barques, embarcations et radeaux à voile et en bois qui circulaient autrefois sur le Danube, vers aval mais aussi en remontant vers l’amont ce qui représentait un tour de force avec des trains de embarcations (Zille) tirées difficilement par des équipages de chevaux voire aussi parfois par des hommes, des maîtres bateliers et autres corps de métier jusqu’à l’apparition de la navigation à vapeur au dix-neuvième siècle.

Musée de la nav. Spitz4

Musée de la navigation de Spitz/Danube, photo © Danube-culture, droits réservés

Une petite partie de ces expositions est également consacrés aux moulins-bateaux, autrefois fort nombreux sur le Haut et Moyen-Danube, aujourd’hui disparus à l’exception de quelques reconstitutions, aux bacs et aux colossaux travaux de régulation qu’a connu le cours du fleuve viennois et autrichien, travaux qui, tout en protégeant mieux les populations des inondations améliorèrent et sécurisèrent la navigation, autrefois fort périlleuse dans certains passages. Il est l’un des deux seuls musées consacrés à ce thème en Autriche avec le Musée de la navigation de Grein (Haute-Autriche), plutôt orienté sur l’histoire de la navigation sur le Danube à partir de l’apparition des vapeurs jusqu’à nos jours. D’autres musées de la navigation sur le Danube sont localisés au bord du fleuve en Allemagne en particulier à Regensburg (Ratisbonne) près du vieux pont de pierre, à Vienne Freudenau (Musée de bateaux, rive droite) et en Hongrie à Zebegény (petit musée privé très éclectique).
De Spitz/Donau on peut rejoindre la rive et le village d’Arnsdorf par le bac. Une installation de l’artiste islandais contemporain Olafur Eliasson sur le bac  « Camera obscurs » offre de nouvelles perspectives sur le fleuve.

Port de plaisance de Spitz Wachau 2016

Le port de plaisance de Spitz/Donau, bien équipé et toujours très apprécié des plaisanciers, photo © Danube-culture, droits réservés

Office du Tourisme de Spitz/Donau  et
Collectivité locale de Spitz/Donau
www.spitz-donau.at

Musée de la navigation de Spitz/Danube (Schifffahrtsmuseum Spitz.Donau), Auf der Wehr 21, A-3620 Spitz/Donau
www.schiffahrtsmuseum-spitz.at

Hébergement/restauration
Hotel Weinberghof
www.weingut-lagler.at

Weinhotel Wachau
www.weinhotel-wachau.at
Au milieu des vergers d’abricotiers et des vignobles, calme et rustique

Pension Donaublick
www.donaublick-spitz.at

Famille Gebetsberger
www.weingut-gebetsberger.at
Hébergement dans une famille de vigneron très sympathique et attentionnée

Maison Machhörndl
www.weinhotel-wachau.at
Une grande maison fleurie et très bien entretenue, jardin au bord du Danube, accueil en français.

Weissenkirchen (rive)  et ses vignobles escarpés donnant quelques-uns des meilleurs vins blancs de la Wachau (rive gauche) photo © Danube-culture, droits réservés

Weißenkirchen (PK 2014, rive gauche)
Un des centres de la culture de la vigne. Un joli musée de la Wachau, aménagé dans une ancienne ferme fortifiée du XVIe invite à la découverte des cultures et d’artistes régionaux.
Collectivité locale de Weißenkirchen
www.weissenkirchen-wachau.at

Hébergement/restauration
Hotel-restaurant Kirchenwirt
www.kirchenwirt.weissenkirchen.at
Excellente cuisine régionale

Chambres d’hôte Jamek
www.weingaestehaus-jamek.at
Un des vignerons les plus réputés de la Wachau. Dégustation et vente de vins.

Chambres d’hôte Huber
www.gaestehaushuber.at
Dans le petit hameau de Sankt-Michael, vue sur le Danube

Dürnstein (PK 2009, rive gauche)

Dürnstein, photo © Danube-culture, droits réservés

Dürnstein, « perle de la Wachau » est un bijou d’architecture. Les lieux furent l’occasion d’un séjour imprévu de quelques semaines (21 décembre 1192 à février 1193), fort désagréable pour Richard Coeur-de-Lion qui rentrait de la troisième croisade,  fut capturé et enfermé pour une sombre question d’orgueil par le duc Léopold V de Babenberg, duc d’Autriche (1157-1194) dans la forteresse au dessus du village. C’est là que, selon la légende, son fidèle troubadour Blondel l’aurait découvert. Son monarque ne recouvra toutefois la liberté que longtemps après et contre une rançon conséquente qui fut difficilement réunie par sa mère Aliénor d’Aquitaine.

 Dominant Dürnstein et le fleuve, la forteresse où fut emprisonné Richard Coeur-de-Lion quelques semaines (de fin décembre 1192 au 4 février 1193) au retour de la troisième croisade,  photo © Danube-culture, droits réservés

La route principal d’aujourd’hui, très fréquentée, évite judicieusement le village par un tunnel. Le village abrite en son coeur un couvent et l’église baroque avec des oeuvres de Johannes Martin Schmidt (1718-1801) dit Kremser Schmidt (Schmidt de Krems). La terrasse à balustrade, au pied de la tour à la façade bleutée permet d’avoir une vue sur le Danube et sur l’embarcadère où les nombreux bateaux de croisières font régulièrement halte.

Loiben, le monument commémoratif dédié aux soldats français des armées napoléoniennes, en arrière-plan la forteresse de Dürnstein, photo droits libres

Dans la petite plaine de Loiben, au milieu des vignobles, se dresse bien visible le « Monument aux Français », monument érigé en souvenir de la bataille sanglante des 10 et 11 novembre 1805, entre le VIIIe corps des armées napoléoniennes placé sous le commandement du maréchal Edouard Mortier (1768-1835) et les troupes russes du général Mikhaïl Koutouzov (1745-1813). L’écrivain russe Lev Tolstoï (1828-1910) mentionne cette défaite des armées de Napoléon dans son roman « Guerre et Paix ».
Il faut goûter quelques spécialités culinaires et déguster les extraordinaires vins blancs de la Wachau avant de quitter la région comme  les savoureuses « Marillenknödel » (boulettes sucrées aux abricots) à l’auberge de la famille Lux dans le village, tout proche d’Unterloiben (Unterloiben 24).

Office de tourisme
www.duernstein.at (ouvert à certaines périodes seulement)

Fondation du couvent des Augustins de Dürnstein
www.stiftduernstein.at

Hébergement/restauration
Hotel Richard Löwenherz
www.richardloewenherz.at

Heinrich Tomec (1863-1928), Baptême en Wachau

 Krems-Stein (PK 2002, rive gauche)
   Principale ville de la Wachau, Krems, est en réalité composée à l’origine de trois communes : Krems, Stein et Und mais elles ne forment plus aujourd’hui qu’une seule et unique collectivité d’environ 25 000 habitants. Là encore c’est une véritable leçon d’architecture du Moyen-âge, de la Renaissance, des époques gothiques et baroques qui s’offre aux yeux des visiteurs. Urbs Chremisa, vieille de plus de mille ans, autrefois coeur du commerce du sel et du vin et de leur transport, est également classée au patrimoine mondial de l’Unesco depuis 2001. Krems-Stein possède outre ses superbes églises comme la Frauenbergkirche, l’église des Frères Mineurs, son Hôtel de ville, ses maisons du XVIIe et du XVIIIe, des lieux d’exposition d’art contemporain et un intéressant musée de la caricature. Différents festivals (Donaufestival) et manifestations culturelles ont lieu tout au long de l’année en salle et en plein air.

Krems-Stein au  miroir du fleuve, photo © Danube-culture, droits réservés

Krems abrite également une université et son campus, ouvert en 2005, dont une partie est hébergée dans l’ancienne manufacture de tabac restaurée. Un quartier d’art (Kunstmeile) réunit le Musée de la caricature, la « Kunsthalle », l’Artothèque, des ateliers d’artistes et d’autres lieux d’exposition instaurant un dialogue permanent entre l’art contemporain et le patrimoine architectural de la ville.

Krems

Idéalement situé à l’entrée de la Wachau, bien dotée en infrastructures hôtelières, sportives et culturelles, universitaires, desservie par le train depuis Vienne, et un réseau de bus et les compagnies de navigation sur le Danube (saisonnier), cette cité de caractère est un lieu de villégiature très agréable à partir de laquelle on peut rayonner vers l’amont comme vers l’aval. Le port de plaisance de Krems est parfaitement équipé pour les plaisanciers.
De Krems partent en saison plusieurs compagnies de bateaux pour des croisières à travers la Wachau (voir croisières fluviales ci-dessous).

Collectivité locale de Krems/Stein et office de tourisme
www.krems.at (site en anglais et allemand)
www.krems.info

Port nautique de Krems
www.motoryachtclubwachau

Hébergement/restauration
Nombreuses possibilités d’hébergement et de restauration de toutes sortes dans la ville et à proximité.

Hotel Steigenberger and Spa
www.krems.steingenberger.at
Grand confort

Arte Hotel
www.arte-hotel.at
Design
contemporain, en retrait du Danube mais proche de l’université et de son campus

Culture
Kunsthalle Krems (Espace d’art contemporain)
www.kunshalle.at

Forum Frohner
www.forum-frohner.at

Musée de la caricature
www.karikaturmuseum.at
Expositions temporaires intéressantes de caricaturistes d’autrefois et contemporains du monde entier

Artothèque de Basse-Autriche
www.artothek.at

Museumkrems
www.weinstadtmuseum.at
Musée municipal dédié au vin et à ses traditions installé dans l’ancien couvent des dominicains

Nature
Promenades au bord du Danube, nombreux sentiers de randonnées dans les vignes et sur les hauteurs. Ne manquez pas d’aller vous promener dans le superbe jardin d’agrément Kittenberger (www.kittenberger.at)qui met en scène de nombreuses thématiques (50 000m2) et où vous pourrez à la belle saison et si vous le souhaitez vo)us baigner dans un  des quatre bassins/piscines naturels. À proximité de Krems, sur la commune de Schiltern, le jardin et conservatoire de semences biologiques de l’Arche de Noë mérite une visite.
arche-noah.at

Cuisine et gourmandises
Cafe-Konditorei Reimitz
www.raimitz.at
Salon de thé à la décoration un peu kitsch (on aime le kitsch en Autriche et dans toute l’Europe centrale !) à proximité de la gare de Krems. Strudel aux pommes, au pavot, au fromage blanc et autres spécialités d’anthologie (chocolats à la liqueur d’abricot).

Göttweig
« J’empruntais le petit bac de Dürnstein, traversai le fleuve et me dirigeai vers le sud. Peu après midi, j’approchais d’une immense bâtisse blanche que j’avais repéré la veille depuis les ruines de Dürnstein. C’était l’abbaye bénédictine de Göttweig, monumental quadrilatère haut perché au dessus des collines et des forêts, nanti d’une coupole au quatre coins. Je me suis si longuement étendu sur les splendeurs de Melk que je n’ose pas trop parler de Göttweig : qu’il me suffise de dire que c’est une digne et resplendissante rivale de sa grande soeur, à l’autre bout de la Wachau. »
Patrick Leigh Fermor, Le temps des offrandes, Éditions Nevicata, Bruxelles, 2016, traduction de Guillaume Villeneuve

L’Abbaye de Göttweig, l’autre grande abbaye bénédictine de la Wachau, photo © Danube-culture, droits réservés

Fondée par l’évêque Altmann de Passau (1065-1091) en 1083, l’abbaye bénédictine baroque de Göttweig a été construite par un autre grand architecte Johann Lukas von Hildebrandt après l’incendie de 1718 mais elle demeura inachevée. L’abbaye, entourée de ses vignobles domine le fleuve et se tient à la sortie de la Wachau en face de la ville de Krems-Stein sur la rive droite du Danube. Elle porte le surnom de « Monte Cassino » autrichien. Moins séduisante et surtout moins fréquentée que celle de Melk, elle mérite néanmoins une visite pour la théâtralité de son architecture et de ses décors et le magnifique point de vue sur les paysages et les vignobles des environs.
www.stiftgoettweig.at

L’abbaye bénédictine de Göttweig depuis le Danube, photo Danube-culture, © droits réservés

Mautern (PK 2004), rive droite
La petite ville Mautern avec ses remparts est un haut-lieu de la présence romaine sur le Danube autrichien. Elle  se situe sur la rive droite du Danube à la sortie de la Wachau et aux pieds de l’abbaye de Göttweig. C’est autour de la forteresse et du camp romain édifiés au premier siècle pour défendre la frontière danubienne (limes) qu’elle commence à se développer. Occupés par des tributs germaniques qui passent le fleuve sans difficulté, elle est reprise par les armées de l’empereur Marc-Aurèle dont les légions sont originaires de toutes les parties de l’empire. Le nom de Mautern (douane, péage) est mentionné pour la première fois dans les « Annales de Fulda »1 en 899, puis dans le Code des douanes de Rafelstetten (903-906) et dans la Chanson des Nibelungen. la ville devient la propriété  des évêques de Passau dont les possessions s’étendent loin vers l’est et qui fortifient la cité au XIIIe siècle.  En 1277 le juge de Mautern obtient la « Juridiction du sang », juridiction du Saint-Empire Romain germanique impliquant des châtiments corporels voire la mort d’un coupable. Après avoir été autorisée à construire un pont en bois (à péage) en 1463, Mautern est occupée par les armées du Royaume de Hongrie en 1481. Ce pont sera détruit en 1805 par les troupes napoléoniennes en 1805, reconstruit, de nouveau démoli en 1809 et une nouvelle fois détruit en 1866 lors de la guerre austro-prussienne.
 www.mautern.at

Hébergement/restauration
Chambres d’hôte Ad Vineas Nikolaihof
www.advineas.at
Proche du Danube, une maison de vigneron où la cuisine est savoureuse, les chambres agréables. Piscine naturelle. Les vins sont biologiques et réputés. Superbes caves construites en partie avec des éléments de murs romains.

Chambres d’hôte Severinhof Schwaighofer
www.severinhof.at

La forteresse d’Aggstein sur la rive gauche domine la vallée de la Wachau, photo droits réservés

Aggstein (rive droite)
Avec celle de Hinterhaus (Spitz/Donau) et celle de Dürnstein la troisième grande forteresse de la Wachau
Impossible de manquer la visite des ruines de forteresse d’Aggstein, antique repaire de brigands-hobereaux, au moins pour en connaître l’histoire et jouir d’un point de vue magnique sur une partie de la vallée de la Wachau.

 

 

Notes :
1 Les Annales de Fulda, appelées aussi Annales Vedastines ( Annales Fuldenses), sont des chroniques médiévales rédigées notamment à Mayence. Couvrant une très longue période de la fin du Haut Moyen Âge (714-901), elles sont la principale source d’information concernant la Germanie, c’est-à-dire le Royaume franc oriental.

Croisières fluviales en Wachau et au -delà…

Le « Mariandl » en Wachau, photo Danube-culture, droits réservés

La croisière est une façon idéale d’aborder le fleuve et les paysages préservés de la Wachau. Plusieurs compagnies offrent un éventail de choix au départ et pour la Wachau et au delà sur des bateaux agréables et élégants. On peut parfois déjeuner et diner à bord à l’occasion de certaines croisières à thématiques particulières.

La Compagnie Brandner Schiffahrt qui organisait au départ de Krems ou de Melk de nombreuses croisières, a arrêté ses activités dans la Wachau depuis le début 2024.
www.brandner.at

La grande compagnie danubienne autrichienne D.D.S.G. (Compagnie de Navigation à Vapeur sur le Danube) propose aussi à la belle saison d’agréables croisières à destination de la Wachau depuis Vienne.
DDSG Blue Danube Schifffahrt GmbH, Schifffahrtszentrum, Handelskai 265, 1020 Vienne
www.ddsg-blue-danube.at

Il existe encore des bateaux de la compagnie allemande de Passau Wurm+Kock assurant certains jours en saison la liaison Passau-Wien et Wien – Passau. De Passau à Vienne le voyage dure toute la journée et il faut parfois changer de bateau en cours de route.
Donauschiffahrt Wurm+Köck
www.donauschiffahrt.de

Paysage de Wachau au coucher du soleil, photo © Danube-culture, droits réservés

Donau Touristik
www.donautouristik.com

« Les artistes sont des éclaireurs, et ce sont les peintres qui nous ont montré le chemin vers les contrées romantiques de la Wachau. L’éloge de la vallée du Danube entre Melk et Krems résonne encore un peu scolairement à nos oreilles depuis les cours de géographie : que le Danube supporte ici très bien la comparaison avec le Rhin, qu’il le surpasse encore en beauté de paysages, qu’il a aussi, comme son grand rival à l’extérieur de l’Empire, ses forteresses et ses châteaux, ainsi que la magnifique abbaye de Melk, qui regarde le pays fièrement et avec envie de le posséder, mais surtout Dürnstein couronné de lierre, ce petit trésor du romantisme, et que malgré tout et malgré tout, « Vater » Rhin reste toujours celui dont on parle le plus, celui dont on fait le plus l’éloge, celui qui a pris une fois pour toutes le pas sur sa sœur danubienne. Mais que celle-ci se console : si le Rhin a ses poètes, le Danube lui a ses peintres, comme il sied à une belle femme. Les peintres sont partis chercher inlassablement leurs motifs dans la vallée du Danube pendant des années et ont rendu hommage à sa beauté orgueilleuse à leur manière, avec leurs pinceaux et leurs crayons.

Hugo Henneberg (1863-1918), Dürnstein

Et c’est aussi la meilleure chose à faire. Car ce printemps de la Wachau, plus riche et plus printanier que tout autre, ne peut jamais être entièrement capturé par des images et des mots. Tout ce que l’on peut en dire ne sont en fait que des slogans, tout ce que l’on peut donner ne sont que des esquisses et des fragments. Il faut voir et sentir l’ensemble. Les prés ont déjà revêtu leur robe de printemps vert clair, parfumée et transparente, les vignobles sur les coteaux montrent encore la terre nue et brune, qui joue parfois merveilleusement sur le rouge et le violet, et sur ce fond se dresse ici et là un bouquet rouge rosé. Ce sont les petits pêchers qui ornent souvent les vignobles jusqu’en haut, là où la forêt remplace la vigne. Les villages sont entièrement plongés dans la floraison, Spitz en particulier, riche en fruits, se délecte de ses arbres en fleurs, et les pêchers avec leur délicate parure sont à cette époque une partie importante de la conversation quotidienne, qu’ils soient les plus beaux aujourd’hui ou qu’ils le soient demain ou après-demain, et il est de bon goût de sortir au moins une fois de Spitz pour se rendre à « Gut am Steg », où une forêt couleur de rose nous attend.

Hugo Charlemont (1850-1939), cour en Wachau, huile sur toile

Mais sur les rives, ici et là, de longues rangées de noyers et leurs jeunes pousses forment un cadre doré et bronzé autour d l’image claire. Au-dessus, le ciel italien le plus bleu s’étend. Mais le village Dürnstein ne se contente pas de tant de couleurs, il sait aussi ajouter ses tons particuliers : les touffes jaunes de la « Steinbusch », qui prolifèrent partout sur les rochers brun-gris et les murs de pierres érodés. Comme les sons d’une fanfare dans une symphonie de joie, leur merveilleuse luminosité salue le printemps. Des slogans, disais-je, rien de plus, mais pour qui s’est promené une fois à travers ce printemps, il devient tout naturellement un poème fleuri… »
Hermine Cloeter (1879-1970), Donauromantik. Tagebuchblätter und Skizzen aus der goldenen Wachau. Zweite Auflage. Schroll, Wien 1923
Hermine Cloeter est une écrivaine et une historienne de l’art autrichienne.

Eric Baude pour Danube-culture, mis à jour octobre 2025 © droits réservés

Le château de Schönbühel (Wachau)

   Le château avec sa tour caractéristique tels qu’on les aperçoit aujourd’hui, date du début du XIXe siècle. Au sommet de deux rochers d’une quarantaine de mètres de haut qui plongent directement dans le lit du Danube et qui sont appelés familièrement « La vache et le veau », ce monument historique, remanié à plusieurs reprises est une propriété privée.
Comme dans de nombreux endroits stratégiques de la vallée du Danube, il est vraisemblable que les Romains avaient déjà bâti à cet endroit une forteresse ou une tour de guet afin de surveiller le fleuve, le Danube faisant alors à la fois office de frontière (Limes) et d’artère commerciale. Un premier château-fort médiéval est construit à la fin du XIe-début du XIIe siècle par les frères, Marchwardus et Friedrich von Schoenbuchele, vassaux de l’évêché de Passau, sur l’emplacement des ruines de la tour romaine
. Une école et une église dans laquelle les messes et les cérémonies auront lieu jusqu’en 1667, seront construites ultérieurement.

Le château de Schönbühel, gravure de Georg Matthäus Vischer (1628-1696) extraite de son recueil « Topographia Archiducatus Austriae Inferioris Modernae », 1672

   À la mort de leur descendant, Ulrich von Schoenbuchele (début du XIVe siècle), la dynastie s’éteint. Le château devient alors la propriété de Konrad (IV) von Eisenbeutel dit l’ancien puis en 1323 de l’évêché de Passau1 qui l’administre mais est contraint de le vendre en 1396 à Gundakar von Starhemberg, dernier seigneur féodal de Gallneukirchen, vraisemblablement pour des raisons financières. Gundakar von Starhemberg et son frère Kaspar vont soutenir le mouvement de la Réforme au XVIe et feront de Schönbühel un centre du protestantisme. Après s’être converti au catholicisme en 1639, Konrad Balthasar von Starhemberg (1612 -1687) fait édifier à proximité du château, entre 1666 et 1674, le monastère de l’ordre des Servites sur des ruines surnommées par les habitants du voisinage « le château du diable ». Son fils, le comte Ernst Rüdiger von Starhemberg (1638-1701), gouverneur militaire de Vienne, a marqué l’histoire de l’Autriche par son courage exceptionnel et sa défense héroïque de la capitale autrichienne assiégée pour la deuxième fois de son histoire par les armées ottomanes de Kara Mustafa en 1683.

Le comte Ernst Rüdiger von Starhemberg (1638-1701)

Pendant plus de quatre siècles, la seigneurie de Schönbühel demeurera la propriété de la famille Starhemberg. Cette famille possédait également dans la Wachau la forteresse d’Aggstein ainsi que les droits de péage pour la navigation sur le fleuve dont abusèrent sans scrupule certains occupants précédents des lieux comme Hadmar III von Kuenring ou encore Jörg Scheck vom Wald.

Le château et le couvent de  Schönbühel, peinture de Jakob-Placidus Altmutter (1780-1820), vers 1817

Franz Graf von Beroldingen (1791-1864), membre d’une vieille famille de la noblesse d’origine suisse, acquiert le château de Schönbühel en 1819 et le fait reconstruire sur les anciennes fondations de la forteresse initiale (1819/1821) dont quelques vestiges sont encore visibles dans le clocher de la chapelle du château.

Le château et le couvent de Schönbühel, gravure coloriée d’Adolphe Kunike d’après un dessin de Jakob Alt, 1826

Schönbühel est ensuite revendu en 1929 au comte Oswald Seilern und Aspang (1900–1967) dont la famille est expulsée par les armées soviétiques lors de l’occupation de l’Autriche  à la fin de la deuxième guerre mondiale. Le château est ensuite restitué aux Seilern-Aspang qui en sont toujours propriétaires.

William Henry Bartlett (1809-1854) vue sur le château de Weitenegg et le Danube depuis le château de Schönbühel, gravure sur acier 1840

communauté juive vécut du Moyen-Âge jusqu’en 1671 dans le petit village au pied du château et dont le nom est mentionné dans un document officiel de l’année 1538. La synagogue se trouvait sur le site de la maison actuellement n° 147. Le cimetière juif du Kettental, au nord-est du village, n’a pu être localisé avec précision. Entre juin 1944 et avril 1945, des membres de la communauté juive hongrois ont été réquisitionnés par l’administration du domaine de Schönbühel et travaillaient à diverses taches (gestion et forêts).

Notes :
1Selon certaines sources la seigneurie et son château deviennent la possession de l’abbaye voisine de Melk.

Danube-culture, © droits réservés, mis à jour septembre 2025

Photo © Danube-culture, droits réservés

Sources : 
www.schoenbuehel.at
www.gedaechtnisdeslandes.at
www.museumnoe.at
Barbara Staudinger, « Gantze Dörffer voll Juden », Juden in Niederösterreich 1496-1670, Mandelbaum Verlag, Wien 2005

Portail d’entrée du parc du château, photo © Danube-culture, droits réservés

La forteresse d’Aggstein

Construite, dans sa partie la plus ancienne, à la fin du XIe et au début du XIIe siècle par Manegold III von Acchispach, elle tombe ensuite dans les mains de la dynastie des Kuenring von Aggsbach-Gansbach jusqu’à leur extinction au XIVe siècle.
Une légende raconte qu’Hadmar III von Kuenring contrôlait et entravait selon son bon vouloir la navigation sur le fleuve à l’aide d’une solide chaîne de fer qu’il faisait tendre en travers du fleuve à l’arrivée des bateaux. Exaspéré par ses pratiques, le duc Friedrich II von Babenberg, duc d’Autriche (1211-1246) décida de s’emparer sans succès de la forteresse. C’est par la ruse qu’il réussit à mettre fin aux exactions d’Hadmar III von Kuenring. Un marchand de Vienne avec un bateau lourdement chargé de marchandises qui cachaient une troupe des soldats puissamment armés dans ses cales, fut arrêté par la chaine dressée en travers du fleuve. Le maître des lieux monta sur l’embarcation et les soldats s’en emparèrent. Ils rentrèrent à Wiener Neustadt avec leur précieux prisonnier. La vengeance du duc Friedrich II von Babenberg fut toutefois clémente puisque Hadmar III von Kuenring recouvra la liberté en échange de la restitution des biens dont il s’était emparé. Repentant, il serait mort en pèlerinage quelques années plus tard non loin de Passau.

Une des chaines qui servaient autrefois à entraver la navigation sur le Danube (collection du Musée de l’armée de Vienne), photo © Danube-culture, droits réservés

En 1429, la forteresse devient la propriété du conseiller ducal Jörg Scheck vom Wald (littéralement « La terreur de la forêt ») qui l’avait reçu des mains du duc Albrecht V de Habsbourg dit « le Sage » (1298-1358), ultérieurement duc d’Autriche sous le nom d’ Albrecht II. Délabrée, la forteresse est reconstruite à la demande de celui-ci. Une période sombre pour la forteresse car son propriétaire, surnommé « le mangeur de fer » (« der Einsenfresser ») ou le vengeur sanguinaire » (« der Blutracher ») s’illustre par son comportement particulièrement sanguinaire et malhonnête. Chargé, à partir de 1438, de contrôler la navigation des bateaux sur le Danube d’amont en aval et d’entretenir le chemin de halage pour les embarcations montantes, il ne peut s’empêcher d’abuser de ses fonctions et se met à rançonner tous ceux qui naviguent sur le fleuve et passent devant son château-fort. Georg von Stain (?-1497) s’empare la forteresse d’assaut en 1463. Aussi peu scrupuleux que son prédécesseur, il en est expulsé par Ulrich Freiherr von Graveneck en 1476. Le duc Leopold III de Habsbourg (1351-1386) reprend lui-même Aggstein l’année suivante et y installe des locataires afin que les pillages et les pratiques de rançons cessent enfin.

Les ruines de la forteresse d’Aggsbach depuis le Danube (1820-1826), gravure coloriée imprimée par Adolph Friedrich Kunike (1777-1838), collection privée

Aggstein va subir encore les assauts des troupes ottomanes au XVIe siècle qui l’incendient (1529). À nouveau rénovée en 1606 par Anna von Polheim-Parz, veuve du dernier locataire, elle est laissée ensuite à l’abandon jusqu’au XIXe siècle.

Ses ruines alimentent alors de nombreuses légendes. Elle devient ensuite un lieu de promenade et commencera a être restaurée à partir de 1930 par son nouveau propriétaire, la famille Seilern-Aspang.

Burgruine_Aggstein_Wachau

La forteresse médiéval d’Aggstein dominant le Danube, photo Danube-culture, droits réservés

La forteresse avec sa salle des chevaliers sa chapelle, sa taverne, ses tours et ses vastes murailles est accessible par une petite route escarpée depuis le hameau d’Aggstein en contrebas. Elle se visite et fait aujourd’hui l’objet de nombreuses manifestations culturelles et historiques. La vue sur la vallée du Danube en Wachau depuis la forteresse est exceptionnelle.
www.ruineaggstein.at
info@ruineaggstein.at
www.aggstein.at

La légende du  jardinet des roses d’Aggstein

« Château en ruines, perché au sommet d’un rocher conique qui domine Aggsbach. Ce château, une des plus belles ruines féodales du Danube, était au XIIIe siècle, la terreur des voyageurs et des bateliers. Il avait alors pour propriétaire un seigneur-voleur nommé Schreckenwald, qui précipitait ses prisonniers par une trappe de fer dans un gouffre qu’il appelait Rosengartlein, son « petit jardin de roses ». Ce bandit périt sur l’échafaud. Mais il eut pour héritier, ou plutôt pour successeur Hadmar de Khuenringer, qui possédait aussi Dürrenstein [la forteresse de Dürnstein] avec dix autres châteaux-forts et qui fit regretter Schreckenwald. Son frère Leutold le secondait si bien dans tous ses crimes et ils inspiraient une telle terreur, qu’on les avait surnommés les limiers. »

Eric Baude pour Danube-culture, © droits réservés, mis à jour septembre 2025

Le monastère de Schönbühel (Wachau)

Le monastère servite de Schönbühel vue depuis l’amont, photo © Danube-culture, droits réservés   

   Les Starhemberg, une des plus vieilles familles de la noblesse de l’archiduché d’Autriche, prennent possession du château-fort et du domaine de Schönbühel en 1411. Ils en resteront les propriétaires durant plus de quatre siècles. Ludwig (1564-1620) et Gotthard von Starhemberg (1563-1624) ainsi leur frère Martin (1566-1620) seront des fervents adeptes du protestantisme et participeront à la célèbre bataille de la Montagne Blanche (Bilá Hora) de Prague en novembre 1620 qui verra le triomphe de la Contre-Réforme. Cette bataille capitale bien que n’ayant duré que deux heures, est remportée par les troupes catholiques de l’empereur du Saint-Empire romain germanique Ferdinand II de Habsbourg (1587-1637) sur celles du roi de Bohême Frédéric V (1596-1632). Elle marque le début de la reconquête catholique des Pays de Bohême.

Le château et le monastère de Schönbühel vers 1820, le peintre hollandais (?) a également représenté la forteresse d’Aggstein en arrière-plan

   En raison de leur participation à cette bataille et à d’autres exactions contre des biens catholiques, les trois frères Starhemberg sont sévèrement punis par l’empereur et leurs biens confisqués. Leur frère Paul Jakob (1560-1635), resté prudemment en retrait des affrontements, pourra avec bien de difficultés conserver le domaine de Schönbühel. Son fils, Conrad Balthazar comte de Starhemberg (1612-1687)1, qui s’est converti au catholicisme, commence par faire édifier en 1666 à l’endroit où se trouvent des ruines de sinistre réputation, auréolées de légendes et tout autant maudites des bateliers du Danube à cause de rochers dans le lit du fleuve, une chapelle sur le modèle de l’église du Saint-Sépulcre de Jérusalem. Sa volonté était d’aider les habitants de la contrée à mieux se représenter les scènes essentielles de la vie du Christ et celles de la passion. La première messe est célébrée dans la chapelle en 1667 pour la nuit de Noël. Le calvaire baroque est achevé en 1669.

Jakob Alt (1789-1872), vue sur la vallée du Danube et sur le cloître de Schönbühel, 1847

   L’ensemble des travaux de construction du monastère sont dirigés l’architecte originaire de Kufstein, Christoph Schachinger. Dans l’église Sainte-Rosalie du monastère une chapelle funéraire est placée dans le chœur et la crypte est aménagée comme une grotte de Bethléem. C’est le seul exemple autrichien d’une réplique de la grotte de la Nativité. La chapelle Peregrinus, bâtie ultérieurement (1737), a été décorée de fresques Rococo par le peintre Johann Wenzel Bergl (1719-1789), élève talentueux et original de Paul Troger (1698-1762) et un des peintres préférés de l’impératrice Marie-Thérèse qui le mit largement à contribution pour décorer certains des appartements de Schönbrunn et de la Hofburg (Vienne). J. W. Berlg a peint également des fresques « exotiques » pour le pavillon du jardin de l’abbaye de Melk et celles du château de Donaudorf, monument historique englouti sous les eaux du Danube depuis la construction de la centrale hydroélectrique d’Ybbs-Persenbeug en 1954.

Le calvaire baroque datant de 1669, photo © Danube-culture, droits réservés

    Se conformant à un souhait de la veuve de l’empereur Ferdinand II de Habsbourg, Éléonore de Mantoue (1598-1655) auprès de laquelle il avait servi comme maître des écuries de la cour, Conrad Balthazar fit également aménager entre 1670 et 1674 (1675?) une réplique adaptée de la grotte de la Nativité dans le rocher même à laquelle on accède par 54 marches. 

La grotte de Bethlehem, photos droits réservés

En 1669 l’église du château, dont les moines servites ont aussi la responsabilité, acquiert le statut de paroisse avec la bénédiction de l’évêque de Passau qui autorise également la création d’un cimetière.

L’église paroissiale sainte-Rosalie, photo droits réservés

Les statuts juridiques, établis en 1672, permettent à cinq moines et deux frères laïcs de résider au monastère. Schönbühel devient rapidement, grâce à sa réplique de l’église du Saint-Sépulcre, un lieu de pèlerinage très fréquenté à la période baroque. De nombreux pèlerins se rendaient au monastère de Schönbühel par bateau.   L’empereur Léopold Ier de Habsbourg s’y rend en 1675. Lors de l’épidémie de peste de 1679, la réputation du pèlerinage de Schönbühel et de son église dédiée à sainte-Rosalie est alors à son apogée. Une Fraternité du scapulaire est fondée et un Livre des miracles témoigne de nombreuses voeux de guérison exaucés.

La cours intérieur du monastère, photo droits réservés

Le château voisin qui n’est plus guère habité ni entretenu, commence à tomber en ruine. Il est vrai que Conrad Balthazar Starhemberg s’est fait construire entretemps, de 1661 à 1667, un palais baroque sur la place des Minorites à Vienne et que sa famille possède de nombreux autres domaines en Autriche et dans des pays voisins parmi lesquels la forteresse toute proche d’Aggstein.

Le palais Starhemberg sur la place des Minorites à Vienne, gravure du XVIIIe siècle, collection privée

   Le monastère prospérera jusqu’au règne de l’empereur Joseph II de Habsbourg (1765-1790) qui, en tant que fervent partisan des Lumières et par des réformes audacieuses, met fin à de nombreuses activités religieuses, restreint les pèlerinages, ferme des couvents et supprime certains ordres. Dans ce contexte défavorable et en raison du nombre de plus en plus réduit de moines qui y demeurent, il est même envisager de fermer le monastère de Schönbühel. Mais les droits paroissiaux reposant sur l’église du monastère depuis 1786 empêchent toutefois sa dissolution. Le monastère se retrouve d’autant plus dans une situation périlleuse qu’il sera pillé par les armées françaises pendant les campagnes napoléoniennes d’Autriche en 1805 et 1809. Le manque de moyens empêche d’entretenir correctement les bâtiments et, de nouveau, le monastère qui recevra la visite de la toute jeune princesse Elisabeth d’Autriche (1837-1898) en 18443 est menacé de dissolution à plusieurs reprises. Faute de moine y résidant, son administration est confiée à partir de 1904 à la section tyrolienne de l’ordre des Servites qui, après avoir commencé à le restaurer, finit par le fermer définitivement en 1980. Les bâtiments sont alors restitués à l’administration du château de Schönbühel. L’église paroissiale du monastère est rattachée au diocèse de Sankt Pölten.

La chapelle du tombeau du Christ surplombant le Danube, photo © Danube-culture, droits réservés

   L’architecture des bâtiments du début l’époque baroque est d’une grande sobriété. Restée pratiquement la même depuis la construction du monastère, elle s’intègre harmonieusement dans le paysage escarpé de ces rives danubiennes. Une « Via sacra » (chemin de pèlerinage) relie le monastère à l’église de Maria-Langegg, un autre haut-lieu de pèlerinage en Wachau.
   En 1887, le philosophe et psychologue Franz Brentano (1838–1917), neveu du poète Clemens Brentano (1778-1842) et qui fût le professeur à l’université de Vienne de Sigmund Freud (1856-1939) et d’Edmund Husserl (1859-1938), découvrit à l’occasion d’une promenade à Melk, la taverne construite par la famille des comtes Starhemberg au XVIIe siècle à proximité du monastère.

Franz Brentano (1838-1917) pendant ses années viennoises vers 1880, photo des Archives Franz Brentano, Université de Würzburg, Allemagne

Séduit par l’emplacement et par le fait que la taverne lui rappelait la maison de ses parents à Aschaffenburg, il l’acheta et l’aménagea pour en faire sa résidence d’été jusqu’en 1914, y recevant ses invités autour de conversations philosophiques. L’ancien prêtre défroqué, le « grand-père de la phénoménologie », opposé à toute forme d’absolutisme, que ce soit dans les communautés politiques, religieuses ou scientifiques, entretint de bons contacts avec ses voisins du monastère servite. Le philosophe autrichien Alfred Kastil (1874-1950) lui succèdera et s’installera pendant la seconde guerre mondiale dans la maison jusqu’à sa mort pour travailler à l’édition des oeuvres de F. Brentano.

Eric Baude pour Danube-culture © droits réservés, mis à jour juillet 2025 

Le monastère est accessible à la visite à certaines conditions :
www.klosterschoenbuehel.at

Le monastère, les chapelles, le calvaire, l’ancienne auberge transformée en résidence d’été par F. Brentano (au-dessus du couvent à gauche) et le cimetière, photo prise dans les années 1970 

  Notes :
1 Ernst Rüdiger von Starhemberg (1638-1701) s’est en particulier illustré dans la lutte contre l’empire ottoman. Commandant courageux de la garnison qui défendait Vienne pendant le siège de 1683, il refusa de capituler et sauva la ville malgré l’arrivée tardive des troupes catholiques qui mirent en déroutent l’impressionnant armada turc.
2 Les fresques ont été heureusement préservées et transférées au château Laudon à Vienne.
3 La scène est reprise dans le film d’Ernst Marieschka Sissi (1955). 

Sources :
FLOSSMANN, Gerhard, « Der Bezirk Melk », Band 2 einer Bezirkskunde: Ein Kultur- und Reiseführer. 1994, S. 251–256
HÄUSLER, W. Geschichte des Servitenklosters Schönbühel, Dissertation, Wien 1969
HOFFMANN, Thomas, HOFFMANN, Clemens, Die Wachau, Wunderbares, Sagenhaftes, Unbekanntes, Kral Verlag, Berndorf, 2013
PLÖCKINGER, N.N. Wachausagen. N°. 15, p. 24
PERNERSTOFER, Matthias, Errichtung und Neuausstattung des « Gottseligen Hauß Bethlehem » im Kloster Schönbühel an der Donau, Hollitzer, Wien, 2019
OPPEKER, Walpurga, « Das Servitenkloster Schönbühel in Bildern: Ergänzungen zur Baugeschichte ». in Das Waldviertel, Heft 77/3, 2008, pp. 241–255
BAUMGARTNER, Wilhelm, « Le contenu et la méthode des philosophies de Franz Brentano et Carl Stumpf « , Les Études philosophiques, 2003/1 (n° 64), p. 3-22. DOI : 10.3917/leph.031.0003. URL : https://www.cairn.info/revue-les-etudes-philosophiques-2003-1-page-3.htm
À l’école de Brentano, de Würzburg à Vienne, traduction sous la direction de Denis Fisette et Guillaume Fréchette, Vrin, Paris, 2007

www.kloster-schoenbuehel.at
www.schoenbuehel-aggstein.at
www.kirche-am-fluss.at

Vue sur le Danube depuis le monastère de Schönbühel, photo © Danube-culture, droits réservés

L’église saint-Michel-en-Wachau

   Le bâtiment visible actuellement remonte à l’époque du gothique tardif (début XVIe) et sera entouré de remparts et d’un pont-levis qui le protégeront, remparts dont il ne reste plus aujourd’hui qu’une massive tour de défense sur les cinq d’origine, une tour autrefois directement reliée à l’ossuaire. Elle est ornée à l’intérieur de sgraffites modernes de l’artiste autrichien Rudolf Pleban (1913-1965) illustrant l’histoire de la vallée du Danube.

Plan des fondations de l’église et de ses remparts

Nikolaus Koffler (1776-1848), Saint-Michel-en-Wachau aquarelle et mine de plomb sur carton, 1841

   Des éléments de la première église de style roman (XIe) comme deux têtes sculptés en hauteur sur le mur extérieur côté sud, sont encore visibles ainsi que la fresque peinte sur le même pan de mur et qui représente le mont des Oliviers.
Saint Michel en Wachau

Deux têtes sculptés, XIe siècle, photo © Danube-culture, droits réservés

   La crypte qui a pu être préservée (XIe siècle), la statue illustrant un christ souffrant (XVe) et celle de saint Sébastien, appartenaient également au bâtiment roman.

Saint–Michel-en-Wachau, Christ souffrant, XVe siècle, photo © Danube-culture, droits réservés

Pieta, École du Danube, vers 1500, photo © Danube-culture, droits réservés

La Pieta (École du Danube, vers 1500) et les panneaux du maître-autel (1690) qui a été transféré à Saint- Michel-en-Wachau en 1748 depuis l’église paroissiale de Stein, datent, quant à eux, de l’époque du gothique tardif.

Photo © Danube-culture, droits réservés

   Les sept figures animales que l’on peut apercevoir au sommet du toit, probablement des cerfs, des chevaux ou d’autres animaux en céramiques (les copies des originaux sont conservées au Musée de la ville de Krems), pourraient symboliser le motif mythologique de la « Chasse sauvage ». Ils sont aussi à l’origine de plusieurs légendes populaires de la Wachau parmi lesquelles « Les sept lièvres de saint-Michel ».

Saint-Michel-en-Wachau, maître-autel, photo © Danube-culture, droits réservés

   L’église de style gothique tardif a été baroquisée dans la première moitié du XVIIe siècle. La voûte au-dessus d’une longue nef a été réalisée par Cyprian Biasano. Le tableau central du maître-autel de style baroque primitif, représente la Sainte Famille, Marie plaçant l’enfant Jésus sur le globe, saint-Joseph, saint-Nicolas, patron des bateliers, sainte-Claire et quelques anges admirant et célébrant la scène.

Saint-Michel-en-Wachau, Dieu le père et le globe terrestre, photo © Danube-culture, droits réservés

   La peinture au-dessus, de forme ovale, représente Dieu le Père avec un globe terrestre et le Saint-Esprit sous la forme d’une colombe planant, a probablement été réalisée par Johann Bernhard Grabenberger, auteur également du maître-autel de l’église paroissiale saint Nicolas de Krems. Les statues polychromes de saint  Antoine, saint Sébastien, saint Roch et saint Jean, ainsi que de sainte Catherine et de sainte Barbara surmontée de l’archange Michel dominent l’ensemble.
   L’autel latéral gauche possède un retable à cadre pictural avec un fronton triangulaire éclaté (deuxième moitié du XVIIe siècle). Il représente la Sainte Famille et a vraisemblablement été peint par Martin Johann Schmidt dit Kremser Schmidt (1718-1801). L’image supérieure, également de la deuxième moitié du XVIIe siècle, représente sainte Barbe. Sur les côtés se trouvent des figures en planches peintes de saint Laurent et de saint Sébastien.

L’orgue de la tribune et son superbe buffet Renaissance, photo © Danube-culture, droits réservés

   L’orgue avec son jeu d’origine (un manuel et huit registres) et son buffet Renaissance dont le nom du facteur nous est inconnu, n’a pas été construit pour ce bâtiment religieux mais pour une une église des environs de Krems. Il a été déménagé vers 1650. Lors de son installation, il a fallu sacrifier quatre des douze apôtres sculptés (École du Danube, vers 1500) de la balustrade de la tribune. Le positif de l’instrument a été intégré dans la balustrade de la tribune. Le buffet a un fronton éclaté et des anges musiciens sont représentés sur les portes battantes.

L’Ossuaire de Saint Michel en Wachau, fin XIIIe, photo © Danube-culture, droits réservés

   L’ossuaire, à proximité de l’église, a été édifié à la fin du XIIIe siècle, vers 1395, sans doute en raison de la place limitée dans le cimetière autour de l’église. Il est coiffé d’une flèche modeste, au-dessus du pignon ouest. C’est le seul ossuaire d’Autriche à avoir été financé par les habitants eux-mêmes. On y trouve un autel constitué de têtes de morts et deux cercueils en bois « économiques » avec un mécanisme de clapets de fond datant du règne de l’empereur Joseph II. À cette époque, pour des raisons d’hygiène et de salubrité, on enterrait les défunts ordinaires sans cercueil définitif et on les entassait ensuite dans des fosses communes ce qui pourrait expliquer qu’on n’ait jamais retrouver la trace du cadavre de Mozart. Certains des crânes pourraient provenir de soldats français tués à la bataille de Dürnstein (1805). Trois momies (1150-1300) reposent sur le côté droit dans des stalles de pierre recouvertes par un couvercle en verre. Subsistent également 15 tresses de cheveux de veuves, offertes à la paroisse en signe de voeux de fidélité à leurs maris après leur décès.

Fresque de saint Christophe, photo © Danube-culture, droits réservés

   Sur le mur extérieur se trouvent les restes d’une fresque de Saint Christophe, qui a la particularité de ressembler au duc Maximilien d’Autriche.

Les sept lièvres de saint-Michel-en-Wachau
Derrière l’église saint-Michel, perchée fièrement sur son rocher dominant le Danube et entourée de son vieux cimetière et d’un petit jardin, s’alignent dans une ruelle une rangée de vieilles maisons pimpantes qui s’adossent à la colline de l’Atzberg. Les hivers rigoureux sont plutôt rares en Wachau comme en témoigne les vergers d’abricotiers et de pommiers et la vigne qui s’étend sur les deux rives du fleuve et grimpe en terrasse haut le long de ses coteaux. Une année pourtant un hiver particulièrement sévère installa dans le paysage et étendit son manteau de neige dans la Wachau avec une telle épaisseur que les maisons autour de l’église Saint-Michel et la ruelle furent complètement ensevelies tout comme les collines aux alentours. Les pauvres lièvres qui habitaient dans les vignes voisines, commencèrent à mourrir de faim et ne sachant où trouver leur nourriture, s’aventurèrent dans le hameau et montèrent jusqu’au sommet du toit de l’église cherchant vainement quelque chose à manger.

Luigi Kasimir (1881-1962), Saint-Michel-en-Wachau

C’est la raison de la présence des sculptures de petits animaux sur le faîte du toit. Elles rappellent simplement le souvenir de cet hiver terrible et des lièvres que les habitants du hameau virent grimper sur le toit de leur église.  Les amoureux de la nature, intrigués par les sculptures et qui ont une bonne vue, affirment qu’il n’y a pas un seul lièvres parmi eux. Ils ont peut-être raison car la ressemblance est loin d’être évidente. Mais peu importe ! Les habitants s’accrochent avec ténacité à cette vieille légende qu’ils aiment raconter à leurs enfants et aux visiteurs de la belle région de la Wachau.

Robert Russ (1847-1922), Autriche, Saint-Michel-en-Wachau, sortie de la messe, huile sur toile, 1917

Sources : Josef Wichner, Wachausagen, raconté et dédié à tous les amis de la Wachau d’or, Krems an der Donau. [1920]

Eric Baude pour Danube-culture, © droits réservés, mis à jour juillet 2025

Danube-culture adresse ses très grands remerciements à Gertraud Huber de Weissenkirchen pour ses explications passionnantes sur l’histoire (les histoires) de Saint-Michel-en-Wachau.

Johann Franz Pils (1921-2018) Autriche, Saint-Michel-en-Wachau, aquarelle, 1989

Saint-Michel-en-Wachau, photo © Danube-culture, droits réservés

La légende du « mur du diable » et la rose d’Aggsbach (Wachau)

Le Mur du diable, gravure d’Adolph Kunike (1777-1838) extraite de l’Album Donau-Ansichten, 1824

Le Mur du Diable
   C’était il y a longtemps, dans le temps où le diable exerçait un métier fort difficile où, pour gagner une âme, une seule âme qui bien souvent encore lui échappait, il prodiguait les trésors de ses grottes souterraines et opérait des prodiges. À présent, il n’a pas besoin de courir le monde, la bourse à la main, comme un racoleur. Il se repose de ses premières fatigues, comme un courtier qui a su se faire une bonne clientèle. Les âmes n’attendent pas qu’il vienne les chercher, elles vont d’elles-mêmes à lui et se font peu marchander.

Donc, en ces jours de splendides contrats diaboliques, il y avait en Wachau, aux châteaux-forts de Spitz et d’Aggstein, deux chevaliers épris à la fois de la même jeune fille. Celui d’Aggstein était le préféré de la demoiselle. Mais la timide jeune fille, n’osant se prononcer ouvertement entre deux puissants rivaux, déclara, pour prévenir une fatale collision, qu’elle épouserait celui qui remporterait le prix à un tournoi de Vienne. En même temps, elle priait ardemment le ciel de favoriser celui qu’elle aimait, et le ciel exauça ses prières.

Château de Spitz Bartlett

Ancienne forteresse Hinterhaus de Spitz/Donau, siège de la dynastie des Kuenringer et des Maissauer, gravure de W. H. Bartlett (1809-1854), Le Danube illustré, Vues d’après nature dessinées par Bartlett, H. Mandeville, Libraire-Éditeur, Paris, 1849 

Le sire d’Aggstein revenait de la capitale de l’Autriche, heureux de sa victoire, heureux surtout d’avoir conquis par sa couronne d’athlète son triomphe de fiancé. Pendant qu’il rêvait joyeusement à son mariage, son pauvre rival errait le soir sur les bords du Danube, dans l’humiliation de sa défaite et le désespoir de son amour.

Le Danube et la forteresse d’Aggstein, gravure d’Adolph Kunike extraite de l’Album Donau-Ansichten, 1824

— Pourquoi cet air sinistre ? lui dit un petit homme d’une figure étrange qui tout à coup apparut devant lui. Il semblerait, à vous voir, que vous méditez quelque horrible projet.
— Oui, répondit le chevalier, je projette de me précipiter dans cette onde pour y ensevelir ma honte et ma douleur.
— Misérable idée ! reprit avec un sourire sardonique le Méphistophélès du Danube, je puis vous en donner une meilleure : je connais la cause de votre sombre résolution. En ce moment, votre rival navigue gaiement sur les flots au-devant de la riante petite tête d’enfant qu’on appelle « la rose d’Aggsbach ».
Que me donnerez-vous si, par l’effet de ma puissance, dont il est inutile de vous révéler le secret, je l’arrête ici même à son passage et vous ramène à celle que vous aimez ?
— Tout, s’écria le chevalier éperdu.
— Votre âme ?
— Mon âme, que j’allais vouer au démon du suicide.
— Très bien, c’est convenu. Cette nuit mon oeuvre, et demain votre mariage. Aussitôt le diable (car c’était le diable) se met à l’oeuvre et, de son bras magique, entasse pierre sur pierre, monticules sur monticules pour étendre sur le fleuve une barrière contre laquelle viendraient se briser toutes les chaloupes. Déjà il avait accompli une grande partie de son oeuvre maudite, il allait l’achever quand soudain le coq d’Aggsbach chanta.

Aggsbach, gravure de Franz Xaver Joseph Sandmann (1805-1856), vers 1860 (?)

L’infernal pontonnier lui lança une flèche dans la tête. Mais au même instant le jour parut, et la lumière du  jour mettait fin à ses maléfices. La digue resta inachevée et le bateau du chevalier d’Aggstein put franchir l’obstacle sans encombre.

Le chevalier de Spitz se retira dans un couvent pour y expier, en de rudes pénitences jusqu’à la fin de ses jours, sa criminelle erreur, et, en mémoire de ce merveilleux événement, les habitants d’Aggsbach1 posèrent au faite de leur clocher un coq dont la tête est traversée par une flèche.

Xavier Marmier, Du Danube au Caucase, voyages et littérature, 1854

Note :
1 C’est en fait sur le clocher de l’église toute proche de Sankt Johann im Mauerthale que se trouve précisément le coq dont le corps est traversé d’une flèche.

Sankt Johann in Mauerthale (Saint-Jean-Baptiste) au bord du Danube, ancien haut-lieu de pèlerinage, gravure de William Henry Bartlett, colorée par William Mossman (1804-1884), vers 1845  

Navigation danubienne d’autrefois : le train de bateaux

 Friedrich Gauermann (1807-1862), Un équipage de halage sur le Danube, huile sur bois, 1848

   Si la descente vers l’aval (Naufahrt) s’effectuait relativement facilement, à l’exception de conditions météo défavorables (brouillards, tempêtes, vents contraires, inondations…) et de certains passages délicats comme le franchissement des rapides de la Strudengau (Strudel, Wirbel), en aval de Grein et pour lesquels il était indispensable de faire appel à des pilotes locaux, il n’en était pas de même pour la remontée (Gegenwart ou Gegentrieb) du Danube, une remontée qui demandait en raison du courant, de la configuration des rives ou d’autres obstacles comme des éperons rocheux au sein même du lit du fleuve ou des bancs de sable, une force de traction et un équipement considérables que seuls des équipages de chevaux, menés par des hommes expérimentés, pouvaient assumer.

Un train de bateaux au pied du Kahlenberg (Vienne) , gravure coloriée, 1841

   De tels équipages ne pouvaient avancer que très lentement, effectuant de vingt à trente kilomètres par jour, de l’aube jusqu’à la nuit. À titre d’exemple, le trajet en amont de Vienne à Linz pouvait durer de 14 à 25 jours, de Linz à Passau de 6 à 8 jours, de Passau jusqu’à Regensburg, de 9 jusqu’à 15 jours ou encore de 10 à 12 semaines de Pressburg (Bratislava) à Rosenheim sur l’Inn avec de nombreux changements de rives à l’occasion desquels il était nécessaire de transporter les chevaux d’un bord du fleuve à l’autre. La Strudengau, en aval de Linz, avec sa mauvaise réputation pour les embarcations qui descendaient le Danube en raison de ces deux zones de rapides, s’avérait également difficile pour les convois de bateaux remontant le fleuve et leurs équipages. Il est bien évident que dans ces conditions, il était extrêmement extrêmement rare que des voyageurs s’aventurent à remonter le fleuve sur un train de bateaux, ce type de navigation étant réservés aux marchandises.

Halage sur le Danube, collection Musée de la navigation de Spitz/Donau

Friedrich Gauermann (1807-1862), Chevaux de halage près d’une auberge, huile sur toile, vers 1855.     F. Gauermann a peint ici la pause d’un équipage de halage (Hohenauer) dans une auberge au bord du Danube. Le chaland chargé est amarré à la rive devant l’auberge. Les chevaux portent leur harnais de halage avec l’arc en bois caractéristique qui entoure leur arrière-train et qui servait à fixer la corde pour haler le bateau. Le départ semble imminent. Alors que plusieurs hommes sont encore assis sous l’auvent de l’auberge et boivent, deux des cavaliers sont déjà prêts à repartir. Un troisième tente avec difficulté de monter son cheval effrayé par un chien aboyant. Le groupe de quatre chevaux constitue à l’évidence le motif central du tableau. En arrière-plan, à gauche la ruine de Haustein près du village de Sankt Nikola en Strudengau, qui  fut détruite avant 1862 dans le cadre de la régularisation du Danube, collection Landessammlungen Niederösterreich, sources : W. Krug, Friedrich Gauermann 1807-1862, 2001

   Les « Zille » ou autres embarcations, y compris sur le Moyen et le Bas-Danube ottoman, furent tout d’abord tirées ou halées à partir du XIVe siècle par des prisonniers de guerre ou des condamnés auxquels se substituèrent par la suite des équipages de chevaux et ce jusque bien après l’invention de la navigation à vapeur. Ces trains de bateaux étaient encore nombreux au milieu du XIXe siècle : 136 équipages ont été encore comptabilisés en Haute-Autriche dans le petit village de Struden (rive gauche), en aval de Grein dans les années 1860, 11 en 1870, 84 en 1880, 31 en 1890 et 1 seulement en 1900). Ces convois pouvant atteindre une longueur totale de 400 à 500 mètres, portaient le nom, sur le Haut-Danube, de « Hohenhau » et son maître d’équipage qui pilotait les manoeuvres difficiles depuis la tête de l’équipage, celui de « Hohenauer » ou de « Vorreiter ». Les hommes qui exerçaient ce métier éprouvant et épuisant physiquement et qui les obligeaient à demeurer plusieurs mois hors de leur maison, à dormir dans des conditions souvent précaires et à risquer leur vie presque quotidiennement, ont été décrits comme des êtres frustres et brutaux. Le passage d’un tel train de bateaux à la remonte et de l’équipage d’hommes et de chevaux qui le halaient, ne pouvait passer inaperçu et a engendré plusieurs légendes comme celle du train de bateaux fantôme.

Stefan Simony (1860-1950), Équipage de halage, huile sur bois, 1884

Traversée sur l’autre rive des chevaux de halage, collection du Musée de la navigation de Spitz/Donau

Dans la région de Wachau ou en Strudengau là où les rochers affleurant à la surface de l’eau, les tourbillons, les rives particulièrement escarpées rendaient autrefois le halage des lourdes embarcations vers l’amont pénible et dangereux, certains habitants entendaient certaines nuits d’hiver particulièrement sombres ou les jours de grand vent et de tempête, des hurlements sinistres, des claquements secs de fouets et le bruit énorme des sabots et des hennissements de chevaux. Ils savaient qu’il s’agit du passage du train de bateaux fantôme conduit par le « Hohenauer », condamné avec ses hommes pour avoir lancer des imprécations, appeler à l’aide le diable, s’être soulés et avoir été cruels envers leurs bêtes, à remonter éternellement le fleuve et à lutter contre le courant jusqu’à ce que le lit du Danube deviennent aussi sec que le sommet du mont Jauerling (sommet de 960 m situé en Wachau sur la rive gauche). Pour expier leurs fautes, le « Hohenauer »et son équipage devaient faire avancer leur convoi uniquement dans l’obscurité la plus noire. Les villageois des bords du Danube pouvaient ainsi,  durant un long moment ces nuits-là, écouter les voix lugubres des haleurs maudits proférer les mêmes injures qu’autrefois, leurs rires sauvages se mêlant aux plaintes incessantes des chevaux effrayés, épuisés et des claquements de fouets qui leur répondent.

Eric Baude pour Danube-culture, © droits réservés, mis à jour mai 2025

              Johann Adam Klein (1792-1875), scène de halage sur l’Inn, huile sur toile, 1863

Dès ses premiers voyages sur le Danube dans les années 1820, J. A. Klein artiste peintre et graveur originaire de Nuremberg, a été fasciné par les attelages de chevaux halant des bateaux sur le haut-Danube et ses affluents et en a fait le sujet de certains de ses tableaux (« Donau-Schiffszug bei Dürnstein », 1827). Les Zillen, Kehlheimer ou Gamsen, étaient utilisées en Wachau et sur le haut-Danube pour le transport vers l’aval de marchandises et matériaux divers destinés en particulier à Vienne mais pouvaient également accueillir des voyageurs (uniquement dans le sens de la descente). Si les bateaux descendaient vers l’aval avec la force du courant et pouvaient même parfois sur certains tronçons du fleuve hisser une voile par vent favorable, ils devaient être haler vers l’amont par des attelages de chevaux plus ou moins nombreux suivant le nombre d’embarcations, leurs chargements et la force du courant. Pour le peintre J. A. Klein, passionné par les chevaux, leurs corps musclés et tendus par l’effort immense étaient un spectacle saisissant qu’il a immortalisé dans plusieurs de ses tableaux et de ses dessins. Cette toile représente une scène aux tonalités dramatiques le long de l’Inn, un cours d’eau fougueux, affluent du Danube, dans laquelle onze chevaux dont la plupart la plupart sont montés par un cavalier, halent péniblement depuis un chemin caillouteux en bordure de la rivière, deux bateaux (Gamsen de l’Inn) lourdement chargés. Au second plan, un batelier tente d’empêcher les embarcations de trop se rapprocher de la rive à l’aide d’une rame ou d’une perche. Klein a accordé une attention toute particulière à la reproduction fidèle des détails des harnais spécifiques des puissants chevaux de halage et des costumes des membres de l’équipage (Hohenauer) qui les montent et pour certains, les fouettent généreusement.

Srefan Simony (1860-1950 ), halage en Wachau à la hauteur de Dürnstein  aquarelle, 1886

Saint-Jean-Baptiste im Mauerthale (Wachau, Basse-Autriche)

   L’église est mentionnée pour la première fois en 1240 en relation avec un don de l’archevêque Eberhard von Salzbourg (1200-1246) au monastère Saint-Pierre de cette même ville. Avec les villages d’Hofarnsdorf, de Bacharnsdorf et de Mitterarnsdorf, la paroisse de Sankt Johann im Mauerthale forma le domaine d’Arnsdorf propriété de l’archidiocèse de Salzbourg de 860 à 1806. 

Sankt Johann im Mauerthale, pointe sèche coloriée de W. Mossman d’après William Henry Bartlett (1809-1854), en face, sur la rive gauche, le village de Schwallenbach

   Si un tout premier édifice religieux a été bâti dès le IXe siècle en partie sur les ruines d’une tour de guet romaine, l’église actuelle date en grande partie de la première moitié du XVe siècle.

Reste d’un mur d’une tour de guet romaine sur laquelle a été bâtie l’église saint-Jean-Baptiste, photo © Danube-culture, droits réservés

   La tour de l’église est à la base quadrangulaire avec un clocher octogonal  surmonté à son sommet d’un coq transpercé d’une flèche qui évoque une des légendes populaires du Mur du diable (Teufelsmauer) situé sur l’autre rive du Danube.

Le coq transpercé d’une flèche veille toujours sur l’église Sankt Johann im Mauerthal, photo © Danube-culture, droits réservés

   L’intérieur se compose d’une nef avec un toit plat avec sur les côtés de belles fresques murales du début du Gothique, datées d’entre le deuxième quart du XIIIe et le XVe siècle.

photo © Danube-culture, droits réservés

   La chaire en style baroque tardif est accessible de l’extérieur. Le maître-autel également baroque dans un  chœur de style gothique est d’une excellente facture.

Le maître-autel baroque et le choeur gothique, photo © Danube-culture, droits réservés

   Le tombeau présumé de Saint-Aubin (Sankt Albinus) se trouvait jusqu’en 1862 dans une niche murale dans le fonds gauche de l’église. Une statue le représente en pèlerin du début du XVIe siècle.

Saint Aubin dans sa niche au fonds de l’église, photo © Danube-culture, droits réservés

   La fresque sur le mur extérieur du côté du Danube montrant saint-Christophe, protecteur des voyageurs a pu être en partie conservée.

Saint-Christophe, photo © Danube-culture, droits réservés

   Juste derrière l’église se trouve un puits couvert de l’époque Baroque. Les lieux ont été, en particulier pour cette  raison et pour le culte de Saint-Albin dont l’église abritait autrefois la tombe présumée, une importante destination de pèlerinage de la fin du Moyen-Âge jusqu’au Baroque. Les innombrables et souvent superstitieux pèlerins venaient y boire l’eau bénite et prometteuse de guérison miraculeuse et les bateliers y pratiquaient aussi différentes offrandes avec des fers-à-cheval. Un autre lieu de pèlerinage, Maria Langegg, situé sur le chemin de Saint-Jacques de Compostelle, entre l’abbaye de Göttweig et l’abbaye de Melk, voisine avec la modeste église de Sankt Johann im Mauerthale.  

Le puit couvert à l’arrière de l’église, photo © Danube-culture, droits réservés

L’église de Sankt Johann im Mauerthale se trouve désormais sur la commune de Rossatz-Arndorf.

Eric Baude pour Danube-culture © droits réservés, mis à jour avril 2025

Sources :
Die Wachau, Niederösterreichische Kulturwege, NÖ Landesarchiv und NÖ Institut für Landeskunde, St. Pölten
Von Aggstein bis Göttweig, Dunkelsteinerwald, Niederösterreichische Kulturwege, NÖ Landesarchiv und NÖ Institut für Landeskunde, St. Pölten
www.kirchen-am-fluss.at

Austria-forum.at
www.gedaechtnisdeslandes.at

Le clocher octogonal caractéristique, de style gothique tardif, photo © Danube-culture, droits réservés

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