De Timisoara à Vienne et la mer du Nord en bateau via le Danube…

   La rénovation du vieux canal de Bega dans le Banat roumain permet désormais d’envisager la prochaine possibilité de relier par voie fluviale, la capitale du Banat roumain via le Danube et la Serbie à Vienne et peut-être à la mer du Nord ou à la mer Noire. Si les travaux entrepris du côté roumain ont avancé et ont permis d’ouvrir le canal à la navigation, la rénovation de la partie de la voue d’eau située en Serbie, est pour le moment loin d’être achevée…

En bateau de Timisoara jusqu’à Vienne via le canal de Bega et le Danube ?

Les nombreux marécages qui couvraient autrefois la province austro-hongroise du Banat ont pu être en grande partie asséchés par la construction d’un dense réseau de canaux parmi lesquels celui de la Bega. Ils sont transformés à la fin du XVIIe et au XVIIIe siècles en terres propices à l’agriculture. Ces territoires ont été cultivées par des colons roumains, serbes et d’autres populations originaires de l’ouest de l’Empire d’Autriche parmi lesquels des Souabes et quelques Lorrains1…). Les travaux de construction du canal de Bega durèrent de 1718 à 1723. Ce canal commence à Timisoara, capitale du Banat roumain, rejoint le village serbe de Klek (Клек) en Vojvodine (Serbie) et conduit jusqu’à la rivière Bega. Pour relier le Danube, il faudra encore emprunter après un bref parcours sur la Bega, le canal Danube-Tisza-Danube (DTD) qui rejoint lui-même la rivière Tisza environ 10 km en amont de son confluent sur la rive gauche avec le Danube (PK 1214, 5).

le Canal Danube-Tisza-Danube (petit canal Bačka), photo Danube-culture, © droits réservés

   La longueur de la partie navigable du canal de la Bega représente 114,5 km, dont 44,5 km se trouvent en Roumanie et 70 km sur le territoire serbe. Pour le rendre navigable les structures hydroélectriques du noeud hydraulique de Sânmihaiu ont déjà  été rénovées.

L’ancien barrage hydroélectrique de Sânmihaiu sur le canal de Bega, photo Danube-culture, © droits réservés

Une grande partie de ce réseau, n’était plus, faute d’entretien, en activité. La signature en 2019, au siège de l’Administration du bassin hydrographique du Banat, en présence du ministre roumain des Eaux et Forêts, d’un projet de remise en service de la navigation entre le canal de Bega et la Serbie financé en partie par l’Union Européenne a été suivi par la réalisation des travaux. Il reste encore après la rénovation du noeud hydraulique de Sânmihaiu deux autres nœuds ouvrages à moderniser du côté serbe.
Le montant total des travaux s’élève à 13,85 millions d’euros répartis de la manière suivante : 11,77 millions d’euros de financement de l’Union Européenne (programme IAP), 917 000 euros de l’État roumain et 141 000 euros de participation de l’entreprise APA Banat et du Conseil du Judeţ de Timis.

Un point de passage frontalier sera ouvert dès la fin des travaux du côté serbe, à la fois sur le canal et sur ses rives pour permettre le passage fluvial dans les deux sens.

Le canal de Bega à la hauteur de Timisoara, photo Danube-culture, © droits réservés

Eric Baude pour Danube-culture, mis à jour mai 2023
Notes :
1 Dans les années 1830, l’homme politique français Charles Lemercier de Longpré, baron d’Haussez, (1778-1854) visite l’Europe centrale et rencontre des descendants d’émigrés lorrains installés dans le Banat, alors sur le territoire du Royaume de Hongrie. Il écrit à leur propos : « Je me suis détourné de ma route pour voir quelques villages habités par des Français dont les pères avaient été attirés et fixés là par l’impératrice Marie Thérèse. Ces villages sont situés dans un pays marécageux, arrosé et souvent inondé par le Moros  (Mureș, sous-affluent du Danube via la Tisza) et la Bega et dont la fécondité paraît compenser l’insalubrité. Mes compatriotes n’ont pas semblé me tenir compte de la peine que j’avais prise pour venir les visiter. C’est tout au plus s’ils se souvenaient de leur origine, dont la tradition ne s’accompagne d’aucune sympathie. La langue française, déjà tout altérée et dégénérée en patois mêlé d’allemand et de slave, cessera d’être parlée chez la génération qui remplacera celle existante. »
Charles Lemercier de Longpré, baron d’Haussez, Alpes et Danube ou voyages en Suisse, Styrie, Hongrie et Transylvanie, Volume 2, p. 211, Ambroise Dupont, Paris,  1837. On lira encore à propos des Lorrains dans l’Empire d’Autriche et dans le Banat, le livre de François Roth, « La Lorraine et les Lorrains dans l’Europe du Saint-Empire », 1697-1790, 1999.

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