Adrien von Riedel (1746-1809) et l’Atlas hydrographique des fleuves et rivières de Bavière

    Adrien von Riedel est issu d’une famille de cartographes qui a déterminé le domaine de la construction et de la mensuration en Bavière pendant plus de 75 ans. Il fréquente à Munich les premières classes du lycée dirigé à l’époque par les jésuites (aujourd’hui le Wilhelmsgymnasium) et est initié très tôt par son père au domaine de la géométrie. Dès l’âge de 16 ans (1762), l’État le soutient financièrement dans sa formation. Deux ans plus tard (1764), il est remarqué par les savants de l’Académie bavaroise des sciences à Munich pour sa transposition cartographique des résultats des levés du cartographe français César François Cassini de Thury (1714-1784), que celui-ci avait effectués en Bavière en 1761 et 1762. Après avoir passé l’examen de l’Académie, Riedl est nommé « Landgeometer » du prince électeur en 1766 et chargé en 1769 de relever le réseau routier bavarois.
   Au fil des années, il succède à son père Castulus Riedl (1701-1783) dans les fonctions de conseiller de la chambre impériale (1771) et de commissaire aux eaux, aux ponts et aux routes (1772). En collaboration avec le directeur général des travaux publics Joseph Aloys von Hofstetten, il développe l’institutionnalisation et la professionnalisation de la construction et de la topographie bavaroise. Son Atlas Des Fleuves et Rivières de la Bavière fut publié à Munich au tout début du XIXe siècle, trois années avant la mort du cartographe.Il est dédié à Maximilien Ier (1756-1825), prince électeur de Bavière de 1799 à 1805 puis roi de Bavière de 1805 à1825.

STROM ATLAS

von

Baiern.

vom

Oberster von Riedl.

DONAU STROM,

INN, ISAR, LECH, LOISACH, AMMER FLUSS

Hydrographische Karte in 4 Blättern

Profil Plane,

vom

Adrien von Riedel

1806

MÜNCHEN

in der Lentnerischen Buchhandlung

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ATLAS

des Fleuves et Rivières

de la

Bavière

Par

le Colonel de Riedl

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à Munic[h]

chez LENTNER, Librairie, 1806 [Première livraison]

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Seiner Majestät

MAXIMILIAN JOSEPH

Könige von Baiern

gewidmet

vom

Obersten von Riedel

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Notes de l’imprimeur Zängl

Les soins particuliers qu’exige la beauté des planches, ou de la gravure à la perfection de laquelle on s’est fait un devoir spécial de parvenir pour l’édition de l’atlas des rivières de Bavière, particulièrement à l’égard de quelques cartes, est cause que les cartes de cet ouvrage ne pourront se suivre dans l’ordre que l’on aurait désiré tenir dans leur livraison. On observera donc préalablement à cette fin, que les livraisons ne seront point reliées, jusque’à ce que l’ouvrage ne paraisse dans son entier ; On indiquera à la fin de quelle manière l’atlas doit être relié.

Presque tout l’ouvrage est achevé excepté la gravure à laquelle sont employés les artistes les plus habiles, et il sera déposé pour la sureté des personnes qui ont favorisé cette entreprise chez le sieur Lentner libraire à Munich.

On donnera à la seconde livraison de la grande carte mathématique hydrographique, qui est déjà rédigée deux gravures, et dans la cinquième et dernière des plans des profils, des diamètres, et le niveau de des rivières principales suivront dans la cinquième et dernière livraison.

On a tellement soigné pour l’exactitude des livraisons de cette édition, qu’aucun retard ne peut avoir lieu en quel cas que ce soit. Les noms de Messieurs les abonnés de la seconde livraison y seront imprimés.

La première livraison contient :

  1. Le titre ou frontispice
  2. L’épitre dédicatoire à sa Majesté Maximilien Joseph, Roi de Bavière
  3. La rivière d’Isar depuis les frontières du Tyrol, jusqu’à Toelz en trois sections
  4. Le Wurmsee, ou lac de Staremberg, près de Staremberg avec son profil, et canevas trigonométrique.
  5. Le Walchensee, et le Kochelsee avec leurs profils.
  6. Le Tegernsee, et le Schliersee.
  7. Deux dessins de ponts suspendus et cintrés, dont l’un a été bâti l’an 1790, sur la Mangfall près de Weiarn. tous les plans des fleuves et des lacs

L’échelle a été généralement prise égale et conforme pour tous les plans des fleuves et des lacs

6 feuilles pour le Danube
3 feuilles pour la carte hydrographique de la Bavière
1 feuille en trois parties pour l’Inn
2 feuilles pour l’Isar
2 feuilles pour la Loisach
1 feuille pour l’Ammer
1 feuille pour l’Ammersee
1 feuille pour le Chiemsee
1 feuille pour le Tegernsee et le Schliersee
1 feuille pour le Walchensee
1 feuille pour le Wurmsee
3 feuilles pour des plans et coupes de ponts
1 gravure du monument à Post Saul sur le Danube
1 gravure du monument aux deux lions de Bad Abbach, dessins de Bollinger et gravure de Laminit

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A. von Riedel (1746-1809)

Le Danube par Adrien Franz Xaver Florian von Riedel :

Le Danube nommé Ister par les Romains Danubius, Isther, est un des principaux fleuves de l’Europe. On est presque généralement d’accord, qu’il prend sa source auprès d’Eschingen en Sorabe, et c’est aussi pourquoi ce lieu porte le nom de Donauesching[en].
Ce fleuve parcourt  à ce que l’on prétend l’espace de 400 lieues d’Allemagne depuis sa source jusque’à son embouchure dans la mer noire.  Il se jette plus de 60 rivières dans ce grand fleuve, qui dirige son cours de l’occident à l’orient.

Il prend au Nord, en Bavière seul, la Wertniz [Wörnitz] au-dessus de Donauwörth, la Usel [Ussel] au-dessus de Neuburg, la Schuttach [Schutter] près d’Ingolstadt, l’Augraben [Mailinger Bach] entre Ingolstadt et Vohbourg, l’Altmühl près de Kelheim, la Laber et la Nab [Naab] entre Abbach et Ratisbonne, le Regen auprès de Stadtamhof, la Sulz [Sulzach ?] au-dessous de Donaustauf, la Wiesent [Wieseth] au-dessus de Wörth, la Knisach [Kinsach] au-dessus de Straubing, la Mennach [Menach] près de Bogen, la Schwarzach [il existe deux rivières de ce nom qui se jette dans le Danube] près de Niederschwarzach, la Gaisach [Gailach] au dessus de Passau, et l’Ilz près de Passau, outre nombre d’autres rivières moins considérables et plusieurs ruisseaux.

Il prend au midi [rive droite]  la Schmutter au-dessous de Donauwörth, le Lech auprès de Lechsgemund, la Ach [Friedberger Ach] près de Niederschönfeld, la Ach [Aich] au-dessus d’Ingolstadt, la Par [Paar] entre Ingolstadt et Vohbourg, l’Ilm [aujourd’hui sous-affluent via l’Abens] près de Vohbourg, l’Abens au-dessous de Neustadt [son confluent a été modifié et déplacé au nord en 1935/1926] , la Pfäter [Pfatter, se jette dans le Vieux Danube] près de Pfäter [Pfatter], la « Grosse » et « Kleine » Laber [la Kleine Laber se jette dans la Grosse Laber] au-dessus de Straubing, l’Isar au-dessous de Deggendorf, la Vils auprès de Vilshofen, le Lautenbach [Laufenbach] et le Steinbach [Sandbach ou Setzenbach] au-dessus de Passau, l’Inn près de Passau, outre plusieurs autres petites rivières et nombre de ruisseaux.

Le but que je me suis proposé en donnant un atlas des fleuves et rivières, ne me permet pas de donner une description détaillée de ce fleuve, mais purement de me border à l’espace qu’il parcourt en Bavière. Je ne ferai donc que développer mes expériences et les observations que j’ai eu l’occasion de faire pendant le temps de mon administration. J’exposerai les causes des inondations, et j’indiquerai les moyens de les prévenir, ou tout au moins de les rendre moins nuisibles.

Trois rivières se réunissent au Danube près de Donauwörth dans un district d’assez peu d’étendue, à savoir la Wernitz [Wörnitz] qui vient d’Ötting[en], la Zusam de Wertingen, et au-dessus de Donauwörth la Schmutter de Minster [?].

Quand il vient à y avoir des pluie de longue durée, ou quand en hiver, il arrive que dans les grands froids, les petites rivières viennent à geler, il en résulte nécessairement dans le premier cas des inondations, dans le second cas, les glaces s’amoncèlent  près de Donauwörth, et pour lors les suites en sont encore plus destructives, parce que le pont du Danube est beaucoup trop étroit, et que le fleuve se jette avec violence sur la gauche, où les terres sont très hautes. C’est pourquoi que dans de tels cas les terres du côté droit qui sont beaucoup plus basses sont couvertes d’eau ou de glaces, surtout parce que les glaçons ne peuvent aussi promptement sous le pont, vu son trop peu de largeur.

Il serait donc certainement très à propos de ne point regretter quelques frais, et de creuser un canal du côté droit du fleuve, de 100 pieds de largeur, et de 1000 à 1200 pieds de longueur au moins, si non pour prévenir entièrement les inondations, tout au moins les rendre moins destructives, et par là faciliter les débâcles.

Le pied de la montagne de Schellenberg qui aboutit jusqu’au Danube auprès de Donauwörth, repousse le fleuve au-dessus de Schöfstal, qui est aussi sur une éminence, vers le village de Ginterkingen. la hauteur montagneuse près de Graisbach, presse également le fleuve vers les terres basses de la droite, à côté desquelles il continue son cours jusque’à Marxheim, où le Lech, rivière navigable pour les radeaux, et qui vient des montagnes méridionales, se jette presque en rectangle dans le Danube.

S’il arrive que les eaux du Danube soient parvenues à une hauteur assez considérable, et que le Lech, qui a lui-même une pente fort rapide, grossissant en même temps par les torrents qui s’y jettent, vienne, pour ainsi dire se précipiter dans le Danube ; il faut immanquablement, qu’il en résulte de grandes inondations, vu qu’une eau arrête l’autre dans son cours et la repousse. Il serait donc à souhaiter que l’on pensa sérieusement à donner au Lech une embouchure oblique ; il serait de plus très à propos d’élever une digue, afin que le Danube ne puisse plus regonfler le Lech. Et il est hors de doute, que si cette digue était élevée analogiquement au but que l’on devrait se propose, on pourrait s’en promettre des suites très avantageuses.

Le Danube continue son cours depuis l’embouchure du Lech jusqu’à Neubourg en faisant nombre de grands détours, où il forme aussi beaucoup de bruyères. les montagnes voisines, le rétrécissement du fleuve, et même le pont de Neubourg donnent lieu à ces détours ou courbures.

Il y a plus de 30 ans que le Danube s’ouvrit un passage à gauche au-dessus de Neubourg, près du soi-disant Fasanschutt ; il est certain que s’il n’eut été alors reconduit dans son lit précédent parc de grands ouvrages en fascines, le pont de Neubourg eut immanquablement été mis à sec. Le Danube traverse ensuite un pays plat depuis Neubourg jusqu’à Ingolstadt, son cours est divisé en plusieurs bras, et serpente tantôt à gauche, tantôt à droite.

Ne serait-il pas à souhaiter que cette quantité de bras du Danube fussent tous conduits dans un même lit d’une largeur proportionnée ? Combien de journaux de terre n’y gagnerait-on pas ? Mais il faudrait aussi continuellement veiller avec soin que le fleuve ne sortit point du lit qui lui aurait été assigné.

On veut prétendre que le Danube prenait anciennement son cours dans les environs de Weichering, par le soit disant Somenbrücke sur la route de Munich à Ingolstadt, jusqu’à Märching. On voit même encore aujourd’hui  les traces de relit, et l’ancien nom de vieux Danube, ou Sandarach [Sandrach] semble le confirmer. Il a maintenant son cours à environ une lieue plus loin sur la gauche.

Dans la neuvième décade du siècle dernier, le Danube prit son cours vers le ci-dessus mentionné ancien Danube. Il fit une irruption au-dessus d’Ingolstadt, se dirigeant vers cette ville, il menaça aussi d’en faire de même au-dessous, et de laisser le pont à sec.

Ces dangers étaient trop impérieux pour que l’on ne pensa sérieusement à y porter incessamment remède, si l’on ne voulait pas voir le fleuve changer de cours, ce qui ne pouvait avoir lieu sans causer les plus grands inconvénients, et sans des dommages irréparables. La direction des bâtiments hydrauliques d’alors proposa un projet qui fut accepté, après avoir été murement examiné. De sorte que l’on dirigea le cours du Danube à deux lieues de longueur dans des canaux en droite ligne, et on lui assigna de cette manière un cours direct jusqu’au pont de Ingolstadt. Le succès couronna cette entreprise, et le Danube a gardé actuellement le cours qui lui fut alors donné, et par là on gagna, ou conserva plusieurs mille journaux de terre.

Le soi-disant Donaumoos [marais du Danube] contigu et au-dessus d’Ingolstadt, sur la droite à ce fleuve, raison qui lui a aussi fait donner ce nom. On dit dans ces environs, que dans les temps les plus reculés le ]Danube traversait ce marais. Mais il est enclavé par une chaine de montagnes en forme de chaudière, sur la longueur de six lieues depuis Neuburg jusqu’à Pötmes, et depuis là en passant par Langenmoosen, Berg in Gai, Arnbach et Pobenhausen jusqu’à Reichertshofen près de la route de Munich à Ingolstadt ; il n’est donc nullement vraisemblable que le fleuve ait jamais pris un cours aussi opposé. Ce qui est fait mention plus haut à l’égard des environs depuis Weichering, jusqu’à Märching paraît beaucoup plus naturel , vu que le Danube aurait eu son cours dans le le lit de la Sandarach [Sandrach]  d’aujourd’hui.

Si l’on considère attentivement la situation des lieux, on verra facilement, que si ce fleuve n’a pas entièrement donné naissance au marais, il a tout au moins beaucoup contribuer à l’entretenir. La Ach, qui vient de Pötmes traverse le marais, il s’y écoule aussi beaucoup de petits ruisseaux, qui viennent des montagnes circonvoisines, il sort même de terre dans cette vallée plusieurs sources, de sorte que le Danube regonflait cette masse d’eau, et quand les siennes se grossissaient, il rejetait sa trop grande quantité dans cette basse contrée, ainsi ces eaux ne pouvant plus s’écouler, elles y restaient dormantes, et transformèrent peu à peu ces environs en marais. Tous les canaux, qui ont été creusés pour le dessécher se rendent dans le Danube.

Ce fleuve fait depuis Ingolstadt plusieurs détours du côté du midi, le plus grand de tous, est celui de Möring, où la Paar se jette dans le Danube. Il continue alors son cours le long du pied des montagnes sur la gauche ; il y a sur la droite une plaine, qui s’étend depuis Pötmes jusqu’au delà de Neustadt, dans laquelle l’Ilm [cette rivière se jette désormais dans l’Abens et non plus dans le Danube ] se rend dans le Danube, au-dessus, et l’Avens au-dessous de Neustadt, et il forme beaucoup de bruyères et d’îles.

On pourrait ici acquérir plusieurs arpents de terre si l’on donnait au fleuve un cours fixe et déterminé ; mais l’état n’a encore rien entrepris à cet égard. On s’est occupé jusqu’à actuellement que de pouvoir à la sûreté de la navigation, et on a laisse aux propriétaires le soin de veiller à la sureté des terres voisines du fleuve, de sorte qu’on n’a fait que très peu de choses  pour la direction du fleuve. Les propriétaires ne font aussi que peu de cas des petites irruptions, mais si elles viennent un jour à être de quelqu’importance, ils seront hors d’état d’y remédier. De manière que les irruptions augmentent insensiblement, et le dommage devient irréparable. Il serait très à souhaiter que l’on pensa sérieusement à fixer précisément les bornes des fleuves et des rivières, et que l’on prescrivit de quelle manière on pourrait, en contribuant de concert, prévenir les dévastations qu’ils occasionnent, et gagner et conserver une infinités d’arpents de terre qu’ils enlèvent à l’agriculture.

Il y avait du temps des Romains une route au-dessous de Neustadt qui conduisait au-delà du Danube. Cette route venait probablement d’Abensberg, et passait par Eining, où il y avait sans doute un pont sur le fleuve. Il y a des éminences et des montagnes depuis Neustadt jusqu’à Kelheim, où le fleuve est resserré des deux côtés, et se presse par une pente de rocher perpendiculaire l’espacé d’une lieu entière.

Weltenbourg est situé d’abord au commencement de cette pente de rocher. On trouve au-dessus de Weltenbourg sur les montagnes des traces d’anciennes redoutes des Romains qui se prolongent jusqu’à l’Altmühl. Ce fleuve qui prend son cours au nord, vient se jeter dans le Danube en passant presque continuellement entre de hautes montagnes. On découvrit il y a environ cinquante ans, à une lieur au-dessus de Kelheim sur la chaine de montagnes à la gauche de cette rivière une ouverture, ou caverne fort singulière, qu’il mériterait à tout égard d’être soigneusement visitée et examinée dans la suite. L’entrée aussi bien que l’intérieur de l’intérieur  de cette grande caverne sont gravés dans le plan. L’entrée en est très pénible et très difficile ; on y entend de loin le bruit de plusieurs eaux qui se précipitent. Cette caverne forme une file de corridors ou allées fort singulières. On n’a pas encore jusqu’à présent visité avec assez d’attention cette caverne extraordinaire. Il faut observer de ne point y descendre sans lumière, et cela même avec de grandes précautions.

La ville de Kelheim est située au nord de l’embouchure de l’Altmühl dans le Danube. Ce fleuve continue son cours depuis Kelheim entre des montagnes presque en ligne direct jusque’à Abbach. Il y avait autrefois sur la droite des terres près de Postal et d’Abbach des rochers escarpés, entre le pied desquels et le fleuve, passe la grande route de Ratisbonne. L’espace de cette route était non seulement très étroit mais même très dangereux tant en hiver qu’en été. Si les eaux étaient grandes, ou s’il arrivait des débâcles, le Danube débordait, et fermait fort souvent la communication de cette route, et de grosses masses de pierre agglomérée menaçaient de s’écrouler et d’écraser le voyageur effrayé.

L’Electeur Charles Théodore auquel on représenta toute l’imminence du danger, donne l’ordre de faire sauter les rocher, d’élargir et d’élever la route. On fit donc sauter au moyen de plusieurs mines des pièces de rocher de la hauteur de plus de 100 pieds, et de la largeur de 12 à 20 ; la route fut rehaussée de 17 pieds plus haut que n’est la moyenne hauteur de l’eau du Danube, l’on y employa les débris des rochers que l’on avait fait sauter, et elle fut élargie et pourvue de parois. Cet ouvrage fut terminé dans l’espace de deux ans et répondit entièrement à l’attend que l’on s’en était promise. L’Electeur Charles Théodore qui connaissait parfaitement la situation des lieux, et les dangers précédents, s’y rendit lui-même, et témoigna son entière satisfaction sur la réussite de l’exécution de ces travaux. Le Comte de Töring Jettenbach fit aussi ériger deux monuments en mémoire de cette entreprise d’utilité publique, l’un auprès d’Abbach, l’autre auprès de Postal.

Le Danube fait de grands détours depuis Abbach, jusque’à Ratisbonne à travers les montagnes situées de droite et de gauche. La Nam se jette dans le Danube au-dessus de Ratisbonne près de Prüfering, et la Regen près de Stadtamhof. Ces mêmes détours, et la lenteur du cours du fleuve, qui est encore arrêté par la chute de ces deux torrent, sont la cause des inondations fréquentes dans les basses contrées auprès d’Abbach, auxquelles on ne peut remédier qu’en bâtissant dans les lieux les plus bas de fortes digues convenables à la situation des dits lieux.

Le Danube se divise en deux bras capitaux au-dessus de rationne près d’un lieu nommé Wörhrloh, et forme une grande île. On fait usage de ces deux bras ; l’un sert à la navigation pour descendre et remonter le fleuve, et on a construit plusieurs moulins sur l’autre. Il y a depuis longtemps des conventions particulières de faites entre la Bavière et Ratisbonne à l’égard des bâtiments hydrotechniques et de leurs situations. Ces bâtiments ne sont à la vérité pas entièrement bâtis d’après des principes mathématiques et techniques mais la situation gênée entre Ratisbonne et Stadtamhof ne permet aussi pas d’y bâtir autrement, malgré que la Bavière possède et exerce de temps immémorial la souveraineté, et tous les droits qui y sont attachés tout le long du Danube, tel qu’il est cité dans le droit public du Baron de Kretmair.

Le pont de pierre entre Ratisbonne et Stadtamhof gène singulièrement le cours du fleuve dans toute sa largeur normale, par ses ouvrages avancés aux arches. Cela fait que, lorsque les eaux du Danube sont hautes, ou qu’il y a des débâcles, les champs et les près aux environs de Stadtamhof, et celle ville elle-même sont inondés, et que les eaux se jettent avec violence dans le Regen qui passe auprès de Stadtamhof. S’il arrive que dans le même temps la Regen vienne aussi à grandir, pour lors le mal est encore pire et de plus longue durée. C’est pourquoi il serait fort à souhaiter que l’on examina soigneusement, s’il ne serait pas possible de prévenir en quelque façon ces inondations désastreuses en élevant plusieurs digues dans les basses terres au-dessous de Stadtamhof, et du côté de la  Regen.

Le Danube fait depuis Ratisbonne jusque’à Straubing plusieurs grands détours : le rivage à droite est plat, mais au contraire d-celui de la gauche est montagneux, il y a néanmoins des endroits, où les montagnes en sont éloignées d’une demie, d’une et même de plusieurs lieues. la quantité de détours et la faible pente du Danube gène le cours du fleuve, et lui ôte la rapidité nécessaire. Il se divises derechef en deux bras principaux auprès de Straubing. On a bâti près de Sossau une digue, nommée la digue de Sossau, afin de procurer à l’eau la profondeur nécessaire pour la navigation  : lorsque les eaux sont basses, elles arrêtent le cors du fleuve vers la ville, mais quand elles sont hautes, le superflu passe par-dessus la digue, et va se jeter dans le bras extérieur, nommé le vieux Danube. La ville de Straubing soigne l’entretien de cette digue.

Le pont qui est près de la ville est vraiment beaucoup trop étroit, et contribue infiniment à augmenter les inondations, surtout lorsqu’il y a des débâcles.

Il y a quelques années que le fleuve se jeta avec beaucoup de violence vers le vieux Straubing, (faubourg de la dite ville ) où se trouve le cimetière de la ville, nommé St; Pierre. Comme la situation du lieu ne permettait point de laisser prendre ce cours du fleuve, on y bâtit une digue pour le détourner, et lui donner sa direction vers Bogenberg.

Le Danube continue son cours depuis Bogenberg jusque vers la ville de Deggendorf, en faisant un grand détour. Il y a près de cette ville un pont fort long et très léger sur le Danube, mais il faut l’enlever presque tous les hivers dans le temps des débâcles. L’Isar vient se jeter presque en rectangle dans le Danube à une demi lieu au-dessous de Deggendorf. De sorte que quand les débâcles et les grandes eaux surviennent en même temps dans le Danube, et dans l’isard, toutes les terres basses sont inondées. On a déjà en parlant de l’Isar indiqué les moyens de prévenir tous ces malheureux évènements.

Il y a déjà longtemps que l’on avait forme le projet de creuser des canaux, de construire des digues, et de diriger l’Isar en ligne oblique dans le Danube ; mais les trop grands frais et les secours que l’on exigea pour des travaux si importants détruisirent tous les projets ; les propriétaires des terres, qui auraient du faire quelques sacrifices à la patrie, surent toujours mettre des obstacles insurmontables à toutes les entreprises. Il en est aussi de même auprès de Niederalteich et de Winzet où le Danube fait de très grands détours. Deux profils feraient ici un très bon effet, et diminueraient les fréquentes inondations, qui sont extrêmement nuisibles, tant à cause de la basses situations des terres, que du prompt écoulement des eaux et des glaces du Danube, auquel les deux détours susdits mettent beaucoup d’obstacles.

Le confluent de l’Isar avec le Danube en aval de Deggendorf, détail

Les inquiétudes que l’on pourrait concevoir, que les glaces ne vinssent se jeter avec encore plus de force sur les lieux circonvoisins, si le Danube venait à être dirigé en ligne directe, doivent s’évanouir, si l’on observe que les glaces ne peuvent plus se réunir, et s’accumuler en aussi grande quantité, ni avec autant de viloence qu’actuellement, si l’on donne une ligne directe au Danube.

Le fleuve se presse de droite et de gauche entre des montagnes auprès du bourg de Pleintig pour se rendre à Passau. Il y a ici de grosses masses de rochers qui rendent la navigation très dangereuse, surtout lorsque les eaux sont grandes, et qu’elles cachent ces masses. Il n’y a positivement que l’adresse, et la vigilance des maîtres bateliers et maîtres de radeaux qui puissent garantir d’évènements fâcheux. Si jamais l’un de ces points essentiels venait à n’être point observé, il e résulterait les plus tristes accidents. Cette circonstance et les dommages irréparables que ces masses occasionnent surtout en haut du fleuve dans le temps des débâcles, seraient des raisons suffisantes pour qu’on les fit sauter. La Vils se jette près de Vilshofen dans le Danube.

L’Ilz qui vient de la forêt tombe à gauche dans le Danube d’abord au-dessous de Passau, et à droite, l’Inn qui vient des montagnes. De sorte que Passau est un lieu fort remarquable, en ce que presque toutes les rivières et tous les ruisseaux tant de la Sorabe, que de la Bavière et du haut Palatinat s’y réunissent.

Que l’on se représente la quantité d’eau qui se rassemble ici, tant de la forêt, que des montagnes après de grandes pluies ; que l’on observe le peu de largeur, et e peu de profondeur du Danube au-dessous de Passau ; que l’on considère la lenteur du cours de ce fleuve, et son peu de pente, qui n’est portée par plusieurs connaisseurs, qu’à 500 pieds jusque’à Baude en Hongrie : pour lors il sera facile de se convaincre à n’en plus douter, que toutes ces circonstances ont, et doivent immanquablement avoir par en haut une grande influence sur toutes les rivières qui viennent se jeter dans le Danube, et cela d’autant plus, que le fleuve est effectivement trop étroit et trop peu profond auprès de Passau, de manière que la quantité d’eau ne peut jamais s’écouler assez promptement.

Partant de ce point de vie, il est indispensablement nécessaire, si jamais l’on veut réussir à diminuer les inondations en Bavière, de se faire une loi inévitable, de faire examiner le nivellement avec l’exactitude la plus scrupuleuses par les hommes les plus experts, de même que la situation des lieux en détail et dans son entier ; il faudrait de plus réfléchir sur les circonstances, même sur celles de la moindre conséquence, consulter les habitants des différentes contrées, leur demander leur opinions, s’informer de leurs observations, et pour lors on se verrait immanquablement en état de projeter les vrais moyens par lesquels on pourrait prévenir avec succès toutes ces dévastations. Tant que cela n’aura pas lieu on ne parviendra jamais à empêcher les inondations, et toutes les dépenses, et toutes les peines que l’on se donnera à cet égard seront toujours inutiles et sans succès.

Mais la carte des niveaux fixera quels calculs doivent se faire d’avance  ; et c’est aussi pour cette raison qu’on ajoutera à cet ouvrage la carte hydrographique, dans laquelle toutes les rivières sont portées d’après leur véritable levée, d’où l’on pourra tirer des lumières, et faire des réflexions sur toutes les circonstances.

Il est bien vrai que les montagnes capitales devraient tout au moins être portées dans cette carte hydrographique, mais le projet que l’on a formé de représenter clairement toutes les rivières, n’a point permis de marquer les montagnes, parce qu’il aurait été impossible de pouvoir représenter les eaux dans toute la clarté nécessaire, et tel que l’on se l’est proposé. Il y a encore de plus à observer que le Danube prend son cours d’occident en orient. Le sol de presque toutes les rives de ce fleuve est fertile, si l’on en excepte les montagnes, et même celles-c pas entièrement.

La pesanteur de l’eau du Danube fait qu’un bateau peut porter à peu près jusque’à 1000 quintaux. On navigue aussi sur le Danube avec des radeaux. Aussitôt que les conducteurs des radeaux sur l’Isar ont passé le pont près de Pläting, ils lient leurs radeaux deux à deux, l’un à côté de l’autre, et trois en arrière. On nomme train (Fluden) tous ces radeaux liés les uns aux autres avec lesquels on navigue ordinairement sur le Danube. On remonte et descend le fleuve avec les bateaux.

L’état n’entretient aucun bâtiment sur le Danube depuis Donauwörth, jusqu’à Passau, excepté ceux qui sont près d’Ingolstadt, et le pont de Neubourg. Les communautés qui habitent sur les rives du fleuve entretiennent tous les ponts et bâtiments.

Néanmoins l’état a toujours contribué à grands frais et de tout son pouvoir à la construction des bâtiments nécessaires à la sureté de la navigation, et à la conservation des terres dans les cas où il dépendait du bien public. Il s’est aussi chargé depuis peu par bienfaisance de l’entretien du pont de Passau, afin de ménager des revenus et des fonds destinés au soulagement de l’humanité souffrante. (L’hôpital entretenait autrefois ce pont).

L’État doit entretenir tout le long du Danube les chemins destinés à remonter le fleuve au moyen des chevaux. (Ces chemins ou passages se nomment ordinairement en langue allemande, Schiffrit ou Ziehewege, et en Bavière Treppelwege). Ce qu’il y avait ci-devant de singulier sur le Danube, était les trains de bateaux chargés de sel (Salzzüge). Le sel qui venait de Hallein dans l’état de Salzbourg, et qui par certains contrats était cédé à la Bavière, se chargeait sur la Salzach et sur l’Inn, et était transporté jusqu’à St. Nicolas près de Passau, d’où on le charriait par [voie de] terre jusqu’au Danube, il y était alors chargé sur des bateaux, et conduit en remontant le Danube jusqu’à Donauwörth. Il y avait dans ces environs des paysans précisément destinés à remonter le fleuve avec les bateaux par le moyen des chevaux, et qui pour un salaire fixé, et quelques autres avantages entretenaient les chevaux de train nécessaires. En quelqu’endroit que la nuit vint à surprendre un tel train de sel, on passait la nuit en rase campagne. Les gens préposés à ces transports, et nommés en Bavière Salzpodeln s’entretenaient eux et leurs chevaux à leurs propres frais. Ces gens nommaient « fil » (Faden) le gros câble avec lequel tous les bateaux étaient attachés, et liés les uns aux autres, et auquel on attelait souvent 12 à 15 chevaux et même encore d’avantage. Il fallait toujours qu’un d’entre eux allât à cheval dans l’eau devant le train pour sonder la profondeur ; cette fonction exigeait beaucoup de précaution, et cet homme était continuellement en danger de perdre la vie, et c’est aussi pourquoi on nommait ce « Vorreiter » le nommait l’homme perdu (der verlorene Mann).

Des bateaux chargés ont ordinairement besoin, quand l’eau a une hauteur suffisante de cinq heures depuis Donauwörth jusqu’à Neubourg, six de Neubourg à Ingolstadt, douze d’Ingolstadt à Ratisbonne, huit de Ratisbonne à Straubing, dix de Straubing à Vilshofen et trois de Straubing à Passau ; le total depuis Donauwörth jusqu’à Passau se monte à quarante-quatre heures. La longueur du Danube depuis Donauwörth jusqu’à Passau, tel qu’il prend son cours par  des détours immenses, se monte à 1072000 pieds de Bavière. Si l’on tire une ligne directe depuis Donauwörth jusque’à Passau, Il y aura pour lors 666000 pieds de Bavière. Il a 7 pieds de profondeur auprès de Donauwörth, 9 auprès de Neubourg, 12 auprès d’Ingolstadt, 11 auprès de Ratisbonne, 10 auprès de Straubing, 6 auprès de Deggendorf, 10 aurprès de Vilshofen, et 17 auprès de Passau. Ce fleuve a 511 pieds de pente depuis Donauwörth à Passau. Il ne faut donc point s’étonner d’après cela, et d’apps les grands détours que fait le Danube, si la rapidité des autres rivières est peut-être quatre fois plus forte, que la sienne.

La manière accoutumée de bâtir sur le Danube, et celle qu’on y a observé jusqu’ici, consistait en de soi-disants politages en pieux joints les uns aux autres par des bois de traverse, ajustés en tenaille, puis garnis de fascines, et chargés de grosses pierres de carrière. Cette manière de bâtir est solide et durable, ce qui doit avoir lieu sur le Danube à cause des débâcles. Il y a de semblables pilotages à Neubourg, Ingolstadt, Ratisbonne, Straubing et Passau. Ces ouvrages sont de très longue durée et très solides, s’ils sont bien entretenus, et produisent même de très bons effets ; mais si l’on néglige les soins requis à leur entretien, ils deviennent très coûteux, tel que tout autre bâtiment qui est négligé. Les bâtiments en fascines, surchargés de grosses pierres, ce qu’il faut observer à cause des débâcles sont aussi fort avantageux, et font de fort bons effets, particulièrement en ce qu’il y a près du Danube assez de saules, et de bois de fascines et de pierre de carrière. Les bâtiments en fascines, construits auprès des terres sont d’autant plus avantageux, surtout avant que le dommage ne soit considérable, que le Danube charrie beaucoup de parties terreuses, qui s’attachant peu à peu aux bois des saules favorisent leur végétation et les entretiennent dans toute leur vigueur, ce qui ne peut arriver aux rivières, qui viennent des montagnes, et qui ont de fortes pentes.

Les bâtiments en pilotage sont préférables dans les lieux où le Danube est resserré, comme auprès de Städlen, parce qu’ils doivent y être extrêmement solide à cause des débâcles, car les bâtiments en fascines les mieux construits, y ont presque toujours été détruits. Il y a des ponts sur le Danube à Donauwörth, Neubourg, Ingolstadt, Mähring, Vobourg, Neustadt, Kelheim, Ratisbonne, Donaustauf, Straubing, Deggendorf, Vilshofen et Passau.  

Danube-culture, © droits réservés, décembre 2023

Kelheim et le confluent de l’Altmühl avec le Danube, détail de la feuille n°III

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